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Early Modern Parisian Soundscapes

 

Recueil

de

Chansons,

Vaudevilles, Sonnets,

Epigrammes, Epitaphes

Et autres vers

Satiriques & Historiques

avec des Remarques curieuses

Années 1687 à 1692.

 

Vol XXVI.

 

Chanson                                                    1687                                          [1]

Sur l’Air de Joconde.

Le Seigneur Lachau-Montauban de la Maison de la Tour-Gouvernet, et Brigadier des Armées du Roy, et le Seigneur de la Roche sur Buys, se battirent à coups de poings ayant leur épée au costé.

 

L’attente de nôtre grand Roy

                  N’a pas êté trompée,

Quand il fit la severe Loy

                  Contre les gens d’éspee!

On ne se bat plus à la Cour

                  Que les mains dans la poche.

Immobile comme une Tour,

                  Et froid comme une Roche.

 

Autre                                                           1687                                          [2]

Sur l’air: Laire la lair lan laire.

 

Belle Mouchy  si vos appas

Ne font pas un plus grand fracas,

Que le Canon de vôtre pere,

Laire la, laire lan l’aire,

Laire la, laire lan la.

 

Je lui conseille en bon amy,

D’aller se retirer chez luy;

Et vous en quelque monastere.

Laire la etc.

 

Chanson                                                    1687                                          [3]

Sur l’air: Helas brunette mes amours.

Monsieur de Saint Gilles Mousquetaire, à Mademoiselle de Mouchy.

 

Ménagez un peu vos regars,

On ne peut s’en deffendre.

Vous allez voir de toutes parts

Cent malheureux se pendre.

Helas! sans un petit espoir

J’aurois déja fait mon devoir.

 

Mais j’ose espérer, mon feu,

Où le respect éclate

Vous touchera peut être un peu;

C’est l’espoir qui me flatte.

Hélas! sans ce charmant espoir,

J’aurois déja fait mon devoir.

 

Mourir d’amour à vos genoux;

Ȏ sort digne d’envie!

Vivre amoureux auprés de vous,

C’est une douce vie:

Helas! donnez moi cet espoir

Il me seroit doux de l’avoir.

 

Réponse                                                                                                                                              [4]

 

Mousquetaire mon pauvre enfant,

Oste de ta cervelle

Un dessein extravagant.

Crois un ami fidelle;

Hazarde moins sur ton espoir,

Je te dispense d’en avoir.                                                                                                      

 

Désespoir

 

Mourons je ne puis faire mieux.

Ȏ mort viens à mon aide,

Unique espoir des malheureux.

C’est à toi que je cede.

Helas! quand on n’a plus d’espoir,

Il faut mourir, c’est un devoir.

 

Epitaphe.

 

Malgré ces tendres sentimens.

On réduit à se pendre

Un modele des vrais amans;

Cy gist sa triste cendre;

Honteux d’avoir pris trop d’espoir

Il descend au sombre manoir.

 

Chanson                                                    1687                                          [5]

Sur l’air………….

Sur Monsieur du Cambout.

 

Par charité chrétienne

Donnez chasses à Cambout,

De toilles sont les siennes,

Que tous les soirs, la boiteuse Julienne

Avec du fil lui recout.

 

Autre                                                           1687                                          [6]

Sur l’air Si Bourdaloue

Pour briller sur la scêne,

Le pauvre Capistron

A pris pour son Mêcene

Un Bougeois de Vernon.                                   L’Abbé de Chaulieu

 

Chanson                                                    1687                                          [7]

Sur l’air: Tranquilles coeurs.

 

Laide guenon qui court partout,

Crois-tu te faire aimer par force?

En horreur l’amour se résout

Dés qu’on entend nommer la Force.

Si tu veux des amans qui chérissent tes fers

Cherchent-les aux Enfers.

 

Laide guenon quand tu te vois

Reconnois que tu vois le Diable.

Je te le jure sur ma foy

Que tu est au lit détestable.

Va t’en donc chez Jeanot avec Furstemberg

Y passer tout l’hyver.

 

Cher Chevalier, que faites vous

De cette Carcasse infectée?

Tu te perds lorque tu la f….

Elle est de vérolle empestée.

Helas! tu fais bien voir par tes feux odieux

Que l’amour est sans yeux.

 

Autre                                                           1687                                          [8]

Sur l’air de Mais.

 

Prés de Conflans il s’est donné Bataille, (1)

Le Général c’est le Duc de Noailles;

                  Mais

Pour peu que l’affaire vaille,

Il n’en tastera jamais.

 

(1) Conflans sur oise, ou plustost au camp de la plaine Douelle où Commandoit le Duc de Noailles, depuis Marechal de France.

 

Autre                                                           1687                                          [9]

Sur l’air du branle de Metz.

Monsieur de Saint Gilles Mousquetaire à Mademoiselle Marion.

 

Dans une belle assemblée;

J’estois assis prés d’Iris,

Lorsque mon coeur fut épris,

De sa belle jouë enflée;

Faut il qu’une fluction

Cause tant de passion?

 

Son beau teint n’estoit pas blanc,

Son oeil êtoit enchanté,

Sa bouche un peu de côté

Avoit une grace extrême.

Faut il qu’une fluction

Cause tant de passion?

 

Vénus êtoit potelée,

Les amours êtoient jouflus;

Pour moi je n’aimerai plus

Qu’une beauté boursouflée.

Faut il qu’une fluction

Cause tant de passion?

 

Autre                                                           1687                                          [10]

Sur l’air de Joconde.

Sur Monsieur le Tellier Archevesque de Reims.

 

Cet Archevesque aux larges reins,

Si connu dans la France

Pour l’immensité de ses biens,

Et par son arrogance;

Voyant que Madame vouloit                        d’Orleans.

Lui joüer une piéce,

S’en console, et baise en secret

La Belinghen sa Niece.

 

Chanson                                                    1687                                          [11]

Sur l’air de Joconde.

 

Corrompre une fille de bien

                  D’une fine maniere,

Et du prochain prendre le bien,

                  Lubin le pourra faire;

Mais par l’ordre de son gardien,

                  Avaler de l’eau claire;

Faites la boire à vôtre chien

                  Lubin ne le peut faire.

 

Autre                                                           1687                                          [12]

Sur l’air: Laire la, laire lan laire.

Sur l’Ordre du Saint Esprit.

 

Les Peres ne nous ont point dit

Si le Pigeon du Saint Esprit,

Estoit Ramier, ou de voliere.

Laire la, laire lan laire;

Laire la laire lan la.

 

Chanson                                                    1687                                          [13]

Sur l’air: Toute l’Europe est sous les Armes.

Pour Mademoiselle de Chasteauneuf, contre le Seigneur de Chenevieres. son nom de famille est Masparo.

 

Nostre Seigneur est sous les Armes,

                  Il s’occupe soir & matin

A chasser dans les Bleds, a tirer au raisin,

Lorsqu’à servir le Roy chacun trouve des charmes;

                  Lui comme un grand guerrier,

                  Même des plus vaillans

A la Moisson fait tous les ans la guerre,

Pour faire voir à tous ses habitans

Qu’un Fusil à la main avec la Gibeciere,

Un Seigneur peur ruiner toute sa terre.

 

Autre                                                           1687                                          [14]

Sur l’air: C’est la pure vérité.

Sur le même que la précédente.

 

Masparo ce beau Seigneur,

Passe pour un grand Chasseur;

Ce n’est qu’une médisance.

On dit que son ignorance

A tirer sur le Gibier,

Lui donne mauvaise chance,

C’est la pure vérité.

 

On dit qu’il est la terreur

Du Perdreau qui meurt de peur;

Ce n’est qu’une médisance;

On dit qu’avec violence

Il tire aux épies de bled,

En abat grande abondance,

C’est la pure vérité.

 

On dit qu’il est protecteur,

De cinq soeurs filles d’honneur,

Ce n’est qu’une médisance.

On dit que sans conscience

Tous leurs Bleds il a gâté.

Dont il fera pénitence,                                                                          [15]

C’est la pure vérité.

 

On dit qu’il a résolu

De les fouëter a cul nud,

Ce n’est qu’une médisance;

On dit que sa véhemence

Leur fait beaucoup de pitié,

La justice est bonne en France,

C’est la pure vérité.

 

On dit que de son procez,

Il espere un bon succez,

Ce n’est qu’une médisance;

On dit qu’elles font dépence

Pour le faire condamner

Par une bonne sentence,

C’est la pure vérité.

 

Sa femme par son crédit

Tous ses témoins a séduit;

Ce n’est qu’une médisance.

Ils ont de la conscience,

Et beaucoup de probité,

Ont tout dit a l’audience,

C’est la pure vérité.

 

Chanson                                                    1687                                          [17]

Sur l’air de l’amour malade

 

N’avez vous point veu par la rüe

La Pardaillan sur une grüe?

                  En vertu gadin,

Avec un jupon de satin,

                  Dans le Faubourg.

Chacun s’est écrié, voici venir la mere d’amour;

                  Elle a la mine,

                  Cette divine,

D’aller droit à Luxembourg.

 

En croupe êtoit la Capviolle,

Portant la Cape à l’Espagnolle,

                  Et son violon;

De la grüe êtoit a l’arçon

                  Par ses attraits.

Ces enfans attirez faisant fort grand bruit,

                  Couroient aprés,

                  Dont de collere,

                  La belle mere,

Fesse la grüe aux Marais.

 

En arrivant prés le Calvaire,

La Chasteauroux fraiche et legere

                  Aparut soudain                                                                                          [18]

Tenant la Castagnette en main,

                  Un vieilleux

Pour la faire dancer jouoit volte et pavane des mieux

                  Cette Assemblée

                  Fut approuvée

Et réjouit fort les yeux.

 

Mongeron avec la Montagne

Etoient sur un Cheval d’Espagne,

                  Et la Vilvenart

Sur un petit poulain a part;

                  Dans ce moment

La grüe leve le cul et jette bien loin la Pardaillan,

                  Dont cette belle,

                  Dessoubs l’aisselle,

Se fit un trou en tombant.

 

Pour la Pardaillan je soûpire,

Helas! je suis sous son empire,

                  Depuis le moment,

Que je connus son enjouement;

                  Dans un valon

Contre tous assaillans, je soûtiens plus bouffy,

                  Qu’un ballon;

                  Que Capviolle,

                  Est une folle.

                  Avec son violon.

 

Adieu                                                           1687                                          [19]

de Madame la Princesse d’Orange.

Sonnet.

 

Va Prince généreux, où ton devoir t’apelle;

Je consens que tes yeux évitent ma douleur.

Je connois ta tendresse, et je crains pour ton coeur;

Pars viste, et va cueillir une gloire immortelle.

 

La Carriere où tu cours ne peut être plus belle,

Les Loix et les Autels implorent ta valeur;

S’il est beau de marcher sur les pas d’un vainqueur,

Regarde ton Autel, et suis ce beau modelle.

 

Mais si dans le combat tu peux, songer à moy,

Souviens toy des soupirs de la fille d’un Roy

Qui craint pour son époux qui tremble pour son pere.

 

Ménage donc tes jours où jay tant d’interrest,

Et détournant ton bras d’une teste si chere,

Laisse au Ciel tout le soin d’accomplir ses Arrests.

 

Chanson                                                    1687                                          [21]

Sur l’air du branle de Metz.

Par Monsieur de Saint Gilles, pour Madame ……. Landais.

 

La bergere qui m’enchante

Est toute pleine d’appas:

On dit qu’elle a pour les chats

Une amitié surprenante,

Et pour les tendres amans,

Peu de tendres sentimens.

 

Autrefois Vénus la belle,

Sensible aux voeux d’un amant,

Pour adoucir son tourment,

Changea sa chatte en donzelle;

Et moy je deviendrai fou,

Si je ne deviens matou.

 

N’est-ce pas un bien extrême

Pour un Chat bien enflamé,

D’etre tendrement aimé,

D’une bergere qu’il aime?

Pour moi je deviendrai fou

Si je ne deviens matou.

 

Dans ce nouveau personnage,                                                                          [22]

Je vivrois modestement;

Je ne serois point gourment;

Je n’irois point au fromage.

Je ne serois au logis

Redoutable qu’aux souris.

 

Avec une douce patte,

Je gratterois doucement;

Il est fâcheux en aimant,

D’egratigner quand on gratte,

Et les plus tendres amours

Ont la patte de velours.

 

Jamais d’une ardeur nouvelle

Mon coeur ne s’en flamera;

Ma bergere me sera

Toujours constante et fidelle;

Je perdrai plustost le jour

Que de perdre mon amour.

 

Si la moindre espérance,

Mon coeur ose se flatter;

Mais craignons de l’irriter,

Eviter ce qui l’offense;

Il vaut mieux lui faire voir

Qu’on peut aimer sans espoir.

 

Autre                                                           1687                                          [23]

Sur l’air: Il a battu son petit frere.

Sur Monsieur de Madaillan qui êut la teste cassée/ coupée pour avoir couché avec sa fille.

 

Se lassant des C… de sa race

Il leur fit faire volte face;

Puis descendant jusque aux garçons,

Baisant Masles comme Femelles,

Et tout cela chez les Gascons

Ne passe que pour bagatelle.

 

A Duc de la Feuillade                        1687                                          [24]

Mareschal de France

 

Hé! pourquoi diable le Feuillade,

Le plus fou de tous les esprits,

Avec sa place incommodeet maussade,

Fait il enrager tous Paris?

De tous côtez sa dépense inouye,

Fait que l’on s’en moque aujourd’huy:

Mais ce qui plus m’anime contre luy;

C’est qu’il ait renfermé le Roy dans sa folie.

 

Chanson                                                    1687                                          [25]

Sur l’air: Reveillez vous etc.

 

Quand la Mouchi fait l’agréable

Chez le beau fils de Perauté;

Est-ce pour manger à sa table?

Ou pour coucher à ses costez.

 

Chanson                                                    1687                                          [27]

Sur l’air des Trompettes du Carrousel.

Sur l’Opera d’Acis et Galathée.

les parolles dont de Monsieur Capistron, et la Musique de Monsieur Lully.

 

Ma foy vôtre Galathée

Et le Sot Berger Acis,

N’aprochent point de Persée*,                                     *opéra de Monsieur Lully joué en 1682.

Ny du vaillant Amadis*.                                                      *Opera id joué en 1684.

                  Capistron.

Laissés-là, la Chanson,

Vous aurez un affront,

Prenez un autre ton,

Ou bien sur vôtre front

Les Lauriers faneront.

 

Que veut dire Polipheme

Avec son Flageolet?

Quant ce géant dit qu’il aime;

Je crois qu’il me bout du lait.

                  Capistron.

Laissez là etc.

 

Scilla qui fait la soubrette,

Ne scait pas bien son métier,

Elle doit dans sa retraite,

Retenir ce Chaudronnier.                                                                   [28]

Capistron;

Laissez là etc.

 

Quand Comus dit que les festes,

Parlant à ses Compagnons,

Parmi vous soient toujours prestes.

Les prent-il pour des Oisons?

                  Capistron.

Laissés là etc.

 

Hé quoi! dans la passacaille

Où la Moreau doit charmer;

On ne voit que qu’on qui vaille,

Qu’on serrer, et qu’on s’armer.

                  Capistron etc.

 

Que dans l’ardeur qui le presse

Un amant est détesté

S’il refuse à sa maîtresse

Un moment de liberté.

                  Capistron etc.

 

Chanson                                                    1687                                          [29]

Sur l’air: Il fait tout ce qu’il deffend.

Couplets faits sur le mariage du Duc de Guiche, avec Mademoiselle de Noailles. Il ne fit rien à sa femme la nuit de ses noces.

 

Du Cap de bonne espérance

J’estois parti ce matin;

Pour allaer a joüissance;

Mais j’ay manqué le chemin.

La Mer d’amour est étrange.

Le vent à toute heure y change;

Cependant j’y fais toujours

Des voyages de long cours.

 

Quand sur le Golphe du tendre,

Je m’embarquay l’autre jour,

Dans peu je croyois me rendre

Dedans l’Isle de l’amour.

La Mer paroissoit tranquille,

Leur trajet court, et facile:

Mais sur Mer pour compter bien,

Il ne faut compter sur rien.

 

La surprise de l’Orage

Ayant fait baisser le Mast,

Jetta le triste équipage

Dans un terrible embarras;                                                               [30]

Je perdis la tramontane,

Mon vaisseau qui fit la cane,

Quoique le tems devint beau,

Ne put revenir sur l’eau.

 

J’avois un vent favorable,

Doublé le Cap de pudeur;

Et cet écueil redoutable

Qu’on apelle l’honneur,

Le Ciel êtoit sans nuage,

Et je touchois le rivage;

Mais le vent changea d’abord,

Et je fis naufrage au port.

 

Chanson                                                    1687                                          [31]

Sur l’air de Joconde.

Le Solitaire de Chaulnes, devenu homme du monde, c’est un jet d’eau qu’on apelloit de ce nom, parce qu’il êtoit dans un lieu écarté et brute, qui enfin est devenu un lieu délicieux, du consentement de Madame la Duchesse de Chaulnes qui s’y êtoit toujours opposée. par Coulanges.

 

A Chaulnes dans un lieu désert

                  S’etablit un hermite,

Dix ans durant, clos, et couvert;

                  Sous la terre il habite.

Maintenant, las de ce repos

Au monde il cherche à plaire.

N’est-ce pas là de nos dévotes

                  La conduite ordinaire?

 

La Duchesse dans ce moment

                  A l’hermite propice,

Loin d’improuver son changement,

                  Se rend sa bienfaitrice;

De ses nouveaux habits prend soin;

Luy fait faire la barbe,

Et donne quatre cens de foin (1)

Pour lui nourrit un Barbe. (2)

 

(1)   Elle abandonne un Pré qui raportait beaucoup de foin.

(2)   Augmentation d’un cheval pour faire aller la Machine qui éleve l’eau, et qui rend ce jet d’eau plus considérable.

 

Chanson                                                    1687                                          [33]

Sur l’air. Je suis encore trop jeunette etc.

A Madame la Duchesse de Chaulnes, qui par un brouillard épais alloit voir travailler ses Ouvriers à Chaulnes au mois de Novembre.

 

Madame au mois de Decembre,

                  Janvier, Fevrier, Mars,

Ainsi qu’au mois de Novembre.

N’allez point tant au brouillard;

                  Je ne scaurois.

Tenez vous dans votre chambre,

                  J’en mourrois.

 

                                                                        1687                                          [35]

Les derniers jours d’Appartemens, avant le départ du Roy, Monsieur le Grand Prieur (le Duc de Vendôme), causant avec le Duc de la Ferté, dans l’endroit de la Collation, aperçêut Madame de Bregy, et une autre beauté de son âge avec elle, qui venoient pour manger et ayant remarqué qu’elles se jettoient souvent sur des Fromages. Il dit au Duc qu’il alloit les coaglionner, et qu’il y auroit grand plaisir de voir ces vieilles avaller un pareil ragôut. Le Duc rit et trouva cela plaisant. Monsieur le Grand Prieur execute aussitôt son dessein, & cracha tant qu’il pût sur les petits Fromages. Dans ce moment Monseigneur passa qui s’aperçeut de ce qu’il venoit de faire et l’apella, lui disant que cela êtoit fort villain et infame, & que si le Roy scavait cela il le trouveroit fort mauvais. Quelques gens en remarquerent autant et le Roy le sceut. Estant asouper, ayant pris sa mine haute, et sévére, il dit, qu’il y avoit des gens assés hardis pour faire des insolences sur la Collation, et que s’il scavoit qui c’est, il en feroit un exemple, & se tournant du côté de Monseigneur, vous scavez qui c’est, dites le moi; Monseigneur se deffendit; mais le Roy lui ayant ordonné d’une maniere à ne lui oser désobéir. Il répondit qu’il avoit veu le Grand Prieur, et le Duc de la Ferté

 

                                                                                                                              [36]

qui êtoient ensemble, le Roy dit, c’est assez, quelqu’un qui entendit nommer le Duc de la Ferté, envoya au plus vite le chercher, et l’avertir de ce qui venoit de se passer. Comme le Roy sortit de table, il s’aprocha, et lui dit, Sire je suis bien malheureux d’avoir déplû en quelque chose à votre Majesté et aprés lui en avoir demandé pardon, je lui diray la chose comme elle est, et la conta comme elle s’etoit passée; Qu’il avoit tort de ne s’y être pas opposé; mais que l’idée de voir ces femmes faire un aussi méchant repas, l’avoit fait rire & consentir à ce que l’autre avoit proposé et exécuté. Le Roy lui répondit, je scavois la chose; mais soyez sage. Le Grand Prieur êtoit allé à Paris au sortir de l’Appartement, si bien que Monsieur le Duc de Vendosme se mit en devoir d’implorer la bonté du Roy; mais d’abord sa Majesté lui deffendit de lui en parler: Il revint le lendemain à la charge, & fit si bien que le Roy lui dit, qu’il vouloit bien à sa considération n’en pas faire un exemple tel qu’il méritoit; mais qu’il ne se presenta pas devant lui. Je ne crois pas que la chose soit encore accommodée.

Monsieur de Coulanges dinant ces jours passez avec Monsieur de Louvois, comme on lui aporta plusieurs choses que l’on avoit prises par ses ordres aux

                                                                                                                              [37]

Couriers, à qui il est deffendu de se charger que de Lettres mises dans le paquet, et non autrement. Entre plusieurs hardes confisquées, il se trouva une quaisse, Coulange, lui dit, au moins Monsieur je vous demande la Confiscation des Portraits, elle lui fut accordée. On ouvre la boëtte, il parût bien du cotton, et en si grande quantité que l’on crût d’abord que c’estoit pour ce moquer que l’on en avoit tant mis, à la fin on trouva une petite boëte dans laquelle êtoit un Portrait d’un homme frisé, et sous les Armes, Monsieur de Louvois lui donna. Dieu scait la joye! Le paquet êtoit adressé à Madame de Serre à l’hostel de …… rue de Condé. Il admire le Portrait, il s’en joue, il le montre partout, contant l’histoire, ayant dessein de le rendre à la Dame, & pour cet effet, aprés avoir confié cette avanture à bien des gens, il envoya chercher Madame de Serre, que l’on trouva jolie et fort bienfaite, et comme elle entendoit que l’on s’informoit d’elle, elle s’informa aussi soigneusement qui c’estoit; le Laquais ne lui voulut pas nommer son maître; mais lui dit un nom en l’air, qu’elle ne connût pas, et ajouta que son maître avoit à luy parler, elle lui donna heure pour le lendemain aprés diner. Coulanges au lieu d’y aller lui même y envoya son

                                                                                                                              [38]

Laquais avec la Boëte, en lui disant comme la chose êtoit arrivée, et que son maître s’etant trouvé à l’ouverture, s’en êtoit chargé pour avoir le plaisir de lui rendre. Mon Dieu que je lui suis obligé! elle ouvre, elle cherche, et trouve le Portrait, ses remercimens augmenterent, et l’envie de scavoir qui lui avoit rendu un si bon office; mais le Laquais qui avoit ordre de n’en rien faire fut fidelle, et dit seulement qu’il logeoit au marais. La Dame en dévélopant le portrait aperçêut des vers que Coulanges y avoit mis sur l’air de Joconde, elle les lêut, et les trouva fort jolis, et demanda s’ils êtoient de la facon de celuy qui lui faisoit une aussi agréable galanterie? le Laquais répondit que ouy; Elle les lêut, les relût, et les chanta: Il ne tiendra qu’à vous d’en faire autant, car les voicy.

                  Délivrez nous d’un Jugement,

                  Peut être téméraire.

                  Est-ce le Portrait d’un amant,

                  D’un époux, ou d’un frere?

                  Quel qu’il soit il a des attraits:

                  Vous êtes jeune belle Iris,

                  Cachez un peu mieux vos secrets,

                  La Poste est infidelle.

 

                                                                                                                              [39]

Hé mon Dieu! dit la Dame, est-ce que je n’auray point la jye de connoître un aussi honeste homme, et aussi spirituel? Je vous prie de bien dire à vôtre maître que j’ay une passion extrême de le connoître, et que je le conjure de me venir veoir, affin que j’aye le plaisir de le bien remercier moy meme, et comme je ne doute point quil ne m’accorde cette faveur et que je suis icy à 200. lieues de mon mary, et obsédée par un beau frere qu’il pourroit même trouver céans; Qu’il fasse come s’il y venoit voir un tableau, qu’il a apris que je voulois vendre. Cependant Monsieur de Coulanges, qui n’est aparemment pas si galand que la Dame le croit, ne s’est pas trouvé pressé de l’aller voir. Madame de Grignan & le Chtr de Grignan son beaufrere ayant sceu ce détail voulurent y ajouter quelque chose du leur. Le Chevalier fit le Couplet qui suit au nom de la Dame, et le fit écrire et cacheter bien proprement, et on le donna au Portier de Monsieur de Coulanges. Il est sur le même Air de Joconde

                  Ce Portrait n’est pas d’un amant,

                  D’un amy n’y d’un frere;

                  Corrigez vous d’un Jugement

 

                                                                                                                              [40]

Qui seroit téméraire;

                  Comme vous je scay que souvent

                  La Poste est infidelle;

                  Mais cela m’est indifferent

                  Je ne suis pas comme elle.

Monsieur de Coulanges revenant chez lui trouva cette réponse, et aprés s’en être diverti, on lui aprit le véritable lieu d’où elle venoit: voila en quel état est l’avanture; je ne crois pas qu’elle aille plus loin de sa part; mais d’autres gens ont envie d’y aller pour luy.

 

Chanson                                                    1687                                          [41]

Sur l’air: Cher amy que mon ame est ravie.

Pour Madame la Duchesse de Chaunes, aprés sa grande maladie en 1687.

 

Quel plaisir adorable Duchesse

De vous voir revenir en santé!

Scavez vous que vous avez êté

Au point de causer une extrême tristesse?

Mais enfin vous avez résisté.

Rions maintenant, beuvons, chantons sans cesse,

Et dansons au son des Chalumeaux,

Courantes et branles nouveaux.

                                                      par Coulanges.

 

Autre                                                           1687                                          [42]

Sur l’air de Joconde.

La colere du Capitaine du Château de Chaulnes, contre les Ouvriers qui ne venoient pas à l’heure marquée. par Coulanges.

 

Où sont donc tous ces ouvriers?

Ces coquins passent l’heure.

Où sont allez tous ces Chartiers?

Nôtre ouvrage demeure.

Dites pourquoi tardez vous tant?                                les voit venir.

Marchez vite canaille.

Madame est là qui vous attend (1)

Sur son Trosne de paille.

 

(1)   la Duchesse qui sur une Chaise de paille prend plaisir à voir travailler ses ouvriers.

 

Année 1688                                                                                                  [43]

 

Chanson                                                    1688                                          [45]

Sur l’air: Il fait tout ce qu’il deffend.

Sur LOUIS XIV.

 

Qu’à Marly le Roy s’occupe

Du soin de ses beaux Jardins,

Et qu’il soit toujours la dupe

Des Bigots et des Putains,

Sans Général, sans Ministre.

Dieux! quel avenir sinistre!          

Je me f….. de son destin,

Pourveu que j’aye du vin.

 

Autre                                                           1688                                          [46]

Sur le même Air.

 

Ah grands Dieux! sans ma vieillesse,

Que mon sort seroit heureux;

Je vois toute la jeunesse

Vouloir tout ce que je veux.

Et chacune, dit, vieux restre

Ne veux tu pas me le mettre:

Tout compté, tout rabatu,

Je suis toujours le f…..tu.

 

Autre                                                           1688                                          [47]

Sur le même Air.

Sur Monsieur le Prince de Conty.

 

Que Conty toujours murmure

De n’estre pas Général;

Qu’avec aigreur il censure

Ce qu’il feroit bien plus mal;

Qu’aux voeux de tout le Royaume,

Louis n’accorde Vendosme;                                            Vendosme le Duc.

Je me f…… de leur destin

Pourveu que j’aye du vin.

 

Autre                                                           1688                                          [48]

Sur Colasse, Musicien qui acheva l’Opera d’Achille, commencé par Lully.

 

                  Petit Colasse                                         Petit Colasse

Que ta musique a de grace.                           Ta musique nous glace

Ton opera plus qu’un autre plaît                                 J’aimerois mieux

Quelque grace                                      Faire chanter l’oublieux.

Que les Dieuz, Lully, te fasse,

Tes Airs charmand

Te feront monter d’un cran:

                  Petit Colosse etc.

 

Quoique tu fasse,

Tu n’aura jamais de grace

                  Dans tes récis.

Tu ne scais ce que tu dis;

                  Petit Colasse.

 

En vain Francine,

Sans aucun droit,

S’imaine par ses Concers,

Charmer tout l’univers.

                  Petit Colasse.

 

A la louange d’Innocent XI.          1688 (Décembre)              [49]

Pape. Il se nommoit avant son exaltation Benoît Odescalchi.

 

Pauperibus sua dat gratis, nec munera curat,

                  Curia Papalis, ut modo perspicimus,

Laus tua, non tua fraus, virtus non copia rerum,

                  Scandere te fecit, culmen ad eximium.

Conditio tua sit stabilis, nec tempore parvo

                  Vivere te faciat, hic Deus omnipotens.

 

Les mesmes Vers retournez, contre lui.

 

Omnipotens Deus, hic faciat te vivere,

                  Parvo tempare, nec stabilis sit tua conditio.

Eximium ad culmen, fecit te scandere,

                  Rerum copia, non virtus, fraus tua non tua laus,

Perspicimus modo, ut Papalis curia

                  Curat munera, nec gratis dat sua pauperibus.

 

Chanson                                                    1688                                          [50]

Sur l’air…..

 

Nos champs sont pleins de Generaux,

Qui s’en vont par mons et par vaux.

De Lauzan est déja parti

Ce grand homme de guerre,

Pour s’en aller tout conquerir

Avec le bon Roy d’Angleterre.

 

Chanson                                                    1688                                          [51]

Sur l’air…#

 

Quand Proserpine apercêut

La femme à Guillaume;                                                      Marie d’Angleterre

Aussitost la Dame crût

Perdre son Royaume;

Mais son noir mary Pluton;

Luy jurason grand juron.

On vaut mieux sous terre,

Que dans l’Angleterre.

 

Autre                                                           1688                                          [52]

Sur l’air: Dodo au secours de Guillemo.

 

Notre pauvre Prince impuissant

Devient fou faute d’argent,

Ne pouvant continuer la guerre

Contre tous les gros Milors Anglois

Luy disent tout d’une voix.

Reposez, faites un bon somme dodo,

Faites dodo Guillemo.

 

Abregé de l’Opéra d’Achille.       1688                                          [53]

Les parolles sont de Capistron, et la Musique de Colasse.

Sur l’air: Reveillez vous belle endormie.

Par Monsieur de Saint Gilles.

 

Or escoutez la noble histoire

De l’Opéra de Capistron;

Je veux asseurer sa mémoire

Par une immortelle Chanson.

 

Agamemnon, outrage Achile,

Qui dit, qu’il s’en repentira.

Il se promene dans une Isle;

Vénus lui donne l’Opéra.

 

Patrocle meurt, Hector l’assomme;

Certe, ce fut mal apropos;

Car on voyoit en ce jeune homme

Tous les sentimens d’un héros.

 

Achille en son humeur bouruë,

Chasse Vénus tres brusquement;

Il s’embarque, il combat, il tuë:

Hector descend au monument.

 

Le Roy Priam, sa bru, sa fille,

Ont tous trois le coeur bien serré;                                                [54]

Polixene est assez gentille,

Achille la trouve a son gré.

 

S’en est fait, ce héros l’adore,

Arcas en va dire deux mots;

Briscis croit qu’on l’aime encore,

Achille lui tourne le dos.

 

Cette Princesse m’embarasse;

Où couchera-t’elle ce soir?

Chez Agamemnon, plus de place;

Achille ne veut plus la voir.

 

Briscis est tres allarmée;

Junon lui montre les Enfers.

Les Diables font de la fumée;

La clarté revient dans les Airs.

 

Au premier bruit de quelque treve,

Les villageois s’en vont dansans,

Avant que la tréve s’acheve

Ils voudroient labourer les camps.

 

Polixene veut bien se rendre,

Andromaque a beau raisonner,

Et les Almanachs de Cassandre,

N’ont rien qui puisse l’estonner.                                                                     [55]

 

Tous les beaux Conseils qu’on lui donne,

Ne sont bons que pour l’enflamer:

Un coeur que le peril étonne,

N’est ma foy pas digne d’aimer.

 

Priam reçoit dans sa famille

L’invincible fils de Thétis;

Trop heureux de donner sa fille,

Au fier vainqueur d’Hector, son fils.

 

Un changement si favorable,

Comble aujourdhuy tous ses désirs.

Auroit il crû son coeur capable

D’avoir encore quelques plaisirs?

 

Vous, que nôtre sort interresse

Dans cet évenement heureux.

Peuples, montrez vôtre allégresse,

Par les ébats les plus pompeux.

 

Polixene semble interdite

Devant son époux prétendu;

Je ne scais ce qu’elle médite.

Achille en est tout confondu.

 

Hé! parlez donc beauté charmante,                                           [56]

M’aimerez vous de bonne foy?

Monsieur, je suis obéissante;

Mon papa répondra pour moy.

 

Bref, Paris assassine Achille,

Polixene se veut fraper,

Du même trait elle s’enfile;

La Toille tombe on va souper.

 

Or vous scavez la noble histoire,

De l’Opéra de Capistron;

Je viens d’asseurer sa mémoire,

Par une immortelle Chanson.

 

Réponse                                                    1688                                          [57]

à Monsieur de Coulanges.

 

Pourquoi de nos jeunes galans

Te faire un sujet de satire?

Pourquoi des Coquetes du tems

Dans tes Chansons, chercher a rire?

Coulanges, si tu n’estois vieux

Des jeunes tu parlerois mieux.

 

Pour cajoler et cetera;

Va t’en chercher Dame gigogne,

Les Infants de l’Opéra

Ne sont pas pour un vieux yvrogne,

Et la plus salope catin,

Te renvoye au vertu gadin.

 

Qu’une femme soit en Manteau,

En fontange, en écharpe, en mule,

En malitie à Patrons nouveaux.

Est-ce un amour si ridicule?

Ouy, si c’estoit pour ton esbat

Qu’Elle se tint preste au Combat.

 

Vas dans le fons d’un Cabaret

Débiter tes rimes boufonnes;

Ce n’est pour toi qu’en Corset                                                         [58]

Se mettent nos jeunes mignonnes.

Ho! le plaisant fileur d’amout

Qu’un gouteux de la vieille Cour.

 

Pourquoi blesser dans vos chansons

Nos usages les plus commodes?

Il faudroit bien d’autres leçons

Pour renformer toutes nos modes,

Tous vos atours du tems jadis

Ne font point honte à nos habits.

 

Faites nous voir que nos amans,

N’ont ni mérite, ni tendresse;

Otez leur tous leurs agrémens,

Vous nous reverrez sans foiblesse,

Une Tabatiere à la main

Rend t’elle un homme si vilain?

 

S’il est couché dans un fauteuil,

Des genoux croisez l’un sur l’autre.

Ne croyez pas à ce coup d’oeil

Nôtre gout different du vôtre;

Mais quand d’ailleurs le marché plaist

Le Marchand passe tel qu’il est.

 

Ne scait on pas que nos guerriers

Ont des vertus bien reconnuës?

Et nous n’en serions pas émues;

Chez nous qui se fait estimer

N’est pas loin de se faire aimer.

 

Dans nôtre faubourg Saint Germain,

Nous n’aimons point les vieux usages.

Croyez vous qu’en vertugadin

Nos grandes meres êtoient plus sages?

Que sert quand on est sans témoins

D’un peu d’etoffes, plus ou moins?

 

Feuilletez bien vôtre Almanach,

Vous trouverez que ces matronnes,

Sand vin, sans jeu, et sans Tabac,

Faisoient come nous les dragonnes,

Et sous leur grotesque harnois

Cachoient d’amour un feu gregeois.

 

Les hommes sont faits pour aimer,

Les femmes sont faites pour plaire.

Quand deux beaux yeux ont pû charmer;

L’habit ne fait rien a l’affaire.

Les vrais amans dans leurs combats

Se sont toujours veus pourpoint bas.

 

Les hommes sont trop de bon goût                                              [60]

Pour s’arrester à la parure;

On ne les voit que troppartout

Quitter le velours pour la bure,

Et nos amans et nos amis

Courent la grisette à Paris.

 

S’ils ne cherchoient à l’Opéra

Ces Infantes à beau corsage,

Ce n’est pas en ce païs là,

Qu’ils feroient leur second ménage.

Ce n’est pas l’or de leurs habits

Qui met leurs coeurs à si haut prix.

 

Trouvez vous le goût si mauvais

De chercher là quelque Deésse?

Elles joignent a de beaux traits

L’esprit et la délicatesse.

L’himen ne veut que de grands noms;

Mais l’amour veut bien des fanchons.

 

Chacun a son petit réduit,

Où sans orgueil, et sans grimace;

Loin de la contrainte et du bruit,

On fait tout de tres bonne grace;

Ce sont les filles d’Apollon

Qui font chanter sur le haut ton.

 

Il en est en ce païs là                                                                              [61]

Dont le coeur répond aux manieres,

Qui partout comme à l’Opéra,

Soûtiennent leurs vrais caracteres;

Et qui dans toute leur maison,

N’ont rien de bourgeois que le nom.

 

Les modes, les noms, les éstats,

Sont tous sujets à la satire;

Souvent qui chante ne scait pas

Ce qu’on pense quand il fait rire.

Tel qui rit des deffauts d’autruy,

Rit de ce qu’on rit de luy.

 

Coulanges ce n’est pas pour toy

Que ce dernier couplet raisonne;

Ma Muse s’est fait une Loy

De chanter sans chooquer personne;

Je parle à ceux qui sont en train

De mordre sur le genre humain.

 

Chanson                                                    1688                                          [63]

Sur l’air des Trompettes.

Au départ du Roy d’Angleterre.

 

Quand on suit le Soleil, jamais on ne s’egare,

Dit Jacques, je meuray mon Gendre à la raison

                  Sur leton de fanfare,

                  Guillaume lui répond

Mon beaupere tarrare ponpon.

 

Chanson                                                    1688                                          [65]

Sur le bon bransle.

Sur le Roy d’Angleterre.

 

Le Roy d’Angleterre est party,

Et la Flotte s’ebranle;

Pour un projet assez hardy,

Et fort beau s’il y réüssit.

Il va pour mettre en branle

L’Ecosse, qui à ce qu’on dit,

Au manche déja tremble.

 

Des gens de là lui ont écrit,

Sire, on attend labranle;

L’Argent êtant rare à Paris,

N’en empruntez pas à Louis

Pour les frais de ce branle;

Nous vous ferons plûtost crédit

Jusqu’à la fin du branle.

 

C’est ce qui l’a déterminé

A mettre tout en branle,

Le Roy seulement a donné

De quoi le mettre en seureté

Pour commencer le branle;

Il faut qu’il y soit couronné,                                                               [66]

Sinon, f….tre du branle.

 

Chanson                                                    1688                                          [67]

Sur l’air de Joconde.

 

Un petit fils au grand Condé

                  Commence de paroitre,

A sa valeur, à sa fierté,

                  Peut on le méconnoître?

Douai le feu de tes remparts,

                  Respecte sa personne;

On croit que c’est un nouveau Mars,

                  Ou le fils de Bellone.

 

Un Enguien dans ses jeunes ans, (1)

                  D’un coup de son tonnerre

Foudroye en Piemont les Titans

                  Qui nous faisoient la guerre;

Bourbon de même sang que luy,

                  Même ardeur dans ses veines

Doit faire aux Titans d’aujourd’huy

                  Sentir les mêmes peines.

 

Rocray, Fribourg, Norlingue et Lens,

                  S’offrent à sa mémoire, (2)

Et lui montrent en même tems,

                  Le Chemin de la gloire,

Pour le suivre dans les Combats

(1)   Francois de Bourbon Comte d’Enguien a l’age de 24 ans gagne la Fameuse Bataille de Cerisole sur le Marquis du Gas général de l’Empereur Charlesquint en 1544.

(2)   Le Grand Condé n’avoit pas 22 ans accomplis lorqu’il gagne la Bataille de Rocray en 1643. Il gagna les 2. années suivantes les Batailles de Fribourg et de Norlingue.

 

La victoire s’apreste.                                                                                      [68]

Guerriers que ne ferez vous pas,

                  S’il marche à vôtre teste?

 

Bientost par ce Prince, on verra

                  Nos allarmes cessées;

Le souvenir s’effacera,

                  De nos pertes passées.

Déja pâlir à son seul nom

                  Eugêne de Savoye,

Qui sent bien que de ce Lion

                  Il doit être la proye.

 

Chanson                                                    1688                                          [69]

Sur l’air des Triolets.

 

Ȏ trio le plus accomply!

Trio le plus sain de nôtre age;

Vaubrun, Caumartin & Choisy                                       3 Abbez

Ȏ trio le plus accomply!

Mais de ce trio tant joly

Je donne a choisir le plus sage.

Ȏ trio le plus accomply!

Trio le plus sain de nôtre age.

 

Vaubrun des Abbez le mieux fait,                                Vaubrun

Sur ses consors à l’avantage

D’être fourny comme un mulet.

Vaubrun des Abbés le mieux fait,

Et des Bautrus le noble extrait,

Parmy les femmes fait la rage.

Vaubrun des Abbez le mieux fait

Sur ses Consors a l’avantage.

 

Caumartin, quel nombre d’Ayeux             accusé d’avoir fait la lettre contre l’évesque de Noyon.

Releve déja ta noblesse!

Les Clermont ne valent pas mieux,

Caumartin quel nombre d’Ayeux,

Et tu te mets au dessus d’eux.

Par ton scavoir, par ta sagesse;                                                     [70]

Caumartin quel nombre d’Ayeux

Releve déja ta noblesse!

 

Je vanterois la probité

Et je dirois, ce que je pense,

De Choisy sur la chasteté

Je vanterois la probité

Si de la Font et de Gardeblé

J’avois pû garder le silence,

Je vanterois la probité

Et je dirois ce que je pense.

 

Autre                                                           1688                                          [71]

Sur l’air du Confiteor.

Contrevérités.

 

Maintenon disoit l’autre jour,

Louvois mignon ah! que je t’aime!

Qui n’auroit pour toy de l’amour!

Mignon Louvois, des beaux la crême;

Ton visage est rempli d’atraits

Comme Mayence de Mousquets.

 

Autre                                                           1688                                          [72]

Sur l’air Mais.

 

Des Caumartins l’arrogance séquelle,  

Fair aux Clermont intartade nouvelle;

                  Mais

Si quelqu’un tombe sur elle

C’en sera fait pour jamais.

 

On parle fort du pere et du grand pere.

Loin au delà l’on ne remonte guerre;

                  Mais,

Si quelqu’un le vouloit faire,

Le retour seroit mauvais.

 

Chanson                                                    1688                                          [73]

Sur l’air: Laire lan laire.

Sur la Prise de Philisbourg, par Monseigneur le Dauphin.

 

Monseigneur est donc de retour

Du voyage de Philisbourg?

Le Palatin ne tient guere;

Laire la, laire lan laire,

Laire la, laire lan la.

 

Quel plaisir pour ce nouveau Mars,

De voir qu’affrontant les hazards;

Tout lui cede comme à son pere.

Laire etc.

 

Le coeur charmé de ses hauts faits,

Mille beautez plus que jamais;

Vont prendre le soin de lui plaire.

Laire etc.

 

Mais pour elles je crains bien fort,

Qu’animez d’un plus beau transport,

La gloire ne lui soit plus chere.

Laire etc.

 

Que les Bergers de nos cantons                                                                       [74]

Craindrons pour leurs pauvres Moutons,

De Loups il ne prendra plus guere.

Laire etc.

 

Ce jeune Mars dans les combats

S’en va faire plus de fracas,

Qu’Achile autrefois n’en pût faire.

Laire etc.

 

Le Rhin dans ses flots écumeux,

Craint d’en sentir encore les feux.

Il tremble comme un pauvre here.

Lere etc.

 

On dit qu’au milieu de ses eaux

Le front tout couvert de Roseaux;

Ce grand Fleuve se désespere,

Laire etc.

 

Ses yeux ont êté les temoins

Des explois fameux et des soins,

Du fils aussi bien que du pere.

Laire etc.

 

Ce beaucoup dessai, sur ses bords,

Fait voir que de plus grands efforts;                                            [75]

Vont suivre cette ardeur guerriere,

Laire la laire lan laire.

Laire la laire lan la.

 

Autre                                                           1688                                          [76]

Sur l’air des Ennuyeux.

 

Vouloir sans rime et sans raison

Contre Noyon toujours escrire.                                                      l’évesque

Contre les Saints de sa maison,

Composer sanglante satire.

De l’Evesché c’est le chemin

Que tient l’Abbé de Caumartin.

 

Estre lourd et mauvais plaisant,

Faire grand chere aux Bergeries,                                                   Terre a l’Abbé de Caumartin.

Estre d’un esprit malfaisant,

Estre dure dans ses railleries.

De l’évesché  c’est le chemin,

Que tient l’Abbé de Caumartin.

 

Faire le scavant, l’estre peu,

Estre fier jusqu’a l’insolence.

Aimer la femme, aimer le jeu

Estre vrai, sac de médisance.

De l’évesché c’est le chemin,

Que tient l’Abbé de Caumartin.

 

Chanson                                                    1688                                          [77]

Sur l’air: ho ho ho tourlouribeau ou Marie Salisson.

Sur l’entreprise du Prince d’Orange contre l’Angleterre en 1688.

 

Le Prince d’Orange en Angleterre,

                  Ho ho tourlouribeau;

Est allé voir son beau pere;

                  Ho ho tourlouribeau.

Il ny fera que de l’eau claire,

                  Ho ho tourlouribeau

 

Ha! que ce jeune homme est inciville,

                  Ho. etc.

De s’en aller comme un drille,

                  Ho. etc.

Prendre Londres la grande ville,

                  Ho. etc.

 

Il avoit mis exprés dans la Manche,

                  Ho. etc.

Huit cent chevaux sur des Planches,

                  Ho. etc.

Ils sont noyez comme on pense,

                  Ho. etc.

 

Grand Prince soyez en asseurance,

                  Ho. etc.

Car si le grand Bourbon de France,

                  Ho. etc.

Va prendre votre deffense,

                  Ho. etc.

 

Le Roy Jacques bon Catholique,

                  Ho. etc.

Se rit de la politique,

                  Ho. etc.

De ces maudits hérétiques.

                  Ho. etc.

 

Suivons le Dauphin* qu’un chacun révere,                             *s’en allant à Philisbourg.

                  Ho etc.

Il est allé à la guerre,

                  Ho. etc.

A quitté son propre pere.

                  Ho. etc.

 

Année 1689                                            [79]

 

Sonnet                                                        1689                                          [81]

A Madame la Duchesse du Maine, sur l’acquisition de Sceaux.

 

Seignelay qui pour vous bâtit salle et …...portique,

Enflamé de la gent qui porte………………….fabala:

Fut des Dames l’amour, des maris l’……….Attila,

Aima jusqu’aux beautez qui montent la….Bourique.

 

Mais avec les vertus de la chaste………….….…..Monique,

Vous chassez loin de Sceaux l’amour qui s’y….coula,

En signant vôtre Contract vous lui dites…………hola,

Fussiez vous relegué jusqu’au pole………………..Artique.

 

Ainsi le pauvre enfant de ces lieux sort………….Camus,

Heureux d’avoir ailleurs droit de…………………...Comittimus;

Mais il vous faut des biens exempts de………….sindereze.

 

Vos devoirs sont reglez même au coup de……..Marteau,

Sage comme les Saints qu’a peint Paul…………..Veroneze,

Vous aimez jusqu’au soin de rendre le……………Château.

 

Chanson                                                    1689                                          [82]

Sur l’air: Que fais tu Bergere etc.

Sur Monsieur de Feuquieres (de Pas)

 

Que fais tu Feuquieres

Si loin de la Cour?

Preste à ma priere,

Icy ton retour;

Tes amis se plaignent

Que tu sois absent;

Tes maîtresses craignent

Ton coeur inconstant.

 

Chanson                                                    1689                                          [83]

Sur l’air de Jean de vert

 

Non non je m’etonne pas

Qu’on nomme Jean Farine

Monsieur le Mareschal Duras;

Sa politique est fine,

Il en scait faire de l’Argent,

Bien mieux qu’on ne faisoit du tems,

                  De Jean de vert.

 

Parlons pour finir ce discours

Du Mareschal d’Humieres;

Il a bien fait voir à Valcourt,

Qu’il abonde en lumieres;

Il a bien un plus beau talent

Pour faire nettoyer ses gens

                  Que Jean de vert.

 

Barbezieres est un imposteur, (1)

En bravour, en naissance,

Il n’a fait acte de valeur.

Au Siége de Mayence

Si l’on n’a d’autres Commandans,

Nous ne reverrons plus le tems,

                  De Jean de vert.

 

(1)   Brigadier de Dragons qui se jetta dans la place pendant le siége.

 

Chanson                                                    1689                                          [85]

Sur l’air de grosse bourguignonne.

Sur le mariage de Monsieur de la Fayette avec Mademoiselle de Marillac, dont est venu Madame de la Tremoille. Decembre 1689.

 

Chantons de la Fayette

Le galant compliment,

Qu’il fit à sa poulette

En qualité d’Amant.

Chantons son avanture,

Et sa noble posture.

Jamais amant ne s’est mieux présenté,

Pour être marié.

 

Dedans une Assemblée,

D’amis et de parens,

La Lisette pareé

Attendoit son amant;

Il paslit à sa veuë,

Tremble, rougit et suë;

En ne scachant qu’il devoit saluer;

Il sortit/ s’assit sans parler.

 

Lisette/ La belle consulteé,

Sur son nouvel/ futur époux,                                                             [86]

Dit dans cette Assemblée;

Qu’il lui paroissoit doux,

Et d’une humeur honneste,

Quoique peut être beste;

Mais qu’aprés tout pour elle un sot mari,

Etoit un bon party.

 

De la jeune Lisette

On aprouva l’avis,

Et une amie discrette,

Aussitôt reparty;

Il yra à sa Terre

Comme Monsieur son pere.

Et vous, ferez des Romans à Paris.

Avec les beaux ésprits.

 

La Lisette à sa mere

Demandoit l’autre jour

Comment se peut il faire

Qu’on demeure si court?

Sera-t’il aussi sage le jour du mariage?

Pour moy je n’aime la timidité

Qu’à un certain dégré.

 

Ah! l'aimable jeunesse

Que celle de Vieuxbourg;                                                                    [87]

Il a de la tendresse,

J’ay pour luy de l’amour.

On dit que s’il lamente;

Je ne suis point contente.

Ah! si je pouvois choisir un mari

Vieuxbourg seroit choisi.

 

Autre                                                           1689                                          [88]

Sur l’air: des Lampons.

 

Le Roy met à ce qu’on dit

Un impost sur chaque v….

Monsieur en a la régie (1)

En dépit de la Reinie (2).

                  Lampon, lampon

                  Camaradon lampon.

 

(1)   le Duc d’Orleans frere unique du Roy.

(2)   Lieutenant general de Police.

 

Chanson                                                    1689                                          [89]

Sur l’air: Il a battu son petit frere.

Sur le LOUIS XIV.

 

Vray pieux Monarque de France,

Regarde Heidelberg et Mayence,

Mal attaqué, mal deffendu.

De ces deux chefs de confiance,

L’un ne songe qu’a faire éscus,

L’autre à faire peu de Dépense.

 

Autre                                                           1689                                          [90]

Sur l’air des Rochelois.

 

Saint Ruth, Calvo, Larré, Bouflers (1),

Ce ne sont point des Ducs et Pairs,

Et ne pretendent pas de l’estre,

Par plus d’une bonne raison.

Mais ils servent si bien leur maître

Qu’ils mériteroient le Baston.

 

(1)   Ils étoient tous quatre Lieutenans généraux; le dernier fut fait depuis Maréchal de France.

 

Autre                                                           1689                                          [91]

Sur le même Air.

 

Tessé, d’Huxelles et de Sourdis

Le mériteroient bien aussi.

Sans compter le maure Feuquiere;

Mais pour nos deux grands Généraux,

Les prudens Duras et d’Humieres,

Ils en méritent de nouveaux.

 

Autre                                                           1689                                          [92]

Sur l’air des Ennuyeux.

 

Lanjamet vain, rempli d’orgueil (1),

Dis nous malgré ton arrogance,

Aprés quatre ans d’habit de deuil,

Que tu portois par indigence;

Quelle aumône ta deffrayé

Ce bel habit de drap rayé?

 

(1)   Gentilhomme de Bretagne qui n’avoit d’autre metier que d’être Courtisan.

 

Chanson                                                    1689                                          [93]

Sur l’air de Flon flon.

Pour le Cardinal Maldachin, quand il annonça de la Loge de Saint Pierre, l’élection du Cardinal Ottoboni, pour être Pape sous le nom d’Alexandre VIII.

 

Quand Maldachin en chape

                  De la Loge cria

Qu’Ottobon êtoit Pape;

                  La trompette sonna.

Et flon flon lariradondaire,

Et flon flon lariradondon.

 

Autre                                                           1689                                          [94]

Sur l’air du Confiteor.

Sur Monsieur de Pontchartrain Controlleur general des Finances.

 

Pontchartrain ne resvez pas tant

Au moyen que vous devez prendre

De donner au Roy de l’Argent,

Vous n’avez qu’à lui faire rendre

Ce qu’ont pris soin de mettre a part,

Et la Couleuvre* et le Lezare**.

 

*Monsieur de Colbert

*Monsieur de Louvois

 

Autre                                                           1689                                          [95]

Sur l’air: Sonnons le Tocsin.

 

Dieux! quelle différence

De Lorraine à Duras;

L’un n’a pris que Mayence,

Dont je fais peu de cas;

Mais l’autre mil fois plus fin,

                  Diguedin,

En a pris tout le vin.

 

Autre                                                           1689                                          [96]

Sur l’air: Sur le Rhin parût une beste.

 

Martinet cet homme exécrable,

Est déja réprouvé du Ciel;

La preuve en est que Saint Michel

L’a battu comme un Diable.

 

Réponse.

 

Que fait le grand Condé chez lui,

Ce grand héros, ce bel esprit?

C’est dont tout le monde murmure,

Il a pris Martinet pour son Voiture.

 

Chanson                                                    1689                                          [97]

Sur l’air de Jean de vert

 

Saint Paul en terrible valeur

De chevrette ferreé

Pour de l’Argent donnoit son coeur

A sa vieille effronteé;

Mais las d’un si vilain micmac,

Il a renvoyé la d’Orlac

A Jean de vert.

 

Pidou n’a pas de vanité,

Il répand sur la terre

Pourtant sa belle parenté,

Doit rendre une ame fiere.

La Francine et la Saint Olon

Estoient les maîtresses, dit on

De Jean de vert.

 

Noisy pour avoir de l’Argent                          Maupeou.

Fait une belle addaire,

Car la laide femme qu’il prend                    Catelan.

Lui vient d’un chien de pere;

Qui pourveu qu’il ait profité

Sur un bon gage auroit presté

A Jean de vert.

 

Sur le fils du grand Colbert                                                                 [98]

A des biens qu’il vous offre;

Louvois tient les siens à couvert

Dans le fonds de son coffre

Deux procédez si differens

Font bien causer les descendans

De Jean de vert.

 

Quoi! Louvois ne devoit il pas

En faisant bonne mine

Remplacer lui seul de ses Ducats

La nouvelle Tontine?                                          creé en 1689 au mois de Decembre.

Des Ministres moins opulans,

Auroient bien fait cela du tems,

De Jean de vert.

 

Il est constant que Ratabon,

Fait honneur à la France.

Le Roy dit avoir tout de bon

Esgard à sa dépense.

L’heureux abri que sa maison;

L’affreux séjour que le Gaudron

De Jean de vert.

 

Autre                                                           1689                                          [99]

Sur l’air de Joconde.

 

A la porte de Saint Martin

L’on arresta Banille                                            ou Baville.

Avec huit bouteilles de vin

Venant de Belleville:

Les Maltotiers fort vigilans

Fermerent la Barriere,

Messieurs vous n’êtes point exempt

Des Droits de la rapiere.

 

Autre                                                           1689                                          [100]

Sur l’air de Joconde.

 

La France faisant tous les jours

Du progrés dans la gloire.

Nous devons luy prester secours

A force de bien boire.

Pour moy je prétends que du Roy

Je soustiens la dépense;

Puisqu’a mesure que je bois

J’augmente sa finance.

 

Chanson                                                    1689                                          [101]

Sur l’air des Rochelois.

Réponse à une Chanson faite par Monsieur Dangeau au sujet du Jardin de Trianon.

 

Vous ne dites Monsieur Dangeau

Sur Trianon, rien de nouveau.

L’on n’est pas surpris qu’il vous plaise;

Vôtre épouse à tous les momens

Y voit les spectacles à son aise.

Cela rend les maris contens.

 

Sur des Jardins, loüer le Roy,

Nous semble petit, croyez moy.

C’est un héros extraordinaire;

Les zéphirs portent dans les Airs

Les grandes choses qu’il fait faire

Pour en informer l’univers.

 

Dans votre troisieme sixain,

Vous dites qu’en ce lieu divin.

Les vertus sont en asseurance;

L’on croit que vous n’y pensés pas.

Avec vous quelque connoissance

Qu’ailleurs on ait fait des faux pas?

 

Le quatrieme auroit passé                                                                [102]

Si solide êtoit bien placé.

L’on ne dit point solide gloire

Sur le fait des amusemens.

Ne vous en faites point accroire,

Vous n’aurez point de nôtre encens.

 

Chanson                                                    1689                                          [103]

Sur l’air J’ay fait beaucoup de bruit.

Sur le Baron de Beauvais.

 

Vaillant guerrier de Saint Denis

Grand conservateur des Perdrix.

Baron, ta garde accoutumeé

Te manque bien dans le besoin;

Car à celle de ton Epeé

Tu n’as jamais fié ton pourpoint.

 

Autre                                                           1689                                          [104]

Sur le même Air.

 

Le Buffet de grande aparence,

Ce linge si blanc et si fin,

Sont plus pour la magnificence,

Que pour la bonté du festin.

La Poudre a manqué dans Mayence,

Nous pourrions bien manquer de vin.

 

Chanson                                                    1689                                          [105]

Sur l’air: Non non, je ne suis pas seul a médire.

Voyage de Rome en 1689 pour l’élection d’un Pape, qui fut Alexandre VIII. Ottoboni. par Coulanges.

 

Sur Mer, je reprens l’air des Itineraires,

                  Pour chanter les Galeres,

                  Au nombre de vingt huit.

                  Qui voguans jour et nuit,

                  Seurement ont porté

Ambassadeur Cardinaux maint Abé

                  En terre de Papauté.

                  L’agréable voiture!

                  Mais survint une avanture

                                    Qui fit peur,

Et troubla le repos du voyageur.

Il parût un soir six vaisseaux ennemis,

                  Qu’aisement on eut pris,

                  Si la nuit qui fut trop obscure.

                  Ne nous eût fait changer d’avis.

 

Tout fut preparé dans les Galeres pour aller à eux. Ils faisoient une tres bonne manoeuvre; mais ayant pris la route de Corse, et la nuit êtant venuë on abandonna l’entreprise.

 

Autre                                                           1689                                          [106]

Sur le mesme Air.

Arrivée à Rome le 23. Sept’. 1689.

par Coulanges.

 

Hé quoi! je revois ce fameux Colizeé,

                  Au bout de mainte anneé.

                  Je revois le Panteon,

                  Le Palais de Néron,

                  L’arc du grand Constantin.

Le Temple de Faustine et d’Antonin,

                  Et le Mont Capitolin.

                  Je revois Marc-Aurele,

                  Les Chevaux de Praxitele;

                  Et je sens

Tous les plaisirs que j’avois à vingt ans;

J’ay la même humeur, & la même santé;

                  Je suis en liberté.

Fortune, tu m’as fait querelle;

Mais tu ne m’as point maltraité.

 

L’Auteur avoit êté à Rome en 1657. sous le Pontificat d’Alexandre VII de la Maison de Chigi.

 

Chanson                                                    1689                                          [107]

Sur l’air: Vive la jeunesse qui ne vit que d’amour; faite à Villeroy, par Coulanges.

A Madame la Comtesse de Saint Geran.

 

Prés de la belle Duchesse, bis                     la maréchale de Villeroy

Je chante icy sans cesse

La nuit et le jour;

Je vis sans tristesse,

Dans ce beau séjour.

 

Je chante icy sans cesse; bis

La contrainte m’opresse,

Je crains mon retour;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

La contrainte m’opresse; bis

La liberté, Comtesse

Fait tout mon amour;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

La liberté Comtesse, bis

Vaut bien mieux que la presse,

Qu’on voit à la Cour,                                                                               [108]

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Vaut bien mieux que la presse, bis

Je chante à la grand Messe,

Et crie comme un sourd;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Je chante à la grand Messe, bis

Ainsi que la Duchesse;

On m’ensense à mon tour;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Ainsi que la Duchesse, bis

Je reçois la Noblesse,

Des lieux d’alentour;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Je reçois la Noblesse, bis

Toute nôtre jeunesse

Dans tout le jour;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Toute nôtre jeunesse, bis                                                                   [109]

En sautant se despaisse;

Au Fifre, au Tambour;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

En sautant se despaisse, bis

Pour sauter on me laisse,

J’ay le cul trop lourd.

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Pour sauter on me laisse, bis

L’un donne à sa maîtresse

Des pieces de four;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

L’un donne à sa maîtresse, bis

Et l’autre la caresse,

L’apelle m’amour.

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Et l’autre la caresse, bis

Nul, en fait de tendresse

Ne demeure court.                                                                                  [110]

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

La Beste                                  1689 Mars                                               [111]

où l’on jouë toutes les nations de l’Europe.

 

le Cardinal de Furstemberg donne les cartes.

Les Jesuites les meslent.

La Hollande dit c’est ma beste qui joue.

Le Prince d’Orange dit à tout part par Madame.

La France, je fais et prends de mon Roy.

L’Allemagne on nuit au contre.

La Pollogne dit, je paris pour le contre.

La Savoye dit, si le contre perd je quitte le Jeu..

Le Dannemarck. je ne scais ce que je dois faire.

L’Angleterre je me défais de mon Roy.

La République de Venise; je ne puis jouer à ces jeux là.

L’Escosse dit, je garde mon Roy pour empescher la volle.

Le Portugal dit, je ne fais, ni bien, ny mal.

La Suede, je ne jouë point sur ma bourse.

L’Espagne dit, je ne puis jouer que je ne perde.

La République de Gennes dir, si j’avois le jeu de nuire au Contre, je le ferois.

Le Pape, dit je renonce à tout.

Le Roy d’Angleterre, dit qui renonce fait la Beste.

 

Le Turc, dit prenons garde que le Contre ne fasse la volle             [112]

L’Irlande, dit, si celui qui fait jouer entre dans mon jeu, il a perdu.

La Suisse, dit nous vous verrons jouer.

 

Chanson                                                    1689                                          [113]

Sur l’air de Joconde.

Sur la Barbereau de l’Opéra.

 

Si vôtre coeur doit s’embrazer

                  D’une flame nouvelle,

Le mien se doit interresser

                  Que la cause en soit belle,

Parmi le sautillant Troupeau:

                  Voulez vous bien m’en croire,

N’adorez que la Barbereau.

                  Il y va de ma gloire.

 

Autre                                                           1689                                          [114]

Sur l’air……

Couplet de Monsieur le Duc de la Ferté.

 

Plaignons tous en ce jour

Le malheur de du Bourg.

Il a aimé ma fille, et ma femme;

Il m’a aimé de plus cet infame;

Mais le plus grand de ces forfaits

C’est d’escrire à Louvois.

 

Chanson                                                    1689                                          [115]

Sur l’air: Lere la, lere lan lere.

 

Scavez-vous qui demeure court,

Devant le Siege de Valcourt?

C’est le Mareschal d’Humiere,

                  Lere la, lere lan lere,

                  Lere la, lere lan la.

 

Cet hiver chez Barbereau                                actrice de l’opera.

Ce grand Général du Bureau,

Tiendra son Conseil de guerre,

                  Lere la, lere lan lere,

                  Lere la, laire lan la.

 

Autre                                                           1689                                          [116]

Sur l’air de Joconde.

En allant à Rome, et descendant au Port de Robinet en Provence; par Coulanges.

 

Rosne je te fais mes adieux;

                  Je quitte ton rivage.

A chercher Iris en ces lieux

Mon tendre amour m’engage

Pour cet objet rare & charmant,

Et dont je suis esclave;

Je quitterois fort aisement,

Et Rome & le Conclave.

 

Autre                                                           1689                                          [117]

Sur l’air de Joconde.

A Monsieur le Prince de Turenne qui êtoit à Rome par Coulanges.

 

Que dites vous? que faites vous?

                  Trop aimable Turenne?

Vous me laissez longtems chés nous;

                  Cela me met en peine;

Polignac est un favory,

                  Qu’on estime et qu’on aime;

Mais hélas! entre vous et luy,

                  Est-ce trop d’un troisiême?

 

Autre                                                           1689                                          [118]

Sur le même Air.

 A Monsieur l’Abbé de Polignac, qui êtoit allé porter un Paquet de conséquence en France, et qui resta un tems infiny à Gennes, manque d’une voiture assez seure pour passer: par Coulanges.

 

Il est certain qu’un bon Courrier

                  Doit faire diligence;

Il ne faut point pour ce mestier

                  Tant, & tant de prudence:

Abbé vous avez en deux mots

                  Eu trop de retenüe;

Il falloit passer sous les flots,

                  Ou bien perçer la nüe.

 

Chanson                                                    1689                                          [119]

Sur l’air: Ofily et Filix.

Sur l’Affaire de la Régale avec la Cour de Rome.

 

La Sorbonne deffend la Loy,

Et le Clergé l’Edit du Roy;

On ne scait qui l’emportera,

                  Alleluya

 

Harlay (1), la Chaise (2) et Chanvalon (3),

Et le President de Novion (4)

N’ont voulut que le Roy cedât,

                  Alleluya.

 

Qu’on nous tienne pour insensez

S’ils sont jamais canonisez,

A moins qu’un bon mea culpâ,

                  Alleluya.

 

(1)   Alors Procureur general et depuis 1er. President en 1689.

(2)   Jesuitte Confesseur du Roy.

(3)   l'Archevesque de Paris.

(4)   Alors 1er. President.

 

Autre                                                           1689                                          [120]

Surl’air……

Par Rousseau contre ceux qui alloient au Caffé de la Laurent.

 

Que Boindin de son haut caquet

Désormais ne nous étourdisse;

Que la Grange de son fausset,

En ces lieux jamais ne glapisse.

Que par quelque jeune plumet

Le Caffé soit bientost défait

De Saurin et de sa sequelle,                                           Sorin

Qu’a mentir Villiers si sujet.

Aille ailleurs porter sa nouvelle.

 

Voyez les Stances de Rousseau sur le mesme sujet, qui commençent ainsi. Que le rechapé des prisons.

 

Chanson                                                    1689                                          [121]

Sur l’Air: Jardinier ne vois tu pas?

Quand LOUIS prit le devant,

Il laissa le derriere;

Il abandonna ce lieu

Pour apanage à Monsieur

Son frere, son frere, son frere.

 

Autre                                                           1689                                          [122]

Sur l’air de flon flon ettc.

 

La Camarde la Force

Dans son célébre trou,

Sur le tant moins des noces

A fait faire à Briou,

Flon flon flon laridadondaine

Flon flon flon laridadondé.

 

Chanson                                                    1689                                          [123]

Sur l’air de Jean de vert

 

Vous êtes plus médisant,

Marquis de la Bourlie

Vôtre esprit court et suffisant,

N’entend pas raillerie;

Mais à force d’etre brutal,

Il en prend aussi souvent mal.

Qu’à Jean de vert.

 

Autre                                                           1689                                          [124]

Sur l’air: Helas s’il n’estoit pas mort.

Sur la mort de la Reine d’Espagne.

 

Pleurés François pleurez tous

Que vôtre douleur soit forte;

Aux larmes abandonnez vous,

La Reine d’Espagne est morte.

 

Le poison par son effort,

De ses jours tranche la trame;

N’est-ce pas un triste sort

Pour une si bonne Dame?

 

Ah! qui l’auroit jamais crû

Que cette belle Princesse,

Recevoir la mort eut dû,

Par une main si traîtresse.

 

Helas! trop bien elle êtoit

Avec le Roy son cher Prince.

Sa belle mere voyoit

Que son crédit êtoit mince.

 

Sans le témoigner au Roy,

Cette marastre enrageé,

A contre la bonne foy

La Princesse empoisonneé.

 

Sa douleur ni ses attraits,

N’ont point sa rage arresteé;

A de semblables forfaits

L’Autriche est accoutumeé.

 

Le Roy lui dit tout en pleurs;

Car il aimoit bien sa femme,

De vôtre âge dans la fleur,

Faut il vous perdre Madame?

 

Consolez vous mon époux,

Luy répondit la Princesse.

Adieu vous dit pour toujours,

Hélas! je tombe en foiblesse.

 

Oubliez, Prince, ma mort,

De bon coeur je la pardonne;

Ne vous plaignez point du sort.

C’est ainsi que Dieu l’ordonne.

 

Adieu mes femmes adieu,

Retirez vous vites en France,

Il ny a plus dans ce lieu                                                                                           [126]

Pour vous aucune asseurance.

 

Voyez toutes de ma part

Le Roy de France en personne;

Je vous dis icy sans fard

Que j’aimois bien sa couronne.

 

Je salüe le Dauphin,

Et son illustre famille;

Monsieur et Madame enfin,

Le Duc leur fils, et leur fille.

 

Je laisse mes Diamans

A mes deux soeurs que j’embrasse.

Et Monsieur pareillement.

Priez pour m’obtenir grace.

 

Prions Jesus de grand coeur,

Prions tous ce Roy de gloire

Qu’il la mette en son bonheur,

La tirant du Purgatoire.

 

Chanson                                                    1689                                          [127]

Sur l’air de l’amour malade.

Coulanges.

 

La Trousse, Montgerou (1), Berniere,

Se baignoient dedans la Riviere;

                  Chacune crioit

Sitost qu’un mortel s’en aprochoit;

Et cependant ce bon pauvre apparut qui leur dit

Plus ras qu’un gros Feuillan;

                  Je suis Hercule,

                  En Canicule.

Je prens ce déguisement.

 

C’est moy, j’ay quitté ma Massüe,

Et je la quitte quand je süe.

                  J’ai quitté ma peau.

Pour venir vous carresser dans l’eau.

                  Ses beaux corps nuds.

Montrez moy vos Testons, les miens ne sont ils pas velus?

                  Je suis allegre,

                  Sans être maigre

Entre eux assez doucement.

 

A ces parolles ces trois belles,

Ne furent plus beautez cruelles;

                  Mais chaque beauté

Lui parut pleine d’humanité;                                                           [128]

                  Ce Dieu charmant

Pour elles ne fut plus qu’un objet tout rempli d’agrement

                  Et la journée

                  Fut terminée

Entre eux assez doucement.

 

Chanson                                                    1689                                          [129]

Sur l’air…….

Sur Monsieur de Pontchartrain Controlleur général des Finances.

 

Défiez vous, peuple de France

Du Ministre de nos Finances,

Que l’on apelle Pontchartrain;

C’est un Pont de planches pouries,

Un char tiré par des furies

Dont Bourvalais mene le train.

 

Epigramme                                              1689                                          [130]

Sur la taxe des Arts et Metiers.

 

Pour soulager l’etat, Pontchartrain, ton génie

A trouvé le secret de taxer les Metiers;

Et même jusqu’aux Gargotiers,

Et loueur de Chambre garnie;

Mais on dit que tes sages soins

Garde pour les derniers besoins

Deux Communautez fort nombreuses,

Les Savetiers, les Ravaudeuses;

Pour l’Estat c’est un grand apuy.

Ȏ combien tu scauras en tirer de Finances!

Car eux seuls font aujourd’huy

Tout le Commerce de la France.

 

Chanson                                                    1689                                          [131]

Sur l’air de Jean de Nivelle.

Sur Gabriel Estienne Texier Comte d’Hautefeuille, Lieutenant général des Armées du Roy, épousa en 1689. Marie-Françoise-Elizabeth Rouxel de Grancey.

 

Hautefeuille est bien marié        bis

A l’aînée des Granceys;                                    bis

On nous a dit pour nouvelle,

Qu’il avoit trouvé pucelle.

Ne se seroit il point trompé?

                  Jean de Nivelle,

Hautefeuille est bien marié.

 

Aux voeux d’un Prince, dit-on,   bis

Fort amy de sa Maison,                                    bis

Elle ne fut point rebelle.

L’auroit-il laissé pucelle,

Comme dit nôtre épouse?

                  Jean de Nivelle.

Hautefeuille est bien marié.

 

Meres, j’apelle d’abus,                                    bis

De tous vos soins superflus;       bis

Que vos filles soient pucelles                                                          [132]

Pourveu qu’on les croit telles;

Hautefeuille à bien épousé

                  Jean de Nivelle,

La fille aînée des Granceys.

 

Autre                                                           1689                                          [133]

Sur l’air des Triolets.

Ces Couplets sont de Danchet pour Madame de Cantleu (Madame des Marets)

 

Cedez vieux Châteaux de Roman,

Canteleu scait bien mieux nous plaire;

Tous les plaisirs y sont charmans;

Cedés vieux châteaux de Roman.

Une belle y fait plus d’amans

Qu’Armide autrefois n’en sceût faire.

Cedez vieux Chasteaux de Roman,

Canteleu scait bien mieux nous plaire.

 

Tous se rend à son air vainqueur,

Il exerce un pouvoir suprême,

Abbez, Curés, et Sénateurs,

Tout se rend à son air vainqueur;

Trop heureux en perdant son coeur

Qui ne perd pas la raison même.

Tout se rend à son air vainqueur

Il exerce un pouvoir suprême.

 

Sur la mort du Pape Innocent XI                 1689                        [134]

 

Peu pour lui, rien pour ses parens,

                  Tout pour les pauvres.

 

Il a ouvert le Jubilé, et les Portes du Paradis pour tout le monde, et il est mort ne les vouland point fermer.

 

Chanson                                                    1689                                          [135]

Sur l’air de Jean de vert.

Sur Monsieur de Montesquiou Comte d’Artagnan.

 

Le petit Comte d’Artagnan

En sage de l’Armeé,

Loin de s’entester follement

D’un peu de renommeé

En seureté dans un Moulin

Attaquoit Valcourt* d’aussi loin,               *ville

Que Jean de vert.

 

D’en sauver plus d’un ce moulin

Eut, dit on, l’avantage;

Du Vivier, Lizieux & Courtin,

Pleins du même courage

Daquin qui s’en fuyoit aussi,

S’y sauve, et croit être suivy

De Jean de vert.

 

Quittez donc Comte d’Artagnan

La pique et la rapiere;

Dessus les pas de vos parens,

Retournez en arriere,

Reprend le petit collet                                                                          [136]

Vous serez  en vray Prestolet

De Jean de vert.

Blâmer le Comte d’Artagnan,

C’est une médisance.

Quoi donc! le plus grand des talens,

N’est-ce pas la prudence?

La valeur dont on fait état,

N’est-ce pas la vertu d’un goujar

De Jean de vert?

 

L’habile Major d’Artagnan,

Excelle en manigance.

Il scait en manede de temps

Tirer la quitessence;

Mais il ne songe rien qu’a soy,

Et moins à l’interrest du Roy

Qu’à Jean de vert.

 

Un esprit adroit, fourbe et fin,

Est son noble partage;

Par là l’on arrive à sa fin

Mieux que par le courage.

Tous les braves sont indigens.

Ils laissent ferailler les gens.

De Jean de vert                                                                                                            [137]

 

Sa femme d’un farouche esprit (1)

La vielle Majoresse (2):

Veuve d’un Boucher de Poissi,

Se croit une Déesse:

Mais quand on la voit on la prend

Pour une sibille du tems

De Jean de vert.

 

La fausse valeur d’Artagnan

Voudroit tout entreprendre

Son esprit gâté de Roman

Ne songe qu’à pourfendre.

S’il fut né un siecle plutost,

Il auroit pû casser les os,

De Jean de vert.

 

(1)   Sa 1ere. femme. Il a epousé en 2de. N……l’Hermite.

(2)   Je crois qu’elle s’apelloit Visdelou qui lui donne de quoi achepter la charge de ……. dans le Regiment des Gardes. Elle est morte sans enfans.

 

Autre                                                           1689                                          [138]

Sur l’air de Joconde.

Sur le Parlement.

 

Amy garde toy de plaider;

L’injustice est trop grande.

Résous toy plûtôt d’accorder

Ce que l’on te demande;

Le Palais est plein de brigans;

Sauve toy de leurs pattes,

Et la Grand Chambre en ce tems

Fourniroit vingt Pirates.

 

Chanson                                                    1689                                          [139]

Sur l’air: Ouy je le dis et le repete.

Sur Monsieur le Mareschal de Duras.

 

Quand Duras ce grand Capitaine

Galopant a perte d’haleine,

Vers Heidelberg tourna ses pas;

Quoique l’on en ait voulu dire,

Pour combattre il n’alloit pas;

Il alloit pour s’y faire escrire.

 

Année 1690                          [141]

 

Sur Monsieur de Guerchois

par Monsieur Greard    

 

                  Vous dont la sublime éloquence

                  A consacré le nom à la postérité.

Pourquoi dans le désir d’une autre dignité

                  Vous condamnés-vous au silence?

                  De l’employ qui vous a tenté,

Je connois lagrandeur, l’éclat, l’autorité;

                  Mais enfin vous avez beau faire

                  Pour vous y signaler;

Vous n’acquererés jamais tant d’honneur à vous taire

                  Que vous en eûtes a parler.

 

Chanson                                                    1690                                          [145]

Sur l’air de Jean de vert.

 

Monsieur le premier Président,                                   Harlay.

Monsieur le Doyens frere,

Et Monsieur de la Faluere.

Sont trois aussi sotes gens

Qu’il y en avoit

Du tems de Jean de vert.

 

Chanson                                                    1690                                          [147]

Sur l’air de Charivary.

Sur Monsieur Richelet (1).

 

Ta servante est donc ta femme,

Vieux Richelet?

Mais ta soeur bien plus infame,

Longtemps a fait,

Avec le Boureau de Paris,

                  Charivary.

 

(1)   Avocat de Parlement de l’Academie Françoise et auteur d’un Dictionnaire pour la langue françoise.

 

Chanson                                                    1690                                          [149]

Sur l’air de l’Eschelle du Temple.

Aprés la Bataille de Staffarde.

 

Le Duc de Savoye au Combat,

S’en est fui devant Catinat;

Les Ramoneurs inblanchissables,

Qui lui rendoient fort leurs devoirs,

Ne se sont pas trouvé si Diables

Comme nos gens les trouvoient noirs.

 

Catinat dit à nos Soldats

Mes Enfans ne les craignez pas;

Pour dissiper cette assembleé,

Faites dessus eux plusieurs foid

Dévotement avec l’éspeé

Bon nombre de signes de croix.

 

Les gens du Duc mal asseurez,

Se voyant aussi conjurez,

Lui disoient en raison probable

Qu’il faisoit chaud en cet endroit,

En s’enfuyant/ Et s’enfuyoient à tous les Diables

Apres la/ Suivant sa chaise qui couroit.

 

Les Cavaliers & leurs Chevaux,                                                                         [150]

Pour n’estre pris par Diabloteaux,

Coururent en grande diligence;

Qu’on dit en leur langue, presto,

De peur de trouver même chance

Se débarbouiller dans le Pô.

 

Chanson                                                    1690                                          [153]

Sur l’air. Reveillez vous belle endormie.

A Madame de Lamoignon, par Monsieur de Coulanges.

 

Prenez bien garde à Thiessonville

Le drôle guigne Soligny;

Il est fort grand bruit dans la ville

Que l’oiseau veut faire son nid.

 

Avertissez la Présidente

Qu’elle détourne ce malheur;

Car pour devenir confidente,

Elle a trop d’esprit, et d’honneur.

 

Il servit cruel à son âge,

Qu’estant aimable, et sans deffauts.

Elle fit son aprentissage

Pour garder déja les manteaux.

 

Autre                                                           1690                                          [154]

Sur l’air des Fichus.

 

Tourville vous a joué d’un tour

Comme le Gobin Luxembourg;

                  L’Arriéreban aussi

Y va d’un coeur réjouy;

Outre plus Messieurs de Noailles

Commandans sur terre et sur mer,

Vous ont battu canaille,

Et montré leur coeur guerrier.

 

A Monsieur le Duc de Luxembourg           1690                        [155]

Sur la Bataille de Fleurus.

 

Tu viens de combattre en soldat,

Tu viens de vaincre en capitaine;

Luxembourg, tu fais plus dans ce fameux combat,

Tu consoles Louis de la mort de Turenne.

 

Ce qu’il a fait est admirable,

Et chacun se dit tour a tour;

Tout ce qu’on a crû des héros de la Fable.

Nous le voyons dans Luxembourg.

 

Chanson                                                    1690                                          [157]

Sur l’air des Triolets.

Dialogue entre le Pere Bouhours & un prétendu Janseniste, sur le Péché Philosophique en 1690.

 

                  Bouhours.

Les Jesuites de bonne foy,

Vont droit en toutes leurs affaires;

Leur exemple tient lieu de Loy;

Les Jesuites de bonne foy

Ne tiennent point leur quant à moy.

Ils sont deux, affables, et sinceres.

 

                  Janseniste.

Est-ce donc là cette candeur

Et cette anciennce modestie?

Fut il plus impudent menteur?

Est-ce etc.

Quelle abominable douceur!

Quelle execrable modestie!

 

                  Bouhours

Nos Peres ont ils rien écrit

Qui puisse autoriser le crime?

Ont ils rien fait? ont ils rien dit?

Nos Peres ont ils rien écrit.                                                               [158]

Leur morale sans contredit,

N’a que de tres saintes maximes.

 

                  Janseniste.

Pere Bauny l’Agneau de Dieu,

Pour ostez les péchez du monde,

De la morale à fait un jeu.

Pere etc.

De cet auteur (1) digne du feu,

Vient l’erreur en rimes fécondes.

 

                  Bouhours.

Un Régent pour passer le tems,

Dans quelques heures ennuyeuses,

Amusoit quelques jeunes gens.

Un etc.

Dévelopoit à contretemps

Quelques questions curieuses.

 

                  Janseniste.

De ce Régent le sentiment

Est celui de la Comagnie,

Quoique vous blamiez fortement

De ce etc.

Vous rougissez presentement

Qu’on connoisse vôtre infamie.

 

(1)   Il a fait une somme des péchez, dans laquelle en Casuiste facile, il permet beaucoup de chose tres condamnables: on avoit de lui a cause qu’il delivroit de la maladie des scrupules: Ecce agnus Dei qui tollis peccata mundi.

 

Bouhours.                                                                                             [159]

Cela s’est passé dans un coin,

Dans un lieu peu considérable

Dans une Province fort loin.

Cela etc.

Certes il êtoit bien besoin

D’en faire un cancan effroyable.

 

Janseniste.

Une ville de Parlement,

Est donc chez vous une bicoque?

Vous traittez agréablement

Une etc.

Est-ce parler sincerement?

Du public ainsi l’on se moque.

 

Bouhours.

Le sujet de tout ce grand bruit

N’etoit qu’une faible étincelle,

Qui n’auroit jamais rien produit.

Le sujet etc.

Mais vôtre malice grossit

Une légere bagatelle.

 

Janseniste.

De Dijon jusqu’à Louvain

Cette étincelle êtoit voleé,

Le feu prenoit deja grand train

De Dijon etc.

Sans qu’une charitable main.

De l’eteindre se fut meslée.                                                             [160]

 

Bouhours.

Est-ce charité que cela,

Que noiricir des gens de mérite?

Au lieu de mettre le hola?

Est-ce etc.

C’est pain béni à ces gens là

De calomnier un Jesuitte.

 

Bouhours.

Si quelqu’un de nous est l’auteur

De ce Péché Philosophique;

Certes nous en avons horreur.

Si etc.

Nous le détestons de bon coeur.

L’aveu n’est il pas authentique.

 

Janseniste.

Hé! vous parlez de charité,

Vous qui ne l’avez point dans l’ame:

Vous corrompez la vérité.

Hé! etc.

Pour terrasser l’iniquité,

Un juste zele nous enflame.

 

Janseniste.

Le beau doute Pere Bouhours,

Qu’en vôtre écrit on vous voit mettre.

D’où peuvent n’aitre ces Détours?

Le beau etc.

De Paschal sans tant de discours,                                                [161]

Lisez la quatrîeme Lettre.

 

Bouhours.

Jansenistes rétractez vous,

Et que la chose soit publique;

Demandez pardon à genoux.

Jansenistes etc.

La grace est accordez à tous,

Autrement Dieu seroit inique.

 

Janseniste.

Le Pape n’entendit donc rien

A l’erreur qu’il a fulmineé,

Ne parlant que des gens de bien?

Les etc.

A l’Iroquois comme au Chrestien

La même grace est donc donneé?

 

Bouhours.

Jansenistes ne parlez plus,

Suivez l’exemple qu’on vous donne,

Des cinq points par vous sôutenus,

Jansenistes etc.

Condamnez de Jansenius.

Et les écrits et la personne.

 

Bouhours.

Cet évesque herétique en vain

A parlé trop fort sur la grace.

Il a suivy saint Augustin.                                                                      [162]

Cet etc.

Abjurez-le comme Calvin

Où l’on fera sur vous main baisse.

 

Janseniste.

A Rome un fourbe se trouvant

Au bout de toute sa malice,

Lorsqu’il veut prendre un innocent.

A Rome etc.

Va le dénoncer a l’instant

Aux bons Peres du Saint Office.

 

Janseniste.

N’est-ce pas ce qu’on voit chez vous,

Sitost qu’un homme vous attriste,

Il doit succomber sous vos coups?

N’est-ce pas etc.

Vous criez partout en courroux

A l’hérétique, au Janseniste.

 

Janseniste.

Ah! mon bon pere croyez moi,

Rentrez dans la galanterie;

C’est là vôtre plus bel employ.

Ah! etc.

Et laissez là de bonne foy,

Ce fatras de Philosophie.

 

Janseniste.

Aussi bien n’entendez vous pas

Ces subtiles Scholastiques,                                                              [163]

Vous n’en fietes jamais grand cas,

Aussi etc.

Vous aimez bien mieux faire amas

De ces fleurettes poëtiques.

 

Janseniste.

Qu’Arnault lise Saint Augustin,

Que mille fois il le commente,

Il vous faut Buffi-Rabutin.

Qu’Arnault etc.

Trouve-t’on dans ce vieux latin

Cette politesse charmante?

 

Chanson                                                    1690                                          [164]

Sur l’air des Triolets.

Après le siege de Mayence.

 

Duras dit fiez vous à moy

Nous allons secourir Mayence,

Portant la terreur avec soy,/ Je porterai partout l’effroy

Duras dit fiez vous à moy;

Mais si jamais plus on le croit

Avec toutes ses asseurances,

Nous courrons risque dans deux mois

De nous en retourner en France.

 

Chanson                                                    1690                                          [165]

Sur l’air…..

Sur Monsier de Sanlecque Chanoine régulier de Sainte Genevieve, Prieur de Garnay, nommé à l’évesché de Bethléem en 1701. et mort en 1714. agé de 64.

 

Permettez, mon Reverend Pere,

Qu’un malheureux Prieur Curé,

Vous dépeine icy sa misere,

C’est a dire son Prieuré.

 

Ce Bénefice dont la Dixme

Vaut bien cent éscus d’argent clair;

Est dans un si profond abisme

Que J’entends tout le bruit de l’Enfers.

 

De là j’ay bien ouy des Ames

De Hollandois, et de Flamans                      Bataille de Fleurus.

Qui se calbutoient dans les flames.

Prés des fourneaux pleins d’allemans.

 

Dans mon église l’on patrouille

Si l’on ne prend bien garde à soy;

Et le Crapaud et la Grenouille

Chante quelque fois avec moy.                                                                         [166]

 

On ne voit là que des mazures,

Cinq cent gueux couverts de haillons;

Point de Dévote a Confiteor,

Point de pénitente à bouillon.

 

Chanson                                                    1690                                          [167]

Sur l’air……..

Monsieur l’Abbé de Sanlecque ne voulant pas lire avec des Lunettes un papier que trois jeunes Dames lui presenterent à la fin d’un repas oùil avoit bien bû, contrefit l’ivrogne pour s’en deffendre, et se tira d’affaire par la chanson suivante.

 

Ai je donc changé de Climat?

Pourquoi ces tenebres epaisses?

Ah! j'ay trop admiré l’eclat.

De la beauté des trois Déesses.

Quand on devient chauve souris,

On n’a plus les yeux de Paris.

 

Autre                                                           1690                                          [168]

Sur l’air……

Impromptu fait par le même un moment aprés

 

Une Uranie

Quand elle plaît,

Elle paroist

Un grand génie.

En est on fou?

C’est une muze.

En est on sou?

C’est une buze.

 

Chanson                                                    1690                                          [169]

Sur l’air….

Sur le mariage de Monsieur et Madame la Marquise de la Salle.

 

Plus d’une cabale,

Pour plus d’une rivale,

En vain à la Salle,

Inspiroit de l’amour.

La plus charmante,

Est triomphante;

Qu’elle nous chante

Cent fois le jour

J’aime le plus beau de la cour.

 

Mais que dit on d’elle?

On dit, elle est trop belle,

Pour une mortelle,

Elle a de trop beaux yeux.

Dés qu’on l’admire,

C’est un martire,

Chacun soupire,

Mesme les Dieux.

Moins vous la voyés, c’est tant mieux.

 

Autre                                                           1690                                          [170]

Sur l’air du nouveau Marly. Etreine à Madame la Marquise de la Salle.

 

Un grand Astrologue du tems,

Belle, a compté tous les instans;

Il trouve en toy deux destinées;

Ta beauté, même sas Atours

Plein soixante dix anneés;

Mais ton esprit plaira toujours.

 

Chanson                                                    1690                                          [171]

Sur l’air….

Sur les Coëffures.

 

La Battant l’oeil n’est plus joly,

                  La mode en est passée;

Il est bon quand on sort du lit;  

                  Mais quand on est pareé,

C’est la Coëffure à beau Tignon

                  Qui sert aux Dames de bouchon.

 

Sans la Coëffure à beau Tignon,

                  Peut on faire visite?

De nos Dames le beau Chignon

                  Fait le plus grand mérite,

Et sans le Tignon si charmant,

                  On ne peut plus faire d’amant.

 

Autre                                                           1690                                          [172]

Sur l’air des Lampons.

Pour le Roy d’Angleterre.

 

A quoi bon me renvoyer,                bis

En Irlande guerroyer?                      bis

Je ne veux plus me deffendre.

Je cede tout à mon Gendre;

                  Lampons, lampons.

                  Camarades lampons.

 

De mon Trosne renversé,              bis

Et d’Angleterre chassé;                                    bis

Je vais vivre en asseurance,

Dans le Royaume de France.

                  Lampons etc.

 

Quand le Roy Jacques partit,      bis

Pour s’en revenir à Paris;

Il dit à Monsieur son Gendre,

Ayez bien soin de l’Irlande.

                  Lampons etc.

 

Chanson                                                    1690                                          [173]

Sur l’air: Autrefois je chantois Achille

Sur Monsieur de Pontchartrain

 

La justice que l’on doit rendre

N’eut pas fait choix de Pontchartrain;

Mais à présent qu’elle est a vendre,

Peut elle être en meilleure main?

 

Autre                                                           1690                                          [174]

Sur l’air. Vous m’entendez bien.

Sur les Filles de Madame.

 

Toutes les filles de chez vous

Ne trouveront jamais d’époux;

Elles n’ont croix, ny pille,

                  Hé bien!

Et le reste a fait gille,

Vous m’entendés bien.

 

Chanson                                                    1690                                          [175]

Sur l’air du Bransle de Metz.

Au sujet de la Bataille de Fleurus.

 

Valdeck se bat a merveille,

Il a battu Luxembourg,

Et beaucoup mieux qu’a Valcourt;            ville

Les François ont sur l’Oreille.

On dit que ce Général

Pour en porter la nouvelle;

On dit que ce Général

Pensa crever son Cheval.

 

Il a passé par Nivelle,

Et ne s’est point arresté;

Il arriva tout croté

A la porte de Bruxelles,

Quoi! ne connoissés vous pas,

Dit il, à la sentinelle,

Quoi! ne connoisséz vous pas

Le Général des Estats?

 

J’ay remporté la victoire

J’ay battu les énnemis,

Avec vous mes chers amis

J’en viens partager la gloire.                                                            [176]

Ah! que vôtre Gouverneur,

Pour peu qu’il veuille croire.

Ah! que vôtre Gouverneur

Me recevra de bonne coeur.

 

Pour achever la défaite,

J’ay laissé tout mon canon,

Toute ma munition,

Mes Timballes, et mes Trompettes,

Mes Estendars & drapeaux,

Tant la victoire est complette;

Mes Estendars & Drapeaux

Et bon nombre de Chapeaux/Chevaux.

 

Du détail de la Bataille,

Je ne vous en diray rien,

Puisque je me porte bien.

Je reponds de nos murailles;

J’ay laissé là tout mon train

Pour chasser cette Canaille.

J’ay laissé là tout mon train;

Mes enfans ne craignez rien.

 

J’ay partagé mon Armeé.

Un tiers est sous Charleroy,        ville

Et l’autre, à ce que je crois,                                                               [177]

Me suit à grandes journées.

Les plus braves de mes gens

Sont encore dans la meslée.

Les plus braves de mes gens

Aux François montrent les dents.

 

Autre                                                           1690                                          [178]

Sur le même Air.

 

Valdeck ce foudre de guerre,

Dont on vante les Exploits;

S’est sauvé plus d’une fois

De devant Monsieur d’Humieres;

Mais Monsieur de Luxembourg

Ayant pris en main l’affaire;

Mais Monsieur de Luxembourg.

L’a bien vangé de Valcourt           ville.

 

Les Dames les plus galantes

De Bruxelles, de Charleroy,

L’attendoient en bel arroy

Avec Lauriers plus de trente:

Mais son malheureux succés,

Les trompa dans leur attente;

Mais son malheureux succés

Les changea tous en Ciprés.

 

Satire                                                          1690                                          [179]

Contre les petits Augustins

 

Les petits Augustins du fauxbourg Saint Germain,

Ont fait faire chezeux un concert tout divin.

On scait qu’on y chanta Tenebres en Musique;

Mais le détail en est extremement comique:

L’on trouvoit affiché à tous coins de Paris

En faveur de devots et curieux esprits.

Ames qui cherchez Dieu dans la belle harmonie,

Vous le rencontrerez dans nôtre simphonie,

Accourrez promptement, c’est l’illustre Opera

Avec les instrumens qui la composera;

Comme on êtoit pour lors dans la semaine sainte

Où l’Ame du Chrestien est de douleur atteinte,

Et quitte l’Opéra de craine du péché,

On tient qu’ils en ont eu meilleur marché,

Le service fut fait avec mélodie,

On n’entroit qu’en payant comme à la Comédie,

Ils avoient aposté dix ou douze fripons,

Et sept ou huit Archers ramassés sur les ponts.

La porte de l’église êtoit demie barreé,

Et fort severement en deffendoient l’entreé.

Une femme êtoit là qui recevoit l’Argent,

Et qui faisoit payer le riche et l’indigent,

Il est vrai qu’on êtoit assés bien à son aise

Car pour ses trente sols on avoit une chaise.                       [180]

Il y vint un Bourgeois qui n’avoit pas le sol,

Et qui probablement se fut tenu de bout;

Le Chef qui commandoit cette noble brigade,

Luy dit fort rudement, arreste camarade;

Ça donne trente sols pour entrer en ce lieu.

Et qui ne les a pas, ne priera donc pas Dieu?

Dit il, mais il jura le brave par la ventre,

Nous sommes sans quartier, qu’aucun sans payer n’entre

Car quiconque entrera sans payer trente sols,

Il aura sur le champ plus de dix mille coups.

Aprés voulut passer un bon et pauvre Prestre

Mais un Moine parut, et dit par la fenestre,

Monsieur, cherchez ailleurs du divertissement,

C’est tout dire en un mot, nous voulons de l’argent.

Il survint un gascon de ces gens sans ressource.

Qui l’épeé à la main plus viste qu’a la bourse,

Bous êtes des Coquins, dit il, je passeray,

Quiconque ose branler, mort, je l’escharperay.

Ces généreux soldats dirent de bonne grace,

Monsieur, est galant homme, il est juste qu’il passe.

Cadedis repond t’il, bous etes gens d’honneur,

Bonjour Monsieur je suis fort vôtre serviteur

Le Moine vit cela qui crevoit dans son ame;

Il les querella fort aussi bien que la femme.

Parût un Advocat fameux à ce qu’on dit;

Mais l’éloquence là n’avoit point de crédit;

Il avoit avec lui deux jeunes damoiselles,

Que je connois pour être aussi bonnes que belles.

Venez vous, lui dit on, pour entendre chanter?

Il faut donc vôtre argent bien et deument compter.

C’est donc, dit il pour trois, à trente sols par teste,

Quatre franes et demi, je ne suis pas si beste,

Il vaut mieux retourner chanter à la Maison.

Un Marchand de bon vin nous fera mieux raison;

Mercy Dieu voyons voir dit la grosse harangere.

Qui vint foudre sur eux, fortement en colere,

Malgré vous et vos dents j’entreray dans ce lieu.

Et qu’est-ce, pourquoi non? c'est la Maison de Dieu,

Et généreusement força le corps de garde,

Et passe à la faveur des coups de hallebardes.

Le Corporal cria, mes Peres au secours.

Venez ou cette femme entrera malgré nous.

Un gros Moine accourut qui la pousse et la tire,

Et la prend aux Cheveux, et sa coëffe déchire

Elle se deffendit le nommant gros cochon,

Luy tira par morceaux robe et coqueluchon,

Et jurant jour de Dieu, somme nous à la guerre?

Lui donne un coup de poing, et le jetta par terre.

Je vous laisse a penser s’il ne fut pas moqué,

Voila, dit on, voila le Moine défroqué;

Ce gros Moine a perdu son froc à la Bataille,

Pas un là, n’est pour lui, tout le monde le raille,                                  [182]

Un Novice le vit qui saisi de frayeur,

Cria l’on a tué nôtre Pere Prieur.

On sonne le toccin, tout le Couvent s’assemble,

Ils s’arment de bâtons et viennent tous ensemble,

On eut dit à les voir des Dragons furieux

Prest a bouleverser la terre et les Cieux.

Ah! cette pauvre femme eût êté déconfite:

Mais alors par bonheur elle avoir pris la fuitte.

Ces Moines ne pensant qu’a livrer des Combats,

Le peuple profita de cet embarras,

L’un assés doucement aprés l’autre s’ecoulle,

Et cinq cens par aprés passerent à la foulle.

Ils doublerent les gardes, et dirent d’un ton fier

Que l’on fasse surtout main basse et sans quartier

On chargea rudement et Prestre et femme grosse,

Gare, gare, dit on, il arrive un Carosse,

Il sort un Partisan, un celebre voleur.

Aussi riche en argent qu’il est pauvre en honneur,

Il tenoit par la main une assés belle femme,

Et qui dedans Paris passe pour une infame.

Cela n’empesche pas en payant l’écu blan

Un Moine ouvre la porte et passe librement;

Sur la fin de la piece et Bourgeois et grisettes,

Tous entroient pour cinq sols, comme aux Marionetes,

Vengez vous, juste Ciel! Vous avez des Carreaux.

Ecrasez propmptement ces méchans animeaux.                                [183]

Ah! mon Dieu quel désordre a présent dans l’église,

Sous le masque du bien le vice se déguise.

Ah! jamais un Ministre a-t’il pris un teston

Pour permettre d’aller au Presche à Charenton?

N’est-ce pas ce veau d’or que ces Moines honorent?

Ce n’est pas Jesus Christ, c’est la Croix qu’ils adorent.

Ces Moines en effet sont pires que Judas;

Car s’il prit de l’argent, il ne le garda pas.

Il fut le raporter avec l’ame contrite;

Mais ces Moines en font bien bouillir leur marmite,

Cela leur a fait tort, et l’on s’en paint et l’on dit,

Qu’a present dans Paris ils n’ont plus de crédit,

Que le frere questeur quoiqu’il dise, et qu’il fasse

Retourne au Couvent et flacon et bessasse,

Toi qui auparavant donnoit un pain entier,

Qui n’en donne a présent qu’un tres petit quartier,

La boëte du questeur êtoit tous les jours pleine,

Elle n’est qu’a demi au bout de la semaine.

Tel donnoit du vin pur, du vieux ou du nouveau,

Quile mesle a présent avec les deux tiers d’eau,

On lui ferme la porte, et pour lors il persiste;

On lui dit rudement, le bon Dieu vous assiste.

Allés frere questeur diner à l’Opera,

Nous n’irons plus chez vous quand on y chantera,

Chacun voit sans pitié ces misérables Moines

Que l’on a veu jadis plus gras que des Chanoines.

Ils demeurent d’accord en se voyant à bout.                        [184]

Pour vouloir trop gagner, que souvent l’on perd tout.

 

Chanson                                                    1690                                          [185]

Sur l’air: C’est la pure vérité.

 

Le Pontchartrain, se dit on,

Voit la femme du Gascon.             le Duc de Roquelaure.

Ce n’est qu’une médisance;

Elle pourra escarteler

De Phelypeaux et de France       Louis XIV.

C’est la pure vérité.

 

Chanson                                                    1690                                          [186]

Sur l’air: Sommes nous pas trop heureux.

Sur Jacques II. Roy d’Angleterre.

 

Bon Dieu! calmés ce grand vent

Qui semblant toujours contraire

Pour aller en Angleterre,

Retarde l’embarquement;

Jacques veut chasser son gendre

Avec de braves soldats;

Mais helas! s'il scait descendre,

Ce n’est que du Throsne en bas.

 

Chanson                                                    1690                                          [187]

Sur l’air de Lampon.

Sur le Duc de Savoye aprés la Bataille de Staffarde.

 

Le Duc de Savoye est pris (1),

On l’ameine à Paris;

Mon Dieu que nos Chemineés.

Vont être bien ramoneés!

Lampons, lampons,

Camarades lampons.

 

S’il n’est pas bon Cavalier,

Il est du moins bon courier;

Car on la veu dans la plaine

Courir a perte d’haleine,

Lampon etc.

 

On m’a mandé de Paris,

Que Catinat m’a tout pris;

Il a menti s’il s’en vante;

Voila ma Chaise roulante.

Lampon etc.

 

Nôtre pauvre Prince impuissant

 

(1)   Il fut poursuivie par un Cornette de Cavalerie, qui pensa le prendre prisonnier.

 

Devient fou faute d’argent                                               [188]

Ne pouvant continuer la guerre

Contre le Roy son beau pere.

Lampon etc.

 

Tous les gros Milords Anglois

Lui disant tout d’une voix.

Reposez faite un bon somme;

Car pour vous point de Royaume.

Lampon etc.

 

L’étoille du grand Louis,

Fait perir ses ennemis;

Presque nul ne s’en echape

Non pas même jusqu’au Pape.

Lampon etc.

 

Elle abregea les vieux ans

De ce matin d’Innocent;                                  XI.

Et sur le chemin de Vienne

Surprit le Duc de Lorraine,

Lampon etc.

 

Le vieux Schomberd en sabré

Et son parti délabré

L’on confirme la nouvelle,

Que Guillaume en a dans l’aisle;                                                   [189]

Lampon etc.

 

Il n’est pas un Electeur,

Qui ne meure de frayeur,

Et sa Majeste Lipüe,                         Leopol.

Craint même qu’on ne la tüe.

Lampon etc.

 

Que feriez vous pauvres gens,

Si vos efforts impuissans,

Ne servent à nostre France

Que pour croistre sa puissance?

Lampon etc.

 

On verra les Hollandois

Bientost réduit aux abois,

Et la Reine Guillemette,

Chercher la boëte à Perrette,

Lampon etc.

 

J’ay pitié du Savoyard;

Car il sera tost ou tard,

Pour remplir sa destinée

Ramoneur de chemineé.

Lampon etc.

 

Autre                                                           1690                                          [190]

Sur l’air: Lair la lair lanlair.

 

Chacun s’etonne avec raison,

De l’amour de la Maintenon;

Les Dames ne scavent qu’en croire.

Laire la, laire lan laire;

Laire la, laire lan la.

 

Que diroit ce petit Bossu (1),

S’il vivoit de ce voit cocu,

Par le plus grand Roy de la Terre?             le Roy Louis XIV.

Laire etc.

 

Il diroit que ce conquerant,

A tant pris qu’a la fin il prend,

Le reste de toute la terre.

Laire etc.

 

(1)   Scaron cu de jatte êtoit né fait comme un autre. Dans un froid excessif lui 4e. firent une débauche et s’en revinre nuds chez eux e. en moururent, Scaron en devint cu de jate. J’ay veu ailleurs que c’estoit pour avoir pris du mercure pour le guerir de la verolle.

 

Mademoiselle Scudery                   1690                                          [191]

sur des Preaux.

 

A l’aspect d’un bâton, Boileau tremblant, et blême,

Cria, tout beau Messieurs, ne précipités rien;

Quoi! sans confession assommer un Chrestien,

N’y lui donner le tems de songer à lui même.

 

Sur Boileau                            1690                                          [192]

 

Boileau ce rimeur satirique,

Ayant senti la vertu du bâton,

                  Demeura sans replique.

Ce remede quand on l’aplique,

Range la rime à la raison.

 

Sur Monsieur Santeuil                     1690                                          [193]

Poëte.

 

Avoir de quel air effroyable,

Roulantles yeux se tordant les mains,

Santeuil lit ses Cantiques vains.

Diroit on pas que c’est le Diable

Que Dieu force à louer ses Saints?

 

Chanson                                                    1690                                          [194]

Sue l’air Jardinier ne vois tu pas.

Sur les Jesuittes.

 

Scavez vous bien qui fait mal,

Sans mesures, et sans bornes?

C’est, je le diray tout net,

Quiconque porte au bonet

Trois cornes, trois cornes, trois cornes.

 

Chanson                                                    1690                                          [195]

Sur l’air des Triolets.

Aprés la Bataille de Fleurus par Mademoiselle Ithier.

 

Retirez vous pauvre Valdeck,

Vous n’avez plus rien a pretendre.

Ce Combat est un rude éschec,

Retirez vous pauvre Valdeck;

Allez chercher quelque rebec,

Et vous consolez à l’entendre.

Retirez vous pauvre Valdeck.

Vous n’avez plus rien a pretendre.

 

Luxembourg vous a confondu,

Vôtre malheur est sans ressource;

Lorsque vous faisiez l’entendu,

Luxembourg vous a confondu.

Pour vous tout espoir est perdu;

Eussiez vous de Cresus la bourse.

Luxembourg vous a confondu

Vôtre malheur est sans ressource.

 

Louis le plus grand de nos Rois,

Vous a fait sentir sa colere;

On reconnoit à ses éxploits

Louis le plus grand de nos Rois.                                                                        [196]

Voyez malheureux Hollandois,

Ce que c’est que de lui déplaire:

Louis le plus grand de nos Rois

Vous a fait sentir sa colere.

 

Vous feriez mieux pauvres Bourgeois,

Qui n’estes pas gens de rapiere

De vous retirer chez vous bien coys,

Vous ferez mieux pauvres Bourgeois;

Ne quittez plus une autre fois

Vos Fromages ny vôtre Bierre.

Vous ferez mieux pauvres Bourgeois

Qui n’estes pas gens de rapiere.

 

Autre                                                           1690                                          [197]

Sur l’air de Jean de vert.

 

Sur la Sambre, et non sur le Rhin.

Fut blessé Senneterre,                                     le Comte de Brinon Capitaine aux Gardes

Qui aprés avoir pris du vin,

Dit, grace au Dieu du verre;

Je me sens revenir le coeur,

Et je crois que je ferois peur

                  A Jean de vert.

 

Autre                                                           1690                                          [198]

Sur l’air de Jean de Nivelle ou Mordienne de vous.

Aprés la Bataille de Fleurus.

 

Te voila défait Valdek

                  Sans cervelle;

Luxembourg te fait vrai jean de nivelle;

Comment pourrez vous Valdek?

                  Comment pourrez vous

                  Réparez ce coup?

 

Lorsque Guillemot

                  Scaura la nouvelle

Il sera plus sot que jean de nivelle;

Comment pourrez vous Valdek?

                  Comment pourrez vous,

                  Réparez ce coup?

 

Chanson                                                    1690                                          [199]

Sur l’air: Reveillez vous belle endormie.

de Madame la Duchesse, envoyeé à Monsieur le Prince pour le jour de sa feste.

 

Dans ce grand jour de vôtre feste,

Chacun vous offre son present.

Le mien qui est le moins honneste,

Peut être aura son agrément.

 

Ce n’est qu’une Chanson badine

Que je pretends vous presenter;

La matiére en est noble et fine,

Préparez vous à la gouter.

 

Cette noble fine matiére

Sur quoi cette Chanson s’etend;

C’est celle qui sort du derriere,

Et qui d’abord au nez vous prend.

 

D’offrir des fleurs, c’est la coutume;

Mais si l’on fait cas de l’odeur,

Un bel et bon étron qui fume

Répand au coeur plus de senteur.

 

Ce Compagnon de Saint Antoine

Qui se vient presenter à vous,                                                         [200]

N’est devenu gras comme un Moine,

Qu’avec de si friand ragoust.

 

Cette délicate pasture,

Dont il remplit son éstomach,

Luy tenant lieu de nourriture

Vous pourra servir de tabac.

 

J’avois dessein de vous escrire,

Des Couplets un peu moins puans.

Si vous n’osez plus haut les lire,

Maschaunez-les entre vos dents.

 

Que pouvez vous penser ou dire

En lisant ce tas de rebus;

Si vous dites que c’est pour rire,

Vous aurez mis le nez dessus.

 

Si le mon d’Estron effarouche,

Pour ceux qui l’entendront chanter,

Quand il vous viendra dans la bouche,

Vous n’aurez plus qu’a l’avaler.

 

Mais ne faites point de mistere,

C’est un mets des plus succulens;

La merde ne doit pas déplaire,                                                                         [201]

Chacun la fait avec les dents.

 

N’ayez aucune répugnance,

Ce présent n’est pas des plus grans;

Mais vous voyez qu’en récompense,

Il ne manque pas de bon sens.

 

N’allez pas seul par gourmandise,

Taster de ce mets délicieux;

A vos amis chacun leur prise,

Ce ne sera pas trop pour eux.

 

Chanson                                                    1690                                          [202]

Sur l’air: des Trompettes.

Impromptus faits à Table, à la santé du Roy, aprés la Bataille de Fleurus.

 

Nous voila couvert de gloire,

Que nos coeurs soient rejoüis;

Amis ne cessez de boire,

A la santé de Louis.

Ta la la la etc.

 

Luxembourg a fait merveille,

A Valdeck il est fatal;

Ça vuidons cette Bouteille,

Pour ce brave Général.

Ta la la la etc.

 

On void sur mer et sur Terre,

Triompher nôtre grand Roy;

Tout ceux qui lui font la guerre,

Seront soûmis à sa Loix. Ta etc.

 

Pour faire honneur à Tourville,

Prenons tous le verre en main;

Il faut que toute la ville

Boive à ce héros malin. Ta etc.

 

Chanson                                                    1690                                          [203]

Sur l’air: Morguienne de vous.

Sur la Bataille de Fleurus en 1690.

 

On vous a défait

Valdek sans cervelle;

Luxembourg a fait

Un grand Jean de Nivelle.

Morguienne de vous,

Quel Prince êtes vous?

 

Quand Dom Guillemot

En scaura la nouvelle,

Il sera plus sot

Que Jean de Nivelle.

Morguienne etc.

 

Quoi! point de douceur?

Et toujours cruelle?

Avec vôtre honneur;

Vous nous la baillés belle.

Morguienne etc.

 

Autre                                                           1690                                          [204]

Sur l’air….

Imitons Baptiste (1) et Chaussons (2),

                  Point de Religion

                  Que celle des flacons.

N’aimons que les garçons

                  Sans Parens,

Crédit aux Marchans,

De l’Argent comptant,

Le v… bien bandant,

                  Sans émploy;

                  N’obeir qu’a soi,

                  C’est être ma foy,

Plus heureux que le Roy.

 

(1)   Monsieur Lully.

(2)   Monsieur Chausson fut brûlé en Greve pour sodomie en 16..

 

Autre                                                           1690                                          [205]

Sur l’air des Rochellois.

 

Bavieres fuit nôtre Dauphin,

Catinat fait trembler Thurin;

Noailles en vainqueur fait la guerre,

Tourville sur mer gagne un combat.

Luxembourg en gagne un sur terre,

Et Lauzun fait échec et mat.

 

Autre                                                           1690                                          [206]

Sur l’air: Scavez vous faire la difference.

 

Louvois (1) tu paroît a ta mine

Avoir étudié la Marine.

Colbert (2) eut le même destin;

Mais en Enfer il se console,

D’avoir perdu tant de Catin,

Te voyant perdre ta boussole.

 

(1)   Monsieur de Louvois desirant succeder a l’Intender. de la Marine, se fit instruire peu de tems avant la mort de Monsieur de Seignelay.

(2)   Monsieur Colbert dans la veu de devenir Chancelier, et de succeder à Monsieur le Tellier avoit apris le latin quelques anneés avant sa mort, et se fit recevoir Avocat.

 

Chanson                                                    1690                                          [207]

Sur l’air. Il fait tout ce qu’il deffend.

Sur l’Opéra d’Orpheé, la Musique est de Monsier de Lully, et les parolles de Monsieur de Boulay.

 

Ah! que ces fades sornettes,

Dans l’Opéra que je vois!

Orphée attiroit les bestes,

Il attiroit jusqu’aux bois,

Mais ce misérable Orpheé

N’attire que la hueé,

Et ses plus charmans effets,

Sont d’attirer les sifflets.

 

Francine, dit on, fait faire

Tout ce tintamare là,

Pour empescher son beaufrere ,

De réüssir à cela.

Par ce jeu le sot Francine,

Travaille pour sa cuisine,

Et pourroit bien voir enfin

Qu’un sifflet n’est pas du pain.

 

S’il produit toujours sa vache,

La sourdine Barbereau;

Si la des Matins ne cache                                                                    [208]

Son êtroit, et long museau;

Si le Marquis la Gambade,

Est toujours son camarade.

Si Colasse fait des Airs,

Tout s’en ira de travers.

 

Autre                                                           1690                                          [209]

Sur l’air: Il a battu son petit frere.

Sur le Prince d’Orange.

 

Est il mort le Prince d’Orange?

Chaque jour la nouvelle change

Quand l’un dit ouy, l’autre dit non;

S’il vit ce qui me met en peine;

C’est qu’a l’espreuve du Canon

Ait êté ce grand Capitaine.

 

Autre                                                           1690                                          [210]

Sur l’air…..

Courante du Marquis de Lassé, pour Madame la Dauphine.

 

Faut-il qu’un amant bien traité

                  S’en aplausisse?

                  Quoi! se peur il flaté

                  Que le mérite agisse,

                  Prés d’une beauté?

Qu’il scache que le plus charmant

N’est pas toujours le plus heureux amant;

Mais c’est celui qui du tendre caprice

                  Trouve le moment.

 

Chanson                                                    1690                                          [211]

Sur l’air de Jean de Vert.

Sur Monsieur de Maurevert.

 

Un guerrier fort doux et fort vert,

Que Maurevert on nomme;

Nous a fait voir que Jean de vert

Estoit un vray Jeanlogne.

Bona sera donc Jean de vert;

Cedez, cedez à Maurevert,

                  A Maurevert.

 

Autre                                                           1690                                          [212]

Sur le même Air.

Sur Monsieur de Sennecterre.

 

Sur la Sambre, et non sur le Rhin,

Fut blessé Sennecterre,

Qui aprés avoir pris du vin,

Dit; Graces à Dieu des verres,

Je me sens revenir le coeur,

Et je crois que je ferois peur

                  A Jean de vert.

 

Autre                                                           1690                                          [213]

Sur le même Air.

 

Tourville à vaincu sur les Eaües,

Luxembourg sur la terre;

Notre Dauphin par ses travaux,

Va terminer la guerre.

Grand Roy! tous ces évenemens

Ne se sont jamais veus du temps

                  De Jean de vert.

 

Autre                                                           1690                                          [214]

Sur le même Air.

 

Du gros Lanternier Gauderat,

J’admire la prudence,

Quand à table il juge d’un plat

Pour en remplir sa panse;

Mais pour décided les Procés,

J’aimerois mieux les lansquenais,

                  De Jean de vert.

 

Chanson                                                    1690                                          [215]

Sur l’air du Rigaudon.

Sur les Procez.

 

Hélas! Seigneur

Rendez moy la douceur,

Et le repos du coeur,

Que n’a point un plaideur.

Point de procez,

Quel bien inestimable!

Que de vivre en paix;

Sorty des plais

Que je sois méprisable,

Si j’y vais jamais.

 

Gens sans honneur,

Greffier & Procureur,

L’un et l’autre voleur,

Et l’Avocat menteur.

Huissier fripon,

Fait mainte fourberie

Pour moins d’un teston.

Leuray patron

De cette Confrairie

C’est le bon Larron.

 

Quarante Exploits                                                                                                      [216]

Bien comptez par mes doigts,

Avoir gagné six fois,

Toujours tirer la Croix.

Et cependant

Un Arrest sur Requeste,

Reçoit opposant,

Gagne Marchant!

Va te rompre la teste

En recommençant.

 

L’Avocat prest,

Bien instruit du procés,

Vous allez au Palais,

Vous donnez des placets;

Malgré vos pas,

Et maintes révérences.

Toujours chapeau bas,

Avoir votre audience,

Sans le taffetas.

 

Avoit troté

Tout l’hiver et l’ésté;

Pour toute charité

Vous êtes apointé.

Quelle lenteur!

De poursuivre une affaire                                                                                     [217]

Chez un Raporteur.

Se le plaideur

Ne fonce au Secretaire,

Je plains son malheur.

 

Dans un extrait

Qu’un secretaire a fait

On le tient pour soustrait.

Soins superflus,

La principale piéce,

Ne se trouve plus

J’ay bien perdu

Mon credit, mon adresse

Un bon tas d’éscus.

 

Chanson                                                    1690                                          [218]

Sur l’air……

Pour le Chtr de Bouillon beuvant avec le Chtr de Roches.

 

Chevalier sans peur et sans reproche,

Suis ton coeur et ses Nobles Bouillons;

Imitons ce brave de Roches:

N’espargnons rien dans cette débauche.

Baisons, beuvons, baisons jusqu’a rompre couillons

Moquons nous de ces gens retenus,

Qui prennent les plaisirs par mesure,

De Vénus et du Pere Bacchus;

Quand à nous, poussons la nature,

Jusqu’à tant qu’elle n’en puisse plus.

                                    par Beauregard.

 

Chanson                                                    1690                                          [219]

Sur l’air de Jean de vert.

Sur Monsieur de Sennecterre blessé à la Bataille de Fleurus.

 

Sur la Sambre, et non sur le Rhin

Fut blessé Sennecterre;

Qui aprés avoir pris du vin

Dit graces au Dieu des verres,

Je me sens revenir le coeur,

Et je crois que je ferois peur

                  A Jean de vert.

 

Autre                                                           1690                                          [220]

Sur l’air de la Gavote de Phaëton.

Sur les Ministres de ce tems.

 

Nous sommes quatre hommes en France,

                  D’un merite sans pareil.

Pelletier pour la Finance,

                  Le Tellier pour le Conseil;

Et pour la Guerre Louvois

                  Est un homme incomparable,

Et moy quand je suis à table,

                  Je vaux mieux que tous les trois.

 

Priere                                                          1690                                          [221]

par Monsieur de Valdeck.

 

Ȏ grand Dieu je vous remercie;

De ce que je suis revenu

De la Bataille de Fleuru;

Je croyois y perdre la vie.

Ne m’induisez jamais par indignation

En pareille tentation;

Mais faites par la bonté vôtre,

Quand le dangereux Luxembourg,

Qui m’a battu comme un Tambourg,

Prendra par un costé, que je prene par l’autre.

 

Chanson                                                    1690                                          [223]

Sur l’air: des Triolets.

Sur Louis Quatorze.

 

Louis quatorzieme du nom,

Se promene dedans Versailles;

Sur son palier, c’est un Lion,

Louis quatorzieme du nom:

Mais quand on tire le Canon,

Ou que sur le Rhin on bataille,

Louis quatorzieme du nom,

Se promene dedans Versailles.

 

Autre                                                           1690                                          [224]

Sur l’air. Scais tu pourquoi Manon me verse à boire.

Sur la campagne et les victoires de 1690.

 

Dans trois* Combats remporter la victoire,        *Fleurus, Navale & Staffarde.

Dans trois combats faire sentir son bras;

Dessus ses pas faire marcher la gloire

Et voir la Ligue à bas, ce sont des cas,

Que nous dira l’histoire et qu’on croira pas.

 

Chanson                                                    1690                                          [225]

Sur l’air de l’Archevesque de Paris.

Sur Louis XIV.

 

Sire, voulez vous me croire?

Profitez de ces deux mots

Pour  le bien de vôtre gloire.

Laissez là tous vos dévots,

C’est par eux que vôtre vie

N’est plus que pédanterie.

Vous voyez dans quel mépris,

Votre amy Jacques ils ont mis.                                      le Roy d’Angleterre.

 

Eh! que Diable vous importe!

Que je baise tout mon sou.

Que le Diable aprés m’emporte

Ou qu’il me torde le cou.

Lorsque la Scaron vous berne,

Qu’un jeune fou vous gouverne,                 Barbezieux

En Seigneur de prier Dieu,

Cela vous importe peu.

 

Chanson                                                    1690                                          [227]

Sur l’air: J’ay passé deux jours sans vous voir.

 

Ȏ ciel! quel est nôtre malheur!                                    Après le combat de la Hogue.

Sur mer, comme sur terre,

Louis en tous lieux est vainqueur

Tout cede à son tonnerre.

Hélas! faut il comme à Fleurus,

Nous voir icy encore vaincus.

 

Luxembourg ce vaillant héros

Y parût en Alcide,

Et Tourville dessus les flots,

N’est pas moins intrépide.

Hélas! aprés ces deux combats,

Que vont devenir les Estats?

 

Les Anglois croyoient sur la mer

Avoir un grand Empire,

Et qu’aucuns Roys de l’univers

N’osoient leur contredire.

Hélas! Louis leur fait bien voir

Qu’ils se flattoient d’un vain espoir.

 

Vainement nous étions unis

Pour conjurer sa perte;                                                                                          [228]

Nous n’en sommes que mieux punis;

Nôtre Flotte est déserte.

Hélas! malgré tous nos efforts

Il nous bat jusques dans nos Ports.

 

Nous voguons de tous les côtez

Sans trouver un azile;

Nous sommes partout arrêtez;

Rien n’échape à Tourville;

Hélas en vain nous le fuyons,

Il nous brûle et nous coule à fons.

 

Ah! que Louis est bien servy

Sur la Terre et sur l’Onde.

Chacun le veut rendre a l’envy

Le plus puissant du monde.

Helas! quelle rage pour nous

Quand nous voulons l’accabler tous.

 

Que nous sert de voir aujourd’huy

Tout l’Europe en ligue?

Rien ne reussit contre lui;

Il rompt toutes nos brigues.

Helas! tout ce qu’on entreprend

Ne sert qu’a le rendre plus grand.

 

Vois tous les maux que tu nous fais,                                           [229]

Maudit Prince d’Orange;

Crains à ton tour de tes forfaits

Que le Ciel ne se vange;

Hélas! nous ressentons des coups

Que tu mérites mieux que nous.

 

Sous une libre et douce loy,

Nous vivions sans traverse;

Falloit-il pour te faire Roy

Rompre nôtre Commerce?

Hélas! nous en sommes plus gueux,

Et tu n’en est pas plus heureux.

 

La chute est le sort des Tyrans,

Tu ne scaurois le croire.

Quand tu veux, comme les Titans

Porter si haut ta gloire;

Hélas! puisse-tu l’éprouver

Du Trône où tu sceus t’elever.

 

Sur la Place des Victoires.            1690                                          [230]

A la victoire.

 

Cadedis! quand je vois ne scais à quel propos

Sur le Chef de Louis poser une Couronne;

Je ne puis m’empescher de vous dire en deux mots,

Que véritablement je vous trouve bien bonne.

Eh! Qu’à t’il fait ce Monsieur le Heros?

Qu’écraser ses sujets, sans épargner personne;

A tous honnestes gens préférer les cagots;

Se laisser gouberner par l’antique Scaronne.

Aux Imbéciles, aux fats, confier les Affaires;

Par de honteuses Paix, finir d’injustes guerres;

Nous donner pour Bourbons de petits Montespans

Et vous vouler par là le couronner de gloire?

Mais non, je m’aperçois que vous êtes en suspens.

Cadedis haut le bras, Madame la victoire.

 

Chanson                                                    1690                                          [231]

Sur l’air des Feuillantines.

Sur N……. le Tellier Archevesque Duc de Reims.

 

Dans un amoureux combat,

                  Un Prélat,

Manque de force et s’abat;

N’est-ce pas une avanture?/ Qui paroit, qui paroit contre nature?

A se ……………………………..

 

Pour réparer cet affront

                  La d’Aumont,

Lui montra son blanc teston;

Mais malgré cet étalage

Il n’en fit, il n’en fit pas d’avantage.

 

Le Pere Gaillard amoureux,

                  Plus heureux.

Et cent fois plus vigoureux,

Répara par six reprises,

L’affront qu’il fit à l’église. / Cet affront, cet affront fait à l’église.

 

Autre                                                           1690                                          [232]

Sur l’air: de Marinne, ou: Il a battu son petit frere.

 

Le Chtr de Bouillon, au Prince de Richemont, fils naturel de Charles IId. Roy d’Angleterre et de Madame de Portsmouth (Pennencouet de Keroual)

 

Ȏ toy! dont la beauté charmante,

Passe de loin tout ce qu’on chante

De la beauté des immortels.

Si tu veux qu’on t’eleve un Temple,

Et qu’on te dresse des Autels,

Laisse toy faire/ f..tre à leur exemple.

 

Chanson                                                    1690                                          [233]

Sur l’air. Dormez roulette

C’est le François qui parle au Prince d’Orange à qui il a tant de fois tourné le dos.

 

Préparez vous Nassau,

Prenez viste un Clistere.

Ça en voicy un tout chaud

Tient l’apotiquaire.

Ça le derriere,

Ça mettez vous comme il faut;

C’est ici, et non en guerre,

Qu’il faut tourner le dos.

 

Réponse

Que voulez vous de moy,

Maudit Apotiquaire?

Je vous mets le canon

Dans le derriere,

Ah! quelle misere;

Je crois que je suis perdu,

Et jusqu’en Angleterre,

J’aurai le canon au cu.

 

Autre                                                           1690                                          [234]

Sur l’air: Or nous dites Marie

 

Illustre Présidente,

Nous direz vous comment,

Vous fûtes pénitente

De ce Curé galand?          Mauroy Curé des Invalides

Sa jambe violette,

Ses yeux pleins de douceurs,

Ses gans et sa toilette

L’ont fait mon Directeur.

 

Chanson                                                    1690                                          [235]

Sur l’air du Confiteor.

Sanleque fit ce couplet pour Mademoiselle Langlois.

 

J’estois assez bon Directeur

Quand je gouvernois d’autres belles;

Je reglois assez bien leur coeur.

J’avois de bons avis pour elles;

Mais, belle Iris, quand je vous vois,

Je garde mes avis pour moy.

 

                                                      Anneé 1691                                            [237]

 

Chanson                                                    1691                                          [239]

Sur l’air de Joconde.

Sur Monsieur de Mauroy Curé des Invalides.

 

L’amour range tous sous ses loix,

                  Quoique l’on puisse faire;

Témoin le Tartuffe Mauroy

                  A qui Doujat* sceut plaire.

Tous ces grands faiseurs d’oraisons

                  Et ces signes d’Apostres,

Sont sur les tendres passions,

                  Hommes comme les autres.

 

Quelque triste que soit le sort

Du Conseiller le Boindre,

Il auroit certe un fort grand tort

                  De gémir et se plaindre;

L’Argent, le Carosse, et le lit

                  Qu’il prit du Missionnaire,

Font voir qu’il est sans contredit

                  Un cocu volontaire.

 

Autre                                                           1691                                          [240]

Sur l’air Pierre Bagnolet

Sur ……… Gilbert frere de Madame d’Armemonville, fait President des Comptes

 

Messieurs de la Chambre des Comptes,

Laschez vitement tous vos Chats;

Serrez vos Registres et vos Comptes,

Gilbert est tout rempli de Rats.

                  Il a des Rats.                         Bis

                  Dans sa dépense

Dans sa dépense et dans ses draps.

 

Pour Belin (1) ce n’est pas grand domage,

Qu’il air pris femme en lieu si bas;

Il n’a pas gâté grand ménage,

En s’alliant avec les Rats.

 

(1)   Fermier general marié avec la soeur de Madame d’Armenonville.

 

Autre                                                           1691                                          [241]

Sur l’air de Lampon etc.

Sur Vivien l’Abbé Seigneur de Bulonde, Lieutenant géneral. leva le Siége de Coni en piémont l’an 1691.

 

Un certain bruit court ici,

Que Bulonde a pris Coni;

Il a menti s’il s’en vante,

Il n’a pris que l’epouvante.

Lampon lampon,

Camarade lampon.

 

Autre                                                           1691                                          [242]

Sur l’air: Quand Iris prend plaisir a boire.

 

Admirez les hauts faits de guerre,

Du valeureux Duc de Bavieres;

Il a pris Bellegrade autrefois;

Si l’on eut pû compter sur sa parole,

Il exterminoit les François;

Mais par bonheur tous ses exploits,

Ont abouty à Carmagnole.

 

Chanson                                                    1691                                          [243]

Sur l’air del’Echelle du Temple.

Sur la mort de Monsieur de Louvois.

 

Cy gist le Seigneur de Louvois,

Elevé favori du Roy

Par son habilité profonde;

Du Royaume il portoit le fais;

S’il fut si juste en l’autre monde,

C’est qu’il avoit seul les relais.

 

Chanson                                                    1691                                          [245]

Sur l’air des Triolets.

 

Avec le Duc de la Ferté,

Le premier Chansonnier de France,

Vouloir faire societé

Avec le Duc de la Ferté,

C’est bien grande témérité.

Je le dis comme je le pense,

Avec le Duc de la Ferté

Le premier Chansonnier de France.

 

Chanson                                                    1691                                          [247]

Sur l’air des Contrevéritez

Couplets faits à Rome; par Coulanges.

A Monsieur le Duc de Nevers.

 

                  Rome êtoit aimable,

                  Plaisant, agréable,

Pendant le regne de Nevers;

                  Toujours de jolis vers,

                  Toujours une Table,

                  De peu de Couverts,

De bon vin, surtout le Connestable.                   Un vin de fratoche qui donnoit le Connestable Colonne.

                Et cent mets divers.

 

                  Maintenant Coulanges,

                  Chose fort étrange;

Ne boit, ne mange, ny ne dort;

                  Voila son triste sort.

                  Absent de Thiange*,                                           *Madame la Duchesse de Nevers.

                  Il dépérit fort.

Si bientost il ne revoit cet ange,

                  C’est un homme mort.

 

                  Rome n’est plus Rome

                  Rome est pour moy comme,                                           [248]

Seroient les plus affreux déserts.

                  J’ay l’esprit à l’envers.

                  La goute m’assomme,

                  Et frappe mes nerfs;

En un mot, je ne suis plus cet homme,

                  Du temps de Nevers.

 

                  Qu’elle m’a sceu plaire,

                  Voire Tabatiere (1),

                  A Genes! quoi donc! en fait on?

                  Monsieur de Ratabon,

                  M’envoya n’aguieres.

                  Ce précieux don.

Le travail ne tient point du vulgaire.

                  Le ressort est bon.

 

Mais quelle espérance,                

                  Aprés tant d’absence?

Je conçois d’un tel souvenit,

                  Qui me pourra tenir?

                  Si jamais en France

                  Je puis obtenir,

Comme icy chez vous sans conséquence,

                  D’aller et venir.

 

Voyez la Reponse à cette Chanson qui commence ainsy

Croyez cher Coulanges.

 

(1)   Une Tabatiere que Monsieur de Nevers envoya a Monsieur Coulanges de Genes par Monsieur de Tatabon qui y etoit lors Resident.

 

Autre                                                           1691                                          [249]

Sur le même Air.

En revenant de Rome. Sur une mauvaise nuit qu’on eut à Radicofani, par le bruit épouvantable d’une infinité de bestiaux de toutes les façons assemblez au tour de l’Hostellerie qui est en pleine campagne, pour une foire le lendemain.

 

                        Rien ne me contente,

                        Et tout m’espouvante,

A Radicofanci, grands Dieux!

                        Je n’ay devant les yeux

                        Qu’une trouppe errante

                        De monstres affreux.

N’est-ce point que Circé la méchante

                        Habite en ces lieux?

                                                      par Coulanges.

 

Autre                                                           1691                                          [250]

Sur l’air: A la venuë de Noël

Sur la prise de Mons

 

A la venuë de Bontemps,

Ce fut grande joye à Paris,

Jamais on ny fut plus content,

L’on vit sauter grands et petits.

 

Bonne nouvelle il aportoit

Que mons* avons capitulé                             *la ville de Mons

Et que Guillaume s’aprochoit,

Pour voir entrer sa Majesté.

 

Autre

Sur l’air: Alleluya

Sur le mesme sujet

 

Quand Bontemps se fut presenté

De la part de sa Majesté;

Madame tout haut entonna, Alleluya.

 

Enfin, dit elle, Mons est pris,

Qu’on fasse des feux dans Paris;

Bientost la Ligue tombera, Alleluya.

 

Chanson                                                    1691                                          [251]

Sur l’air. Si Bourdaloue

Contre les Femmes.

 

Les femmes de l’anneé présente

Sont de nature de Melon;

Il en faut entamer cinquante

Pour en trouver un qui soit bon.

 

Autre                                                           1691                                          [252]

Sur l’air: Depuis Janvier etc.

 

Ne soyez point si délicat,

Mon Neveu, je vous fais Légat.

Laissez tous vos Pages à Rome

La France est un méchant état,

On y fit mourir un saint homme;

Mon Neveu je vous fais Légat.

 

Chanson                                                    1691                                          [253]

Sur l’air Si Bourdaloüe.

Sur Mauroy pere de Saint Lazare et Curé des Invalides.

 

Si Mauroy le Missionnaire

Rentre jamais dans son couvent,

On punira bien son derriere

Des fautes qu’à fait le devant.

 

Autre                                                           1691                                          [254]

Sur l’air: L’amour plaît malgré ses peines.

de l’Abbé Martinet.

 

L’amour disoit en colere;

Vraiment, si je suis tout nud,

C’est que ma putain de mere

Mange tout chez la Cornu.

 

Autre                                                           1691                                          [255]

Sur l’air du branle de Metz.

Sur les fréquentes visites de François de Harlay Archevesque de Paris, chez la Duchesse de Lesdiguieres (Gondi)

 

Que sur la fin de vôtre âge

Vôtre goût paroist mauvais;

Et l’on ne croiroit jamais

Qu’un tel objet vous engage;

Si par vôtre assiduité

L’on ne s’en fut bien douté.

 

La Varenne plus jolie,

Dites, pourquoi la quitter?

Puisque vous vouliez changer,

Pour contenter vôtre envie,

Vous deviez donc choisir mieux

Pour vous rendre plus heureux.

 

Cherchez donc qui vous ragoute

Quelque mets plus délicat;

Autrement charmant Prélat,

Ma foyvous ne voyés goute;

Profitez de mes avis

A vieux chat tendre souris.

 

Réponse                                                                                                          [256]

Si je vois cette Déesse

C’est que j’aime le fracas;

Ce n’est pas pour ses appas,

Ni pour sa tendre jeunesse;

Mais sa seule qualité

A flaté ma vanité.

 

Hélas! cette bonne Dame

Est dans la dévotion,

En sortant de sa maison,

Elle vient à nôtre Dame,

D’une tres grande ferveur

Entretenir son Pasteur.

 

Chanson                                                    1691                                          [257]

Sur l’air……………

Sur le Pape Alexandre VIII (Ottobuoni)

Le Saint Pere en l’autre monde,

Les Cardinaux ont passé l’Onde.

Mangeons gras, le Siége est vaccant.

De manger de tout nous avons licence.

                        Le Cardinal prédestiné

                        En faveur de son 1er. né.

                                    Nous donnera,

                                    Nous donnera,                   

                                    Son indulgence.

 

Autre                                                           1691                                          [258]

Sur le petit Air de la Fronde.

Sur Monsieur de Barbezieux.

 

L’on doit être surprix du choix

D’un des plus grands Rois de la terre

D’avoir pris un jeune Bourgeois,

Pour le Ministre de la guerre,

Qui passe le jour à l’orgner

Comme la nuit a yvrogner.

 

Pour paroître de qualité

Il veut avoir une Princesse (1)

Par les Conseils de la Ferté.

Elle répond à sa tendresse;

Ce fut derriere un paravant

Qu’elle en fit un heureux amant.

 

(1)   la Duchesse de Valentinois fille de Monsieur le Comte d’Armagnac.

 

Chanson                                                    1691                                          [259]

Sur l’air. Quand le péril est agréable.

Contrele P. de Mauroy Missionnaire.

 

Tout Saint Lazare est en colere

De voir Mauroy ce grand béat

Se déclarer un Apostat,

Un fourbe, un Adultere.

 

Que deviendront, disent ces Peres,

Aprés un coup si malheureux,

Nos longs toupets, nos cours cheveux?

Et nos mines séveres?

 

Que dira-t’on de nos retraites,

Qui nous faisoient chérir des sots?

Passeront nous pour des dévots

Dans toutes les Gazettes?

 

Ne voit on pas ce séminaire

Rempli sans cesse de Marchands;

Qui nous veulent rendre garands

Des faits de ce faux frere.

 

Enfin Joly (1) dans cette Eglise

 

(1)   General de Saint Lazare. Lorsqu’on lui vint dire l’affaire de Mauroy, fit entrer les Marchands l’Eglise disant qu’il alloit prier Dieu pour la conversion des pecheurs.

 

A fait entrer ces bonnes gens;                                                         [260]

Le temps n’est plus des innocens,

Cela n’est plus de mise.

 

Vous voyés que sans mistere

Pour réparer un si grand tort;

Il nous faut faire quel qu’effort

Pour nous tirer d’affaire.

 

Il vaut mieux pendant sa vie

Boire sans cesse du bon vin,

Que d’avoir jamais le chagrin

De s’en fuir pour Silvie.

 

Autre                                                           1691                                          [261]

Sur l’air: Or nous dites Marie

 

Le P. Bouhours accusé d’avoir fait un Enfant à une Niéce de Monsieur de Vauban laquelle accoucha chez un Procureur où elle avoit êté mise par ce pere en pension. On fit les Couplets qui suivent en Dialogue, a l’imitation d’Ariste et d’Eugene.

 

Angelique

Ah! mon Reverend pere,

On dit je ne scai quoi,

Dans nôtre Monastere;

Qui nous remplit d’effroy.

C’est une chose étrange

Qu’un homme de mon nom

Qu’on prendroit pour un Ange

Passe pour un Démon.

 

Pour apaiser nos meres,

Découvrez vous à moi;

Révélez le mistere

De ce que je ne scay quoi.

Croyez que c’est l’envie

Qui seme ce faux bruit,

Voyez la Calomnie                                                                                    [262]

Comme elle me poursuit.

 

Angel.          On dit que c’est l’affaire

                        De vôtre Procureur;

                        Cet homme là mon pere

                        Est un franc chicanneur.

Eugene.      Mais ce qui me chagrine,

                        Est un je ne scai quoi

                        Que la pauvre Delphine

                        A mis bas malgré moi.

 

Angel.          Mais, quel est donc le traitre?

                        Et quel est l’indiscret,

                        Qui dit l’avoir veu naître?

                        Malgré vôtre secret,

Eugene.      Vous connoissez arriste,

                        Il vous dira le fait;

                        C’est quelque Janseniste

                        Qui m’a lancé ce trait.

 

Angel.          Un Cléante, un Philarque

                        Disciples de Pascal,

                        Arnaud l’hérésiarque,

                        Vous auront fait ce mal.

Eugene.      J’en suis seur Angelique,

                        N’en doutez nullement.

                        D’autant que je m’aplique                                         [263]

                        Au nouveau Testament (1).

 

Angel.          Est-ce un mal qu’on traduise

                        Les Dogmes de la Foy?

                        Est-ce un mal qu’on détruise

                        Certain je ne scay quoi

Eug.               Ils craignent ma préface,

                        Ils s’en prendront à moy;

                        Car leur grave efficace

                        Est ce je ne scay quoi.

 

Angel.          Mais ils voudroient peut être,

                        Que leur je ne scai quoi,

                        Eut produit & fait naître

                        Vôtre je ne scay quoi.

Eug.               Sans grace on se presente,

                        Les deux premiers parens

                        La grace est suffisante

                        Pour faire des enfans.

 

Angel.          Mais tout de bon mon pere,

                        Craignez vous sans raison

                        Qu’on vous fasse une affaire

                        De cette trahison?

Eug.               J’en suis quitte Delphine,

 

(1)   Il travailloit à la traduction qui n’a pas eu un heureux evenement.

 

Grace à mon bienfaiteur (2),                                                             [264]

L’enfant qu’on nous destine,

Est pour le Procureur.

 

(2)   L’Archevesque de Paris (Chanvalon) accommoda cette affaire, et fit taire le Procureur, qui d’abord avoit fait grand bruit. Ce fut le President de Lamoignon qui engagea, pour faire plaisir aux Jesuittes, le procureur de prendre l’enfant auquel il avoit travaillé peut être plus efficacement que le P. Bouhours plus vieux que lui. Monsieur de Lamoignon se fit donner les Lettres du R.P. et les garda. Il s’en servit lorsque les Jesuittes voulurent entreprendre Monsieur Baillet Precepteur de son fils, il les arresta en leur disant le plaisir qu’il leur avoit fait, et qu’il êtoit le maître de renouveller l’affaire par les Lettres.

 

Autre                                                           1691                                          [265]

Sur l’air de Joconde.

Sur le même sujet que la précédente.

 

Sur ce triomphe de l’amour,

                  Disent les Jansenistes,

N’oubliez le Pere Bouhours;

                  La gloire des Jesuites,

Autrefois on les accusoit,

                  Du vice d’Italie;

Mais la dévote qu’il aimoit,

                  Les Peres justifie.

 

En lui faisant un bel enfant,

                  Ne croyés pas critiques,

Qu’il ait fait un péché si grand,

                  Il craint Dieu et s’en pique;

Mais quand sans songer au Seigneur

                  On cede à la nature

L’emportement d’un tendre coeur,

                  Ne rend point l’ame impure.

 

Autre                                                           1691                                          [266]

Sur l’air Tarare ponpon.

 

Le Général Joly d’une humeur fort bizare,

Deffendoit à Mauroy la tendre passion;

Sur le ton de Fanfare, l’Invalide, répond

Mon bon pere Tarare ponpon.

 

L’amour de deux rivaux pour Philis se déclare

Rubentel vieux soldat, Mauroy jeune Caton;

La Caton fit fanfare; car il eut du bon bon,

Le Sodat fit tarare ponpon.

 

Chanson                                                    1691                                          [267]

Sur l’air de Pierre Bagnolet.

 

Hollondois chantez bien la game

Au Général de vos Estats;

Et toute la terre vous blame

De lui donner tous vos Ducats.

                  N’en douter pas;               bis

Castanaga (1) baisoit sa femme

Quand Valdeck arriva bien las.

 

Camarades sans nous abattre

Ne songeons qu’a doubler le pas;

Luxembourg fait le Diable à quatre;

Ayons des pieds, s’il a des bras.

                  Car des éstats,                                     bis

Nous avions ordre de nous battre,

De vaincre nous ne l’avions pas.

 

(1)   Antoine Agourto Marquis de Castanaga, Gouverneur général des pays bas espagnols.

 

Autre                                                           1691                                          [268]

Sur l’air de Lanlurlu.

 

De Frandres et d’Espagne,

Les Ambassadeurs,

De la Grand’ Bretagne;

Et les Electeurs

Se sont venus plaindre,

D’avoir partout entendu,

                  Lanlurlu lanlurlu.

 

On a fait deffense,

De ne plus chanter,

La Chanson qu’on chante,

De lanlurelu:

Si plus tu la chante

Tu seras ma foy pendu,

                  Lanlurlu lanlurlu.

 

Chanson                                                    1691                                          [269]

Sur l’air: Heureux l’amant qui baise sa Maîtresse.

 

Chez la Messié pere Bouhours badine

                  Chez la Messié.

                  Il se croit un Xavier;

Entre ses bras il void la Cochinchine

                  Chez la Messié

Il se croit un Xavier.

 

Embarquons nous sans craindre la tempeste,

                  Embarquons nous,

                  Dit il, à ses genoux;

C’est là mon sort, oh! la bele conqueste!

                  Embarquons nous,

                  Dit il, à ses genoux.

 

En vray Mauroy il a fait le voyage,

                  En vrai Mauroy.

                  Il a planté la Foy.

Dans peu de tems on verra son ouvrage,

                  En vrai Mauroy,

                  Il a planté la Foy.

 

Nos Directeurs, grand Roy, peuplent le monde,

                  Nos Directeurs,

                  Se font des Serviteurs                                                          [270]

En ta faveur leur amour est fécond.

                  Nos Directeurs

                  Se font des Serviteurs.

 

Et depuis quand changent ils de maniere?

                  Et depuis quand,

                  Prennent ils le devant?

Que deviendra desormais le derriere?

                  Et depuis quand

                  Prennent ils le devant?

 

Autre                                                           1691                                          [271]

Sur l’air: de flon flon.

A Monsieur le Prince de Turenne dans un embarras en place d’Espagne (à Rome) où ce jour là ce faisoit le cours: par Coulanges.

 

Quoique de bonne mine,

Et de grande Maison;

Dans vôtre Poltronchine (1);

Je crains sur mon Chignon,

Et flon flon la riradondaine,

Et flon flon la riradondon.

 

(1)   Carosse à Brancard ainsi apellé à Rome.

 

Autre                                                           1691                                          [272]

Sur l’air: Tranquilles Coeurs.

Faite à Rome dans l’endroit, où êtoit autrefois le grand Cirque; par Coulanges.

 

Où sont allez tant de héros?

Où sont leurs Palais magnifiques?

Je ne vois partout que des os;

Partout que des restes antiques;

Et l’on ne trouve plus au Palais des Cezars

Que Serpens & Lézards.

 

Chanson                                                    1691                                          [273]

Sur l’air Tranquilles Coeurs.

En revenant de Rome.

par Coulanges.

 

Défaits enfin de ces Abbés,

Qui se donnoient un air capable;

Et des gens, qui, de tous côtés

S’en venoient nous presser à table.

Du moindre desjeuner, nous faisons plus de cas

                  Que des plus grands repas.

 

                  Je vais les attendre à Paris,

                  Tous ces Abbés de conséquence.

                  Que d’icy je les vois petits

                  Devant certaine Révérence (1)!

Tel qui parloit si haut, en France de retour,

                  Se trouvera bien court.

 

(1)   le Pere de la Chaise Confesseur du Roy.

 

Autre                                                           1691                                          [274]

Sur l’air: Où êtes vous allez mes belles amourettes?

Faite à Rome, par Coulanges.

Sur le Cardinal de Bouillon.

 

Puisqu’enfin le Ciel a permis

Que je sois hors de France

Sur les bords du Tibre assis:

Je songe souvent à Paris;

Et je passe le tems tout rempli d’espérance

D’y revoir bientôt mes bons amis.

 

Chanson                                                    1691                                          [275]

Sur l’air: Je ne scaurois

Sur la Prise de Mons en 1691. en presence du Prince d’Orange campé à N.D. de Hal.

 

Louis ayant quitté Versailles, / Louis est parti de Versailles

Nous a fait viste venir; / Pour nous venir avertir.

Il renverse nos murailles.

Nassau viens nous secourir.

                  Je ne scaurois;

Il faut donner la Bataille,

                  J’en mourrois.

 

Sur Louis XIII.                                         1691                                          [277]

& Louis XIV

 

Louis XIII. gagna la Bataille d’Avin,

Dessy Lamboy, prit l’Alsace et Thurin;

Toujours vainqueur sur la terre et sur l’onde.

Peut être eut il tenté de conquérir tout le monde;

Si le Ciel de tout temps ne l’avoit destiné

Pour triomphe à son Fils, à Louis Dieudonné.

 

Ce Roy fait oublier tous les Rois ses Ayeux,

Ses grand exploits sont gravez sans les cieux.

De sa valeur l’Europe est étonneé.

Louis d’intelligence avec sa destineé;

Dans ses vastes projets craint si peu de revers,

Que son grand nom suffit contre tout l’univers.

 

Chanson                                                    1691                                          [279]

Sur l’air de Jean de Vert.

Sur le mariage de Madame la Presidente Barentin, avec N…. Damas de Cormaillon Gentilhomme de Bourgogne Ingenieur, avanturier à qui elle fit la fortune. Il fut tué au Siege de Namur en 1692.

 

Eut on crû que la Barentin,

Qui faisoit tant la fiere,

Se fut coïffeé d’un blondin,

Qui n’a que la rapiere;

Qui ne peut pas servir delongtems

Une femme qui fut du tems

                  De Jean de Vert.

 

Scavez vous que la Barentin

A son douzieme lustre,

A fait avec un beau blondin,

Un mariage illustre?

Qui n’a pour but que le déduit,

Et qui fait icy plus de bruit,

                  Que Jean de Vert.

 

Si de l’aiguillon de la chair

Vous sentirez la piqueure;

Barentin sans payer si cher,                                                             [280]

Une mince figure;

Pour peu de chose un gros manan,

Vour eût fait ce qu’on fit du tems

                  De Jean de Vert.

 

Vôtre étoille cher Cormaillon,

N’est pas des plus commmune.

Sans crainte d’être Cornaillon

Vous avez fait fortune;

Vous ne serez cocu ny gueux,

N’est-ce pas être plus heureux

                  Que Jean de Vert.

 

Chanson                                                    1691                                          [281]

Sur l’air de Tarare ponpon

Sur la Condamnation de Mauroy Curé des Invalides.

 

Monsieur l’Official Critique et fort bizare,

A condamné Mauroy a dix ans de prison;

                  Sur le ton de fanfare;

Mais sans doute il répond,

Official tarare ponpon.

 

Monseigneur de Lion (1), qui n’est point un barbare,

Et qui scait que l’amour ne veut point de prison

                  Rira de la fanfare;

                  Dira sur le dicton

Official tarare ponpon.

 

Le Pape (2) d’aujourd’huy d’un mérite si rare,

Pour l’amour d’une Iris, se moque de prison;

                  Blamera la fanfare;

                  Je l’entends qui répon,

                  Official tarare ponpon.

 

(1)   Neuville Villeroy Archevesque de Lion.

(2)   Alexandre VIII. Pape.

 

Chanson                                                    1691                                          [283]

Sur l’air de Lanlurlu.

Par Coulanges.

 

On offre à Dom Live (1),

Ou femme, ou chapeau;

Cette alternative

Trouble son Cerveau;

Son éstoit est d’être, ou cardinal ou cocu,

                  Lanlurlu, lanlurlu.

 

                  Tous les Pignatelli

                  Au Ciel font des voeux,

                  Pour qu’on les apelle

                  Au rang de Neveux.

Le Pape s’en moque, le Népotisme est tondu,

                  Lanlurlu etc.

 

                  Maintenant dans Rome

Le Sbirre (2) sans peur,

                  Va comme un autre homme,

                  On lui fait honneur.

Nôtre Pape est ferme, c’est un vieillard résolu.

                  Lanlurlu etc.

 

(1)   Dom Livio fort riche et mal basti neveu du feu Pape InnocentXI. Odescalqui.

(2)   Sbirres sont des Sergens. La franchise des quartiers des Ambassadeurs qui fut longtems contesteé, et enfin accordeé à Alexandre Smit.

 

Vouloit le Saint Pere,                                                           [284]

Le jeune Ottobon,

Qui lui laissât faire

Poupone & Poupon;

Il a fait des siennes, tant que son Oncle a vécu

                  Lanlurlu etc.

 

                  Quand Dom Marco (1) passe

                  Je mets mon Chapeau,

                  Et fais la grimace,

                  A ce laid museau.

Mon Dieu, le sot homme! comme il fait l’entendu,

                  Lanlurlu etc.

 

                  Il est ridicule

                  Que je sois parti,

                  Sans baiser la mule,

                  De Pignatelli (2);

Ce n’est pas ma faute, il s’estoit cassé le cul

                  Lanlurlu lanlurlu.

 

(1)   Un neveu du Pape Ottobon qui ostoit à peine son Chapeau, et qu’on ne regarda plus dés que son oncle fut mort.

(2)   Quand ce Pape fut fair j’estois malade, et quand je fus pour le voir, il avoit fait une si furieuse chute que je ne pus avoir cet honneur.

 

Autre                                                           1691                                          [285]

Sur l’air de Jean de Verd.

Faite à Gennes, par Coulanges.

 

Puisqu’enfin nôtre Ambassadeur             l’Abbé d’Estrées. nommé Ambassadeur à Rome.

A remis pied à terre,

Peut on lui rendre trop d’honneur?

Armons nous tous d’un verre,

Et beuvons pour hausser le tems;

Car ce sont là les sentimens

Des gens de mer, des gens de mer.

 

Il est constant que Ratabon (1)

Fait honneur à la France;

Le Roy doit avoir tout de bon

Esgard à sa Dépense.

L’heureux abry que le Gavon (2)

Des gens de mer, des gens de mer.

 

Vivons icy tranquillement,

Faisons y bonne chere;

 

(1)   Lors Resident à Gennes, y vivant aussi noblement qu’un Ambassadeur.

(2)   C’est où je logeois dans la Galere.

 

Il ne faut pas légerement                                                                    [286]

Remonter en Galére.

Le plus seur, est en ce païs

De se conformer à l’avis

Des gens de mer, des gens de mer.

 

Bon mot                                                     1691                                          [287]

d’Alexandre Viii. (Ottoboni)

 

L’autre jour un Ambassadeur

De sa Majesté Catholique,

Dans une Audience publique,

Voulant par un discours trompeur

Faire accroire à Nôtre Saint Pere

Que la France êtoit aux abbois,

Et reduite à telle misere

Qu’elle périroit dans six mois.

 

Le Saint Pere aprés un sousrire,

Répondit, rien n’est plus certain;

Car elle va chercher du pain

Chez les Alliez de l’Empire.

 

Sur la mort de Monsieur de Seignelay    1691                        [288]

 

Cy gît, ce n’est pas grand domage

Que pour Tourville, et pour Cavois,

Un Ministre d’Estat peu sage;

Qui s’il eût imité Louvois

Eut fait un bien meilleur usage

Des grands biens qu’il en partage;

Mais chacun dit tout d’une voix

Que cet imprudent personnage.

Amangé tout & par delà

Ce que ton pere nous vola.

 

Chanson                                                    1691                                          [289]

Sur l’air de Joconde.

A Monsieur le Cardinal de Bouillon au Conclave de 1691.

Par Coulanges.

 

Que par vous la Maison Conti

Ait un dixieme Pape;

Faites-nous le Duc de Poly

Neveu de pied en cape;

Qu’Aquasparte de son costé                        la Duchesse.

Soit la plus riche Niece.

Ah! remettez la Papauté

Dans l’ancienne Noblesse.

 

Autre                                                           1691                                          [290]

Sur l’air: Tourelouribo.

Impromptu fait à Rome, par Coulanges, en voyant passer le Cardinal Cibo.

 

Voila le Doyen du sacré Colege,

                  Cibo, Tourelouribo;

C’est un vieillard qui Papege,

                  Cibo, tourelouribo;

Mais c’est un Pape de Neige

                  Haho! tourelouribo.

 

Autre                                                           1691 (Fevrier)                      [291]

Sur l’air des Rochelois.

Pour Monsieur l’Abbé de Noirmoustier (la Tremoille), qui affectoit quelquefois à Rome trop de sévérité pour les parties de plaisir.

 

Pourquoi sans rime et sans raison,

Prendre lamine d’un Tronson? (1)

Et se déguiser de la sorte?

Nôtre Saint Pere (2) est assez mal,

Et point du tout il ne comporte

De se masquer ce Carnaval.

 

A Rome il faut être charmant,

Et suivre son temperament,

A Laon, trancher du grand Vicaire, (3)

Vivre enfin selon les Païs.

Quant à moi je n’estime guere

Le nez d’un Rominagrobis.

 

(1)   Autrefois Supérieur du Séminaire de Saint Sulpice.

(2)   Alexandre VIII. Pape Ottoboni qui se mouroit dans le tems du Carnaval.

(3)   L’Abbé avoit êté en France grand vicaire de l’évesque de Laon.

 

Autre                                                           1691                                          [292]

Sur l’air: Quoi! camper en cette saison?

A Monsieur l’Abbé de Polignac, à Gennes.

par Coulanges.

 

                  Quoi! partir le premier de Juillet?

Chargé pour la Cour d’un gros paquet,

                  Et garder à Gennes le mulet?

Voila n’aller pas si vîte qu’un trait,

                  Voila n’aller pas si viste.

 

                  Vous dirés, manque de seureté,

Le meilleur Courrier est arresté.

                  Ouida; mais en bonne vérité;

Un Port est-il sans Félouques, l’Abbé?

                  Un Port est-il sans Felouques?

 

Autre                                                           1691                                          [293]

Sur l’air des Triolets.

Sur la Goute, à Rome aprés le départ de Madame la Duchesse de Nevers. par Coulanges.

 

Chacun me presente le poing;

De peur qu’un faux pas je ne fasse.

Sans aide je ne marche point,

Chacun me presente le point

Que je deviens oiseau de chasse.

Chacun me presente le poing

De peur qu’un faux je ne fasse.

 

Ah! mon Dieu le cruel destin!

De tomber en métamorphose,

Ma goute en est le grand chemin,

Ah! mon Dieu le cruel destin!

Et que l’ennuy de vivre enfin,

Toujours perché sur quelque chose.

Ah! Mon Dieu le cruel destin!

De tomber en métamorphose.

 

Le dernier jour du mois de Mars,

Fut le dernier jour de ma vie.

Diane à six heures trois quarts,                                                                       [294]

Le dernier jour du mois de Mars

Quitta le séjour des Cezars,

Pour retourner en sa Patrie,

Le dernier jour d mois de Mars

Fut le dernier jour de ma vie.

 

Autre                                                           1691                                          [295]

Sur l’air de la grosse Bourguignone.

Adieu à 21. Officiers des Galeres de France restez à Rome pour accompagner Monsieur l’Ambassadeur (l’Abbé d’Estreés) qui de tems en tems 6. à 6. s'en retournerent en France.

 

Sans Messieurs des Galeres,

Pourrons nous vivre icy?

Cabannes, Savonnieres,                les 6. 1ers. qui partirent

La Brêteche, Eserinville,

Vous allez faire gile;

Ah! que l’Ordre signé par Pontchatrain

Me donne de chagrin!

 

Pour moi, cher Savonnieres,

Faites un Compliment,

Auxdeux freres Lubieres,

A Cigogne, a Fontblan,                     ceux qui êtoient partis.

A l’aîné la Brêteche.

Que rien ne vous empesche,

De caresser Montolieu, de ma part,

Dagu, Bissy, du Bar.

 

Embrassez bien Tourette,                                                                   [296]

Et Cologne à son tour;

Dites que je souhaitrre

Mille biens à Teincour.

Je fais la révérence

Au Chevalier de Vance;

Et je finis mes Complimens enfin,

Par Saint Pol, & Marin.

 

Sur le Marquis de Sourdis             1691                                          [297]

 

Fantassassins, si Sourdis pique et nous abandonne

Comme vous le scavez, et comme on nous l’ecrit;

Ce n’est pas qu’il ne soit brave de sa personne;

                  Mais c’est qu’il a l’ame trop bonne

                  Pour hazarder le Saint Esprit.

 

Sur Madame de Nesle                     1691                                          [298]

 

Or dites nous, dormez vous bien la belle?

Le coeur est il fermé comme les yeux?

Passant cette nuit par ces lieux,

J’ay souhaitté que le charmant Nesle

Fut au matin l’aimable Barbezieux.

 

Chanson                                                    1691                                          [299]

Sur l’air de l’Eschelle du Temple.

Au sujet de l’Opéra d’Astreé.

par Monsieur de Saint Gilles.

 

Je laisse à son gré Céladon,

Se refraichir dans le Lignon;

J’avois résolu d’en médire,

Bien des gens m’en avoient prié;

Mais est il besoin de Satire,

Quand le sujet est décrié?

 

Autre                                         1691                                          [300]

Sur le mesme Air.

Critique du couplet précédent.

 

Auteur d’une sote Chanson,

Qui veut critiquer Céladon;

Qui, diable ta dit, je te prie

Que le sujet soit décrié?

C’est sur toi que la raillerie,

Gille niais, va retomber.                                  Saint Gilles.

 

Si tu avois dit que les Airs,

Ne valoient pas mieux que les vers;

On t’eut passé cette Satire;

Mais que le sujet soit mauvais,

C’est donner occasion de dire,

Que tu n’est qu’un Gilles le niais.

 

Autre                                                           1691                                          [301]

 

Sur le même Air.

Réponse de Saint Gilles, à la Chanson précédente.

 

Naissant Auteur, esprit charmant,

Qui me raille si finement;

Vous êtes né pour la Satire.

Vous surpassez des Preaux;

C’est à vous ma foy, de médire.

Que vos commentemens sont beaux!

 

                  Sur le mesme sujet.

Votre Chanson a des attraits

Que les autres n’eurent jamais;

Elle me touche et je l’admire;

Mais aprenez moy vôtre nom,

Ou trouvez bon que j’ose dire,/ Si c’est un homme d’épeé qui soit l’auteur.

Que vous avez peur du bâton./ Que vous êtes un tres grand Poltron.

 

Autre                                                           1691                                          [303]

Sur l’air du role entier d’Amisodar dans Bellorophon. Que ce Jardin se change en un désert affreux.

Ordre au Maitre d’hostel de Monsieur le Duc de Chaulnes, pour un diner à Rome, où survint Madame la Duchesse de Nevers.

 

Rien n’est plus ennuyeux que tous ces grands repas,

                  Cher Honoré, nous voulons peu de plas,

                  Du vin exquis, et de plus d’une sorte.

Et que pour mieux manger, plat à plat on aporte;

C’est un metz excellent, pour le Duc de Nevers,

Qu’une Table fort libre, et peu de couverts.                          bis

 

Quel spectacle charmant se présente à mes yeux!

                  Une Divinité vient honorer la feste,

Dressons-lui des Autels, que pour elle on apreste

Le Nectar, le Nectar, qu’on boit dans les cieux.

Si vous vouliés pourtant, adorable Déesse,

                  N’estre icy bas qu’une Duchesse?

                  Au lieu de Parfums, et d’encens,

On pourroit vous offrir de cent mets differents.                                    bis

                  Cessez donc d’être immortelle;

                  Beuvez, et mangez comme nous,                                 bis

                  Voicy de meilleurs ragouts,                                             [304]

                  Poulardes, Perdrix, Sarcelles.

Un entremets parfait, des vins piquant et doux.

                  Cessés donc d’être immortelle;                                                     bis

                  Beuvés et mangez comme nous.

 

Chanson                                                    1691                                          [305]

Sur l’air: Ouy je le dis et le repete, ou Il a battu son petit frere.

Couplets fait à Rome, celui cy en passant devant le Palais Manchini aprés le départ de Madame la Duchesse de Nevers. par Coulanges.

 

Hélas! que ce Palais est vuide!

Je crois voir le Palais d’Armide (1);

Dépouillé de tous ses appas;

Enpartant de ces lieux aimables,

L’Enchanteresse de Damas,

Les a rendus insuportable.

 

(1)   Armide êtoit Reine de Damas. Madame de Nevers est de la Maison de Damas Thianges.

 

Autre                                                           1691                                          [306]

Sur le même Air.

Sur la retraite à Grosbois, de Monsieur de Fieubet Conseiller d’Estat; par Coulanges.

 

Je n’entends plus parler en France

Que de retraites d’importance,

De gens qui du monde sont las;

Pour moy s’il faut que je me cache,

Je reviens isi, sur mes pas,                            à Rome ou il êtoit

Me faire hermite au Mont Testache (1).

 

(1)   Sous ce Mont, sont des grotes remplies des meilleures vins d’Italie.

 

Chanson                                                    1691                                          [307]

Sur l’air. Reveillez vous belle endormi.

Critique de l’Opera d’Eneé. Par Madame des Houlieres. Les parolles sont de Fontenelle*, et la Musique de Colasse*. (au lieu de Capistron)

 

Moy qu’on a veu chanter Achille;

Moy qui n’ay point chanté Thétis;

Je chante un heros que Virgille

Chanta dans Rome au tems jadis.

 

Gens éclairez, Doctes Cervelles,

Admirateurs de Capistron;

Ne pensez pas que Fontenelle

Soit indigne d’une chanson.

 

Venez voir l’Opéra d’Eneé,

Hatez vous pour vous bien placer;

Mais déja la Toille est leveé.

Silence je vais commencer.

 

                  Prologue.

La félicité se partage

Entre les hommes et les Dieux;

Encelade avec son bagage                                                                 [308]

Trébuche en attaquamy les cieux.

 

                  1er. Acte

L’ingrat déserteur de Cartage,

Rebut de l’Oracle et des flots,

Par un troisieme mariage,

Veut s’asseurer un long repos.

 

L’Infante a beaucoup de tendresse;

Mais elle n’en fait pas semblant.

Le Troyen laisse sa maîtresse

Pour causer avec sa Maman.

 

Ȏ Venus! Ȏ Maman mignonne!

Montrez que je vous dois le jour;

Faites qu’on aime en ma personne

Un petit frere de l’amour.

 

Le Roy veut devenit grand pere;

Et la paix lui semble un grand bien.

Turnus n’a pour lui qui la mere,

Latinus aime le Troyen.

 

                  IId Acte.

On ferme pour la paix prochaine

Le Temple habité par Janus,                                                             [309]

Junon brise tout, et la Reine

Se réjouit avec Turnus.

 

Dans un bocage qu’on révére

La Princesse va soupirer.

Le Roy vient consulter son pere

Qui daigne souvent l’eclairer.

 

La fortune est toujours volage,

Sa haine n’est passans retour;

De long malheurs sont le présage

Des bien qui viennent à leur tour.

 

Faunus prétend que l’avinie

A son gré choisisse un époux;

La jeune Princesse est ravie,

Et cede aux transports les plus doux.

 

Au sortir d’un facheux nuage

Didon l’arreste, et lui fait peur;

Mais bientost elle prend courage

L’ingrat Troyen lui fait horreur.

 

Il vient et dit transporté d’aise,

Princesse que je suis content.

Tout beau, Seigneur, ne vous déplaise,                                                      [310]

Turnus doit du moins l’estre autant.

 

Quel coup mortel! quelle response!

Junon, ce sont là de tes coups.

Ah Ciel! faut il que je renonce

A l’espoir d’un himen si doux?

 

                  IIIe. Acte.

Turnus querelle la Princesse,

Parce que ses voeux sont flotans;

Elle demande avec adresse

Qu’on lui donne un peu plus de tems.

 

Souffrez avec moins de colere

Que je ne précipite rien

Dans le grand choix que je dois faire;

Il ny va pas pout peu du mien.

 

Je vous aimay dés vôtre enfance;

Je suis vôtre cousin germain.

Mon Cousin, sans une dispense,

Je ne puis vous donner la main.

 

La Princesse souffre avec peine

Que l’on médise du Troyen,

Et quoiqu’ait dit l’ombre affriquaine,                                         [311]

Eneé est un homme d’ésprit.

 

Turnus est beaucoup plus sincere;

Il scait aimer comme Amadis;

Mais il ignore l’art de plaire

 

Que Turnus enseigne à son fils.

Quelles sont ces voix éclatantes?

Que veut dire ce bruit confus?

La Reine conduit les Bacchantes.

On celebre aujourd’huy Bacchus.

 

Dans cette bachique cohüe,

On forme un projet inhumain.

Lavinie est fort retenüe,

La Reyne la veut mettre entrain.

 

Que ferez vous pauvre Princesse?

Il faut heurler avec les Loups;

La Reine, Bacchus, tout vous presse.

De choisir Turnus pour époux.

 

                  IVe. Acte.

Le Troyen que ce choix assomme

La réduit à s’en excuser,

Turnus accepte ce galant homme                               [312]

Le Combat qu’il peut refuser.

 

Dans une Coquille doreé,

On voit la Déesse d’amour.

Elle est brillante, elle est pareé,

Et plus belle que le beau jour.

 

Comment vous portez vous ma mere?

Vous négligez bien vos enfans;

Quel destin, quelle Loy sévere,

Loin de moy vous tient si longtemps?

 

Mon fils connoît mieux ma tendresse,

Lavinie est fole de toy;

Mais le coeur de cette Princesse

Est un don que tu tiens de moy.

Item Turnus porte une hache

Teinte dans le Lac sousterrain;

Mais je t’aporte une rondache

Qu’a fait pour toy le bon Vulcain.

 

                  Ve. Acte.

Sur un présage assés frivole,

La Reyne rend graces au destin;

Turnus meurt, Junon s’en console,                                              [313]

Les Troyens vont parler latin.

 

Quoiqu’on ait souffert comme un Diable,

Quand on devient heureux amant.

Il reste un scrupule effroyable

D’avoir eu trop peu de tourment.

 

Autre                                                           1691                                          [314]

Sur le même Air.

Réponse à Madame des Houlieres, par Monsieur de Saint Gilles, sur les Chansons précedentes.

 

Moy qui viens de chanter Achille               Opéra

D’un stile agréable et bouffon;

Souffrirai-je qu’on dise en ville,

Que je n’ay pas fait ma chanson.

 

Réveillez vous belle endormie,

Ma gloire allons, réveillez vous;

Une redoutable énnemie,

Ravit nos coeurs les plus doux.

 

On dit qu’une Muse scavante,

A fait dans le sacré vallon,

Une Chanson divertissante,

Sur l’Opéra de Capistron.

 

Ce faux bruit m’assonne, il me tuë;

Je le feray cesser ma foy;

Achille dans son humeur bouruë

N’estoit pas si fâché que moy.

 

J’esprouve le sort de Virgile,                                                            [315]

Sur certains vers qu’on lui vola,

Il sentit émouvoir sa bile.

Il s’en plaignit, il en parla.

 

Ceux qui prennent moins de peine,

Sont, disoit il, les mieux payez;

Si nos Moutons portent la Laine

C’est pour faire nos draps rayés.

 

Le boeuf qui tire la Charuë,

N’a pas le fruit de son tourment;

Tandis qu’il travaille et qu’il süe,

Son maître mange le froment.

 

L’Abeil en son travail fidelle,

Forme son Miel du suc des fleurs;

Mais ce Miel n’est pas fait pour elle,

Un autre en goûte les douceurs.

 

Pourquoi charmante des Houlieres

M’enlevez vous dix huit couplets?

Quoi! n’estes vous pas assez fiére

Des beaux vers que vous avez faits?

 

Restituez donc à Saint Gilles,

Le foible hommeur de ses Chansons.                                         [316]

Contentez vous de vos Idilles,

Et retournez à vos Moutons.

 

Autre                                                           1691                                          [317]

Sur le même Air.

Réponse de Madame des Houlieres.

 

Si le public à l’aventure

A répondu sous nôtre nom;

L’agréable et vive peinture

De l’Opera de Capistron.

 

Il ne vous a point fait d’outrage,

N’en soyez pas mal satisfait;

Ce n’est pas tant pis pour l’ouvrage,

Quand on dit que nous l’avons fait.

 

Autre                                                           1691                                          [318]

Sur l’air de la Chacone d’Amadis.

 

Plaignons tous aujourdhuy,                          bis

                  Le malheur de Joly,                           bis

Il s’est mepris avec la Duchesse;

Car il a pris son C….. pour ses fesses.

                  De ce crime Dieu le punit,

                  Car il a mal au v….

 

Autre                                                           1691                                          [319]

Sur l’air du Prevost des Marchands.

Sur …………. Mauroy Superieur des Missionnaires aux Invalides, et Monsieur le Duc de Beauvillier.

 

Beauvillier est pris par le coeur,

Comme Mauroy son Directeur (1);

Il aime jusqu’à sa servante (2)./ Il f… tout jusqu’à sa servante,

L’auroit on crû si bon auteur?/ Qui l’auroit cru de si bon coeur,

Lui qui parût n’avoir de pente

Qu’à s’unir à son Directeur./ Que pour servir son Createur.

 

Qui voudroit blâmer ce caton,

Seroit dépourveu de raison.

Est il plus sage que son pere?

Ne scait on pas que Saint Aignan

Jusqu’à la mort fut un compere,

Aussi fortuné que galant.

 

Ils different pourtant entre eux,

Quoiqu’également amoureux.

                                                                                                                                                                                                     

(1)   Mauroy, connu pour ses galanteries, êtoit Directeur du Duc de Beauvillier.

(2)   Une des Filles servantes de la Duchesse de Beauvilliers se trouva grosse. Il est vraiqu’ilfut fait entendre aux Domestiques que celui qui avoit fait le delit se declarant on lui pardonneroit en épousant la fille. le reste de ce qui attaque personnellement le Duc est une charge sur lui faite a plaisir.

 

L’un en faisoit toujours trophée,                                                   [320]

Et l’autre bien plus finement

Ne fait bien qu’à la dérobeé,

Avec l’objet le plus charmant.

 

Mais que ce beau sexe est trompeur,

Dans sa plus obligeante humeur;

Le Duc découvre que sa belle,

Rendoit comme lui bienheureux

Quatre valets, que l’infidelle

Comptoit plus que lui vigoureux.

 

Comment si prit ce fin matois

Pour en scavoir tant à la fois?

Aprés ses Oraisons publiques;

Il dit d’un ton plein de courroux

A tous ses tremblans Domestiques,

Il est fripon entre vous.

 

Qui fillette ici déflora?

Et ma Maison deshonora?

Oui je vangerai cette injure

Avec toute sévérité.

Hors qu’un prompt aveu ne m’asseure

De la sincere vérité.

 

Devant le Duc se prosterna

Un qui dit qu’il la suborna,                                                                 [321]

Un second s’accusa de même.

Lui faisant cent soumissions,

Un trois, enfin un quatriême

Firent mêmes Confessions.

 

Aussitôt le Duc convaincu,

Qu’il etoit quatre fois cocu,

A la Duchesse s’en explique.

Disant de chasser à l’instant

Une soubrette assés lubrique,

Pour rendre ainsi chacun content.

 

La pauvrette accuse à son tour,

A quoi se borna son amour;

Conjurant sa chere maîtresse

De rabattre un peu de ses coups.

Luy protestant que sa grossesse

Venoit du seul Duc son époux.

 

Autre                                                           1691                                          [322]

Sur l’air de la marieé de Roland.

Sur la Défaite de Leuze.

 

Valdee en furie,

                  Crie,

Quoi donc! ma Gensdarmerie

                  Plie,

Devant les Francois?

Morbleu j’enrage

Viste du Charois                bis

Pour sauver mon bagage.

Autrement tout est pris

Si nous sommes suivis.

Qu’ils sont en courroux;

Grands Dieux quels coups,

Ils portent à nos gens par derriere!

Quels tailleurs de croupierent!

Croy moy Nassau,

Sauvons nous et quittons le trot,

Et prenons le galop.

 

Chanson                                                    1691                                          [323]

Sur l’air ……………

Par Mademoiselle de B……par Madame des Houlieres.

 

Vous regnez sur le Côteau, hoho,

Où Phoebus tient son empire,

Toujours sur un ton nouveau, hoho,

Luy même il met vôtre Lire,

Et je scay que quand vous voulez médire;

Il ordonne qu’on vous tire,

Du robinet de Boileau, ho ho.

 

Autre                                                           1691                                          [324]

Sur l’air de Joconde.

Pour Mademoiselle d’Armagnac

 

D’où vient que d’aucun de ses traits,

L’amour ne vous enflamme

A-t’il fait des desseins secrets?

Belle Iris sur vôtre ame

Aux yeux point trop belle?

Psiché l’etoit bien moins que vous,

Lorsqu’il brûloit pour elle.

 

Autre                                                           1691                                          [325]

Sur l’air de Jean de Vert.

Sur le Mareschal de Duras.

 

Foin de Bonne et des Allemans,

On a veu Jean farine,

Piller partour les païsans,

Pour fonder la cuisine.

Il a surpris fort peu de Gens;

Cela se faisoit il du tems

De Jean de Vert?

 

Autre                                                           1691                                          [326]

Sur l’air: Quand le peril est agréable.

Sur la Princesse de Turenne.

 

Jeune Princesse de Turenne

Laisse-tu perdre ton crédit

Reprends le verre dans ton lit,

Bois a perte d’haleine.

 

Souffre-tu qu’on te reproche

Sur l’amour comme sur le vin?

Que Bournonville & Lavardin

Te passent en débauche?

 

Chanson                                                    1691                                          [327]

Sur l’air de Lanlurlu.

Sur Innocent XII. qui fit une chute qui le rendit longtemps malade.

 

                  Il est ridicule,

                  Que je sois parti

Sans baiser la Mule

                  De Pignatelli;

Cependant je ne l’ay pû;

Car il s’estoit cassé le cul.

 

Sur la Prise de Mons.                        1691                                          [329]

 

Puis-je croire ce que je vois?

Tout cede à ton bras redoutable;

Mais pourquoi s’etonner, Grand Roy?

Car plus la chose est incroyable

Et plus elle est digne de toy.

 

A Mademoiselle….                             1691                                          [330]

 

Mons êtoit la seule Pucelle                           ville.

Que l’Espagne gardoit avec beaucoup de soin,

                  Louis en eut besoin,

La belle se rendit, vous eussiés fait comme elle.

 

Chanson                                                    1691                                          [331]

Voyage à Auxerre en 1692. à Mademoiselle Adam.

 

Vous demandez trop pressante Climene,

Tous les jours un couplet de ma façon;

Mon esprit plus froid qu’un glaçon,

Ne peut plus rien produire qu’avec peine,

Et la rime est mal avec ma raison.        

 

Mais cependant il faut vous satisfaire,

Si l’on ne veut se brouiller avec vous;

Ma Muse allons ranimons nous;

A Climene il s’agit icy de plaire,

Et ne pas s’attirer son courroux.

 

Le Mercredy dixieme de Septembre,

Je m’embarquay sur un coche à Paris;

Dieu! que je m’y trouvai surpris;

Si l’on ne m’eut placé dans une chambre,

Sur le Tillac je restois sans abris,

 

Je vis Moines de toutes les especes,

Des blancs, des noirs, des tannez, et des gris;

Les uns avoient bon coloris sur leurs habits.

D’autres portoient des piéces                                                        [332]

Qui n’haïssoient ny les jeux ny les ris.

 

Les Abbez gens à faire bonne chere

Ny manquoient point non plus que les filous;

Des filles faisant les yeux doux;

Des Marchands, des Plaideurs, des gens de guerre,

Des femmes, des vieux et des jeunes fous.

 

Du bonhomme Noé l’Arche fameuse,

Certainement portoit moins d’Animau,

On y vit des Originaux;

Et dans cette troupe si monstrueuse,

J’y remarquay des hommes tous nouveaux.

 

Au départ de Paris la Grandville,

On vit les uns, les autres observer.

Tous songeoient à se preserver

De certains gens dont la main habile,

Scait attraper ce qu’on veut conserver.

 

Un vieux Abbé fut portant assés beste                                      Provençal fort fier perdit 18. Louis d’or.

Pour s’aller joindre avec un grand coquin,

Qui lui gagnant tout son frusquin,

Le réduisit à venir à la Queste.

Lui qu’on avoit veu plus fier qu’un Tarquin

 

On eut encore la plaisante avanture                                          [333]

D’une fillette avecque son amant,

Qui l’ayant quitté sourdement,

S’estoit sauvé dessus nôtre voiture

Ne voulant point taster du Sacrement.

 

Mais sitôt que la pauvre creature

Eut eu le vent de cette trahison,

Avec les forces d’un Samson;

Elle partit pour joindre ce parjure,

Et déchirer ce malheureux garçon.

 

Tant et si bien courut par la Campagne,

Qu’elle attrapa le Coche prés d’Ablon;

Et dévouvrant ce Ganclon,

Qui ne vouloit plus l’avoir pour compagne;

Elle lui fit un joly carillon.

 

Traitre de chien lui dit elle en furie,

C’est donc ainsi que tu viole ta foy;

Tu ne connois ny Dieu ny Loix:

Ah! plustost l’on m’arrachera la vie,

Que de souffrir que tu partes sans moy.

 

Prens pitié de ta pauvre Marie-Anne,                                        c’estoit son nain.

Ajouta-t’elle en se radoucissant;

Au nom de nôtre amour naissant;                                                [334]

Reviens à moy, ou que je t’accompagne,

De mes faveurs, est tu méconnoissant?

 

De tout ce qui se passa sur le Coche,

C’est ce qui fut de plus divertissant,

De la voir en Lion rugissant

A son Amant faire un sanglant reproche

Et puis reprendre un ton tout languissant.

 

L’on eut cette petite Commédie,

Depuis Ablon jusqu’au point de Melun,

Où Marianne êtoit à Jeun;

Oubliant du galant la perfidie,

Souper, coucher avec lui, fut tout un.

 

Le lendemain je ne scay ce qu’ils firent,

Car je quittay la voiture de l’eau,

Et sortîmes de ce Batteau,

Sur l’avis des gens sages qui nous dirent

Qu’on seroit dans peu loin de Montreau.

 

Nous montâmes dans une Cariolle,

Qui nous menoit assez gaillardement;

Bien empaillez, le nez au vent,

Nous y faisions plus d’une capriolle;

Mais aussi nous n’allions pas lentement.

 

Sens nous fournt commodité plus belle,                                  [335]

Une Chaise pour aller à Senant,

C’est un Château appartenant

A une aimable et bonne Demoiselle,

Qui nous receût tres agréablement.

 

Elle descend d’une illustre famille,

Qui dés longtemps en France est en renom;

La grande Darquien c’est son nom.

En Pologne l’on scait comme elle brille;

Sur le tronçon, en voit un rejetton.                                              le Mareschal de Montigni de ses Ayeux.

 

Cette fille jamais ne dégénere,

De la vertu de ses Nobles Ayeux,

La pudeur paroist dans ces yeux.

A son air l’on connoist quel fut son pere,

Et qu’elle apartient à nos Demy Dieux.

 

Danc ce Château j’etois fort à mon aise;

Mais cependantil fallut en partir,

Ce ne fut point sans ressentir

Lorsqu’on fut prest à monter dans la chaise,

Un chagrin qui pouvoit m’anéantir.

 

Estant enfin arrivé dans Auxerre,

Je logeay chez des Peres sans surplis;

J’y bus beaucoup de Rossolis;                                                         [336]

J’y fis aussi bonne et fort grosse chere;

Mais bon Dieu qu’ils avoient de mauvais Lits.

 

Cette nuit là Climene; Ah! quel domage!

Je ne dormis gueres plus qu’un Lutin,

Depuis le soir jusqu’au matin,

Au Dieu Morpheé on me vint rendre homage:

Pour l’attirer j’y perdis mon latin.

 

J’estois si mal de cette nuit facheuse,

Que dans peu j’eus perdu mon embonpoint,

Sans un dîné qui vint à point;

Dieu benit la Marquise* généreuse                                            *de Saint Phal.

Qui voulut si bien remplir mon pourpoint.

 

Le Mercredy une brave Comtesse,                                               de Courson                            Sept. 4. temps.

Entreprit de nous traiter en poisson;

J’y mangeay d’excellent Saumon;

Que ce repas eût de la délicatesse!

Mais surtout le vin s’y trouva bon.

 

Le Jeudy je disnay chez la Marquise,

Qui voulut bien nous avoir sans façon;

Je lui chantay cette Chanson,

Et quoiqu’elle ne soit pas fort exquise,

Fallut lui en donner une leçon.                                                       [337]

 

C’est bien la plus noble et la plus belle Ame

Qui soit dans tout le Pays Auxerrois;

Elle plairoit même à des Roys;

Car elle a ce qu’il faut à une Dame

Pour ranger les plus grands coeurs, sous ses Loix.

 

Chés elle on voit briller la politesse,

Beaucoup d’esprit, encore plus d’enjoüement,

De la beauté, de l’agrément;

Certain air de grandeur et de Noblesse,

Qui ravit, et qui plaît infiniment.

 

La Compagne de cette aimable,                                                    Mademoiselle Faverille

N’avoit que trop de quoi plaire à mes yeux;

Je vous le dis du sérieux;

J’allois sentir une nouvelle flame

Pour peu que je fus resté sur les lieux.

 

Je ne scaurois vous peindre cette ville,

Sinon que ce n’est pas un lieu charmant;

On n’y vit point civillement;

Le peuple est dur, impoli, peu docile,

Et ne parle que fort grossiérement.

 

Les Femmes y sont affreusement laides.                                [338]

Ah! grand Dieu, les effroyables museaux!

Leurs bras sont comme des fuseaux.

A l’amour ce sont d’excellens remedes;

Vous ny voyez aussi que noires peaux.

 

De leur esprit je ne peux vous rien dire,

Avecque elles, j’ay peu daigné causer;

On les voit toutes niaiser;

Ou du prochain cruellement médire,

Croyant par là se singulariser.

 

Des hommes, les uns sont toujours à boire,

Et les autres passent leur temps à jouër.

Le Sexe ils ne peuvent louër;

De le brusquer ils font toute leur gloire;

On en voit peu aux Dames se dévoüer.

 

Le Dimanche je partis pour la Motte,                                         le 21 Septembre.

Afin d’y boire avec un mien parent;

Nous n’allions point d’un pas trop grand,

Et cependant nôtre Histoire anecdotte,

Dit que son fils culbuta en courant.

 

A cela prés fort gay fut le voyage,

Grosse chere on nous fit en Pigeonneaux,

Poulets de grains, tendres Perdreaux;                                      [339]

Jeunes Lapins, Dindons de moyen âge,

Accompagnés de fort bons Cailleteaux.

 

Par un mauvais temps contre nôtre attente,

Nous partîmes le Mardy pour Courson,                                    23. Septembre.

Le Carosse êtoit assés bon,

Et cependant sans la double soupante,

Nous étions étendus de nôtre long.

 

Je vis enfin arriver avec joye                                                             le 29 Septembre.

L’heureux moment fixé pour mon retour,

Ah Dieu! que j’en benis le jour;

Quand on m’auroit donné force monnoye,

On n’auroit pû me faire mieux sa cour.

 

Je m’embarquay le coeur plein d’allegresse,

L’esprit content, l’oeil sec, le front serain,

Et m’esloignant de ce terrain;

Je fis de ny plus venir, la promesse,

Quand on voudroit m’en faire souverain.

 

Je vous dis donc adieu, ville d’Auxerre;

Adieu à tous vos grossiers habitans,

Ils sont pour moi trop médisans;

Je ne pourrois vivre dans une Terre,

Où l’on trouve si peu d’honnestes gens.                                  [340]

 

Quelques uns d’eux m’ont fait assés grand chere,

Je l’avoüe, et leur en suis obligé;

Pour eux je me sens affligé;

Qu’ils sont à plaindre ayant l’Ame sincere,

Où l’honneste homme est si outragé.

 

Marchez Chartiers, tirez nous d’affaire;

Faites courir un peu plus vos Chevaux:

N’epargnez point ces animaux.

Patron dite à vos gens ce qu’il faut faire;

Courage enfans nous payerons vos travaux.

 

Prenez garde que le coche n’arreste;

Au travail que chacun soit assidu;

A Paris je suis attedu;

S’il nous alloit venir quelque tempeste,

Que ce seroit pour nous de tems perdu.

 

Quittons Joigny, laissons-là Villeneuve;

Pour à Sens de meilleure heure arriver demain,

Qu’on nous fasse lever de grand matin

Pour reprendre le Fleuve,

Et Mercredy le voyage achever.

 

Je vois Paris, qu’un chacun se réjoüisse;                                 [341]

Chantons enfans chantons Gaudeamus,

Laissons-la tous les Oremus;

Qu’à cet aspect ma rate s’epanoüisse,

Desja mes Sens s’en touvent tous émûs.

 

Oh Dieu! que ce soir l’on me verra boire,

Et que je vais manger, rire et chanter;

Ne songeons plus à lamenter;

Je suis abord il faut crier victoire.

Allons nous en sans tant parlementer.

 

Enfin aprés trois semaines d’absence,

Je me retrouve avec vous mes chers amis;

Eloigné de vous, je gemis,

Dés que je me vois en vôtre presence,

De mes fatigues je suis tout remis.

 

               Envoy

Ces Couplets vont à vous Climene,

Recevez-les au moins de fort bon coeur,

Et pensez un peu au Rimeur

Qui les a faits sur les bords de la Seine

Pour vous plaire & vous mettre de belle humeur.

 

                                                          Année 1692                                        [343]     

 

1692.                                         [345]

                                                                                                                

Sur Mathurin Savary nommé Evesque de Seez en 1682. et sacré en 1693. Il êtoit jadis Marchand; Il parût la 1re. fois à Seez avec un Justeaucorps violet garni de boutons d’or et une veste en or et violet.

 

Avez vous veu la veste

Que Monseigneur avoit?

On dit que c’est un reste

D’etoffe qu’il vendoit.

 

Chanson                                                    1692                                          [346]

Suisse ou Flamant de Monsieur de Bousset.

 

Mon foy sti Roy té France l’estre ein crand movement, l’y fenir tous les ans prendre ma lochement; l’autre l’an qui n’est plus l’y fenir en personne faire sortir té Mons tout nostre Carnisson, moy chafre tant Namur ein four chouli Maison, tant mon café pon fin, faut ché l’apantonne; moy s’en fa tant Mastrickchi sis en seureté, & si lé Roy té France y fenit pour la prendre, pien plitost que sortit en crante lâcheté, moy poiré tout mon fin, moy poiré tout mon fin, afant que te la renter; moy poiré tout mon fin, moy poiré tout mon fin afant que témoy la rentre. moy poiré tout mon fin; moy poreé tout mon fin afant que te la rentre.

 

                                                                        1692 (Fevrier)                      [347]

Ce fut a peu prés dans ces termes que le le Saint Pere s’exprima après avoir leu la Lettre que Monsieur de Rebenac Envoyé Extraordinaire de Louis XIV. lui donna en presence du Cardinal d’Estrées & du Duc de Chaunes Ambassadeur de France. Par cette Lettre, Louis XIV. prie bien humblement sa Sainteté, premierement de regarder Monsieur de Rebenac son Envoyé sur le même pied qu’il regarda autrefois le Doge de Gennes, qu’il fit venir à Paris, l’asseurant qu’il ne l’envoye que pour lui demander pardon des Offenses qu’il a commises contre le Saint Siége. Secondement qu’il déteste et désaprouve tout ce qui fut arresté dans l’Assembleé des Evesques de l’an 1682. en 3e.  lieu, qu’il biffera de sa propre main en presence de son Nonce Apostholique, toutes les Déclaraons, Ordonnances & autres procédures qui ont été enregistreés en Parlement, contre l’autorité du Saint Siége Apostholique. Et enfin il asseure le Pape, qu’il confesse et reconnoît son infallibilité, tant dans le spirituel, que dans le temporel. Ce dernier Article plût si fort au Saint Pere, qu’il fit aussitost assembler les Cardinaux Cazanata, Panciatici, & Albani, qui resolurent unaniment que sa Sainteté devoit envoyer les Bulles aux évesques de France, à condition qu’ils prestcroient tous serment entre

                 

                                                                        1692                                          [348]

les mains de son Nonce qui est à Paris, Qu’ils reconnoissent les 4. Propositions du Clergé de France pour érronées, et qu’ils ne souffriroient plus à l’avenir qu’on enseignat rien sur cette matiére. Cette résolution ayant êté prise, le Saint Pere fit en même tems expediter des Bulles pour plusieurs évesques, et le lendemain le Cardinal d’Estrées, le Duc de Chaune Ambassadeur de Louis XIV. et le Marquis de Rebenae son Envoyé extraordinaire, vinrent avec un grand cortege remercier le Pape de sa bonté paternelle et lui presenterent avec un profond respect un blanc signé du Roy avec un Sceptre et une Couronne de Diamans de la valeur de cent mil francs, que le Marquis de Révenac mit aux pieds du Saint Pere, à qui il dit tout haut.

                  Saint Pere nous venons au nom de nôtre Roy,

                  Confesser qu’il depend absolument de toy,

                  Nous mettons à tes pieds son Sceptre et sa Couronne,

                  Dis nous ta volonté, commande, parle, ordonne,

                  Remplis ce Blanc signé selon ton bon Plaisir,

                  Car Louis veut enfin contenter ton désir.

 

Pasquin qui s’etoit trouvé dans l’Assembleé, voyant que le Marquis de Rebenac en demeuroit là, et que ces Messieurs faisoient leurs reverences pour se retirer, poursuivit ainsi.

                  Son oeil tout penitent ne pleure qu’eau benite,

                  Il ne peut plus trouver de repos dans son gîte,

                  Et son Esprit trouble de cent crimes commis

                  De ses meilleurs sujets à fait ses ennemis.

                  Parce qu’il ne sait plus où donner de la teste.

                  Tres sainte Pere il vous vient aujourd’huy faire feste.

 

Les François furent fort surpris d’entendre ce langage, le Duc de Chaune ayant ouy que c’estoit Pasquin, fit courir après, mais il se sauva dans la foule, et comme il prend toutes sortes de figures selon qu’il veut, il fut impossible de le reconnoitre, malgré les François il chanta encore cet Air en se retirant.

 

                  Quand le Coq chantoit hautement,         bis

                  Pierre pleuroit amerement;                         bis

                  A present que le Coq soupier,

                  Le Saint Pere n’en fait que rire,

                  Lire boula, lire lan lire

                                    Lan la la,

                                    Lire boula.

 

                  Ce Coq dit-on asseurement

                  Couve sous un oeuf un serpent;                                                     [350]

                  Mais pour éviter sa piquure,

                  Il ne faut pas que l’on l’endure

                  Lire boula, lire lan lure,

                                    Lan la, la

                                    Lire boula.

 

A la reserve du Coq qui chante, comme le Roy fait aujourd’huy, de la joye qu’il a d’avoir deux enfans, que l’on a trouvés sous une feuille de chou; Car il fait remarquer que quand le Roy voulut légitimer en Parlement Madame de Blois, et le Duc de Maine, le 1er. President demanda qu’elle êtoit leur mere, le Procureur du Roy répondit que sa Majesté les connoissoit pour ses enfans et que cela devoit suffire, le President n’estant point satisfait de cette réponse demanda si le Roy les avoit enfantés par la teste ou par la cuisse, comme fit autrefois Jupiter. Non reprit aussitost le Procureur il les a trouvés sous une feuille de Chou; Ah! dit le Président

                  Cette regle de droit est donc fausse aujourdhui.

                  Un enfant peut toujours bien connoitre sa mere,

                                    Mais pour scavoir quell est le pere,

                  Il peut souvente fois prendre un autre pour lui.

 

Monsieur Talon Avocat du Roy, voyant que le Parlement faisoit difficulté reconnoitre ces enfans pour legitimes, s’ecria en plein Bareau.

 

                  Pour couvrir un double Adultere,

                  Louis à bien raison de cacher ce mistere.

 

Dés qu’il eut prononcé cette parolle, le President recueillit les voix et dit au Greffier.

 

                  Escrivez que deux Anonimes,

                  Qu’on a trouvés dessous un chou,

                  Estant sortis d’un même trou,

                  Sont déclarez pour légitimes.

 

Cette Affaire fit pour lors tant de bruit qu’on en fit ce vaudeville qu’on chantoit hautement dans Paris. Sur l’air de Joconde.

 

                  Oui! Mademoiselle de Blois,

                  Avec le Duc de Maine,

                  Causeront un jour aux Francois,

                  Du mal & de la peine

                  Puisque Louis les a trouvez,

                  N’est-ce pas assez dire;

                  Il veut qu’ils soient légitimez

                  Pour troubler son empire.

 

La Quintessence                                 1692 (17 Mars)                   [353]

des Nouvelles.

 

Le Dessert vient toujours sur la fin d’un repas,

                  Quand on joüe des Comédies,

                  Des Opéra, des Tragédies,

La farce pour dessert jamais ne manqué pas

                  Ainsi suivant cette méthode,

Aprés avoir joué mon petit Opéra,

                  Je veux dans une Période

En dire une au lecteur qui le détrompera.

 

Tout le monde croit que Madame de Montespan est bien considéreé à la Cour; mais on se trompe fort, toutes les Princesses du sang la regardent comme les Paons de la Fable regardoient le jay qui s’étoit paré de leurs plumes; dans les occasions elle ne manquent pas de lui donner un coup de bec. Madame la Duchesse d’Orleans lui en donna un bien sensible, dans une visite qu’elle fut lui rendre au Palais Royal le 6. du courant. Cette Princesse qui avoit êté avertie de sa venuë, avoit donné ordre à une de ses Demoiselles d’aler prendre Madame de Monstespan au haut de l’éscalier, et de lui dire tout haut en l’introduisant dans sa Chambre;

 

                  C’est Madame de Montespan,                                      [354]

                  Qui vous vient faire un compliment.

 

Madame qui êtoit assise dans un fauteuil, tenant un Livre en sa main, fit d’abord semblant de ne pas entendre. Cependant Madame de Montespan s’aprocha, et aprés lui avoir fait une profonde reverence, lui dit, Je viens, Madame, vous témoigner la joye que je ressens de l’honneur que vous m’avez fait. Quel honneur vous ai-je fait? reprit la Duchesse. Quoi! Madame poursuivit la Montespan, n’est-ce pas un grand honneur pour moy d’etre entreé dans vôtre illustre Alliance? Il est vrai, Madame, repondit la Duchesse en s’emportant, que c’est un grand honneur pour vous; mais un tres grand deshonneur pour moy. Quoi! reprit la Montespan un peu en colére, quel meilleur parti pouviez vous esperer pour le Duc de Chartres, que celui qu’il a pris, d’epouser la Fille d’un des plus grands Rois du monde & qui est votre niece et sa Cousine germaine. Je veux croire charitablement, puisqu’il le faut, répondit la Duchesse, que le Roy en peut être le pere. Je dis charitablement, ajouta t-elle, car des personnes de vôtre sorte sont bien sujettes à caution. Comment des personnes de ma sorte! repliqua la Montespan en furie; Je suis une femme comme une autre. Il est vrai, repartit la Duchesse, qu’il y a des femmes qui vous ressemblent. Il n’y en a même par malheur que trop dans cette Cour, qu’on a raison d’apeller, Communis generis. Je n’entends point le Latin, reprit la Montespan, qui voulut changer l’entretien, mais je vous avoüe, que j’ay toujours fort aimé les honnêtes Compagnies. Je n’en doute nullement, dit la Duchesse; mais poursuivit-elle, en lui demandant; Les honnestes Compagnies vous aiment-elles? cette demande surprit fort la Montespan qui ne scavoit que répondre et qui fut bien aise de voir entrer Madame de Montpensier qui vint fort a propos pour romper cet entretien. Aprés quelques momens de conversation, la Montespan se retira avec Madame de Montpensier à qui elle temoigna n’estre pas contente de l’accueil que Madame la Duchesse d’Orleans lui avoit fait; mais elle fut encore bien mortifiée, d’entendre chanter en passant sur le pont neuf ces deux Couplets.

                                    Sur l’air Lire lan la.

                  Un chacun parle librement,        bis

                  De la faveur de Montespan,        bis                                               [356]

                  Les Dames n’en font rien que rire,

                  Lire lan la, lire lan lire,

                  Lan la lire lan la.

 

                  Mais pour Madame, ce dit on,   bis

                  Elle est facheé avec raison,         bis

                  Et n’oseroit pourtant rien dire;

                  Lire lan la lire lan lire,

                  Lan la, lire lan la.

 

Chanson                                                    1692                                          [359]

Sur l’air des Triolets.

faite à la Harelle en Juillet 1692.

l’Abbé Savary à Mademoiselle du Petitfort.

 

Mon Petitfort vous m’avez pris,                                    le 22 Juillet.

De vous je n’ay pû me deffendre;

De vos beautez je suis épris,

Mon Petitfort vous m’avez pris.

Et vos beaux yeux tous plein d’esprit,

Ont force mon coeur à se rendre.

Mon Petitfort vous m’avez pris,

De vous je n’ay pû me deffendre.

 

Belle et charmante Petitfort,                       C’est le pere de l’Abé qui parle.

Je vois que de prés l’on vous presse;

Certain Abbé vous parle fort,

Belle et charmante Petitfort.

Je lui pardonne, il n’a pas tort,

De vous marquer tant de tendresse,

Belle et charmante Petitfort,

Je vois que de prés l’on vous presse.

 

Petit Abbé de Savary

Retirez vous au séminaire,                                                                [360]

C’est tout de bon qu’on vous le dit;

Petit Abbé de Savary.

Laissez moi toute seule icy;

C’est bien assez d’un petit pere.

Petit Abbé de Savary

Retirez vous au séminaire.

 

Mon cher Abbé de Savary

Revenez tost du séminaire;

C’est tout de bon qu’on vous le dit

Mon cher Abbé de Savary;

Fanchon voudroit vous voir icy

A la place du Petit Pere.

Mon cher Abbé de Savary,

Revenez tost du séminaire.

 

Autre                                                           1692                                          [361]

Sur l’air d’un Rigaudon.

Sur le même sujet.

 

Mon pauvre Abbé,                              c’est Mademoiselle Petitfort qui parle

Quitte là la Poësie;

Qui mene à la folie,

Deviens plus sensé:

Tu fais l’amant

D’une jeune voisine

Depuis peu de tems;

Mais elle dit que tu as bien la mine

De perdre l’esprit

Va t’en au séminaire

Aprendre ton métier,

Et a dire un Breviaire

Qui sera ta moitié;

Iris ne te rendra jamais heureux,

Et méprise tes feux.

 

Autre                                                           1692                                          [362]

Sur l’air: Laire la laire lan laire.

Sur le même sujet.

 

Aimable et charmante beauté;

Je vais boire à vôtre santé;

Ne pourrai-je jamais vous plaire?

                  Laire la , laire lan laire,

                  Laire la laire lan la.

 

Je suis arrivé sur les lieux,

Pour vous y presenter mes voeux;

Escoutez moi donc sans colere,

                  Laire etc.

 

J’ay du coeur, j’ay de l’enjouëment,

Je n’aime tout au plus qu’un an;

Voyez si c’est là vôtre affaire.

                  Laire etc.

 

Autre                                                           1692                                          [363]

Sur l’air Ah! qu’elle y va gayement.

En allant à Saint Just chez Monsieur de Savary. le 23. Juillet.

 

Beautez et Nonnes chéminants

Ah! qu’elles y vont gayemens;

Ayant déjêuné gentiment

Tout le long de la Prairie.

Ah! qu’elles y vont les jolies;

Ah! qu’elles y vont gayemens.

 

Ayant déjeuné gentiment.

Ah! etc.

Vont à Saint Just gaillardement.

Tout le long etc.

 

Vont à Saint Just gaillardement,

Ah! etc.

Sans le Congé de leur maman.

Tout le long etc.

 

Sans le Congé de leur maman,

Ah! etc.

Le grand Maître en sera content; (1)                        

Tout le long etc.

 

(1)    Monsieur de Savary grand Maître des eaux et Forests de Normandie

 

Le grand Maître en sera content,                                                  [364]

Ah! etc.

Il s’en ira tout triomphant,

Tout le long etc.

 

Il s’en ira tout triomphant,

Ah! etc.

D’avoir attrapé le moment,

Tout le long etc.

 

D’avoir attrapé le moment,

Ah! etc.

De pouvoir conter son tourment.

Tout etc.

 

De pouvoir conter son tourment,

Ah! etc.

A la beauté qu’il aime tant.                           Mademoiselle de Petitfort.

Tout etc.

 

A la beauté qu’il aime tant,

Ah! etc.

Qui lui répond en gambadant.

Tout etc.

 

Qui lui répond en gambadant.

Ah! etc.

Vous ne seres point mon amant.                                                   [365]

Tout etc.

 

Vous ne serez point mon amant; Ah! etc.

Car j’ay un autre engagement.

Tout etc.

 

Car j’ay un autre engagement,

Ah! etc.

Que je veux aimer constamment.

Tout etc.

 

Que je veux aimer constamment.

Ah! etc.

Adieu, faites en tout autant.

Tout etc.

 

Adieu faites en tout autant,

Ah! etc.

Allons retrouver la maman.

Tout etc.

 

Allons retrouver la maman,

Ah! etc.

Embrassons-la bien tendrement;

Tout etc.

 

Autre                                                           1692                                          [366]

Sur l’air Beuvons à nous quatre

Arrivant à Saint Just pour diner le 24. Juillet.

 

Voicy les voisines,

Et bonjour le voisin,

Nous sommes de faim.

 

                  En partant.

 

Salut à nôtre hoste,

Mille remercimens;

Faisons lui nos complimens

Regagne la coste

Tous bien tristement.

 

Autre                                                           1692 (le 25. Juillet)          [367]

Sur l’air des Triolets

Sur Madame Savary qui se piquoit de scavoir les regles de faire des Vers et qui les citoit pendant qu’on badinoit en faisant des laire lan laire, raportant pour l’exemple un couplet qu’elle disoit avoir fait il y avoit longtemps.

par Madame Raft et Madame du P…..

 

Va t’en au Diable Savary,

Tu nous met toujours en colere;

Et quoi! jusque dans nôtre lit,

Va t’en au Diable Savary.

Venir trancher du bel esprit,

Et troubler nos laire lan laire.

Va t’en au Diable Savary,

Tu nous mets toujours en colere.

 

Autre                                                           1692                                          [368]

Sur l’air de Jean de Vert.

Sur le même sujet.

 

Vit on jamais rien de plus sot

Que cette mine fiere?

Qui vient icy mal apropos

Nous conter des chimeres.

Voyez un peu ce bel esprit

Pour se vanter d’avoir escrit

                  A Jean de Vert.

 

Autre                                                           1692                                          [369]

Sur le même Air.

Sur Monsieur Mordant qui avoit quitté le 24. de juillet Madame l’Abbesse sans lui tenir compagnie comme il le devoit.

 

Mordant ne manque point d’esprit;

Mais bien de politique.

Il fait paroître son dépit,

Et d’un rien il se pique.

Cela se fait il a present?

On l’auroit pû souffrir du tems

                  De Jean de vert.

 

Autre                                                           1692 (28 Juillet)                                   [370]

Sur l’air Alleluya.

A mon retour de Villarceaux.

 

Lorsque je partis de ce lieu,                          Monsieur Mordant

Je vous fis un fort triste adieu;

Mais Dieu mercy m’i revoila.

                  Alleluya.

 

Je vous revois bonne maman,

Il y a pour le moins un an,

Que mon malheur m’en arracha.

                  Alleluya.

 

Chere maman pardonnez moy,

Je vous le jure sur ma foy,

Jamais cela n’arrivera.

                  Alleluya.

 

Que Villarceaux est ennuyant,

Que j’y ay vescu tristement,

Nulle de vous le croira.

                  Alleluya.

 

Cependant rien n’est plus certain

Que même dez le grand matin;                                                       [371]

Je baillois à ces grilles là,

                  Alleluya.

 

A la fin je suis prez de vous,

Cheres soeurs réjouissons nous;

Chantons dansons et cetera.

                  Alleluya.

 

Divertissons nôtre maman,

C’est le devoir d’un bon enfant,

Et puis le Ciel nous benira.

                  Alleluya.

 

Autre                                                           1692                                          [372]

Sur l’air des Ennuyeux.

Mon voyage à Villarceaux

 

De mon voyage je reviens,

Et voicy quelle est l’histoire:

Je partis si je m’en souviens,

A cinq heures, ce fut sans boire;

Quand j’arrivay chez le Curé,

J’estois, ma foy bien altéré.                          le 24. juillet a Heubecourt

 

Je l’avois cherché dans Vernon,

Sans en aprendre de nouvelles;

Car ce villain petit garcon

Etoit allé avec des belles

Se promener jusqu’à Bissy,

Sans de moy prendre aucun soucy.

 

En entrant dedans la Maison

J’envoyay Jacquet à la Cave,

Qui m’apporta, en franc oison

Un vin couleur de betterave,

Dont je ne bus qu’un petit coup,

Ne le trouvant pas à mon gout.

 

Le Prieur ayant aperçeu                                                                                        [373]

Du pauvre jacquet lourdise,

Et voyant qu’il s’etoit deçeu

Lui fit reparer sa sottise,

L’envoyant tirer du bon vin,

Dont je bus jusqu’au lendemain.

 

Estant ainsi en liberté,

Et nous regardant comme freres;

Aprés avoir bien caqueté,

Nous reprenions en mains les verres.

A ce qui te plaist mon amy,

Et tope et tinque grand mercy.

 

Lorsque minuit vint à sonner,

Nous sonnâmes aussi retraite;

Nous nous mimes à raisonner,

L’un l’autre denos amourettes:

Toute aimable du Petitfort

Nous parlâmes de vous bien fort.

 

Enfin le lendemain matin,

M’estant greffé sur Rossinante;

Je pris tristement le chemin

D’une maison bien ennuyante;

Que Villarceaux est un couvent,

Où passe bien mal son tems.

 

Du Petitfort qu’eussiez vous fait,                                                  [374]

Dans cette affreuse solitude?

On ny voit point de Berthemet

Pour en charmer l’inquiétude:

Vive la Harelle ou vernon,

Dites, jamais s’i ennuye t’on?

 

J’aurois peine à vous exprimer,

Comment j’y passois les journées;

Vous pouvez vous imaginer,

Qu’elles me sembloient des anneés;

Mais ces discours sont superflus,

J’en suis sorti n’en parlons plus.

 

Lorsque je voulus en partir,                                            le 27.

Il survint un vilain orage,

Qui pouvoit me faire périr,

Si je me fus mis en voyage;

Par prudence il fallut rester

Pour ne me pas aller noyer.

 

Mais le Tonnere êtant passé,

Je songeay à me mettre en route;

L’orage leur dis-je est cessé,

C’est en vain que vous parlés toutes;

Je veux aller trouver Mordant,

Car il m’attend asseurement.

 

Je pris congé de ces Nonains,                                                          [375]

Malgré toute leur résistance

De rester jusqu’au lendemain,

Elles me firent grande instance;

Mais je leur dis le bon Mordant

M’attend ce soir bien seurement.

 

Adieu vous dis, mes cheres soeurs;

Adieu ma chere Divigeé;

Croyés moi, essuyés vos pleurs;

Vous vous montrez trop affligeé,

Il faut enfin nous séparer,

Car Mordant m’attend à souper.

 

Rocinante à beaucoup d’esprit

Depuis Bray jusqu’à son étable;

Sans lui parler elle m’a mis

Dans un chemin fort agréable;

Rocinante en a bien apris

A l’école du bon Fyfy.

 

Dés que je fus chez le Prieur,

Je chantay mon historiette;

Combien crois tu, ma chere soeur,

Qu’on bût de son vin de Farguette?

Nous en soufflâmes seurement

Trois pintes bien tranquillement.

 

Nous raisonnons ainsi tous deux,                                                 [376]

De tout ce qui nous pouvoit plaire,

Aux tendres objets de nos voeux,

Nous buvions comme des comperes.

Et dans cet agréable employ,

Minuit nous attrapa ma foy.

 

Il êtoit question ce matin

De revenir à la Harelle;

La crainte du méchant chemin

M’a fait Monter une haridelle,

Sans selle, bride, et étrier,

Comme un pauvre Menestrier.

 

Ainsi huché sur le Grison,

J’ay suivi Dame Rocinante,

Sans aucun accident, sinon,

Qu’ayant une épaule méchante,

Si je ne me fus bien tenu

Par terre il m’auroit etendu.

 

Ne songeons qu’à nous rejouir,

Je suis encore à la harelle;

Mais je n’ay plus guere à jouir

D’une Compagnie aussi belle;

Il faut retourner à Paris,

Adieu donc les jeux & les ris.

 

Dieu! que l’on m’y verra chagrín,                                                  [377]

Et que j’y feray triste mine;

J’y pleuray soir & matin,

Ne voyant plus cette blondine,

Qui par la douceur de ses yeux

Me rejouissoit dedans ces lieux.

 

Charmante Abesse excuses moy,

Prenes pitié de ma foiblesse,

Prés de vous je trouvois de quoy

Charmer l’ennuy et la tristesse;

Mais helas! il me faut partir,

Je peux bien dire adieu plaisir.

 

Autre                                                           1692                                          [378]

Sur l’air Et son son

Par Mademoiselle du Petitfort.

 

Une dévote a leü dans la Sainte Evangile,

Qu’il faut jeuner au feu toute plante infertile.

                  Et son son.

 

Qu’on ne la traite point de badine et de folle,

Elle a de point en point suivi la parabolle,

                  Et son son.

 

C’est par le bon avis d’un pere Trinitaire,

Que la devote a pris ce parti salutaire.

                  Et son son.

 

Elle explique tres bien la tres Sainte Ecriture,

Elle a pour son sauveur fait une créature.

                  Et son son.

 

Autre                                                           1692                                          [379]

Sur l’air de l’Echelle du temple.

En partant de Vernon pour Mantes le 31. Juillet en compagnie de Messieurs Tallement, et de Madame sa soeur, de Madame de Milly mere et fille, de Mesdesmoiselles Fontenay mere et filles, de Mademoiselle Passerat, et de Monsieur de Malherbe.

 

La Compagnie de Tallement,

Part de Vernon fort tristement;

De quitter cette aimable ville

Où l’on passoit si bien le tems

A danser dessous la charmille

Au son de plusieurs Instrumens.

 

Lorsqu’on se mit dans le bateau

La Conté pleura comme un veau;

Laugeois* en eut l’Ame affligeé,                                  *Conseiller au Parlement.

Et de Milly pareillement,

Qui voyant sa femme embarqueé

Se retira tout dolemment.

 

Un Abbé* qu’on ne nomme pas,                                   *d’Anviray

Soupira quittant les appas,

D’une tres charmante Baronne;                                  de Clermont       [380]

Les larmes lui vinrent aux yeux,

Et il ne put trouver personne

Pour le consoler dans ces lieux.

 

Au moment de l’embarquement,

Tout le monde chercha Mordans*;           fils, Lieutenant general de vernon.

Mais comme il a le coeur fort tendre,

Il ne voulut point dire adieu;

Et l’on craint qu’il ne s’aille pendre

A Forge ou dans quelqu’autre lieu            Il partoit en jour là pour Forge.

 

Le bon Monsieur de Fontenay,

N’avoit pas, ma foy, la coeur gay;

On vit aussi pleurer des Nonnes,

Et l’aimable du Petitfort,

Conduisant ses belles personnes,

Parut triste dessus le Port.

 

Autre                                                           1692                                          [381]

Sur l’air de Mais.

Par Mademoiselle du Petitfort, à la Harelle.

 

Soeur Savary l’Abesse te destine

Pour au Couvent aller chanter matiné;

                  Mais

Si tu fais trop la Mutine,

Tu n’en reviendra jamais.

 

Autre                                                           1692                                          [382]

Sur le même Air.

Couplets faits en revenant de vernon et envoyez à Mademoiselle du Petitfort le 3. Aoust 1692.

 

Du Petitfort que je ressens d’allarmes!

Et qu’à Paris je repandray de larmes.

                                    Pour,

Avoir connu tous vos charmes;

Je vais resver nuit et jour.

 

Malgré l’oubli qui suit toujours l’absence,

Vous me verrés signaller ma constance;

                                    Mais,

                  Quelle rude penitence

                  Si vous ne m’aimiez jamais.

 

J’en fais l’aveu, j’étios un peu volage;

Mais desormais l’on me verra tres sage,

                                    Loin,

                  De friponner d’avantage

                  Vous seule aurez tous mes soins.

 

Je n’auray plus cette ancienne foiblesse,

D’aller partout prodiguer ma tendresse;                                                  [383]

                                    Non,

                  J’ay fait un voeu de sagesse,

                  Auprés de vous dans Vernon.

 

J’en ay conté jadis a chaque belle,

Et l’on ma veu à toutes infidelle;

                                    Mais

                  J’ay juré dans la Harelle

                  De ne vous quitter jamais.

 

Voila tout ce qu’à pû faire ma muse,

Car tres souvent la badine s’amuse;

                                    Mais

De vôtre bonté j’abuse;

                  Vôtre valet à jamais.

 

A repartir il faut que je m’apreste,

Que n’est-ce helas! pour aller ou vous êtes.

                                    Oh!

                  Que j’en ferois grande feste;

                  Mais je vous tourne le dos.

 

Autre                                                           1692                                          [384]

Sur le même air

Couplets faits en allant à Clairefontaine. le 4. Aoust 1692.

 

Pere Merry, t’est le plus habile homme,

Qui fut jamais de Paris jusqu’a Rome;

                                    Car

                  Tu donne tes ordres comme

                  Si tu estois Maitre ez Arts.

 

                  Sur celuy des Ennuyeux.

Hier au soir en arrivant

Dedans la ville de Chevreuse;

On nous receut fort gallemment,

Et l’histoire en est curieuse,

L’on sonna, l’on carillonna,

Comme on eut fait pour le Legat.

 

                  Sur celuy de Landerirette.

A mon maître aussitost je dis,

Soyez certain de tout cecy,

                                    Landerirette.

Se fait par ordre de Merry,

                                    Landeriri.

 

On fit cesser le Carillon,                                                                                         [385]

Pour faire entendre le violon,

                  Landerirette.

Le tout par ordre de Merry,

                  Landeriri.

 

Aprés cela j’aurois juré

Trouver le soupé préparé,

                  Landerirette.

Par les bons ordres de Merry,

                  Landeriri.

 

Mais en entrant au Cabaret,

Nous ne trouvâmes rien de prest,

                  Landerirette.

Où Diable est ton ordre Merry,

                  Landeriri.

 

Eh! pourquoi leur dis-je tout haut?

N’avez vous rien tenu de chaud?

                  Landerirette.

Vous n’avez donc point veu Merry?

                  Landeriri.

 

Pardon mon Pere, excusez moy,

Dit la maîtresse en grand émoy;

                  Landerirette,                                                                             [386]

Je n’ons point l’ordre de Merry,

                  Landeriri.

 

Ne fallout point de violon,

De Cloches, ny de Carillon,

                  Landerirette.

Il falloit à soupé Merry,

                  Landerri.

 

Prends y bien garde un autrefois,

Au lieu de rester dans tes bois,

                  Landerirette.

Va donner tes Ordres Merry

                  Landeriri.

 

Ce coup nous te pardonnerons,

Doucement nous te traiterons,

                  Landerirette;

Mais regale nous bien Merry.

                  Landeriri.

 

 

                                                                        1692                                          [387]

Parodie de Monsieur l’Abbé de Lubert, après la Prise de Namur 1692. Sur les 3. 1ers. Scenes du 1er. Acte d’Atis.

 

                                    Scêne 1re.

                                    les Flamans.

 

Allons, allons accourez tous

                  Guillaume vient en Flandres.

Trop heureux Allemands venés icy l’attendre;

                  Mille peuples seront jalloux

                  De tant d’or que pour vous

                  Sa rigueur à sceu prendre.

 

                                    Scêne 2e.

                                    Nassau.

 

                  Allons, accourez tous,

Je viens pour vous deffendre.

                                    les Flamans.

Quand nos champs sont parez de ces vives couleurs,

                  Qui regnent sur les fleurs,

Quand le Ciel l’adoucit, que l’herbe vient a croître;

Le carnage chez nous commence de paroître,

Et nous fondons en pleurs.

                  La valeur du François s’eveille;

                  Et court au 1er. bruit de Mars,

                  Il bat, il force nos ramparts,                                            [388]

                  Le Statouder encore sommeil.

                                    Nassau.

Vous devez mieux juger du parti que je prens.

J’en veux à des guerriers dont les fougues legeres,

Passent avec fureur ainsi que des torrents;

                  Je scai que des efforts si grands,

                  Ont un sort qui ne dure gueres.

                                    les Flamans.

                  Il faudroit secouir Namur,

                                    Nassau.

                  Mes bras ne scauroient te deffendre;

                  Mais croyés moy, c’est un coup seur,

                  J’ay deux bons yeux pour le voir prendre.

                                    les Flamans.

                  Vôtre flegme en la guerre, et vos rares secrets,

                                    Poussent à bout les plus discrets.

                                    Nassau.

                  Les Francois prennent une ville,

Et vos yeux aussitost me voyent de travers;

Pour un Château perdu vous en aurez dix mille,

                  Quand j’auray conquis l’univers.

                                    les Flamans.

Que de fols ont signé la Ligue avec l’Empire,

                  L’Espagne doit s’en repentir.

                  L’Hollandois voudroit en sortir,

                  Le petit Savoyard soupire,

Les Anglois ont cherché ce qu’on leur fait sentir;                                [389]

Si leurs maux sont outrez, leur crime est encore pire.

François que triomphez, que vous êtes heureux!

Vos Biens sont a l’abri sous un Roy glorieux,

Et nous prés d’expirer nous n’oserions nous plaindre:

                  Et malgré nos tourmens rigoureux,

                  Et malgré ceux qui sont à craindre.

Francois qui etc.

                                    Nassau.

J’ay crû chers Alliés pouvoir tout entreprendre,

Et trouver les François aussi laches que vous.

Mais je n’ay point trouvé de foible pour les prendre.

 

                                    Scêne 3e.

                                    les Flamans.

                  Allons, accourez tous,

                  Nassau va nous deffendre.

                                    Nassau.

                  Si les François sont assés fols,

                  Pour assiéger, laissons les prendre;

Je vous promets qu’un jour je leur feray bien rendre.

Mais je n’ay pas encore animé mon courroux.

                                    les Flamans.

                  Allons accourez tous,

                  Nassau va nous deffendre.

                                    Nassau.

Ecoutez leurs canons, ecoutez leurs Tambours,

Ils remplissent mon coeur d’une frayeur étange.                                [390]

                                    les Flamans.

                  C’est à vous que l’on a recours;

                  Venez vaillant Prince d’Orange.

Les Bourgeois de Namur demandent du secours;

                                    Louis redoutable,

                                    Courageux aimable,

                  Voudroit devenir leur Roy;

                  Doivent ils subir sa Loy?

                                    Nassau.

Il faudroit contre lui gagner une victoire.

Je le scais comme vous, et je le voudrois bien.

                                    les Flamans.

Oui s’il ne vous en coutoit rien;

                  Car telle est votre gloire.

                                    Nassau.

                  Souvent quand on s’est avancé,

                  Pour la deffense des murailles.

                  On y trouve ses funerailles,

                  Ou du moins on est relancé.

                  Que les Armes de la France,

                  Soient beaucoup a redouter,

                  Aprés tant d’expérience.

                  Je ne puis en douter.

                                    les Flamans.

                  Allez Guillaume avec Baviere;

                  Faites mieux à Namur qu’à Mons

                                    Nassau.                                                                       [391]

Mais les François sont des démons,

                  Qui ne me craignent guere.

                                    les Flamans.

Serez vous insensible à l’espoir des Lauriers?

                                    Nassau.

                  Avec cent mille guerriers,

J’evite les combats autant qu’il m’est possible

                  Si j’etois battu par malheur,

                  Je connois bien mon coeur,

                  Il seroit trop sensible.

S’ils prennent des Châteaux et des villes sur nous,

                  Cela ne doit pas vous surprendre.

                  Tous ensemble avec Nassau.

                  Fuyons, et courons tous,

                  Namur vient de se rendre.

 

Chanson                                                    1692                                          [392]

Sur l’air des folies d’Espagne.

Par Mademoiselle F….. à Monsieur d’U………. à Pignerole.

 

Nos ennemis ont quitté votre Ville,

Et semblent s’en éloigner pour toujours;

Je devrois donc avoir l’esprit tranquille,

Puisque je ne crains plus rien pour vos jours.

 

Si j’allois vous soupçonner d’inconstance,

Seroit-ce à tort? parlez moy franchement;

Quant tous les jours on me fait confidence,

Que vous avez un autre engagement.

 

Complainte des Flamans              1692                                          [393]

Sur l’air des Folies d’Espagne.

 

Hélas! Nassau, quel sera nôtre azile

Contre Louis? qui peut nous proteger?

Si tous les ans il nous prend une ville?

Où pourrons nous à la fin nous loger?

 

Tu nous flattois de faire des merveilles,

Pour arrester le cours de ses Exploits;

Mais devant lui tu baisse les Oreilles,

Quand ta valeur nous réduit aux abois.

 

Pauvres Flamans que nous sommes a plaindre,

D’etre Artisans nous mêmes de nos maux;

De tous côtés nous avons tout a craindre,

Quand verrons nous la fin de nos maux?

Quoi! falloit-il épuiser nôtre bourse,

Sans nous donner aucun soulagement?

Quelle sera Nassau nôtre resource?

Quand nous t’aurons donné tout notre Argent.

 

Tu nous flattois d’une belle entreprise

Qui nous devoit render heureux a jamais;

Par ces discours tu nous mets en chemise

Sans rien tenir de ce que tu promets.                                        [394]

 

Tu préparois pour faire une descente,

Un Armement formidable aux François;

Ces grands aprets ont trompé nôtre attente,

Et Furne enfin couronne tes Exploits.                       s’empara de Furne mois de Septembre.

 

Devant Namur nous croyons voir le Siége;

Mais tu nous dis qu’il n’est pas encore tems,

Et nous voyons que c’est un autre piége

Que cet hiver à nos bourses tu tends.

 

Tout come nous l’Anglois est miserable,

Et l’Hollandois n’en est pas plus heureux.

Touchant l’argent nostre sort est semblable;

S’il prend sur nous, il prend bien plus sur eux.

 

Aprés avoir fait gémir tant de monde,

Aprends Nassau quels sont pour toy nos voeux;

Nous prions Dieu que le Ciel te confonde,

Et nous sauve d’un fleau si dangereux.

 

Chanson                                                    1692 (Septembre)            [395]

Sur l’air Scavez vous bien beauté cruelle.

Par Mademoiselle F….. à Monsieur d’I………

 

Mon coeur est plein d’Allegresse,

Voyant finir les beaux jours;

Bien loin d’en être en tristesse,

Je ne fais que chanter toujours;

Quel plaisir que l’hiver se presse;

Car je verray mes amours.

 

L’Esté, pour moy, est sans charmes,

L’Automne à plus d’agrement;

L’Hyver fait cesser mes larmes,

En me ramenant mon Amant;

Mais que je sentiray d’allarmes,

Aux aproches du printemps.

 

Il est doux lorsqu’on est tendre

De retrouver son Berger;

Il est bien facheux d’aprendre,

Qu’on ne doit le voir que leger;

Tous les jours l’on me fait entendre,

Que vous n’aimez qu’a changer.

 

J’aprends pour toutes nouvelles                                                                     [396]

Que vous avec des Cloris;

Et que vous courrez les belles

A Pignol comme à Paris.

Dites moy, vous écoutent ells?

Je trembre pour leurs maris.

 

Si vous aimez Célimene,

Songer à vous excuser;

Ou craignez qu’elle reprenne

Son coeur qu’on vous voit abuser.

Qu’amour prés d’elle vous ramene,

Sans ailleurs vous amuser.

 

Chanson                                                    1692                                          [397]

Sur l’air de l’Eschee du temple.

Sur le Combat de Steinkerque.

 

Aprés Mons et Namur vaincus,

La Ligue qui n’en pouvoir plus;

Pour surcroit perdre une Bataille.

Avec plus de cent mille bras;

Guillaume ne fait rien qui vaille

Dans les Siéges ny les Combats.

 

De nôtre Monarque vainqueur,

N’osant éprouver la valeur;

A ses yeux Namur il vit prendre,

Croyant que ce seroit en vain

Qu’on songeroit à se deffendre,

Quand Louis tient son foudre en main.

 

Mais quand ce soleil des François,

Aprés ses rapides Exploits, paroist

En repos dans la France;

Guillaume qui prenoit l’essor,

Voit que par sa seule influence,

Ce grand Astre l’accable encor.

 

Oui sur les Drapeaux de Louis,                                                        [398]

On fait des Exploits inoüis;

Pour lui la victoire agissante,

De ses Soldats fait des Héros,

Et son Étoille triomphante,

Fait triompher ses Généraux.

 

Guillaume aprens donc en ce jour

Ce qu’est le brave Luxembourg;

Ta deffaite en dit des nouvelles;

Le Ciel renverse tes Projets,

Veut à des peuples fidelles

Ouvrir les yeux sur tes forfaits.

 

Autre                                                           1692                                          [399]

Sur le même Air

Sur Louis Quatorze.

 

Louis est sage et généreux,

Dans ses desseins il est heureux;

A ses amis il est fidelle.

Les autres Monarques jaloux

Disent qu’il seroit leur modelle,

S’il alloit moins souvent aux coups.

 

Autre                                                           1692                                          [400]

Sur le même Air

Pendant le Siége de Namur.

 

Je ne m’estonne nullement,

Qu’Atlas porte le Firmament,

Comme dit la Métamorphose,

Puisque nous voyons en ce jour,

Que toute la France repose,

Sur la bosse de Luxembourg.

 

Chanson                                                    1692                                          [401]

Sur l’air……

 

Sur la terre et sur l’onde,

Tout ce qui voir le jour;

Il n’est rien dans le monde

Qui soit exemt d’amour;

Il faut être homme de mer, / Pour bien aimer Les Matelots,

Aiment au milieu ds flots.

 

Les Officiers de terre,

N’aiment pas constamment;

Ils sont comme le verre,

Sujets au changement.

                  Pour bien aimer

Il faut être homme de mer,

                  Les Matelots,

Aiment au milieu des Flots.

 

Un homme de Marine,

En agit autrement;

Car plus on le chagrine,

Et plus il est constant.

                  Pour etc.

 

Nous connoissons les costes

Et l’Étoille du Nord,                                                                [402]

Et comme bons Pilotes,,

Nous venons à bon port.

                  Pour etc.

 

Embarquez vous, Medames,

Ne craignez point les eaux;

Pour eteindre nos flames,

Venez sur nos vaisseaux.

                  Pour etc.

 

Les vents et les tempestes,

Les Brulots, les Rochers,

Ne sont que des fleurettes,

Aux amoureux rochers.

                  Pour etc.

 

On dit que la Sirene,

Par ses amoureux tons,

Ravit, charme, et entraîne

Ilauque et les Tritons.

                  Pour etc.

 

Chanson                                                    1692                                          [403]

Sur l’air Vivons comme le voisin vit

Ce Couplet est de Monsieur le Grand Prieur, pour Fanchon Moreau de l’Opéra.

 

Aprés avoir quitté Paris

Où tout plaisir abonde.

Avec du vin & mon Iris

J’irois au bout du monde.

 

Autre                                                           1692                                          [404]

Sur l’air de Joconde.

Adresseé à Boileau des Préaux.

 

Apollon si chéry des belles

A pris plaisir a l’egarer,

Et les Muses qui sont fémelles

Ont refusé de l’inspirer.

 

(1)   On s’est trompé sur l’air de cette Chanson, ou bien il y auroit 4. vers d’obmis parce qu’il en faut 8. Pour l’air de Joconde.

 

Chanson                                                    1692                                          [405]

Sur l’air: du Traquenard.

Le Comte de Grimbergue présentement le Prince de Barbançon qui etoit Gouverneur de Namur. Il avoit épousé Mademoiselle de Lalain sa Cousine, qui etoit fort belle et de peu d’esprit.

 

Mon Cousin que faites vous?

                  Ma Cousine je vous f.

Ah! vraiment mon Cousin

Vous prenez bien de la peine

Ah! vraiment mon Cousin

Prenez en jusqu’a demain.

 

Autre                                                           1692                                          [406]

Sur l’air: Tranquilles coeurs

par Coulanges.

Pour Monsieur le President le Coigneux, en partant de Morfontaine, pour Paris aprés les Vaccations.

 

                  Chevreuils & Cerfs courez les Champs,

                  Le Coigneux retourne à la ville;

                  Dieux! que vois d’icy, de gens

                  Qui lui vont eschauffer la bille;

Les Plaideurs, les Procez, les chagrins, les ennuys,

                                    L’attendent à Paris.

 

                  Adieu plaisirs, adieu repos,

                  Il s’en va bien changer de vie,

                  Endosser la Robbe à tuyaux;

                  Entendre un Avocat qui crie,

Et préférer enfin contrainte et gravité,

                                    A toute liberté.

 

Chanson                                                    1692                                          [407]

Sur l’air: des Rochelois.

Sur N….. Bolo ou Boleau.

 

Que Bolo a les yeux charmans!

Qu’on voit en elle d’agrémens!

Ȏ! Vénus que l’on croit si belle.

Viens te faire voir en ces lieux,

Pour déciderla querelle

Qui pouroit n’aître entre vous deux.

 

Je ne veux point de Jugement,

Je veux par accommodement

Finir entre vous cette guerre.

Que Bolo, de l’avis des Dieux,

Soit la plus belle de la terre,

Et moy la plus belle des Cieux.

 

Que Vénus a fait prudemment

D’eviter un tel Jugement!

De l’aveu de la Cour Celeste,

Avec tant de divins appas;

Boleau l’eut emporté de reste,

Faisant voir ce qu’on ne voit pas.

 

Epitaphe                                                   1692                                          [408]

De Monsieur de Louvois

 

                  Icy gît sous qui tout plioit,

Et qui de tout avoit une connoissance parfait,

                  Louvois que personne n’aimoit,

                  Et que tout le monde regrette.

 

Chanson                                                    1692                                          [409]

Sur l’air….

On dit que cette Chanson est de Monsieur Dangeau pour Madame la Princesse de Conty.

 

On a que trop de plaisir à vous rendre,

Ce que l’amour demande par vos yeux.

Ah! Princesse, seriez vous tendre?

Seriez vous pour le plus amoureux?

 

Autre                                                           1692                                          [410]

Sur l’air………

A Madame la Comtesse de Portland.

 

Belle Comtesse, l’honneur de l’Angleterre;

Vous me traittez avec trop de rigeur,

D’avoir quitté un Climat plein de guerre,

Pour la venir déclarer à mon coeur.

                                                                        Brunel.

 

Chanson                                                    1692                                          [411]

Sur l’air de Joconde.

 

Guillaume est un Roy vigilant,                     Prince d’Orange ou le Roy d’Angleterre.

Sa prudence est extrême;

Jamais sans verd on ne le prend;

Il voit tout par lui même.

Anglois de ce grand conquerant

Vous devez tout attendre;

Louis ne prend rien à present

Qu’il ne le voye prendre.

 

Il n’est Nassau, namur, ni mur,/ Ma foi Nassau Namur n’a mur,

N’y doublé Fort qui tienne;

Louis de son coup toujours seur,

Ordonne qu’on le prenne.

Luxembourg avec les François

Feront une barriere,

Que tu ne veux, et ne scaurois,

Franchir avec Baviere.

 

Il est fâcheux, on le scait bien,

Pour des guerriers habiles,

De voir, sans entreprendre rien,

Forcer de telles villes;

Mais au moins, Nassau, tu scauras.

Comment il faut les prendre;                                                           [412]

Si Mons ne te suffisoit pas,

Namur doit te l’aprendre.

 

                  Au Roy d’Espagne.

Vivez toujours, Prince, en repos

Dans le coeur de l’Espagne.

Le grand Nassau vôtre héros

Le/ Se fait voir en champagne.

Fiers Espagnols de vos Estats

Ne soyez pas en peine,

Nassau ne l’ignorera pas

En cas qu’on vous les prenne.

 

                  Le Prince d’Orange aux Alliez.

Enfin amis sans contredit,

Je scais prendre une ville;

Mons et Namur m’en ont instruit.

Je vais en prendre ille,

Je vous promets que dans un an

Ma troupe formidable

Se montrera prés de Dinant,

Si Dieu m’est favorable.

 

Chanson                                                    1692                                          [413]

Sur l’air de la Tambonne.

Sur Monsieur le Prince de Condé.

 

Sortez donc Prince;

Nos Provinces

Ont besoin de vos bras;

Montrez que vous êtes Prince,

Ou Enfant de treize mois.

 

Autre                                                           1692                                          [414]

Sur l’air: Quand Iris prend plaisir à boire.

Sur le Prince d’Orange.

 

Quand Nassau partit d’Angleterre,

Il dit qu’au bruit de son Tonnerre,

Trembleroient la Terre & les Cieux;

Mais Louis le Grand à bien sceu le confondre,

Sur Mons* faisant briller ses yeux;                             *ville.

Il a constraint cet audacieux

De regagner le Port de Londres.

 

Sonnet                                                        1692                                          [415]

Sur la Reduction de Namur.

 

Namur ville autant d’importance

Qu’il en soit dans les Pays bas;

Aprés Mons passe aussi le pas,

Et subit le jour de la France.

 

Un Prince nous donne espérance

D’un secours qu’il ne tente pas,

Et souffre avec cent mille bras

Qu’on capitule en sa presence.

 

C’est donc pour en être témoin

Qu’il vient vite et de si loin

Avec une escorte si grande.

 

Heureux aprés ce noble effort,

S’il peut avoir un Passeport

Pour s’en retourner en Hollande.

 

Complainte                                             1692                                          [416]

de la garnison de Namur.

Sur l’air des Ennuyeux.

 

Louis, disoit on, êtoit vieux,

Ce héros n’aimoit plus la guerre;

Nous ne devions plus en ces lieux

Entendre gronder son tonnerre;

Mons en fut le premier témoin;

Ma foy Louis ne vieillit point.

 

Nous l’avons veu de nos remparts

A la teste de ses Armeés

De la présence de ce Mars,

Toutes nos troupes allarmeés,

Diront partout, s’il est besoin;

Ma foy Louis ne vieillit point.

 

Mes bons amis c’est fait de nous,

Et du reste de votre Flandre;

Nassau se moque de nous tous.

Barbançons songeone à nous rendre

Sauvons le moule du pourpoint,

Ma foy Louis ne vieillit point.

 

Grand Baviere si tu m’en crois,                                                                         [417]

Aprés ta honteuse champagne

Retourne pour jamais chez toy;

Va dire à toute l’Allemagne,

Pleurant ta goute dans un coing,

Ma foy Louis ne vieillit point.

 

Si tu ne prétens en ces lieux,

Que voir Louis, prendre des villes;

Guillaume tout seul en vaut deux.

Peu de gens y sont plus hábiles;

Sans craindre laisse lui ce soin,

Ma foy Louis ne vieillit point.

 

Chanson                                                    1692                                          [418]

Sur l’air…..

Sur Monsieur de Barbançon.

 

Tout mary qu’on met en Chanson,

S’en prend à tort à Barbançon,

Qui ne songe plus a médire:

Car sa femme l’a convaincu,

Qu’il est malhonneste d’escrire,

D’un pauvre Diable de cocu.

 

Chanson                                                    1692                                          [419]

Sur l’air du Menuet de Furstemberg.

A Madame la Comtesse de Saint Geran.

 

Voicy le tems adorable Silvie;                      le printemps

Voicy le tems d’escouter les Amans;

Le Rossignol jour et nuit y convie;

Tout est amour dans nos bois, dans nos champs.

Voicy les tems adorable Silvie,

Voicy le tems d’escouter les amans.

 

Ah! quel plaisir sur la verte prairie,

De soulager ses amoureux tourmens

Voicy le tems etc.

 

Autre                                                           1692                                          [420]

Sur l’air des Ennuyeux

Remerciement pour une Chaise de commodité, construite aux Dépens de 3. personnes. par Coulanges.

 

Grace à Madame le Coigneux (1)

Ma Chaise est bonne et bien garnie;

Grace à son Courin généreux (2).

De gallons elle est enrichie,

Lamoignon (3) s’est mise en grands frais

En velours, à trois quartiers prés.

 

De velours passablement neuf,

Trois quartiers achevoient l’affaire,

Gaster sa Tarte pour un oeuf;

Voila ce qu’elle vient de faire,

L’on en eût doublé le dossier.

Et j’ay besoin du Tapissier.

 

(1)   La Presidente le Coigneux de la maison de Navailles.

(2)   Le Duc de Lauzun.

(3)   Madame de Lamoignon.

 

Autre                                                           1692                                          [421]

Sur l’air de Grizelidis.

Pour le Pere Bourdalouë qui preschoit à Saint Cheron parroisse de Basville, le jour de la feste du Saint.

 

C’est aujourd’huy la feste

La feste du Patron;

Tout le monde s’apreste

Pour entendre un sermón

Des plus exquis;

Qui dira que sans teste,

Dieu receût Saint Cheron,

                  En Paradis.

 

                  par Coulanges.

 

Sur Monsieur de Coulanges         1692                                          [422]

par Monsieur de Nevers; à Saint Martin à la fin de 9.bre 1692.

 

                  Jamais on ne s’en passera,

On veut Coulanges aux champs, on le veut à la ville,

A Saint Martin, à Meudon, à Basville;

                  On se l’arrache enfin,

                  Et c’est à qui l’aura.

 

Chanson                                                    1692                                          [423]

Sur l’air Dormez Roulette.

Entretien du Prince et de la Princesse d’Orange, aprés le Siége de Namur; par le Chevalier de Rochefort.

 

Vous paroissez chagrin.

Oh! qu'avez vous Guillaume?

Ma femme je n’ay rien.

Comment va mon Royaume?

Fort bien Guillaume.

Et vous, comment vous va?

Passablement bien ma femme; mais j’ay mal a l’Estomach.

 

Vous vous fatiguez trop,

Conservez vous de grace;

Mais dites moy un mot

De l’importante place.

Le Roy de France enfin apris Namur,

Mais qu’il fera de depense pour en réparer les murs.

 

Comment avez vous pû

Voir prendre cette ville

Sans avoir combattu?

Ce trait n’est pas habile;

Le grand Bavieres differoit de jour en jour                              [424]

D’outrepasse la Riviere pour aller à Luxembourg.

 

N’estoit-ce pas à vous,

Comme Roy d’Angleterre,/ Comme Roy d’importance,

De commander à tous

De faire diligence?

Pour aller battre ce Luxembourg si méchant,

Ou de le faire combattremême sans y être present.

 

C’estoit bien mon dessein;

Mais je n’ay pû le faire;

Car rien n’est plus mal sain

Pour moy, qu’une Riviere;

J’avois mon âne qui m’incommodoit bien fort,

Et avec cela, ma femme, je n’estois pas le plus fort.

 

Que faire maintenant

Pour vôtre renommeé?

Allez prendre Dinant

Avec vôtre Armeé.

Le Roy de France à Versailles est de retour.

Profités de son absence pour surprendre Luxembourg.

 

Ma femme, croyés vous

Que cela soit facile?

Nous avons contre nous                                                                                        [425]

Un Général habile.

Luxembourg veille, .. rien n’eschape à son esprit,

Et pendant que tout sommeil, partout des Ordres il escrit/ il observe l’ennemi.

 

Vous qui passés partout

Pour un grand politique;

Faites quelque grand coup,

Qui lui fasse la nique.

Que faut il faire ma femme? dites le moy,

Je suis tout prest pour vous plaire, c’est vous qui m’aves fait Roy.

 

Il faut absolument

Que vous chassis de Flandres

Luxembourg, et ses gens,

Et les villes reprendre,

Que son grand maître a pris sur les Flamans.

Pour vous faire connoitre pour Guillaume le Grand.

 

Vous ne repondez rien,

Mon bon ami Guillaume/ Cher ami de mon ame;

Ne parlay-je pas bien

Comme un habile Dame?

Oui da ma femme, vous faites un beau projet,

Mais, qui sera l’habile homme qui le mettra en effet?

 

J’ay veu prendre Namur

J’en ay l’ame saisie;                                                             [426]

Mais dans peu à coup seur

Elle sera reprise,

Dans mon Royaume je retourne tout expres

Pour chercher les moyens comme j’en chasserai les François.

 

Avant de s’engager

En si grande entreprise,

Il faudroit vous purger.

Couchez vous sans remise,

Dormez Guillaume, ayez soin de/ prenez bien vôtre repos.

J’auray soin de vos Royaumes, ayez soin de vôtre peau.

 

Réveillez vous Nassau,

Prenez vîte un Clistere,

En voicy un tout chaud

Que tient l’Apoticaire;

Ça le derriere, tournez vous bien comme il faut,

C’est icy, non pas non pas en guerre, qu’il vous faut tourner le dos.

 

Que me faites vous donc,

Monsieur l’Apoticaire?

Je vous mets le Canon;

Sire, laissez moy faire;

Quelle misere, je crois que je suis perdu.

Quoi! jusqu’en Angleterre j’auray le canon au cu?

 

                                                                        1692                                          [427]

Complainte du Prince d’Orange à la Flandres et aux Alliez, après la Prise de Namur 1692.

Sur l’air de la Plainte de Priam, dans l’Opera d’Achille.

 

                  Le Prince d’Orange.

Restes infortunés des villes de la Flandres;

Allemans, Espagnols, et vous pauvres Flamans.

Suspendez vos regrets, écoutés mes sermens.

Je jure d’obliger la France de tout rendre.

                  La Flandres.

Ne songeons qu’a fléchir le coeur

De ce terrible vainqueur.

                  Le Prince d’Orange.

Vous voyez Ligue deplorable,

Un Roy qui fut longtems le plus puissant des Rois,

C’est ce même Nassau qui mettra sous vos Loix,

Du plus grand des héros, l’Empire redoutable:

C’est moy que le dernier de mes fameux exploits

Vient de rendre si formidable

A tous les vaisseaux des François…………………. Pose

 

La perte de Namur est un coup tres funeste;

Mais ma valeur vous la rendra.

Ma douleur chés les morts plûtôt m’emportera,                                 [428]

Que de ne pas deffendre au moins ce qui vous reste.

Vous le scavez, vous que j’ateste?

Combien j’ay fait d’efforts pour secourir Namur,

On vous a pris cette ville importante,

Et pour comble d’horreur, ma Majesté présente:

Mais dans peu vous verrez à quel point je suis seur

De vous faire rentrer triumphant dans Namur.

Sitôt que vous serez rentré dans cette Place,

Je souhaite, je veux, et j’entens que l’on fasse

Eriger en mon nom un pompeux monument.

Ce sera pour servir de Temple à vôtre gloire,

Puisque tout l’avenir avec étonnement

Y verra quelque jour cette grande victoire.

                  La Flandres.

Que pourrois-je espérer d’un si faible secours?

Quand je vois tous les jours

Quelle est vôtre impuissance?

Je méprise tous vos discours;

Que pouvez vous, helas! contre le Roy de France?

Laissez moy de Louis implorer la bonté;

A mes soupirs il sera favorable.

N’augmentés pas l’excés de mon adversité

En le rendant inexorable.

 

Chanson                                                    1692                                          [429]

Sur l’air: Je ne scaurois.

 

L’Electeur venant de boire,                           de Bavieres.

Dit à Nassau l’autre jour.

Courons vîte à la victoire

Vengeons nous de Luxembourg.

                  Je ne scaurois.

Je risquerois trop ma gloire,

                  J’en mourrois.

 

Mais reprit il, sans rien faire,

Verrons nous prendre à nos yeux

Le rempart de la Frontiere?

Croyez moi vengeons nous mieux.

                  Je ne scaurois

Du moins passons la Riviere,

                  J’en mourrois,

 

Craignez vous cet adversaire,

Luy repartit l’Electeur?

Je prens mon humeur guerriere.

Quittez, quittez vôtre peur,

                  Je ne scaurois,

Je crains bien moins le Tonnerre,

                  J’en mourrois.

 

Sitost répliqua Bavieres,                                                                     [430]

A quoi bon venir ici?

Retournons viste en arriere;

Et quittons ce país cy;

Je le voudrois; mais je ne scaurois,

S’il me prenoit par derriere

                  J’en mourrois.

 

Je vais donc boire et reboire,

Nassau, resvez nuit et jour.

J’abandonne la victoire

Au démon de Luxembourg;

Je le voudrois; mais je ne scaurois,

Quitter le vin pour la gloire,

                  J’en mourrois.

 

Autre                                                           1692                                          [431]

Sur l’air: Reveilles vous.

 

Nassau jure en sa conscience

Que si lui même n’avoit veu,

Prendre Namur en sa presence;

Non, il ne l’auroit jamais crû.

 

Autre                                                           1692                                          [432]

Sur l’air: Quand Iris prend plaisir.

 

Puisqu’enfin, Louis, que rien ne t’étonne

Assiege Namur en personne,

Il sera bientost sous nos Loix.

Ce Conquerant si chéri de Belonne,

Ce parfait model des Rois

A toujours réduit aux abois

                  Les Ennemis                         bis

                  De sa Couronne.

 

Autre                                                           1692                                          [433]

Sur l’air. Je veux qu’on sonne pour cloches tous les pots du Cabaret, ou Les sauts de Bordeaux.

 

Pourquoi grand Prince d’Orange.

As-tu sitost disparû?

Et que fais donc ta phalange

Dans les plaines de Fleurus?

En ce lieu, troupes superbes,

Nous ouvrimes vôtre flanc,

Et vous n’y voyez point d’herbes

Qui n’ait bû de vôtre sang.

 

Vos pareils en ce carnaje

Fuyoient comme des troupeaux.

Verra-ton vôtre courage

S’animer sur les Tombeaux,

Pour courir à leur vengeance?

Déployez tous vos Drapeaux

Où prendrez vous patience

Quand Louis prend vos Châteaux?

 

A cette digne Conqueste,

Borne, Louis, tes exploits

Qui contre ta seule teste

 

Réunissent tant de Rois;                                                                                       [434]

Donne la paix à la terre,

Et nul peuple désormais

Ne craindra plus que la guerre

Ensanglante ses guerets.

 

Autre                                                           1692                                          [435]

Sur l’air de la marche du Prince d’Orange.

 

Le Prince d’Orange Nassau,

A pris son vol un peu trop haut.

                  De cet Icare,

                  De ce barbare,

De cet Icare la cire fond

Qu’on va voir Bellorophond

Luy creuser un gouffre profond.

 

On dit qu’on a veu dans Paris,

Le Prince d’Orange endormi

                  Courir la poste,

                  Dans une hoste,

Courir la poste sur un Cochon.

                  Madelon, ce dit on,

A veu ce grand Champion

Qui venoit assiéger Dijon.

 

Autre                                                           1692                                          [436]

Sur l’air: Moy.

 

Sur Barbezieux ait eu l’art de me (1) plaire,

M’en dois-je faire une grande affaire?

                                    Si

Maman (2) baisoit bien le pere,

J’ay droit de baiser le fils.

 

(1)   Madame de Blansac fille de la Mareschalle de Rochefort.

(2)   La Mareschalle de Rochefort.

 

Autre                                                           1692                                          [437]

Sur l’air: Les Oiseaux vivent sans contrainte.

Sur la Comtesse de Vienne (la Vieuville)

 

Chez la Vienne on vit sans contrainte,

On y f…… sans crainte;

                  L’époux est doux,

Tout y rit, tout y cherche à plaire,

Nous pouvons en être jaloux.

Si l’esprit ne s’y trouve guere,

                  En amour ils sont tous,

                  Moins bestes que nous.                 bis

 

Autre                                                           1692                                          [438]

Sur l’air de Mais

Sur la même personne que la précédente.

 

Qu’est devenu le sceau de porcelaine,

Où tu faisois refraichir ta bedaine?

                                    Mais

                  S’il est dans ton C…..la Vienne

                                    Il n’en reviendra jamais.

 

Un Colonel a pris martel en teste,

D’une Comtesse il se fait grande feste;

                                    Mais,

                  C’est sa premier conqueste,

                  Ne le trouvons pas mauvais.

 

Chanson                                                    1692                                          [439]

Sur l’air de la Sarabande de Lully.

Réponse de la des Chars à la Chanson précédente.

 

Vous me voyez telle qu’on ma dépeinte,

Je vous paroist toujours dans la contrainte;

Mais en particulier je fais la rage;

Est il quelque Nigaud que je n’engage?

                  Tout est receu chez moy,

                  Vous scavez pourquoi.

 

Autre                                                           1692                                          [440]

Sur l’air….

Monsieur le Prince (de Condé) fit cette Chanson à Chantilly lorsque nôtre Flotte fut battue par les Anglois & Hollandois, au Combat de la Hogueen 1692.

 

Tout est en feu sur la terre et l’Onde,

Tandis qu’en paix nous venons icy;

Libres de soucis de l’autre monde,

Gueris des erreurs de celui cy.

Tout est en feu sur la terre & l’Onde

Tandis qu’en paix nous venons icy.

 

Chanson                                                    1692                                          [441]

Sur l’air de l’Ouverture du grand Ballet, ou Marais beau séjour de la réjoüissance.

 

L’on voit dans ces lieux la Reine (1) des Danseuses;/ Icy vous voyez la Reine des Danseuses

                  L’on dit qu’elle est cagneuse,

                  Plus méchante qu’un lutin,

                  Plus séche qu’un sapin;

                  Avec son long menton,

Sa bouche est pleine de tampons,

                  Ses Levres de vermillons;

                  Ses soucies qui se touchent

                  De noir ont plus d’une couche,

                                    Et son cu

Vient du Palais, et ne vaut qu’un écu.

                  Son Esprit estun Roman,

                  Qu’un sot (2) trouve charmant;

La belle vous paroist farouche,

                  Elle ne l’est nullement.

 

(1)   La Desehart Chanteuse et Danseuse à l’Opéra.

(2)   Beaubour Receveur general des Finances.

 

Autre                                                           1692                                          [442]

Sur l’air: Ma mere mariez moy.

 

Que la guerre est un metier

Qui commence à m’ennuyer;

Condé, Turenne aux enfers,

Et pour Général n’avoir que Bouflers.

Condé, Turenne aux Enfers,

Tout ira bien de travers.

 

Chanson                                                    1692                                          [443]

Sur l’air: Laire la, laire la laire.

 

Namur tout entier est pris,

Dont Guillaume est bien surprise

Comme l’est la Ligue entire

Laire la, laire lanlaire,

Laire la, laire lanla.

 

Guillaume aux gens de sa cour,

Dit parlant de Luxembourg;

Je suis seur de le défaire.

Laire la etc.

 

Alors un de ses Dragons,

Lui dit ce sera comme à Mons.

Où l’on fir le cry derriere.

Laire la etc.

 

Aprés tant de Campemens,

Et de si grands mouvemens,

Faire de l’eau toute claire.

Laire la etc.

 

Guillaume tout interdit

A ce Dragon répondit,

C’est la faute de Bavieres,                                                                 [444]

Laire la etc.

 

De crainte d’avoir des coups.

Mon Prince retirons nous;

Allons boire à Londre de la biere;

Laire la etc.

 

Chanson                                                    1692                                          [445]

Sur l’air de Joconde.

A Madame la Princesse d’Enrichemont lors de sa 1re. Entreé dans sa Principauté, Ses vassaux lui ayant fait fraper une Médaille en 1692.

 

Les habitans d’Enrichemont

Pour vous marquer leur zele,

Inventent chaque jour, dit on,

Quelque feste nouvelle.

Princesse parmi les plaisirs,

Que fait vôtre présence;

Songez quelque fois aux soupirs,

Qu’on pousse en vôtre absence.

 

Lorsque vos sujets vos vassaux

Viennent vous rendre hommage,

Et que sur de brillans métaux,

Ils gravent vôtre Image.

Souvenez vous que ces honneurs,

Ne sont rien qu’en modele,

Et que dans le fonds de nos coeurs,

Elle est cent fois plus belle.

 

Autre                                                           1692                                          [446]

Sur l’air…..

 

A Courson je trouvai la Dame en couche,

Laquelle êtoit de repos sur son lit,

Son travail fut pourtant petit;

Du Ciel ayant obtenu une bouche

Propre a les mettre au monde a petit bruit.

 

C’est le talent de toute sa famille

Les Nigots, n’en use pas autrement;

Leurs enfans sortent aisément,

Et l’on n’en peut douter dans cette ville,               Auxerre

Qui les air fait jamais si brusquement.

 

La Marquise de Courson est fille de Nigot qui avoit les Coches d’Auxerre et Secretaire du Roy. Elle êtoit accoucheé sans sage femme, en moins d’une demie heure. Elle venta toujours ce talent, disant que ses soeurs et elle accouchoient toujours sans peine.

 

Chanson                                                    1692                                          [447]

Sur l’air des folies d’Espagne.

Sur la prise de Namur.

 

Grand Nassau, redoutable Baviere,

Grand Valdeck, vigoureux Brandebourg.

Gardez vous de passer la Riviere,

Pour ne pas rencontrer Luxembourg.

 

La voila cette imprenable ville,

Qui se rend au plus puissant des Rois,

Et Nassau recule en homme habile,

Pour pouvoir s’en fuir une autre fois.

 

Quant à vous Prince prudent et sage,

Gouverneur depuis quelques momens.

Rendez grace au Roy qui vous degage

Du grand pois de ce gouvernement.

 

Autre                                                           1692                                          [448]

Sur l’air: En Janvier jusqu’en avril. ou du brave Comte de Tallard, ou des Rochellois.

 

En Janvier jusqu’en Avril,

Sans craindre danger ni péril.

Luxembourg affamé de gloire

Forme de genereux desseins,

Dont il a perdu la mémoire,

Depuis May jusqu’ à la Toussaint.

 

Autre                                                           1692                                          [449]

Sur l’air Tranquilles coeurs.

Sur le Mariage du Marquis de Bellefonds. (Gigault)

 

Monsieur Gigault préparez vous

Au Saint devoir du mariage;

Vous allez devenir époux,

Faites bien vôtre personnage.

Contentés de Fanchon les secrets apetits,

Elle vous met au pis.

 

Baisés baisés si vous pouvez

Jusques au lever de l’aurore;

Quand Fanchon dira c’est assez,

Croyez qu’elle en demande encore.

Toujours au cabaret la vérité se dit

Et jamais dans le lit.

 

N’allez pas vous entretenir

Des maux qui suivent l’himeneé,

Vous pourriez perdre le plaisir,

De vôtre plus belle journeé.

Jouissez de vôtre heureux destin,

Repentez vous demain.

 

Autre                                                           1692                                          [450]

Sur l’air de Jean de vert.

Sur Monsieur de Damas Seigneur de Cormaillon qui avoir épousé Madame la Présidente Barentin.

 

Vôtre etoile cher Cormaillon,

N’est pas des plus commune;

Sans crainte d’être Cornaillon,

Vous avez fait fortune

Vous ne serez cocu ny gueux,

N’est-ce pas être plus heureux

que Jean de vert?

 

Triolets                                                                        1692                                          [451]

Sur la Signature du Formulaire.

 

Il est vrai, car il est moulé

Qu’il faut signer le Formulaire,

En vain on a tant reculé,

Il est vrai car il est moulé

Janseniste soit apellé.

Celui qui ne le voudra faire;

Il est vrai, car il est moulé,

Il faut signer le Formulaire.

 

C’est être hérétique de Cour,

Que de refuser de souscrire.

Ce fait est clair comme le jour,

C’est être hérétique de Cour,

Que de refuser de souscrire.

 

En conservant l’humilité

Je me conserve ma prébende,

Et je trouve ma seureté

En conservant l’humilité.

Ȏ heureuse facilité!

De signer tout ce qu’on demande;                                               [452]

En conservant l’humilité

Je me conserve ma Prebende.

 

Martin Steyaert travaille en vain

A faire triompher Moline,

Pour oppose saint Augustin

Martin Steyaert travaille en vain.

Car de cet Auteur tout divin

On defend trop bien la doctrine

Martin Stryaert travaille en vain

A faire triompher Moline.

 

Chanson                                                    1692                                          [453]

Sur l’air des Rochelois.

Sur le Mareschal de Luxembourg. A l’occasion de la Lettre escrite au Roy par ce Mareschal apres le combat de Steenkerke.

 

Voulez vous brave Luxembourg,

Scavoir ce qu’on dit à la Cour,

De vôtre derniere Bataille?                           de Steinkerke.

Chacun y publie hautement

Que vous n’avez fait rien qui vaille,

Non de coeur, mais de Jugement.

 

Quoique disent les Courtisans,

Vôtre Lettre à ses partisans.

Elle est escrite par merveille;

Mais il en falloit sans façon,

N’en déplaise à Monsieur Abeille             son secretaire.

Retrancherle joly garcon (1).

 

(1)   en parlant du Marquis de Rochefort Colonel de Bourbonnois.

 

Autre                                                           1692                                          [454]

Sur l’air de l’Echelle du Temple.

Expédition projetteé pour l’Angelterre.

 

Le dessein êtoit beau

D’aller établir de nouveau

Dans le Royaume Britanique,

Jacques l’Eglise, et les Couvens

Avec un pouvoir despotique;

Mais on a compté sans les vents.

 

Autre                                                           1692                                          [455]

Sur l’air de l’échelle du Temple.

Balet proposé pout la leveé du Siege de Namur.

 

Le Prince d’Orange enragé

D’aprendre Namur assiegé;

Harangue sa nombreuse Armeé

Pour la disposer au Combat;

Mais ses feux tournant en fumeé,

Ainsi qu’ à Mons n’a pris qu’un rat.

 

Il avoit promis aux Francois

Un ballet au son des hautbois,

Qui pour repondre à son afiche,

Lui laisserent un beau terrain,

Et comme il danse en écrévisse,

On ne peut lui donner la main.

 

Quoi que le parti fut égal,

Louis eut tout lhonneur du bal;

Valdeck et le Duc de Bavieres

Craignant la danse de Fleurus,

Leur courante en fut plus légere

En sorte qu’on ne les vit plus.

 

A la barbe de Barbençon,                                                                    [456]

Le Château dansa tout de bon,

On ne sortit point de Cadence.

Ath, Mastrick et Charleroy,

A leur rang entreront en danse.

Ostende & Gand tremblent d’effroy.

 

Bavieres est trop homme d’honneur,

Orenge en creve dans le coeur

Il vouloir envahir la Flandres;

Et comme il ny pût réussir

Il nous la regardera prendre

Pour se vanger avec plaisir.

 

Chanson                                                    1692                                          [457]

Sur l’air….

Sur la Prise de Namur.

 

Le Stathouder des Estats,

Est, dit on, des plus habiles;

C’est un grand preneur de villes,

Un grand donneur de Combats;

Mais Louis sous sa puissance

Met Namur & son Château;

Et le fait en la presence

De ce valeureux Nassau.

 

Autre                                                           1692                                          [458]

Sur l’air: Ouy je le dis et le repete.

l'Espagnol aux Alliez.

 

Bien qu’à notre domage,

Vous ayex eu de l’avantage,

Sur quelques vaisseaux des François;

Avouez que depuis la Guerre

Ils n’ont perdu qu’un peu de bois,

Et que je perds beaucoup de Terre.

 

Chanson                                                    1692                                          [459]

Sur l’air. Un Chapeau de paille.

 

Sur la signature du Formulaire que l’on commençoit a introdure dans les Pays bas. Imitation de celle faite lors de la signature du Formulaire en France. On la trouvera parmi les Ouvrages de Monsieur de Coulanges.

 

Ils sont perdus les pauvres Jansenistes,

                  L’on n’en parlera plus;

Nous triomphons nous autres Molinistes,

                  Nous les avons vaincus;

Sans alleguer ny Peres, ny Conciles,

                  Nous sommes habiles nous.       bis

 

En son Colege aux gens de robe noire,

                  La pluspart bons enfans;

Monsieur Steyaert enflé de vaine gloire;                                 Steyaert Professeur a Louvain

                  Crioit en ménaçant,

Vous signerez parbleu le Formulaire

                  J’en fais mon affaire moy.             bis

 

Le grand Steyaert, s’etant mis en voyage

                  Pour tromper les Prelats;

Voyant l’effet de sa pieuse rage,

                  Chantoit aux Prélats,                                                           [460]

Je suis venu, j’ay veu, J’ay mis en fuite,

                  Je fais le Jesuite moy,

                  Je fais le Jesuite.

 

Chanson                                                    1692                                          [461]

Sur l’air de Joconde.

 

Sur le triomphe de l’amour

                  Disent les Jansénistes,

N’oubliez le Pere Bouhours,

                  La gloire des Jesuites;

Autrefois on les accusoit

                  Du vice d’Italie;

Mais la dévote qu’il aimoit,

                  Les Peres justifie.

 

En lui faisant un bel enfant,

                  Ne croyez pas critiques

Qu’il ait fair un peché si grand;

                  Il craint Dieu et s’en pique;

Mais quand sans songer au Seigneur,

                  On cede à a nature,

L’eportement d’un tendre coeur

                  Ne rend point l’ame impure.

 

Autre                                                           1692                                          [462]

Sur ….. de Nangis, à présent la Comtesse de Blanzac (la Rochefoucault) fille de la Mareschale de Rochefort.

 

Nangis, vôtre amant est ben las

De baiser vos maigres appas;

Munissez vous d’un plus fidele,

Vôtre bon coeur/ cocu le veut fort bien;

Mais surtout soufflez la Chandelle

Que la grand maman n’envoye rien.

 

Chanson                                                    1692                                          [463]

Sur l’air des Rochelois.

Sur le Combat de Stenkerke.

 

Luxembourg fait en se jouant,

Comme Cezar en s’apliquant,

Ses impromptus vallent des veilles,

Eh si Nassau ne l’eut surpris,

L’on n’auroit point veu de merveilles

Qui n’ont d’exemple que chez luy.

 

Réponse

 

Taisez vous censeurs indiscrets

Gens comme lui sont toujours prêts;

S’il dort souvent, c’est pour mistere,

Et pour tromper son Ennemy,

Qui n’auroit point tenté d’affaire

S’il n’eût crû le prendre endormi.

 

Autre                                                           1692                                          [464]

Sur l’air ………….

 

Le Chevalier de Mone

Montre à la Bunelay

Un v….. long comme une aune,

Large et dur comme un ais;

Mais il ne la f….. pas en C…..

Pour plaire à la Cologon.

 

Elle a le C….. trop large

Pour placer ce gros v…..

Son v…. est à la marge

Qui pleure de dépit;

Mais il est si prés du C…..

Qu’il croit être f…..tu.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Recueil

de

Chansons,

Vaudevilles, Sonnets,

Epigrammes, Epitaphes

Et autres vers

Satiriques & Historiques

avec des Remarques curieuses

Années 1687 à 1692.

 

Vol XXVI.

 

Chanson                                                    1687                                          [1]

Sur l’Air de Joconde.

Le Seigneur Lachau-Montauban de la Maison de la Tour-Gouvernet, et Brigadier des Armées du Roy, et le Seigneur de la Roche sur Buys, se battirent à coups de poings ayant leur épée au costé.

 

L’attente de nôtre grand Roy

                  N’a pas êté trompée,

Quand il fit la severe Loy

                  Contre les gens d’éspee!

On ne se bat plus à la Cour

                  Que les mains dans la poche.

Immobile comme une Tour,

                  Et froid comme une Roche.

 

Autre                                                           1687                                          [2]

Sur l’air: Laire la lair lan laire.

 

Belle Mouchy  si vos appas

Ne font pas un plus grand fracas,

Que le Canon de vôtre pere,

Laire la, laire lan l’aire,

Laire la, laire lan la.

 

Je lui conseille en bon amy,

D’aller se retirer chez luy;

Et vous en quelque monastere.

Laire la etc.

 

Chanson                                                    1687                                          [3]

Sur l’air: Helas brunette mes amours.

Monsieur de Saint Gilles Mousquetaire, à Mademoiselle de Mouchy.

 

Ménagez un peu vos regars,

On ne peut s’en deffendre.

Vous allez voir de toutes parts

Cent malheureux se pendre.

Helas! sans un petit espoir

J’aurois déja fait mon devoir.

 

Mais j’ose espérer, mon feu,

Où le respect éclate

Vous touchera peut être un peu;

C’est l’espoir qui me flatte.

Hélas! sans ce charmant espoir,

J’aurois déja fait mon devoir.

 

Mourir d’amour à vos genoux;

Ȏ sort digne d’envie!

Vivre amoureux auprés de vous,

C’est une douce vie:

Helas! donnez moi cet espoir

Il me seroit doux de l’avoir.

 

Réponse                                                                                                                                              [4]

 

Mousquetaire mon pauvre enfant,

Oste de ta cervelle

Un dessein extravagant.

Crois un ami fidelle;

Hazarde moins sur ton espoir,

Je te dispense d’en avoir.                                                                                                      

 

Désespoir

 

Mourons je ne puis faire mieux.

Ȏ mort viens à mon aide,

Unique espoir des malheureux.

C’est à toi que je cede.

Helas! quand on n’a plus d’espoir,

Il faut mourir, c’est un devoir.

 

Epitaphe.

 

Malgré ces tendres sentimens.

On réduit à se pendre

Un modele des vrais amans;

Cy gist sa triste cendre;

Honteux d’avoir pris trop d’espoir

Il descend au sombre manoir.

 

Chanson                                                    1687                                          [5]

Sur l’air………….

Sur Monsieur du Cambout.

 

Par charité chrétienne

Donnez chasses à Cambout,

De toilles sont les siennes,

Que tous les soirs, la boiteuse Julienne

Avec du fil lui recout.

 

Autre                                                           1687                                          [6]

Sur l’air Si Bourdaloue

Pour briller sur la scêne,

Le pauvre Capistron

A pris pour son Mêcene

Un Bougeois de Vernon.                                   L’Abbé de Chaulieu

 

Chanson                                                    1687                                          [7]

Sur l’air: Tranquilles coeurs.

 

Laide guenon qui court partout,

Crois-tu te faire aimer par force?

En horreur l’amour se résout

Dés qu’on entend nommer la Force.

Si tu veux des amans qui chérissent tes fers

Cherchent-les aux Enfers.

 

Laide guenon quand tu te vois

Reconnois que tu vois le Diable.

Je te le jure sur ma foy

Que tu est au lit détestable.

Va t’en donc chez Jeanot avec Furstemberg

Y passer tout l’hyver.

 

Cher Chevalier, que faites vous

De cette Carcasse infectée?

Tu te perds lorque tu la f….

Elle est de vérolle empestée.

Helas! tu fais bien voir par tes feux odieux

Que l’amour est sans yeux.

 

Autre                                                           1687                                          [8]

Sur l’air de Mais.

 

Prés de Conflans il s’est donné Bataille, (1)

Le Général c’est le Duc de Noailles;

                  Mais

Pour peu que l’affaire vaille,

Il n’en tastera jamais.

 

(1) Conflans sur oise, ou plustost au camp de la plaine Douelle où Commandoit le Duc de Noailles, depuis Marechal de France.

 

Autre                                                           1687                                          [9]

Sur l’air du branle de Metz.

Monsieur de Saint Gilles Mousquetaire à Mademoiselle Marion.

 

Dans une belle assemblée;

J’estois assis prés d’Iris,

Lorsque mon coeur fut épris,

De sa belle jouë enflée;

Faut il qu’une fluction

Cause tant de passion?

 

Son beau teint n’estoit pas blanc,

Son oeil êtoit enchanté,

Sa bouche un peu de côté

Avoit une grace extrême.

Faut il qu’une fluction

Cause tant de passion?

 

Vénus êtoit potelée,

Les amours êtoient jouflus;

Pour moi je n’aimerai plus

Qu’une beauté boursouflée.

Faut il qu’une fluction

Cause tant de passion?

 

Autre                                                           1687                                          [10]

Sur l’air de Joconde.

Sur Monsieur le Tellier Archevesque de Reims.

 

Cet Archevesque aux larges reins,

Si connu dans la France

Pour l’immensité de ses biens,

Et par son arrogance;

Voyant que Madame vouloit                        d’Orleans.

Lui joüer une piéce,

S’en console, et baise en secret

La Belinghen sa Niece.

 

Chanson                                                    1687                                          [11]

Sur l’air de Joconde.

 

Corrompre une fille de bien

                  D’une fine maniere,

Et du prochain prendre le bien,

                  Lubin le pourra faire;

Mais par l’ordre de son gardien,

                  Avaler de l’eau claire;

Faites la boire à vôtre chien

                  Lubin ne le peut faire.

 

Autre                                                           1687                                          [12]

Sur l’air: Laire la, laire lan laire.

Sur l’Ordre du Saint Esprit.

 

Les Peres ne nous ont point dit

Si le Pigeon du Saint Esprit,

Estoit Ramier, ou de voliere.

Laire la, laire lan laire;

Laire la laire lan la.

 

Chanson                                                    1687                                          [13]

Sur l’air: Toute l’Europe est sous les Armes.

Pour Mademoiselle de Chasteauneuf, contre le Seigneur de Chenevieres. son nom de famille est Masparo.

 

Nostre Seigneur est sous les Armes,

                  Il s’occupe soir & matin

A chasser dans les Bleds, a tirer au raisin,

Lorsqu’à servir le Roy chacun trouve des charmes;

                  Lui comme un grand guerrier,

                  Même des plus vaillans

A la Moisson fait tous les ans la guerre,

Pour faire voir à tous ses habitans

Qu’un Fusil à la main avec la Gibeciere,

Un Seigneur peur ruiner toute sa terre.

 

Autre                                                           1687                                          [14]

Sur l’air: C’est la pure vérité.

Sur le même que la précédente.

 

Masparo ce beau Seigneur,

Passe pour un grand Chasseur;

Ce n’est qu’une médisance.

On dit que son ignorance

A tirer sur le Gibier,

Lui donne mauvaise chance,

C’est la pure vérité.

 

On dit qu’il est la terreur

Du Perdreau qui meurt de peur;

Ce n’est qu’une médisance;

On dit qu’avec violence

Il tire aux épies de bled,

En abat grande abondance,

C’est la pure vérité.

 

On dit qu’il est protecteur,

De cinq soeurs filles d’honneur,

Ce n’est qu’une médisance.

On dit que sans conscience

Tous leurs Bleds il a gâté.

Dont il fera pénitence,                                                                          [15]

C’est la pure vérité.

 

On dit qu’il a résolu

De les fouëter a cul nud,

Ce n’est qu’une médisance;

On dit que sa véhemence

Leur fait beaucoup de pitié,

La justice est bonne en France,

C’est la pure vérité.

 

On dit que de son procez,

Il espere un bon succez,

Ce n’est qu’une médisance;

On dit qu’elles font dépence

Pour le faire condamner

Par une bonne sentence,

C’est la pure vérité.

 

Sa femme par son crédit

Tous ses témoins a séduit;

Ce n’est qu’une médisance.

Ils ont de la conscience,

Et beaucoup de probité,

Ont tout dit a l’audience,

C’est la pure vérité.

 

Chanson                                                    1687                                          [17]

Sur l’air de l’amour malade

 

N’avez vous point veu par la rüe

La Pardaillan sur une grüe?

                  En vertu gadin,

Avec un jupon de satin,

                  Dans le Faubourg.

Chacun s’est écrié, voici venir la mere d’amour;

                  Elle a la mine,

                  Cette divine,

D’aller droit à Luxembourg.

 

En croupe êtoit la Capviolle,

Portant la Cape à l’Espagnolle,

                  Et son violon;

De la grüe êtoit a l’arçon

                  Par ses attraits.

Ces enfans attirez faisant fort grand bruit,

                  Couroient aprés,

                  Dont de collere,

                  La belle mere,

Fesse la grüe aux Marais.

 

En arrivant prés le Calvaire,

La Chasteauroux fraiche et legere

                  Aparut soudain                                                                                          [18]

Tenant la Castagnette en main,

                  Un vieilleux

Pour la faire dancer jouoit volte et pavane des mieux

                  Cette Assemblée

                  Fut approuvée

Et réjouit fort les yeux.

 

Mongeron avec la Montagne

Etoient sur un Cheval d’Espagne,

                  Et la Vilvenart

Sur un petit poulain a part;

                  Dans ce moment

La grüe leve le cul et jette bien loin la Pardaillan,

                  Dont cette belle,

                  Dessoubs l’aisselle,

Se fit un trou en tombant.

 

Pour la Pardaillan je soûpire,

Helas! je suis sous son empire,

                  Depuis le moment,

Que je connus son enjouement;

                  Dans un valon

Contre tous assaillans, je soûtiens plus bouffy,

                  Qu’un ballon;

                  Que Capviolle,

                  Est une folle.

                  Avec son violon.

 

Adieu                                                           1687                                          [19]

de Madame la Princesse d’Orange.

Sonnet.

 

Va Prince généreux, où ton devoir t’apelle;

Je consens que tes yeux évitent ma douleur.

Je connois ta tendresse, et je crains pour ton coeur;

Pars viste, et va cueillir une gloire immortelle.

 

La Carriere où tu cours ne peut être plus belle,

Les Loix et les Autels implorent ta valeur;

S’il est beau de marcher sur les pas d’un vainqueur,

Regarde ton Autel, et suis ce beau modelle.

 

Mais si dans le combat tu peux, songer à moy,

Souviens toy des soupirs de la fille d’un Roy

Qui craint pour son époux qui tremble pour son pere.

 

Ménage donc tes jours où jay tant d’interrest,

Et détournant ton bras d’une teste si chere,

Laisse au Ciel tout le soin d’accomplir ses Arrests.

 

Chanson                                                    1687                                          [21]

Sur l’air du branle de Metz.

Par Monsieur de Saint Gilles, pour Madame ……. Landais.

 

La bergere qui m’enchante

Est toute pleine d’appas:

On dit qu’elle a pour les chats

Une amitié surprenante,

Et pour les tendres amans,

Peu de tendres sentimens.

 

Autrefois Vénus la belle,

Sensible aux voeux d’un amant,

Pour adoucir son tourment,

Changea sa chatte en donzelle;

Et moy je deviendrai fou,

Si je ne deviens matou.

 

N’est-ce pas un bien extrême

Pour un Chat bien enflamé,

D’etre tendrement aimé,

D’une bergere qu’il aime?

Pour moi je deviendrai fou

Si je ne deviens matou.

 

Dans ce nouveau personnage,                                                                          [22]

Je vivrois modestement;

Je ne serois point gourment;

Je n’irois point au fromage.

Je ne serois au logis

Redoutable qu’aux souris.

 

Avec une douce patte,

Je gratterois doucement;

Il est fâcheux en aimant,

D’egratigner quand on gratte,

Et les plus tendres amours

Ont la patte de velours.

 

Jamais d’une ardeur nouvelle

Mon coeur ne s’en flamera;

Ma bergere me sera

Toujours constante et fidelle;

Je perdrai plustost le jour

Que de perdre mon amour.

 

Si la moindre espérance,

Mon coeur ose se flatter;

Mais craignons de l’irriter,

Eviter ce qui l’offense;

Il vaut mieux lui faire voir

Qu’on peut aimer sans espoir.

 

Autre                                                           1687                                          [23]

Sur l’air: Il a battu son petit frere.

Sur Monsieur de Madaillan qui êut la teste cassée/ coupée pour avoir couché avec sa fille.

 

Se lassant des C… de sa race

Il leur fit faire volte face;

Puis descendant jusque aux garçons,

Baisant Masles comme Femelles,

Et tout cela chez les Gascons

Ne passe que pour bagatelle.

 

A Duc de la Feuillade                        1687                                          [24]

Mareschal de France

 

Hé! pourquoi diable le Feuillade,

Le plus fou de tous les esprits,

Avec sa place incommodeet maussade,

Fait il enrager tous Paris?

De tous côtez sa dépense inouye,

Fait que l’on s’en moque aujourd’huy:

Mais ce qui plus m’anime contre luy;

C’est qu’il ait renfermé le Roy dans sa folie.

 

Chanson                                                    1687                                          [25]

Sur l’air: Reveillez vous etc.

 

Quand la Mouchi fait l’agréable

Chez le beau fils de Perauté;

Est-ce pour manger à sa table?

Ou pour coucher à ses costez.

 

Chanson                                                    1687                                          [27]

Sur l’air des Trompettes du Carrousel.

Sur l’Opera d’Acis et Galathée.

les parolles dont de Monsieur Capistron, et la Musique de Monsieur Lully.

 

Ma foy vôtre Galathée

Et le Sot Berger Acis,

N’aprochent point de Persée*,                                     *opéra de Monsieur Lully joué en 1682.

Ny du vaillant Amadis*.                                                      *Opera id joué en 1684.

                  Capistron.

Laissés-là, la Chanson,

Vous aurez un affront,

Prenez un autre ton,

Ou bien sur vôtre front

Les Lauriers faneront.

 

Que veut dire Polipheme

Avec son Flageolet?

Quant ce géant dit qu’il aime;

Je crois qu’il me bout du lait.

                  Capistron.

Laissez là etc.

 

Scilla qui fait la soubrette,

Ne scait pas bien son métier,

Elle doit dans sa retraite,

Retenir ce Chaudronnier.                                                                   [28]

Capistron;

Laissez là etc.

 

Quand Comus dit que les festes,

Parlant à ses Compagnons,

Parmi vous soient toujours prestes.

Les prent-il pour des Oisons?

                  Capistron.

Laissés là etc.

 

Hé quoi! dans la passacaille

Où la Moreau doit charmer;

On ne voit que qu’on qui vaille,

Qu’on serrer, et qu’on s’armer.

                  Capistron etc.

 

Que dans l’ardeur qui le presse

Un amant est détesté

S’il refuse à sa maîtresse

Un moment de liberté.

                  Capistron etc.

 

Chanson                                                    1687                                          [29]

Sur l’air: Il fait tout ce qu’il deffend.

Couplets faits sur le mariage du Duc de Guiche, avec Mademoiselle de Noailles. Il ne fit rien à sa femme la nuit de ses noces.

 

Du Cap de bonne espérance

J’estois parti ce matin;

Pour allaer a joüissance;

Mais j’ay manqué le chemin.

La Mer d’amour est étrange.

Le vent à toute heure y change;

Cependant j’y fais toujours

Des voyages de long cours.

 

Quand sur le Golphe du tendre,

Je m’embarquay l’autre jour,

Dans peu je croyois me rendre

Dedans l’Isle de l’amour.

La Mer paroissoit tranquille,

Leur trajet court, et facile:

Mais sur Mer pour compter bien,

Il ne faut compter sur rien.

 

La surprise de l’Orage

Ayant fait baisser le Mast,

Jetta le triste équipage

Dans un terrible embarras;                                                               [30]

Je perdis la tramontane,

Mon vaisseau qui fit la cane,

Quoique le tems devint beau,

Ne put revenir sur l’eau.

 

J’avois un vent favorable,

Doublé le Cap de pudeur;

Et cet écueil redoutable

Qu’on apelle l’honneur,

Le Ciel êtoit sans nuage,

Et je touchois le rivage;

Mais le vent changea d’abord,

Et je fis naufrage au port.

 

Chanson                                                    1687                                          [31]

Sur l’air de Joconde.

Le Solitaire de Chaulnes, devenu homme du monde, c’est un jet d’eau qu’on apelloit de ce nom, parce qu’il êtoit dans un lieu écarté et brute, qui enfin est devenu un lieu délicieux, du consentement de Madame la Duchesse de Chaulnes qui s’y êtoit toujours opposée. par Coulanges.

 

A Chaulnes dans un lieu désert

                  S’etablit un hermite,

Dix ans durant, clos, et couvert;

                  Sous la terre il habite.

Maintenant, las de ce repos

Au monde il cherche à plaire.

N’est-ce pas là de nos dévotes

                  La conduite ordinaire?

 

La Duchesse dans ce moment

                  A l’hermite propice,

Loin d’improuver son changement,

                  Se rend sa bienfaitrice;

De ses nouveaux habits prend soin;

Luy fait faire la barbe,

Et donne quatre cens de foin (1)

Pour lui nourrit un Barbe. (2)

 

(1)   Elle abandonne un Pré qui raportait beaucoup de foin.

(2)   Augmentation d’un cheval pour faire aller la Machine qui éleve l’eau, et qui rend ce jet d’eau plus considérable.

 

Chanson                                                    1687                                          [33]

Sur l’air. Je suis encore trop jeunette etc.

A Madame la Duchesse de Chaulnes, qui par un brouillard épais alloit voir travailler ses Ouvriers à Chaulnes au mois de Novembre.

 

Madame au mois de Decembre,

                  Janvier, Fevrier, Mars,

Ainsi qu’au mois de Novembre.

N’allez point tant au brouillard;

                  Je ne scaurois.

Tenez vous dans votre chambre,

                  J’en mourrois.

 

                                                                        1687                                          [35]

Les derniers jours d’Appartemens, avant le départ du Roy, Monsieur le Grand Prieur (le Duc de Vendôme), causant avec le Duc de la Ferté, dans l’endroit de la Collation, aperçêut Madame de Bregy, et une autre beauté de son âge avec elle, qui venoient pour manger et ayant remarqué qu’elles se jettoient souvent sur des Fromages. Il dit au Duc qu’il alloit les coaglionner, et qu’il y auroit grand plaisir de voir ces vieilles avaller un pareil ragôut. Le Duc rit et trouva cela plaisant. Monsieur le Grand Prieur execute aussitôt son dessein, & cracha tant qu’il pût sur les petits Fromages. Dans ce moment Monseigneur passa qui s’aperçeut de ce qu’il venoit de faire et l’apella, lui disant que cela êtoit fort villain et infame, & que si le Roy scavait cela il le trouveroit fort mauvais. Quelques gens en remarquerent autant et le Roy le sceut. Estant asouper, ayant pris sa mine haute, et sévére, il dit, qu’il y avoit des gens assés hardis pour faire des insolences sur la Collation, et que s’il scavoit qui c’est, il en feroit un exemple, & se tournant du côté de Monseigneur, vous scavez qui c’est, dites le moi; Monseigneur se deffendit; mais le Roy lui ayant ordonné d’une maniere à ne lui oser désobéir. Il répondit qu’il avoit veu le Grand Prieur, et le Duc de la Ferté

 

                                                                                                                              [36]

qui êtoient ensemble, le Roy dit, c’est assez, quelqu’un qui entendit nommer le Duc de la Ferté, envoya au plus vite le chercher, et l’avertir de ce qui venoit de se passer. Comme le Roy sortit de table, il s’aprocha, et lui dit, Sire je suis bien malheureux d’avoir déplû en quelque chose à votre Majesté et aprés lui en avoir demandé pardon, je lui diray la chose comme elle est, et la conta comme elle s’etoit passée; Qu’il avoit tort de ne s’y être pas opposé; mais que l’idée de voir ces femmes faire un aussi méchant repas, l’avoit fait rire & consentir à ce que l’autre avoit proposé et exécuté. Le Roy lui répondit, je scavois la chose; mais soyez sage. Le Grand Prieur êtoit allé à Paris au sortir de l’Appartement, si bien que Monsieur le Duc de Vendosme se mit en devoir d’implorer la bonté du Roy; mais d’abord sa Majesté lui deffendit de lui en parler: Il revint le lendemain à la charge, & fit si bien que le Roy lui dit, qu’il vouloit bien à sa considération n’en pas faire un exemple tel qu’il méritoit; mais qu’il ne se presenta pas devant lui. Je ne crois pas que la chose soit encore accommodée.

Monsieur de Coulanges dinant ces jours passez avec Monsieur de Louvois, comme on lui aporta plusieurs choses que l’on avoit prises par ses ordres aux

                                                                                                                              [37]

Couriers, à qui il est deffendu de se charger que de Lettres mises dans le paquet, et non autrement. Entre plusieurs hardes confisquées, il se trouva une quaisse, Coulange, lui dit, au moins Monsieur je vous demande la Confiscation des Portraits, elle lui fut accordée. On ouvre la boëtte, il parût bien du cotton, et en si grande quantité que l’on crût d’abord que c’estoit pour ce moquer que l’on en avoit tant mis, à la fin on trouva une petite boëte dans laquelle êtoit un Portrait d’un homme frisé, et sous les Armes, Monsieur de Louvois lui donna. Dieu scait la joye! Le paquet êtoit adressé à Madame de Serre à l’hostel de …… rue de Condé. Il admire le Portrait, il s’en joue, il le montre partout, contant l’histoire, ayant dessein de le rendre à la Dame, & pour cet effet, aprés avoir confié cette avanture à bien des gens, il envoya chercher Madame de Serre, que l’on trouva jolie et fort bienfaite, et comme elle entendoit que l’on s’informoit d’elle, elle s’informa aussi soigneusement qui c’estoit; le Laquais ne lui voulut pas nommer son maître; mais lui dit un nom en l’air, qu’elle ne connût pas, et ajouta que son maître avoit à luy parler, elle lui donna heure pour le lendemain aprés diner. Coulanges au lieu d’y aller lui même y envoya son

                                                                                                                              [38]

Laquais avec la Boëte, en lui disant comme la chose êtoit arrivée, et que son maître s’etant trouvé à l’ouverture, s’en êtoit chargé pour avoir le plaisir de lui rendre. Mon Dieu que je lui suis obligé! elle ouvre, elle cherche, et trouve le Portrait, ses remercimens augmenterent, et l’envie de scavoir qui lui avoit rendu un si bon office; mais le Laquais qui avoit ordre de n’en rien faire fut fidelle, et dit seulement qu’il logeoit au marais. La Dame en dévélopant le portrait aperçêut des vers que Coulanges y avoit mis sur l’air de Joconde, elle les lêut, et les trouva fort jolis, et demanda s’ils êtoient de la facon de celuy qui lui faisoit une aussi agréable galanterie? le Laquais répondit que ouy; Elle les lêut, les relût, et les chanta: Il ne tiendra qu’à vous d’en faire autant, car les voicy.

                  Délivrez nous d’un Jugement,

                  Peut être téméraire.

                  Est-ce le Portrait d’un amant,

                  D’un époux, ou d’un frere?

                  Quel qu’il soit il a des attraits:

                  Vous êtes jeune belle Iris,

                  Cachez un peu mieux vos secrets,

                  La Poste est infidelle.

 

                                                                                                                              [39]

Hé mon Dieu! dit la Dame, est-ce que je n’auray point la jye de connoître un aussi honeste homme, et aussi spirituel? Je vous prie de bien dire à vôtre maître que j’ay une passion extrême de le connoître, et que je le conjure de me venir veoir, affin que j’aye le plaisir de le bien remercier moy meme, et comme je ne doute point quil ne m’accorde cette faveur et que je suis icy à 200. lieues de mon mary, et obsédée par un beau frere qu’il pourroit même trouver céans; Qu’il fasse come s’il y venoit voir un tableau, qu’il a apris que je voulois vendre. Cependant Monsieur de Coulanges, qui n’est aparemment pas si galand que la Dame le croit, ne s’est pas trouvé pressé de l’aller voir. Madame de Grignan & le Chtr de Grignan son beaufrere ayant sceu ce détail voulurent y ajouter quelque chose du leur. Le Chevalier fit le Couplet qui suit au nom de la Dame, et le fit écrire et cacheter bien proprement, et on le donna au Portier de Monsieur de Coulanges. Il est sur le même Air de Joconde

                  Ce Portrait n’est pas d’un amant,

                  D’un amy n’y d’un frere;

                  Corrigez vous d’un Jugement

 

                                                                                                                              [40]

Qui seroit téméraire;

                  Comme vous je scay que souvent

                  La Poste est infidelle;

                  Mais cela m’est indifferent

                  Je ne suis pas comme elle.

Monsieur de Coulanges revenant chez lui trouva cette réponse, et aprés s’en être diverti, on lui aprit le véritable lieu d’où elle venoit: voila en quel état est l’avanture; je ne crois pas qu’elle aille plus loin de sa part; mais d’autres gens ont envie d’y aller pour luy.

 

Chanson                                                    1687                                          [41]

Sur l’air: Cher amy que mon ame est ravie.

Pour Madame la Duchesse de Chaunes, aprés sa grande maladie en 1687.

 

Quel plaisir adorable Duchesse

De vous voir revenir en santé!

Scavez vous que vous avez êté

Au point de causer une extrême tristesse?

Mais enfin vous avez résisté.

Rions maintenant, beuvons, chantons sans cesse,

Et dansons au son des Chalumeaux,

Courantes et branles nouveaux.

                                                      par Coulanges.

 

Autre                                                           1687                                          [42]

Sur l’air de Joconde.

La colere du Capitaine du Château de Chaulnes, contre les Ouvriers qui ne venoient pas à l’heure marquée. par Coulanges.

 

Où sont donc tous ces ouvriers?

Ces coquins passent l’heure.

Où sont allez tous ces Chartiers?

Nôtre ouvrage demeure.

Dites pourquoi tardez vous tant?                                les voit venir.

Marchez vite canaille.

Madame est là qui vous attend (1)

Sur son Trosne de paille.

 

(1)   la Duchesse qui sur une Chaise de paille prend plaisir à voir travailler ses ouvriers.

 

Année 1688                                                                                                  [43]

 

Chanson                                                    1688                                          [45]

Sur l’air: Il fait tout ce qu’il deffend.

Sur LOUIS XIV.

 

Qu’à Marly le Roy s’occupe

Du soin de ses beaux Jardins,

Et qu’il soit toujours la dupe

Des Bigots et des Putains,

Sans Général, sans Ministre.

Dieux! quel avenir sinistre!          

Je me f….. de son destin,

Pourveu que j’aye du vin.

 

Autre                                                           1688                                          [46]

Sur le même Air.

 

Ah grands Dieux! sans ma vieillesse,

Que mon sort seroit heureux;

Je vois toute la jeunesse

Vouloir tout ce que je veux.

Et chacune, dit, vieux restre

Ne veux tu pas me le mettre:

Tout compté, tout rabatu,

Je suis toujours le f…..tu.

 

Autre                                                           1688                                          [47]

Sur le même Air.

Sur Monsieur le Prince de Conty.

 

Que Conty toujours murmure

De n’estre pas Général;

Qu’avec aigreur il censure

Ce qu’il feroit bien plus mal;

Qu’aux voeux de tout le Royaume,

Louis n’accorde Vendosme;                                            Vendosme le Duc.

Je me f…… de leur destin

Pourveu que j’aye du vin.

 

Autre                                                           1688                                          [48]

Sur Colasse, Musicien qui acheva l’Opera d’Achille, commencé par Lully.

 

                  Petit Colasse                                         Petit Colasse

Que ta musique a de grace.                           Ta musique nous glace

Ton opera plus qu’un autre plaît                                 J’aimerois mieux

Quelque grace                                      Faire chanter l’oublieux.

Que les Dieuz, Lully, te fasse,

Tes Airs charmand

Te feront monter d’un cran:

                  Petit Colosse etc.

 

Quoique tu fasse,

Tu n’aura jamais de grace

                  Dans tes récis.

Tu ne scais ce que tu dis;

                  Petit Colasse.

 

En vain Francine,

Sans aucun droit,

S’imaine par ses Concers,

Charmer tout l’univers.

                  Petit Colasse.

 

A la louange d’Innocent XI.          1688 (Décembre)              [49]

Pape. Il se nommoit avant son exaltation Benoît Odescalchi.

 

Pauperibus sua dat gratis, nec munera curat,

                  Curia Papalis, ut modo perspicimus,

Laus tua, non tua fraus, virtus non copia rerum,

                  Scandere te fecit, culmen ad eximium.

Conditio tua sit stabilis, nec tempore parvo

                  Vivere te faciat, hic Deus omnipotens.

 

Les mesmes Vers retournez, contre lui.

 

Omnipotens Deus, hic faciat te vivere,

                  Parvo tempare, nec stabilis sit tua conditio.

Eximium ad culmen, fecit te scandere,

                  Rerum copia, non virtus, fraus tua non tua laus,

Perspicimus modo, ut Papalis curia

                  Curat munera, nec gratis dat sua pauperibus.

 

Chanson                                                    1688                                          [50]

Sur l’air…..

 

Nos champs sont pleins de Generaux,

Qui s’en vont par mons et par vaux.

De Lauzan est déja parti

Ce grand homme de guerre,

Pour s’en aller tout conquerir

Avec le bon Roy d’Angleterre.

 

Chanson                                                    1688                                          [51]

Sur l’air…#

 

Quand Proserpine apercêut

La femme à Guillaume;                                                      Marie d’Angleterre

Aussitost la Dame crût

Perdre son Royaume;

Mais son noir mary Pluton;

Luy jurason grand juron.

On vaut mieux sous terre,

Que dans l’Angleterre.

 

Autre                                                           1688                                          [52]

Sur l’air: Dodo au secours de Guillemo.

 

Notre pauvre Prince impuissant

Devient fou faute d’argent,

Ne pouvant continuer la guerre

Contre tous les gros Milors Anglois

Luy disent tout d’une voix.

Reposez, faites un bon somme dodo,

Faites dodo Guillemo.

 

Abregé de l’Opéra d’Achille.       1688                                          [53]

Les parolles sont de Capistron, et la Musique de Colasse.

Sur l’air: Reveillez vous belle endormie.

Par Monsieur de Saint Gilles.

 

Or escoutez la noble histoire

De l’Opéra de Capistron;

Je veux asseurer sa mémoire

Par une immortelle Chanson.

 

Agamemnon, outrage Achile,

Qui dit, qu’il s’en repentira.

Il se promene dans une Isle;

Vénus lui donne l’Opéra.

 

Patrocle meurt, Hector l’assomme;

Certe, ce fut mal apropos;

Car on voyoit en ce jeune homme

Tous les sentimens d’un héros.

 

Achille en son humeur bouruë,

Chasse Vénus tres brusquement;

Il s’embarque, il combat, il tuë:

Hector descend au monument.

 

Le Roy Priam, sa bru, sa fille,

Ont tous trois le coeur bien serré;                                                [54]

Polixene est assez gentille,

Achille la trouve a son gré.

 

S’en est fait, ce héros l’adore,

Arcas en va dire deux mots;

Briscis croit qu’on l’aime encore,

Achille lui tourne le dos.

 

Cette Princesse m’embarasse;

Où couchera-t’elle ce soir?

Chez Agamemnon, plus de place;

Achille ne veut plus la voir.

 

Briscis est tres allarmée;

Junon lui montre les Enfers.

Les Diables font de la fumée;

La clarté revient dans les Airs.

 

Au premier bruit de quelque treve,

Les villageois s’en vont dansans,

Avant que la tréve s’acheve

Ils voudroient labourer les camps.

 

Polixene veut bien se rendre,

Andromaque a beau raisonner,

Et les Almanachs de Cassandre,

N’ont rien qui puisse l’estonner.                                                                     [55]

 

Tous les beaux Conseils qu’on lui donne,

Ne sont bons que pour l’enflamer:

Un coeur que le peril étonne,

N’est ma foy pas digne d’aimer.

 

Priam reçoit dans sa famille

L’invincible fils de Thétis;

Trop heureux de donner sa fille,

Au fier vainqueur d’Hector, son fils.

 

Un changement si favorable,

Comble aujourdhuy tous ses désirs.

Auroit il crû son coeur capable

D’avoir encore quelques plaisirs?

 

Vous, que nôtre sort interresse

Dans cet évenement heureux.

Peuples, montrez vôtre allégresse,

Par les ébats les plus pompeux.

 

Polixene semble interdite

Devant son époux prétendu;

Je ne scais ce qu’elle médite.

Achille en est tout confondu.

 

Hé! parlez donc beauté charmante,                                           [56]

M’aimerez vous de bonne foy?

Monsieur, je suis obéissante;

Mon papa répondra pour moy.

 

Bref, Paris assassine Achille,

Polixene se veut fraper,

Du même trait elle s’enfile;

La Toille tombe on va souper.

 

Or vous scavez la noble histoire,

De l’Opéra de Capistron;

Je viens d’asseurer sa mémoire,

Par une immortelle Chanson.

 

Réponse                                                    1688                                          [57]

à Monsieur de Coulanges.

 

Pourquoi de nos jeunes galans

Te faire un sujet de satire?

Pourquoi des Coquetes du tems

Dans tes Chansons, chercher a rire?

Coulanges, si tu n’estois vieux

Des jeunes tu parlerois mieux.

 

Pour cajoler et cetera;

Va t’en chercher Dame gigogne,

Les Infants de l’Opéra

Ne sont pas pour un vieux yvrogne,

Et la plus salope catin,

Te renvoye au vertu gadin.

 

Qu’une femme soit en Manteau,

En fontange, en écharpe, en mule,

En malitie à Patrons nouveaux.

Est-ce un amour si ridicule?

Ouy, si c’estoit pour ton esbat

Qu’Elle se tint preste au Combat.

 

Vas dans le fons d’un Cabaret

Débiter tes rimes boufonnes;

Ce n’est pour toi qu’en Corset                                                         [58]

Se mettent nos jeunes mignonnes.

Ho! le plaisant fileur d’amout

Qu’un gouteux de la vieille Cour.

 

Pourquoi blesser dans vos chansons

Nos usages les plus commodes?

Il faudroit bien d’autres leçons

Pour renformer toutes nos modes,

Tous vos atours du tems jadis

Ne font point honte à nos habits.

 

Faites nous voir que nos amans,

N’ont ni mérite, ni tendresse;

Otez leur tous leurs agrémens,

Vous nous reverrez sans foiblesse,

Une Tabatiere à la main

Rend t’elle un homme si vilain?

 

S’il est couché dans un fauteuil,

Des genoux croisez l’un sur l’autre.

Ne croyez pas à ce coup d’oeil

Nôtre gout different du vôtre;

Mais quand d’ailleurs le marché plaist

Le Marchand passe tel qu’il est.

 

Ne scait on pas que nos guerriers

Ont des vertus bien reconnuës?

Et nous n’en serions pas émues;

Chez nous qui se fait estimer

N’est pas loin de se faire aimer.

 

Dans nôtre faubourg Saint Germain,

Nous n’aimons point les vieux usages.

Croyez vous qu’en vertugadin

Nos grandes meres êtoient plus sages?

Que sert quand on est sans témoins

D’un peu d’etoffes, plus ou moins?

 

Feuilletez bien vôtre Almanach,

Vous trouverez que ces matronnes,

Sand vin, sans jeu, et sans Tabac,

Faisoient come nous les dragonnes,

Et sous leur grotesque harnois

Cachoient d’amour un feu gregeois.

 

Les hommes sont faits pour aimer,

Les femmes sont faites pour plaire.

Quand deux beaux yeux ont pû charmer;

L’habit ne fait rien a l’affaire.

Les vrais amans dans leurs combats

Se sont toujours veus pourpoint bas.

 

Les hommes sont trop de bon goût                                              [60]

Pour s’arrester à la parure;

On ne les voit que troppartout

Quitter le velours pour la bure,

Et nos amans et nos amis

Courent la grisette à Paris.

 

S’ils ne cherchoient à l’Opéra

Ces Infantes à beau corsage,

Ce n’est pas en ce païs là,

Qu’ils feroient leur second ménage.

Ce n’est pas l’or de leurs habits

Qui met leurs coeurs à si haut prix.

 

Trouvez vous le goût si mauvais

De chercher là quelque Deésse?

Elles joignent a de beaux traits

L’esprit et la délicatesse.

L’himen ne veut que de grands noms;

Mais l’amour veut bien des fanchons.

 

Chacun a son petit réduit,

Où sans orgueil, et sans grimace;

Loin de la contrainte et du bruit,

On fait tout de tres bonne grace;

Ce sont les filles d’Apollon

Qui font chanter sur le haut ton.

 

Il en est en ce païs là                                                                              [61]

Dont le coeur répond aux manieres,

Qui partout comme à l’Opéra,

Soûtiennent leurs vrais caracteres;

Et qui dans toute leur maison,

N’ont rien de bourgeois que le nom.

 

Les modes, les noms, les éstats,

Sont tous sujets à la satire;

Souvent qui chante ne scait pas

Ce qu’on pense quand il fait rire.

Tel qui rit des deffauts d’autruy,

Rit de ce qu’on rit de luy.

 

Coulanges ce n’est pas pour toy

Que ce dernier couplet raisonne;

Ma Muse s’est fait une Loy

De chanter sans chooquer personne;

Je parle à ceux qui sont en train

De mordre sur le genre humain.

 

Chanson                                                    1688                                          [63]

Sur l’air des Trompettes.

Au départ du Roy d’Angleterre.

 

Quand on suit le Soleil, jamais on ne s’egare,

Dit Jacques, je meuray mon Gendre à la raison

                  Sur leton de fanfare,

                  Guillaume lui répond

Mon beaupere tarrare ponpon.

 

Chanson                                                    1688                                          [65]

Sur le bon bransle.

Sur le Roy d’Angleterre.

 

Le Roy d’Angleterre est party,

Et la Flotte s’ebranle;

Pour un projet assez hardy,

Et fort beau s’il y réüssit.

Il va pour mettre en branle

L’Ecosse, qui à ce qu’on dit,

Au manche déja tremble.

 

Des gens de là lui ont écrit,

Sire, on attend labranle;

L’Argent êtant rare à Paris,

N’en empruntez pas à Louis

Pour les frais de ce branle;

Nous vous ferons plûtost crédit

Jusqu’à la fin du branle.

 

C’est ce qui l’a déterminé

A mettre tout en branle,

Le Roy seulement a donné

De quoi le mettre en seureté

Pour commencer le branle;

Il faut qu’il y soit couronné,                                                               [66]

Sinon, f….tre du branle.

 

Chanson                                                    1688                                          [67]

Sur l’air de Joconde.

 

Un petit fils au grand Condé

                  Commence de paroitre,

A sa valeur, à sa fierté,

                  Peut on le méconnoître?

Douai le feu de tes remparts,

                  Respecte sa personne;

On croit que c’est un nouveau Mars,

                  Ou le fils de Bellone.

 

Un Enguien dans ses jeunes ans, (1)

                  D’un coup de son tonnerre

Foudroye en Piemont les Titans

                  Qui nous faisoient la guerre;

Bourbon de même sang que luy,

                  Même ardeur dans ses veines

Doit faire aux Titans d’aujourd’huy

                  Sentir les mêmes peines.

 

Rocray, Fribourg, Norlingue et Lens,

                  S’offrent à sa mémoire, (2)

Et lui montrent en même tems,

                  Le Chemin de la gloire,

Pour le suivre dans les Combats

(1)   Francois de Bourbon Comte d’Enguien a l’age de 24 ans gagne la Fameuse Bataille de Cerisole sur le Marquis du Gas général de l’Empereur Charlesquint en 1544.

(2)   Le Grand Condé n’avoit pas 22 ans accomplis lorqu’il gagne la Bataille de Rocray en 1643. Il gagna les 2. années suivantes les Batailles de Fribourg et de Norlingue.

 

La victoire s’apreste.                                                                                      [68]

Guerriers que ne ferez vous pas,

                  S’il marche à vôtre teste?

 

Bientost par ce Prince, on verra

                  Nos allarmes cessées;

Le souvenir s’effacera,

                  De nos pertes passées.

Déja pâlir à son seul nom

                  Eugêne de Savoye,

Qui sent bien que de ce Lion

                  Il doit être la proye.

 

Chanson                                                    1688                                          [69]

Sur l’air des Triolets.

 

Ȏ trio le plus accomply!

Trio le plus sain de nôtre age;

Vaubrun, Caumartin & Choisy                                       3 Abbez

Ȏ trio le plus accomply!

Mais de ce trio tant joly

Je donne a choisir le plus sage.

Ȏ trio le plus accomply!

Trio le plus sain de nôtre age.

 

Vaubrun des Abbez le mieux fait,                                Vaubrun

Sur ses consors à l’avantage

D’être fourny comme un mulet.

Vaubrun des Abbés le mieux fait,

Et des Bautrus le noble extrait,

Parmy les femmes fait la rage.

Vaubrun des Abbez le mieux fait

Sur ses Consors a l’avantage.

 

Caumartin, quel nombre d’Ayeux             accusé d’avoir fait la lettre contre l’évesque de Noyon.

Releve déja ta noblesse!

Les Clermont ne valent pas mieux,

Caumartin quel nombre d’Ayeux,

Et tu te mets au dessus d’eux.

Par ton scavoir, par ta sagesse;                                                     [70]

Caumartin quel nombre d’Ayeux

Releve déja ta noblesse!

 

Je vanterois la probité

Et je dirois, ce que je pense,

De Choisy sur la chasteté

Je vanterois la probité

Si de la Font et de Gardeblé

J’avois pû garder le silence,

Je vanterois la probité

Et je dirois ce que je pense.

 

Autre                                                           1688                                          [71]

Sur l’air du Confiteor.

Contrevérités.

 

Maintenon disoit l’autre jour,

Louvois mignon ah! que je t’aime!

Qui n’auroit pour toy de l’amour!

Mignon Louvois, des beaux la crême;

Ton visage est rempli d’atraits

Comme Mayence de Mousquets.

 

Autre                                                           1688                                          [72]

Sur l’air Mais.

 

Des Caumartins l’arrogance séquelle,  

Fair aux Clermont intartade nouvelle;

                  Mais

Si quelqu’un tombe sur elle

C’en sera fait pour jamais.

 

On parle fort du pere et du grand pere.

Loin au delà l’on ne remonte guerre;

                  Mais,

Si quelqu’un le vouloit faire,

Le retour seroit mauvais.

 

Chanson                                                    1688                                          [73]

Sur l’air: Laire lan laire.

Sur la Prise de Philisbourg, par Monseigneur le Dauphin.

 

Monseigneur est donc de retour

Du voyage de Philisbourg?

Le Palatin ne tient guere;

Laire la, laire lan laire,

Laire la, laire lan la.

 

Quel plaisir pour ce nouveau Mars,

De voir qu’affrontant les hazards;

Tout lui cede comme à son pere.

Laire etc.

 

Le coeur charmé de ses hauts faits,

Mille beautez plus que jamais;

Vont prendre le soin de lui plaire.

Laire etc.

 

Mais pour elles je crains bien fort,

Qu’animez d’un plus beau transport,

La gloire ne lui soit plus chere.

Laire etc.

 

Que les Bergers de nos cantons                                                                       [74]

Craindrons pour leurs pauvres Moutons,

De Loups il ne prendra plus guere.

Laire etc.

 

Ce jeune Mars dans les combats

S’en va faire plus de fracas,

Qu’Achile autrefois n’en pût faire.

Laire etc.

 

Le Rhin dans ses flots écumeux,

Craint d’en sentir encore les feux.

Il tremble comme un pauvre here.

Lere etc.

 

On dit qu’au milieu de ses eaux

Le front tout couvert de Roseaux;

Ce grand Fleuve se désespere,

Laire etc.

 

Ses yeux ont êté les temoins

Des explois fameux et des soins,

Du fils aussi bien que du pere.

Laire etc.

 

Ce beaucoup dessai, sur ses bords,

Fait voir que de plus grands efforts;                                            [75]

Vont suivre cette ardeur guerriere,

Laire la laire lan laire.

Laire la laire lan la.

 

Autre                                                           1688                                          [76]

Sur l’air des Ennuyeux.

 

Vouloir sans rime et sans raison

Contre Noyon toujours escrire.                                                      l’évesque

Contre les Saints de sa maison,

Composer sanglante satire.

De l’Evesché c’est le chemin

Que tient l’Abbé de Caumartin.

 

Estre lourd et mauvais plaisant,

Faire grand chere aux Bergeries,                                                   Terre a l’Abbé de Caumartin.

Estre d’un esprit malfaisant,

Estre dure dans ses railleries.

De l’évesché  c’est le chemin,

Que tient l’Abbé de Caumartin.

 

Faire le scavant, l’estre peu,

Estre fier jusqu’a l’insolence.

Aimer la femme, aimer le jeu

Estre vrai, sac de médisance.

De l’évesché c’est le chemin,

Que tient l’Abbé de Caumartin.

 

Chanson                                                    1688                                          [77]

Sur l’air: ho ho ho tourlouribeau ou Marie Salisson.

Sur l’entreprise du Prince d’Orange contre l’Angleterre en 1688.

 

Le Prince d’Orange en Angleterre,

                  Ho ho tourlouribeau;

Est allé voir son beau pere;

                  Ho ho tourlouribeau.

Il ny fera que de l’eau claire,

                  Ho ho tourlouribeau

 

Ha! que ce jeune homme est inciville,

                  Ho. etc.

De s’en aller comme un drille,

                  Ho. etc.

Prendre Londres la grande ville,

                  Ho. etc.

 

Il avoit mis exprés dans la Manche,

                  Ho. etc.

Huit cent chevaux sur des Planches,

                  Ho. etc.

Ils sont noyez comme on pense,

                  Ho. etc.

 

Grand Prince soyez en asseurance,

                  Ho. etc.

Car si le grand Bourbon de France,

                  Ho. etc.

Va prendre votre deffense,

                  Ho. etc.

 

Le Roy Jacques bon Catholique,

                  Ho. etc.

Se rit de la politique,

                  Ho. etc.

De ces maudits hérétiques.

                  Ho. etc.

 

Suivons le Dauphin* qu’un chacun révere,                             *s’en allant à Philisbourg.

                  Ho etc.

Il est allé à la guerre,

                  Ho. etc.

A quitté son propre pere.

                  Ho. etc.

 

Année 1689                                            [79]

 

Sonnet                                                        1689                                          [81]

A Madame la Duchesse du Maine, sur l’acquisition de Sceaux.

 

Seignelay qui pour vous bâtit salle et …...portique,

Enflamé de la gent qui porte………………….fabala:

Fut des Dames l’amour, des maris l’……….Attila,

Aima jusqu’aux beautez qui montent la….Bourique.

 

Mais avec les vertus de la chaste………….….…..Monique,

Vous chassez loin de Sceaux l’amour qui s’y….coula,

En signant vôtre Contract vous lui dites…………hola,

Fussiez vous relegué jusqu’au pole………………..Artique.

 

Ainsi le pauvre enfant de ces lieux sort………….Camus,

Heureux d’avoir ailleurs droit de…………………...Comittimus;

Mais il vous faut des biens exempts de………….sindereze.

 

Vos devoirs sont reglez même au coup de……..Marteau,

Sage comme les Saints qu’a peint Paul…………..Veroneze,

Vous aimez jusqu’au soin de rendre le……………Château.

 

Chanson                                                    1689                                          [82]

Sur l’air: Que fais tu Bergere etc.

Sur Monsieur de Feuquieres (de Pas)

 

Que fais tu Feuquieres

Si loin de la Cour?

Preste à ma priere,

Icy ton retour;

Tes amis se plaignent

Que tu sois absent;

Tes maîtresses craignent

Ton coeur inconstant.

 

Chanson                                                    1689                                          [83]

Sur l’air de Jean de vert

 

Non non je m’etonne pas

Qu’on nomme Jean Farine

Monsieur le Mareschal Duras;

Sa politique est fine,

Il en scait faire de l’Argent,

Bien mieux qu’on ne faisoit du tems,

                  De Jean de vert.

 

Parlons pour finir ce discours

Du Mareschal d’Humieres;

Il a bien fait voir à Valcourt,

Qu’il abonde en lumieres;

Il a bien un plus beau talent

Pour faire nettoyer ses gens

                  Que Jean de vert.

 

Barbezieres est un imposteur, (1)

En bravour, en naissance,

Il n’a fait acte de valeur.

Au Siége de Mayence

Si l’on n’a d’autres Commandans,

Nous ne reverrons plus le tems,

                  De Jean de vert.

 

(1)   Brigadier de Dragons qui se jetta dans la place pendant le siége.

 

Chanson                                                    1689                                          [85]

Sur l’air de grosse bourguignonne.

Sur le mariage de Monsieur de la Fayette avec Mademoiselle de Marillac, dont est venu Madame de la Tremoille. Decembre 1689.

 

Chantons de la Fayette

Le galant compliment,

Qu’il fit à sa poulette

En qualité d’Amant.

Chantons son avanture,

Et sa noble posture.

Jamais amant ne s’est mieux présenté,

Pour être marié.

 

Dedans une Assemblée,

D’amis et de parens,

La Lisette pareé

Attendoit son amant;

Il paslit à sa veuë,

Tremble, rougit et suë;

En ne scachant qu’il devoit saluer;

Il sortit/ s’assit sans parler.

 

Lisette/ La belle consulteé,

Sur son nouvel/ futur époux,                                                             [86]

Dit dans cette Assemblée;

Qu’il lui paroissoit doux,

Et d’une humeur honneste,

Quoique peut être beste;

Mais qu’aprés tout pour elle un sot mari,

Etoit un bon party.

 

De la jeune Lisette

On aprouva l’avis,

Et une amie discrette,

Aussitôt reparty;

Il yra à sa Terre

Comme Monsieur son pere.

Et vous, ferez des Romans à Paris.

Avec les beaux ésprits.

 

La Lisette à sa mere

Demandoit l’autre jour

Comment se peut il faire

Qu’on demeure si court?

Sera-t’il aussi sage le jour du mariage?

Pour moy je n’aime la timidité

Qu’à un certain dégré.

 

Ah! l'aimable jeunesse

Que celle de Vieuxbourg;                                                                    [87]

Il a de la tendresse,

J’ay pour luy de l’amour.

On dit que s’il lamente;

Je ne suis point contente.

Ah! si je pouvois choisir un mari

Vieuxbourg seroit choisi.

 

Autre                                                           1689                                          [88]

Sur l’air: des Lampons.

 

Le Roy met à ce qu’on dit

Un impost sur chaque v….

Monsieur en a la régie (1)

En dépit de la Reinie (2).

                  Lampon, lampon

                  Camaradon lampon.

 

(1)   le Duc d’Orleans frere unique du Roy.

(2)   Lieutenant general de Police.

 

Chanson                                                    1689                                          [89]

Sur l’air: Il a battu son petit frere.

Sur le LOUIS XIV.

 

Vray pieux Monarque de France,

Regarde Heidelberg et Mayence,

Mal attaqué, mal deffendu.

De ces deux chefs de confiance,

L’un ne songe qu’a faire éscus,

L’autre à faire peu de Dépense.

 

Autre                                                           1689                                          [90]

Sur l’air des Rochelois.

 

Saint Ruth, Calvo, Larré, Bouflers (1),

Ce ne sont point des Ducs et Pairs,

Et ne pretendent pas de l’estre,

Par plus d’une bonne raison.

Mais ils servent si bien leur maître

Qu’ils mériteroient le Baston.

 

(1)   Ils étoient tous quatre Lieutenans généraux; le dernier fut fait depuis Maréchal de France.

 

Autre                                                           1689                                          [91]

Sur le même Air.

 

Tessé, d’Huxelles et de Sourdis

Le mériteroient bien aussi.

Sans compter le maure Feuquiere;

Mais pour nos deux grands Généraux,

Les prudens Duras et d’Humieres,

Ils en méritent de nouveaux.

 

Autre                                                           1689                                          [92]

Sur l’air des Ennuyeux.

 

Lanjamet vain, rempli d’orgueil (1),

Dis nous malgré ton arrogance,

Aprés quatre ans d’habit de deuil,

Que tu portois par indigence;

Quelle aumône ta deffrayé

Ce bel habit de drap rayé?

 

(1)   Gentilhomme de Bretagne qui n’avoit d’autre metier que d’être Courtisan.

 

Chanson                                                    1689                                          [93]

Sur l’air de Flon flon.

Pour le Cardinal Maldachin, quand il annonça de la Loge de Saint Pierre, l’élection du Cardinal Ottoboni, pour être Pape sous le nom d’Alexandre VIII.

 

Quand Maldachin en chape

                  De la Loge cria

Qu’Ottobon êtoit Pape;

                  La trompette sonna.

Et flon flon lariradondaire,

Et flon flon lariradondon.

 

Autre                                                           1689                                          [94]

Sur l’air du Confiteor.

Sur Monsieur de Pontchartrain Controlleur general des Finances.

 

Pontchartrain ne resvez pas tant

Au moyen que vous devez prendre

De donner au Roy de l’Argent,

Vous n’avez qu’à lui faire rendre

Ce qu’ont pris soin de mettre a part,

Et la Couleuvre* et le Lezare**.

 

*Monsieur de Colbert

*Monsieur de Louvois

 

Autre                                                           1689                                          [95]

Sur l’air: Sonnons le Tocsin.

 

Dieux! quelle différence

De Lorraine à Duras;

L’un n’a pris que Mayence,

Dont je fais peu de cas;

Mais l’autre mil fois plus fin,

                  Diguedin,

En a pris tout le vin.

 

Autre                                                           1689                                          [96]

Sur l’air: Sur le Rhin parût une beste.

 

Martinet cet homme exécrable,

Est déja réprouvé du Ciel;

La preuve en est que Saint Michel

L’a battu comme un Diable.

 

Réponse.

 

Que fait le grand Condé chez lui,

Ce grand héros, ce bel esprit?

C’est dont tout le monde murmure,

Il a pris Martinet pour son Voiture.

 

Chanson                                                    1689                                          [97]

Sur l’air de Jean de vert

 

Saint Paul en terrible valeur

De chevrette ferreé

Pour de l’Argent donnoit son coeur

A sa vieille effronteé;

Mais las d’un si vilain micmac,

Il a renvoyé la d’Orlac

A Jean de vert.

 

Pidou n’a pas de vanité,

Il répand sur la terre

Pourtant sa belle parenté,

Doit rendre une ame fiere.

La Francine et la Saint Olon

Estoient les maîtresses, dit on

De Jean de vert.

 

Noisy pour avoir de l’Argent                          Maupeou.

Fait une belle addaire,

Car la laide femme qu’il prend                    Catelan.

Lui vient d’un chien de pere;

Qui pourveu qu’il ait profité

Sur un bon gage auroit presté

A Jean de vert.

 

Sur le fils du grand Colbert                                                                 [98]

A des biens qu’il vous offre;

Louvois tient les siens à couvert

Dans le fonds de son coffre

Deux procédez si differens

Font bien causer les descendans

De Jean de vert.

 

Quoi! Louvois ne devoit il pas

En faisant bonne mine

Remplacer lui seul de ses Ducats

La nouvelle Tontine?                                          creé en 1689 au mois de Decembre.

Des Ministres moins opulans,

Auroient bien fait cela du tems,

De Jean de vert.

 

Il est constant que Ratabon,

Fait honneur à la France.

Le Roy dit avoir tout de bon

Esgard à sa dépense.

L’heureux abri que sa maison;

L’affreux séjour que le Gaudron

De Jean de vert.

 

Autre                                                           1689                                          [99]

Sur l’air de Joconde.

 

A la porte de Saint Martin

L’on arresta Banille                                            ou Baville.

Avec huit bouteilles de vin

Venant de Belleville:

Les Maltotiers fort vigilans

Fermerent la Barriere,

Messieurs vous n’êtes point exempt

Des Droits de la rapiere.

 

Autre                                                           1689                                          [100]

Sur l’air de Joconde.

 

La France faisant tous les jours

Du progrés dans la gloire.

Nous devons luy prester secours

A force de bien boire.

Pour moy je prétends que du Roy

Je soustiens la dépense;

Puisqu’a mesure que je bois

J’augmente sa finance.

 

Chanson                                                    1689                                          [101]

Sur l’air des Rochelois.

Réponse à une Chanson faite par Monsieur Dangeau au sujet du Jardin de Trianon.

 

Vous ne dites Monsieur Dangeau

Sur Trianon, rien de nouveau.

L’on n’est pas surpris qu’il vous plaise;

Vôtre épouse à tous les momens

Y voit les spectacles à son aise.

Cela rend les maris contens.

 

Sur des Jardins, loüer le Roy,

Nous semble petit, croyez moy.

C’est un héros extraordinaire;

Les zéphirs portent dans les Airs

Les grandes choses qu’il fait faire

Pour en informer l’univers.

 

Dans votre troisieme sixain,

Vous dites qu’en ce lieu divin.

Les vertus sont en asseurance;

L’on croit que vous n’y pensés pas.

Avec vous quelque connoissance

Qu’ailleurs on ait fait des faux pas?

 

Le quatrieme auroit passé                                                                [102]

Si solide êtoit bien placé.

L’on ne dit point solide gloire

Sur le fait des amusemens.

Ne vous en faites point accroire,

Vous n’aurez point de nôtre encens.

 

Chanson                                                    1689                                          [103]

Sur l’air J’ay fait beaucoup de bruit.

Sur le Baron de Beauvais.

 

Vaillant guerrier de Saint Denis

Grand conservateur des Perdrix.

Baron, ta garde accoutumeé

Te manque bien dans le besoin;

Car à celle de ton Epeé

Tu n’as jamais fié ton pourpoint.

 

Autre                                                           1689                                          [104]

Sur le même Air.

 

Le Buffet de grande aparence,

Ce linge si blanc et si fin,

Sont plus pour la magnificence,

Que pour la bonté du festin.

La Poudre a manqué dans Mayence,

Nous pourrions bien manquer de vin.

 

Chanson                                                    1689                                          [105]

Sur l’air: Non non, je ne suis pas seul a médire.

Voyage de Rome en 1689 pour l’élection d’un Pape, qui fut Alexandre VIII. Ottoboni. par Coulanges.

 

Sur Mer, je reprens l’air des Itineraires,

                  Pour chanter les Galeres,

                  Au nombre de vingt huit.

                  Qui voguans jour et nuit,

                  Seurement ont porté

Ambassadeur Cardinaux maint Abé

                  En terre de Papauté.

                  L’agréable voiture!

                  Mais survint une avanture

                                    Qui fit peur,

Et troubla le repos du voyageur.

Il parût un soir six vaisseaux ennemis,

                  Qu’aisement on eut pris,

                  Si la nuit qui fut trop obscure.

                  Ne nous eût fait changer d’avis.

 

Tout fut preparé dans les Galeres pour aller à eux. Ils faisoient une tres bonne manoeuvre; mais ayant pris la route de Corse, et la nuit êtant venuë on abandonna l’entreprise.

 

Autre                                                           1689                                          [106]

Sur le mesme Air.

Arrivée à Rome le 23. Sept’. 1689.

par Coulanges.

 

Hé quoi! je revois ce fameux Colizeé,

                  Au bout de mainte anneé.

                  Je revois le Panteon,

                  Le Palais de Néron,

                  L’arc du grand Constantin.

Le Temple de Faustine et d’Antonin,

                  Et le Mont Capitolin.

                  Je revois Marc-Aurele,

                  Les Chevaux de Praxitele;

                  Et je sens

Tous les plaisirs que j’avois à vingt ans;

J’ay la même humeur, & la même santé;

                  Je suis en liberté.

Fortune, tu m’as fait querelle;

Mais tu ne m’as point maltraité.

 

L’Auteur avoit êté à Rome en 1657. sous le Pontificat d’Alexandre VII de la Maison de Chigi.

 

Chanson                                                    1689                                          [107]

Sur l’air: Vive la jeunesse qui ne vit que d’amour; faite à Villeroy, par Coulanges.

A Madame la Comtesse de Saint Geran.

 

Prés de la belle Duchesse, bis                     la maréchale de Villeroy

Je chante icy sans cesse

La nuit et le jour;

Je vis sans tristesse,

Dans ce beau séjour.

 

Je chante icy sans cesse; bis

La contrainte m’opresse,

Je crains mon retour;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

La contrainte m’opresse; bis

La liberté, Comtesse

Fait tout mon amour;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

La liberté Comtesse, bis

Vaut bien mieux que la presse,

Qu’on voit à la Cour,                                                                               [108]

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Vaut bien mieux que la presse, bis

Je chante à la grand Messe,

Et crie comme un sourd;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Je chante à la grand Messe, bis

Ainsi que la Duchesse;

On m’ensense à mon tour;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Ainsi que la Duchesse, bis

Je reçois la Noblesse,

Des lieux d’alentour;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Je reçois la Noblesse, bis

Toute nôtre jeunesse

Dans tout le jour;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Toute nôtre jeunesse, bis                                                                   [109]

En sautant se despaisse;

Au Fifre, au Tambour;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

En sautant se despaisse, bis

Pour sauter on me laisse,

J’ay le cul trop lourd.

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Pour sauter on me laisse, bis

L’un donne à sa maîtresse

Des pieces de four;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

L’un donne à sa maîtresse, bis

Et l’autre la caresse,

L’apelle m’amour.

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Et l’autre la caresse, bis

Nul, en fait de tendresse

Ne demeure court.                                                                                  [110]

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

La Beste                                  1689 Mars                                               [111]

où l’on jouë toutes les nations de l’Europe.

 

le Cardinal de Furstemberg donne les cartes.

Les Jesuites les meslent.

La Hollande dit c’est ma beste qui joue.

Le Prince d’Orange dit à tout part par Madame.

La France, je fais et prends de mon Roy.

L’Allemagne on nuit au contre.

La Pollogne dit, je paris pour le contre.

La Savoye dit, si le contre perd je quitte le Jeu..

Le Dannemarck. je ne scais ce que je dois faire.

L’Angleterre je me défais de mon Roy.

La République de Venise; je ne puis jouer à ces jeux là.

L’Escosse dit, je garde mon Roy pour empescher la volle.

Le Portugal dit, je ne fais, ni bien, ny mal.

La Suede, je ne jouë point sur ma bourse.

L’Espagne dit, je ne puis jouer que je ne perde.

La République de Gennes dir, si j’avois le jeu de nuire au Contre, je le ferois.

Le Pape, dit je renonce à tout.

Le Roy d’Angleterre, dit qui renonce fait la Beste.

 

Le Turc, dit prenons garde que le Contre ne fasse la volle             [112]

L’Irlande, dit, si celui qui fait jouer entre dans mon jeu, il a perdu.

La Suisse, dit nous vous verrons jouer.

 

Chanson                                                    1689                                          [113]

Sur l’air de Joconde.

Sur la Barbereau de l’Opéra.

 

Si vôtre coeur doit s’embrazer

                  D’une flame nouvelle,

Le mien se doit interresser

                  Que la cause en soit belle,

Parmi le sautillant Troupeau:

                  Voulez vous bien m’en croire,

N’adorez que la Barbereau.

                  Il y va de ma gloire.

 

Autre                                                           1689                                          [114]

Sur l’air……

Couplet de Monsieur le Duc de la Ferté.

 

Plaignons tous en ce jour

Le malheur de du Bourg.

Il a aimé ma fille, et ma femme;

Il m’a aimé de plus cet infame;

Mais le plus grand de ces forfaits

C’est d’escrire à Louvois.

 

Chanson                                                    1689                                          [115]

Sur l’air: Lere la, lere lan lere.

 

Scavez-vous qui demeure court,

Devant le Siege de Valcourt?

C’est le Mareschal d’Humiere,

                  Lere la, lere lan lere,

                  Lere la, lere lan la.

 

Cet hiver chez Barbereau                                actrice de l’opera.

Ce grand Général du Bureau,

Tiendra son Conseil de guerre,

                  Lere la, lere lan lere,

                  Lere la, laire lan la.

 

Autre                                                           1689                                          [116]

Sur l’air de Joconde.

En allant à Rome, et descendant au Port de Robinet en Provence; par Coulanges.

 

Rosne je te fais mes adieux;

                  Je quitte ton rivage.

A chercher Iris en ces lieux

Mon tendre amour m’engage

Pour cet objet rare & charmant,

Et dont je suis esclave;

Je quitterois fort aisement,

Et Rome & le Conclave.

 

Autre                                                           1689                                          [117]

Sur l’air de Joconde.

A Monsieur le Prince de Turenne qui êtoit à Rome par Coulanges.

 

Que dites vous? que faites vous?

                  Trop aimable Turenne?

Vous me laissez longtems chés nous;

                  Cela me met en peine;

Polignac est un favory,

                  Qu’on estime et qu’on aime;

Mais hélas! entre vous et luy,

                  Est-ce trop d’un troisiême?

 

Autre                                                           1689                                          [118]

Sur le même Air.

 A Monsieur l’Abbé de Polignac, qui êtoit allé porter un Paquet de conséquence en France, et qui resta un tems infiny à Gennes, manque d’une voiture assez seure pour passer: par Coulanges.

 

Il est certain qu’un bon Courrier

                  Doit faire diligence;

Il ne faut point pour ce mestier

                  Tant, & tant de prudence:

Abbé vous avez en deux mots

                  Eu trop de retenüe;

Il falloit passer sous les flots,

                  Ou bien perçer la nüe.

 

Chanson                                                    1689                                          [119]

Sur l’air: Ofily et Filix.

Sur l’Affaire de la Régale avec la Cour de Rome.

 

La Sorbonne deffend la Loy,

Et le Clergé l’Edit du Roy;

On ne scait qui l’emportera,

                  Alleluya

 

Harlay (1), la Chaise (2) et Chanvalon (3),

Et le President de Novion (4)

N’ont voulut que le Roy cedât,

                  Alleluya.

 

Qu’on nous tienne pour insensez

S’ils sont jamais canonisez,

A moins qu’un bon mea culpâ,

                  Alleluya.

 

(1)   Alors Procureur general et depuis 1er. President en 1689.

(2)   Jesuitte Confesseur du Roy.

(3)   l'Archevesque de Paris.

(4)   Alors 1er. President.

 

Autre                                                           1689                                          [120]

Surl’air……

Par Rousseau contre ceux qui alloient au Caffé de la Laurent.

 

Que Boindin de son haut caquet

Désormais ne nous étourdisse;

Que la Grange de son fausset,

En ces lieux jamais ne glapisse.

Que par quelque jeune plumet

Le Caffé soit bientost défait

De Saurin et de sa sequelle,                                           Sorin

Qu’a mentir Villiers si sujet.

Aille ailleurs porter sa nouvelle.

 

Voyez les Stances de Rousseau sur le mesme sujet, qui commençent ainsi. Que le rechapé des prisons.

 

Chanson                                                    1689                                          [121]

Sur l’Air: Jardinier ne vois tu pas?

Quand LOUIS prit le devant,

Il laissa le derriere;

Il abandonna ce lieu

Pour apanage à Monsieur

Son frere, son frere, son frere.

 

Autre                                                           1689                                          [122]

Sur l’air de flon flon ettc.

 

La Camarde la Force

Dans son célébre trou,

Sur le tant moins des noces

A fait faire à Briou,

Flon flon flon laridadondaine

Flon flon flon laridadondé.

 

Chanson                                                    1689                                          [123]

Sur l’air de Jean de vert

 

Vous êtes plus médisant,

Marquis de la Bourlie

Vôtre esprit court et suffisant,

N’entend pas raillerie;

Mais à force d’etre brutal,

Il en prend aussi souvent mal.

Qu’à Jean de vert.

 

Autre                                                           1689                                          [124]

Sur l’air: Helas s’il n’estoit pas mort.

Sur la mort de la Reine d’Espagne.

 

Pleurés François pleurez tous

Que vôtre douleur soit forte;

Aux larmes abandonnez vous,

La Reine d’Espagne est morte.

 

Le poison par son effort,

De ses jours tranche la trame;

N’est-ce pas un triste sort

Pour une si bonne Dame?

 

Ah! qui l’auroit jamais crû

Que cette belle Princesse,

Recevoir la mort eut dû,

Par une main si traîtresse.

 

Helas! trop bien elle êtoit

Avec le Roy son cher Prince.

Sa belle mere voyoit

Que son crédit êtoit mince.

 

Sans le témoigner au Roy,

Cette marastre enrageé,

A contre la bonne foy

La Princesse empoisonneé.

 

Sa douleur ni ses attraits,

N’ont point sa rage arresteé;

A de semblables forfaits

L’Autriche est accoutumeé.

 

Le Roy lui dit tout en pleurs;

Car il aimoit bien sa femme,

De vôtre âge dans la fleur,

Faut il vous perdre Madame?

 

Consolez vous mon époux,

Luy répondit la Princesse.

Adieu vous dit pour toujours,

Hélas! je tombe en foiblesse.

 

Oubliez, Prince, ma mort,

De bon coeur je la pardonne;

Ne vous plaignez point du sort.

C’est ainsi que Dieu l’ordonne.

 

Adieu mes femmes adieu,

Retirez vous vites en France,

Il ny a plus dans ce lieu                                                                                           [126]

Pour vous aucune asseurance.

 

Voyez toutes de ma part

Le Roy de France en personne;

Je vous dis icy sans fard

Que j’aimois bien sa couronne.

 

Je salüe le Dauphin,

Et son illustre famille;

Monsieur et Madame enfin,

Le Duc leur fils, et leur fille.

 

Je laisse mes Diamans

A mes deux soeurs que j’embrasse.

Et Monsieur pareillement.

Priez pour m’obtenir grace.

 

Prions Jesus de grand coeur,

Prions tous ce Roy de gloire

Qu’il la mette en son bonheur,

La tirant du Purgatoire.

 

Chanson                                                    1689                                          [127]

Sur l’air de l’amour malade.

Coulanges.

 

La Trousse, Montgerou (1), Berniere,

Se baignoient dedans la Riviere;

                  Chacune crioit

Sitost qu’un mortel s’en aprochoit;

Et cependant ce bon pauvre apparut qui leur dit

Plus ras qu’un gros Feuillan;

                  Je suis Hercule,

                  En Canicule.

Je prens ce déguisement.

 

C’est moy, j’ay quitté ma Massüe,

Et je la quitte quand je süe.

                  J’ai quitté ma peau.

Pour venir vous carresser dans l’eau.

                  Ses beaux corps nuds.

Montrez moy vos Testons, les miens ne sont ils pas velus?

                  Je suis allegre,

                  Sans être maigre

Entre eux assez doucement.

 

A ces parolles ces trois belles,

Ne furent plus beautez cruelles;

                  Mais chaque beauté

Lui parut pleine d’humanité;                                                           [128]

                  Ce Dieu charmant

Pour elles ne fut plus qu’un objet tout rempli d’agrement

                  Et la journée

                  Fut terminée

Entre eux assez doucement.

 

Chanson                                                    1689                                          [129]

Sur l’air…….

Sur Monsieur de Pontchartrain Controlleur général des Finances.

 

Défiez vous, peuple de France

Du Ministre de nos Finances,

Que l’on apelle Pontchartrain;

C’est un Pont de planches pouries,

Un char tiré par des furies

Dont Bourvalais mene le train.

 

Epigramme                                              1689                                          [130]

Sur la taxe des Arts et Metiers.

 

Pour soulager l’etat, Pontchartrain, ton génie

A trouvé le secret de taxer les Metiers;

Et même jusqu’aux Gargotiers,

Et loueur de Chambre garnie;

Mais on dit que tes sages soins

Garde pour les derniers besoins

Deux Communautez fort nombreuses,

Les Savetiers, les Ravaudeuses;

Pour l’Estat c’est un grand apuy.

Ȏ combien tu scauras en tirer de Finances!

Car eux seuls font aujourd’huy

Tout le Commerce de la France.

 

Chanson                                                    1689                                          [131]

Sur l’air de Jean de Nivelle.

Sur Gabriel Estienne Texier Comte d’Hautefeuille, Lieutenant général des Armées du Roy, épousa en 1689. Marie-Françoise-Elizabeth Rouxel de Grancey.

 

Hautefeuille est bien marié        bis

A l’aînée des Granceys;                                    bis

On nous a dit pour nouvelle,

Qu’il avoit trouvé pucelle.

Ne se seroit il point trompé?

                  Jean de Nivelle,

Hautefeuille est bien marié.

 

Aux voeux d’un Prince, dit-on,   bis

Fort amy de sa Maison,                                    bis

Elle ne fut point rebelle.

L’auroit-il laissé pucelle,

Comme dit nôtre épouse?

                  Jean de Nivelle.

Hautefeuille est bien marié.

 

Meres, j’apelle d’abus,                                    bis

De tous vos soins superflus;       bis

Que vos filles soient pucelles                                                          [132]

Pourveu qu’on les croit telles;

Hautefeuille à bien épousé

                  Jean de Nivelle,

La fille aînée des Granceys.

 

Autre                                                           1689                                          [133]

Sur l’air des Triolets.

Ces Couplets sont de Danchet pour Madame de Cantleu (Madame des Marets)

 

Cedez vieux Châteaux de Roman,

Canteleu scait bien mieux nous plaire;

Tous les plaisirs y sont charmans;

Cedés vieux châteaux de Roman.

Une belle y fait plus d’amans

Qu’Armide autrefois n’en sceût faire.

Cedez vieux Chasteaux de Roman,

Canteleu scait bien mieux nous plaire.

 

Tous se rend à son air vainqueur,

Il exerce un pouvoir suprême,

Abbez, Curés, et Sénateurs,

Tout se rend à son air vainqueur;

Trop heureux en perdant son coeur

Qui ne perd pas la raison même.

Tout se rend à son air vainqueur

Il exerce un pouvoir suprême.

 

Sur la mort du Pape Innocent XI                 1689                        [134]

 

Peu pour lui, rien pour ses parens,

                  Tout pour les pauvres.

 

Il a ouvert le Jubilé, et les Portes du Paradis pour tout le monde, et il est mort ne les vouland point fermer.

 

Chanson                                                    1689                                          [135]

Sur l’air de Jean de vert.

Sur Monsieur de Montesquiou Comte d’Artagnan.

 

Le petit Comte d’Artagnan

En sage de l’Armeé,

Loin de s’entester follement

D’un peu de renommeé

En seureté dans un Moulin

Attaquoit Valcourt* d’aussi loin,               *ville

Que Jean de vert.

 

D’en sauver plus d’un ce moulin

Eut, dit on, l’avantage;

Du Vivier, Lizieux & Courtin,

Pleins du même courage

Daquin qui s’en fuyoit aussi,

S’y sauve, et croit être suivy

De Jean de vert.

 

Quittez donc Comte d’Artagnan

La pique et la rapiere;

Dessus les pas de vos parens,

Retournez en arriere,

Reprend le petit collet                                                                          [136]

Vous serez  en vray Prestolet

De Jean de vert.

Blâmer le Comte d’Artagnan,

C’est une médisance.

Quoi donc! le plus grand des talens,

N’est-ce pas la prudence?

La valeur dont on fait état,

N’est-ce pas la vertu d’un goujar

De Jean de vert?

 

L’habile Major d’Artagnan,

Excelle en manigance.

Il scait en manede de temps

Tirer la quitessence;

Mais il ne songe rien qu’a soy,

Et moins à l’interrest du Roy

Qu’à Jean de vert.

 

Un esprit adroit, fourbe et fin,

Est son noble partage;

Par là l’on arrive à sa fin

Mieux que par le courage.

Tous les braves sont indigens.

Ils laissent ferailler les gens.

De Jean de vert                                                                                                            [137]

 

Sa femme d’un farouche esprit (1)

La vielle Majoresse (2):

Veuve d’un Boucher de Poissi,

Se croit une Déesse:

Mais quand on la voit on la prend

Pour une sibille du tems

De Jean de vert.

 

La fausse valeur d’Artagnan

Voudroit tout entreprendre

Son esprit gâté de Roman

Ne songe qu’à pourfendre.

S’il fut né un siecle plutost,

Il auroit pû casser les os,

De Jean de vert.

 

(1)   Sa 1ere. femme. Il a epousé en 2de. N……l’Hermite.

(2)   Je crois qu’elle s’apelloit Visdelou qui lui donne de quoi achepter la charge de ……. dans le Regiment des Gardes. Elle est morte sans enfans.

 

Autre                                                           1689                                          [138]

Sur l’air de Joconde.

Sur le Parlement.

 

Amy garde toy de plaider;

L’injustice est trop grande.

Résous toy plûtôt d’accorder

Ce que l’on te demande;

Le Palais est plein de brigans;

Sauve toy de leurs pattes,

Et la Grand Chambre en ce tems

Fourniroit vingt Pirates.

 

Chanson                                                    1689                                          [139]

Sur l’air: Ouy je le dis et le repete.

Sur Monsieur le Mareschal de Duras.

 

Quand Duras ce grand Capitaine

Galopant a perte d’haleine,

Vers Heidelberg tourna ses pas;

Quoique l’on en ait voulu dire,

Pour combattre il n’alloit pas;

Il alloit pour s’y faire escrire.

 

Année 1690                          [141]

 

Sur Monsieur de Guerchois

par Monsieur Greard    

 

                  Vous dont la sublime éloquence

                  A consacré le nom à la postérité.

Pourquoi dans le désir d’une autre dignité

                  Vous condamnés-vous au silence?

                  De l’employ qui vous a tenté,

Je connois lagrandeur, l’éclat, l’autorité;

                  Mais enfin vous avez beau faire

                  Pour vous y signaler;

Vous n’acquererés jamais tant d’honneur à vous taire

                  Que vous en eûtes a parler.

 

Chanson                                                    1690                                          [145]

Sur l’air de Jean de vert.

 

Monsieur le premier Président,                                   Harlay.

Monsieur le Doyens frere,

Et Monsieur de la Faluere.

Sont trois aussi sotes gens

Qu’il y en avoit

Du tems de Jean de vert.

 

Chanson                                                    1690                                          [147]

Sur l’air de Charivary.

Sur Monsieur Richelet (1).

 

Ta servante est donc ta femme,

Vieux Richelet?

Mais ta soeur bien plus infame,

Longtemps a fait,

Avec le Boureau de Paris,

                  Charivary.

 

(1)   Avocat de Parlement de l’Academie Françoise et auteur d’un Dictionnaire pour la langue françoise.

 

Chanson                                                    1690                                          [149]

Sur l’air de l’Eschelle du Temple.

Aprés la Bataille de Staffarde.

 

Le Duc de Savoye au Combat,

S’en est fui devant Catinat;

Les Ramoneurs inblanchissables,

Qui lui rendoient fort leurs devoirs,

Ne se sont pas trouvé si Diables

Comme nos gens les trouvoient noirs.

 

Catinat dit à nos Soldats

Mes Enfans ne les craignez pas;

Pour dissiper cette assembleé,

Faites dessus eux plusieurs foid

Dévotement avec l’éspeé

Bon nombre de signes de croix.

 

Les gens du Duc mal asseurez,

Se voyant aussi conjurez,

Lui disoient en raison probable

Qu’il faisoit chaud en cet endroit,

En s’enfuyant/ Et s’enfuyoient à tous les Diables

Apres la/ Suivant sa chaise qui couroit.

 

Les Cavaliers & leurs Chevaux,                                                                         [150]

Pour n’estre pris par Diabloteaux,

Coururent en grande diligence;

Qu’on dit en leur langue, presto,

De peur de trouver même chance

Se débarbouiller dans le Pô.

 

Chanson                                                    1690                                          [153]

Sur l’air. Reveillez vous belle endormie.

A Madame de Lamoignon, par Monsieur de Coulanges.

 

Prenez bien garde à Thiessonville

Le drôle guigne Soligny;

Il est fort grand bruit dans la ville

Que l’oiseau veut faire son nid.

 

Avertissez la Présidente

Qu’elle détourne ce malheur;

Car pour devenir confidente,

Elle a trop d’esprit, et d’honneur.

 

Il servit cruel à son âge,

Qu’estant aimable, et sans deffauts.

Elle fit son aprentissage

Pour garder déja les manteaux.

 

Autre                                                           1690                                          [154]

Sur l’air des Fichus.

 

Tourville vous a joué d’un tour

Comme le Gobin Luxembourg;

                  L’Arriéreban aussi

Y va d’un coeur réjouy;

Outre plus Messieurs de Noailles

Commandans sur terre et sur mer,

Vous ont battu canaille,

Et montré leur coeur guerrier.

 

A Monsieur le Duc de Luxembourg           1690                        [155]

Sur la Bataille de Fleurus.

 

Tu viens de combattre en soldat,

Tu viens de vaincre en capitaine;

Luxembourg, tu fais plus dans ce fameux combat,

Tu consoles Louis de la mort de Turenne.

 

Ce qu’il a fait est admirable,

Et chacun se dit tour a tour;

Tout ce qu’on a crû des héros de la Fable.

Nous le voyons dans Luxembourg.

 

Chanson                                                    1690                                          [157]

Sur l’air des Triolets.

Dialogue entre le Pere Bouhours & un prétendu Janseniste, sur le Péché Philosophique en 1690.

 

                  Bouhours.

Les Jesuites de bonne foy,

Vont droit en toutes leurs affaires;

Leur exemple tient lieu de Loy;

Les Jesuites de bonne foy

Ne tiennent point leur quant à moy.

Ils sont deux, affables, et sinceres.

 

                  Janseniste.

Est-ce donc là cette candeur

Et cette anciennce modestie?

Fut il plus impudent menteur?

Est-ce etc.

Quelle abominable douceur!

Quelle execrable modestie!

 

                  Bouhours

Nos Peres ont ils rien écrit

Qui puisse autoriser le crime?

Ont ils rien fait? ont ils rien dit?

Nos Peres ont ils rien écrit.                                                               [158]

Leur morale sans contredit,

N’a que de tres saintes maximes.

 

                  Janseniste.

Pere Bauny l’Agneau de Dieu,

Pour ostez les péchez du monde,

De la morale à fait un jeu.

Pere etc.

De cet auteur (1) digne du feu,

Vient l’erreur en rimes fécondes.

 

                  Bouhours.

Un Régent pour passer le tems,

Dans quelques heures ennuyeuses,

Amusoit quelques jeunes gens.

Un etc.

Dévelopoit à contretemps

Quelques questions curieuses.

 

                  Janseniste.

De ce Régent le sentiment

Est celui de la Comagnie,

Quoique vous blamiez fortement

De ce etc.

Vous rougissez presentement

Qu’on connoisse vôtre infamie.

 

(1)   Il a fait une somme des péchez, dans laquelle en Casuiste facile, il permet beaucoup de chose tres condamnables: on avoit de lui a cause qu’il delivroit de la maladie des scrupules: Ecce agnus Dei qui tollis peccata mundi.

 

Bouhours.                                                                                             [159]

Cela s’est passé dans un coin,

Dans un lieu peu considérable

Dans une Province fort loin.

Cela etc.

Certes il êtoit bien besoin

D’en faire un cancan effroyable.

 

Janseniste.

Une ville de Parlement,

Est donc chez vous une bicoque?

Vous traittez agréablement

Une etc.

Est-ce parler sincerement?

Du public ainsi l’on se moque.

 

Bouhours.

Le sujet de tout ce grand bruit

N’etoit qu’une faible étincelle,

Qui n’auroit jamais rien produit.

Le sujet etc.

Mais vôtre malice grossit

Une légere bagatelle.

 

Janseniste.

De Dijon jusqu’à Louvain

Cette étincelle êtoit voleé,

Le feu prenoit deja grand train

De Dijon etc.

Sans qu’une charitable main.

De l’eteindre se fut meslée.                                                             [160]

 

Bouhours.

Est-ce charité que cela,

Que noiricir des gens de mérite?

Au lieu de mettre le hola?

Est-ce etc.

C’est pain béni à ces gens là

De calomnier un Jesuitte.

 

Bouhours.

Si quelqu’un de nous est l’auteur

De ce Péché Philosophique;

Certes nous en avons horreur.

Si etc.

Nous le détestons de bon coeur.

L’aveu n’est il pas authentique.

 

Janseniste.

Hé! vous parlez de charité,

Vous qui ne l’avez point dans l’ame:

Vous corrompez la vérité.

Hé! etc.

Pour terrasser l’iniquité,

Un juste zele nous enflame.

 

Janseniste.

Le beau doute Pere Bouhours,

Qu’en vôtre écrit on vous voit mettre.

D’où peuvent n’aitre ces Détours?

Le beau etc.

De Paschal sans tant de discours,                                                [161]

Lisez la quatrîeme Lettre.

 

Bouhours.

Jansenistes rétractez vous,

Et que la chose soit publique;

Demandez pardon à genoux.

Jansenistes etc.

La grace est accordez à tous,

Autrement Dieu seroit inique.

 

Janseniste.

Le Pape n’entendit donc rien

A l’erreur qu’il a fulmineé,

Ne parlant que des gens de bien?

Les etc.

A l’Iroquois comme au Chrestien

La même grace est donc donneé?

 

Bouhours.

Jansenistes ne parlez plus,

Suivez l’exemple qu’on vous donne,

Des cinq points par vous sôutenus,

Jansenistes etc.

Condamnez de Jansenius.

Et les écrits et la personne.

 

Bouhours.

Cet évesque herétique en vain

A parlé trop fort sur la grace.

Il a suivy saint Augustin.                                                                      [162]

Cet etc.

Abjurez-le comme Calvin

Où l’on fera sur vous main baisse.

 

Janseniste.

A Rome un fourbe se trouvant

Au bout de toute sa malice,

Lorsqu’il veut prendre un innocent.

A Rome etc.

Va le dénoncer a l’instant

Aux bons Peres du Saint Office.

 

Janseniste.

N’est-ce pas ce qu’on voit chez vous,

Sitost qu’un homme vous attriste,

Il doit succomber sous vos coups?

N’est-ce pas etc.

Vous criez partout en courroux

A l’hérétique, au Janseniste.

 

Janseniste.

Ah! mon bon pere croyez moi,

Rentrez dans la galanterie;

C’est là vôtre plus bel employ.

Ah! etc.

Et laissez là de bonne foy,

Ce fatras de Philosophie.

 

Janseniste.

Aussi bien n’entendez vous pas

Ces subtiles Scholastiques,                                                              [163]

Vous n’en fietes jamais grand cas,

Aussi etc.

Vous aimez bien mieux faire amas

De ces fleurettes poëtiques.

 

Janseniste.

Qu’Arnault lise Saint Augustin,

Que mille fois il le commente,

Il vous faut Buffi-Rabutin.

Qu’Arnault etc.

Trouve-t’on dans ce vieux latin

Cette politesse charmante?

 

Chanson                                                    1690                                          [164]

Sur l’air des Triolets.

Après le siege de Mayence.

 

Duras dit fiez vous à moy

Nous allons secourir Mayence,

Portant la terreur avec soy,/ Je porterai partout l’effroy

Duras dit fiez vous à moy;

Mais si jamais plus on le croit

Avec toutes ses asseurances,

Nous courrons risque dans deux mois

De nous en retourner en France.

 

Chanson                                                    1690                                          [165]

Sur l’air…..

Sur Monsier de Sanlecque Chanoine régulier de Sainte Genevieve, Prieur de Garnay, nommé à l’évesché de Bethléem en 1701. et mort en 1714. agé de 64.

 

Permettez, mon Reverend Pere,

Qu’un malheureux Prieur Curé,

Vous dépeine icy sa misere,

C’est a dire son Prieuré.

 

Ce Bénefice dont la Dixme

Vaut bien cent éscus d’argent clair;

Est dans un si profond abisme

Que J’entends tout le bruit de l’Enfers.

 

De là j’ay bien ouy des Ames

De Hollandois, et de Flamans                      Bataille de Fleurus.

Qui se calbutoient dans les flames.

Prés des fourneaux pleins d’allemans.

 

Dans mon église l’on patrouille

Si l’on ne prend bien garde à soy;

Et le Crapaud et la Grenouille

Chante quelque fois avec moy.                                                                         [166]

 

On ne voit là que des mazures,

Cinq cent gueux couverts de haillons;

Point de Dévote a Confiteor,

Point de pénitente à bouillon.

 

Chanson                                                    1690                                          [167]

Sur l’air……..

Monsieur l’Abbé de Sanlecque ne voulant pas lire avec des Lunettes un papier que trois jeunes Dames lui presenterent à la fin d’un repas oùil avoit bien bû, contrefit l’ivrogne pour s’en deffendre, et se tira d’affaire par la chanson suivante.

 

Ai je donc changé de Climat?

Pourquoi ces tenebres epaisses?

Ah! j'ay trop admiré l’eclat.

De la beauté des trois Déesses.

Quand on devient chauve souris,

On n’a plus les yeux de Paris.

 

Autre                                                           1690                                          [168]

Sur l’air……

Impromptu fait par le même un moment aprés

 

Une Uranie

Quand elle plaît,

Elle paroist

Un grand génie.

En est on fou?

C’est une muze.

En est on sou?

C’est une buze.

 

Chanson                                                    1690                                          [169]

Sur l’air….

Sur le mariage de Monsieur et Madame la Marquise de la Salle.

 

Plus d’une cabale,

Pour plus d’une rivale,

En vain à la Salle,

Inspiroit de l’amour.

La plus charmante,

Est triomphante;

Qu’elle nous chante

Cent fois le jour

J’aime le plus beau de la cour.

 

Mais que dit on d’elle?

On dit, elle est trop belle,

Pour une mortelle,

Elle a de trop beaux yeux.

Dés qu’on l’admire,

C’est un martire,

Chacun soupire,

Mesme les Dieux.

Moins vous la voyés, c’est tant mieux.

 

Autre                                                           1690                                          [170]

Sur l’air du nouveau Marly. Etreine à Madame la Marquise de la Salle.

 

Un grand Astrologue du tems,

Belle, a compté tous les instans;

Il trouve en toy deux destinées;

Ta beauté, même sas Atours

Plein soixante dix anneés;

Mais ton esprit plaira toujours.

 

Chanson                                                    1690                                          [171]

Sur l’air….

Sur les Coëffures.

 

La Battant l’oeil n’est plus joly,

                  La mode en est passée;

Il est bon quand on sort du lit;  

                  Mais quand on est pareé,

C’est la Coëffure à beau Tignon

                  Qui sert aux Dames de bouchon.

 

Sans la Coëffure à beau Tignon,

                  Peut on faire visite?

De nos Dames le beau Chignon

                  Fait le plus grand mérite,

Et sans le Tignon si charmant,

                  On ne peut plus faire d’amant.

 

Autre                                                           1690                                          [172]

Sur l’air des Lampons.

Pour le Roy d’Angleterre.

 

A quoi bon me renvoyer,                bis

En Irlande guerroyer?                      bis

Je ne veux plus me deffendre.

Je cede tout à mon Gendre;

                  Lampons, lampons.

                  Camarades lampons.

 

De mon Trosne renversé,              bis

Et d’Angleterre chassé;                                    bis

Je vais vivre en asseurance,

Dans le Royaume de France.

                  Lampons etc.

 

Quand le Roy Jacques partit,      bis

Pour s’en revenir à Paris;

Il dit à Monsieur son Gendre,

Ayez bien soin de l’Irlande.

                  Lampons etc.

 

Chanson                                                    1690                                          [173]

Sur l’air: Autrefois je chantois Achille

Sur Monsieur de Pontchartrain

 

La justice que l’on doit rendre

N’eut pas fait choix de Pontchartrain;

Mais à présent qu’elle est a vendre,

Peut elle être en meilleure main?

 

Autre                                                           1690                                          [174]

Sur l’air. Vous m’entendez bien.

Sur les Filles de Madame.

 

Toutes les filles de chez vous

Ne trouveront jamais d’époux;

Elles n’ont croix, ny pille,

                  Hé bien!

Et le reste a fait gille,

Vous m’entendés bien.

 

Chanson                                                    1690                                          [175]

Sur l’air du Bransle de Metz.

Au sujet de la Bataille de Fleurus.

 

Valdeck se bat a merveille,

Il a battu Luxembourg,

Et beaucoup mieux qu’a Valcourt;            ville

Les François ont sur l’Oreille.

On dit que ce Général

Pour en porter la nouvelle;

On dit que ce Général

Pensa crever son Cheval.

 

Il a passé par Nivelle,

Et ne s’est point arresté;

Il arriva tout croté

A la porte de Bruxelles,

Quoi! ne connoissés vous pas,

Dit il, à la sentinelle,

Quoi! ne connoisséz vous pas

Le Général des Estats?

 

J’ay remporté la victoire

J’ay battu les énnemis,

Avec vous mes chers amis

J’en viens partager la gloire.                                                            [176]

Ah! que vôtre Gouverneur,

Pour peu qu’il veuille croire.

Ah! que vôtre Gouverneur

Me recevra de bonne coeur.

 

Pour achever la défaite,

J’ay laissé tout mon canon,

Toute ma munition,

Mes Timballes, et mes Trompettes,

Mes Estendars & drapeaux,

Tant la victoire est complette;

Mes Estendars & Drapeaux

Et bon nombre de Chapeaux/Chevaux.

 

Du détail de la Bataille,

Je ne vous en diray rien,

Puisque je me porte bien.

Je reponds de nos murailles;

J’ay laissé là tout mon train

Pour chasser cette Canaille.

J’ay laissé là tout mon train;

Mes enfans ne craignez rien.

 

J’ay partagé mon Armeé.

Un tiers est sous Charleroy,        ville

Et l’autre, à ce que je crois,                                                               [177]

Me suit à grandes journées.

Les plus braves de mes gens

Sont encore dans la meslée.

Les plus braves de mes gens

Aux François montrent les dents.

 

Autre                                                           1690                                          [178]

Sur le même Air.

 

Valdeck ce foudre de guerre,

Dont on vante les Exploits;

S’est sauvé plus d’une fois

De devant Monsieur d’Humieres;

Mais Monsieur de Luxembourg

Ayant pris en main l’affaire;

Mais Monsieur de Luxembourg.

L’a bien vangé de Valcourt           ville.

 

Les Dames les plus galantes

De Bruxelles, de Charleroy,

L’attendoient en bel arroy

Avec Lauriers plus de trente:

Mais son malheureux succés,

Les trompa dans leur attente;

Mais son malheureux succés

Les changea tous en Ciprés.

 

Satire                                                          1690                                          [179]

Contre les petits Augustins

 

Les petits Augustins du fauxbourg Saint Germain,

Ont fait faire chezeux un concert tout divin.

On scait qu’on y chanta Tenebres en Musique;

Mais le détail en est extremement comique:

L’on trouvoit affiché à tous coins de Paris

En faveur de devots et curieux esprits.

Ames qui cherchez Dieu dans la belle harmonie,

Vous le rencontrerez dans nôtre simphonie,

Accourrez promptement, c’est l’illustre Opera

Avec les instrumens qui la composera;

Comme on êtoit pour lors dans la semaine sainte

Où l’Ame du Chrestien est de douleur atteinte,

Et quitte l’Opéra de craine du péché,

On tient qu’ils en ont eu meilleur marché,

Le service fut fait avec mélodie,

On n’entroit qu’en payant comme à la Comédie,

Ils avoient aposté dix ou douze fripons,

Et sept ou huit Archers ramassés sur les ponts.

La porte de l’église êtoit demie barreé,

Et fort severement en deffendoient l’entreé.

Une femme êtoit là qui recevoit l’Argent,

Et qui faisoit payer le riche et l’indigent,

Il est vrai qu’on êtoit assés bien à son aise

Car pour ses trente sols on avoit une chaise.                       [180]

Il y vint un Bourgeois qui n’avoit pas le sol,

Et qui probablement se fut tenu de bout;

Le Chef qui commandoit cette noble brigade,

Luy dit fort rudement, arreste camarade;

Ça donne trente sols pour entrer en ce lieu.

Et qui ne les a pas, ne priera donc pas Dieu?

Dit il, mais il jura le brave par la ventre,

Nous sommes sans quartier, qu’aucun sans payer n’entre

Car quiconque entrera sans payer trente sols,

Il aura sur le champ plus de dix mille coups.

Aprés voulut passer un bon et pauvre Prestre

Mais un Moine parut, et dit par la fenestre,

Monsieur, cherchez ailleurs du divertissement,

C’est tout dire en un mot, nous voulons de l’argent.

Il survint un gascon de ces gens sans ressource.

Qui l’épeé à la main plus viste qu’a la bourse,

Bous êtes des Coquins, dit il, je passeray,

Quiconque ose branler, mort, je l’escharperay.

Ces généreux soldats dirent de bonne grace,

Monsieur, est galant homme, il est juste qu’il passe.

Cadedis repond t’il, bous etes gens d’honneur,

Bonjour Monsieur je suis fort vôtre serviteur

Le Moine vit cela qui crevoit dans son ame;

Il les querella fort aussi bien que la femme.

Parût un Advocat fameux à ce qu’on dit;

Mais l’éloquence là n’avoit point de crédit;

Il avoit avec lui deux jeunes damoiselles,

Que je connois pour être aussi bonnes que belles.

Venez vous, lui dit on, pour entendre chanter?

Il faut donc vôtre argent bien et deument compter.

C’est donc, dit il pour trois, à trente sols par teste,

Quatre franes et demi, je ne suis pas si beste,

Il vaut mieux retourner chanter à la Maison.

Un Marchand de bon vin nous fera mieux raison;

Mercy Dieu voyons voir dit la grosse harangere.

Qui vint foudre sur eux, fortement en colere,

Malgré vous et vos dents j’entreray dans ce lieu.

Et qu’est-ce, pourquoi non? c'est la Maison de Dieu,

Et généreusement força le corps de garde,

Et passe à la faveur des coups de hallebardes.

Le Corporal cria, mes Peres au secours.

Venez ou cette femme entrera malgré nous.

Un gros Moine accourut qui la pousse et la tire,

Et la prend aux Cheveux, et sa coëffe déchire

Elle se deffendit le nommant gros cochon,

Luy tira par morceaux robe et coqueluchon,

Et jurant jour de Dieu, somme nous à la guerre?

Lui donne un coup de poing, et le jetta par terre.

Je vous laisse a penser s’il ne fut pas moqué,

Voila, dit on, voila le Moine défroqué;

Ce gros Moine a perdu son froc à la Bataille,

Pas un là, n’est pour lui, tout le monde le raille,                                  [182]

Un Novice le vit qui saisi de frayeur,

Cria l’on a tué nôtre Pere Prieur.

On sonne le toccin, tout le Couvent s’assemble,

Ils s’arment de bâtons et viennent tous ensemble,

On eut dit à les voir des Dragons furieux

Prest a bouleverser la terre et les Cieux.

Ah! cette pauvre femme eût êté déconfite:

Mais alors par bonheur elle avoir pris la fuitte.

Ces Moines ne pensant qu’a livrer des Combats,

Le peuple profita de cet embarras,

L’un assés doucement aprés l’autre s’ecoulle,

Et cinq cens par aprés passerent à la foulle.

Ils doublerent les gardes, et dirent d’un ton fier

Que l’on fasse surtout main basse et sans quartier

On chargea rudement et Prestre et femme grosse,

Gare, gare, dit on, il arrive un Carosse,

Il sort un Partisan, un celebre voleur.

Aussi riche en argent qu’il est pauvre en honneur,

Il tenoit par la main une assés belle femme,

Et qui dedans Paris passe pour une infame.

Cela n’empesche pas en payant l’écu blan

Un Moine ouvre la porte et passe librement;

Sur la fin de la piece et Bourgeois et grisettes,

Tous entroient pour cinq sols, comme aux Marionetes,

Vengez vous, juste Ciel! Vous avez des Carreaux.

Ecrasez propmptement ces méchans animeaux.                                [183]

Ah! mon Dieu quel désordre a présent dans l’église,

Sous le masque du bien le vice se déguise.

Ah! jamais un Ministre a-t’il pris un teston

Pour permettre d’aller au Presche à Charenton?

N’est-ce pas ce veau d’or que ces Moines honorent?

Ce n’est pas Jesus Christ, c’est la Croix qu’ils adorent.

Ces Moines en effet sont pires que Judas;

Car s’il prit de l’argent, il ne le garda pas.

Il fut le raporter avec l’ame contrite;

Mais ces Moines en font bien bouillir leur marmite,

Cela leur a fait tort, et l’on s’en paint et l’on dit,

Qu’a present dans Paris ils n’ont plus de crédit,

Que le frere questeur quoiqu’il dise, et qu’il fasse

Retourne au Couvent et flacon et bessasse,

Toi qui auparavant donnoit un pain entier,

Qui n’en donne a présent qu’un tres petit quartier,

La boëte du questeur êtoit tous les jours pleine,

Elle n’est qu’a demi au bout de la semaine.

Tel donnoit du vin pur, du vieux ou du nouveau,

Quile mesle a présent avec les deux tiers d’eau,

On lui ferme la porte, et pour lors il persiste;

On lui dit rudement, le bon Dieu vous assiste.

Allés frere questeur diner à l’Opera,

Nous n’irons plus chez vous quand on y chantera,

Chacun voit sans pitié ces misérables Moines

Que l’on a veu jadis plus gras que des Chanoines.

Ils demeurent d’accord en se voyant à bout.                        [184]

Pour vouloir trop gagner, que souvent l’on perd tout.

 

Chanson                                                    1690                                          [185]

Sur l’air: C’est la pure vérité.

 

Le Pontchartrain, se dit on,

Voit la femme du Gascon.             le Duc de Roquelaure.

Ce n’est qu’une médisance;

Elle pourra escarteler

De Phelypeaux et de France       Louis XIV.

C’est la pure vérité.

 

Chanson                                                    1690                                          [186]

Sur l’air: Sommes nous pas trop heureux.

Sur Jacques II. Roy d’Angleterre.

 

Bon Dieu! calmés ce grand vent

Qui semblant toujours contraire

Pour aller en Angleterre,

Retarde l’embarquement;

Jacques veut chasser son gendre

Avec de braves soldats;

Mais helas! s'il scait descendre,

Ce n’est que du Throsne en bas.

 

Chanson                                                    1690                                          [187]

Sur l’air de Lampon.

Sur le Duc de Savoye aprés la Bataille de Staffarde.

 

Le Duc de Savoye est pris (1),

On l’ameine à Paris;

Mon Dieu que nos Chemineés.

Vont être bien ramoneés!

Lampons, lampons,

Camarades lampons.

 

S’il n’est pas bon Cavalier,

Il est du moins bon courier;

Car on la veu dans la plaine

Courir a perte d’haleine,

Lampon etc.

 

On m’a mandé de Paris,

Que Catinat m’a tout pris;

Il a menti s’il s’en vante;

Voila ma Chaise roulante.

Lampon etc.

 

Nôtre pauvre Prince impuissant

 

(1)   Il fut poursuivie par un Cornette de Cavalerie, qui pensa le prendre prisonnier.

 

Devient fou faute d’argent                                               [188]

Ne pouvant continuer la guerre

Contre le Roy son beau pere.

Lampon etc.

 

Tous les gros Milords Anglois

Lui disant tout d’une voix.

Reposez faite un bon somme;

Car pour vous point de Royaume.

Lampon etc.

 

L’étoille du grand Louis,

Fait perir ses ennemis;

Presque nul ne s’en echape

Non pas même jusqu’au Pape.

Lampon etc.

 

Elle abregea les vieux ans

De ce matin d’Innocent;                                  XI.

Et sur le chemin de Vienne

Surprit le Duc de Lorraine,

Lampon etc.

 

Le vieux Schomberd en sabré

Et son parti délabré

L’on confirme la nouvelle,

Que Guillaume en a dans l’aisle;                                                   [189]

Lampon etc.

 

Il n’est pas un Electeur,

Qui ne meure de frayeur,

Et sa Majeste Lipüe,                         Leopol.

Craint même qu’on ne la tüe.

Lampon etc.

 

Que feriez vous pauvres gens,

Si vos efforts impuissans,

Ne servent à nostre France

Que pour croistre sa puissance?

Lampon etc.

 

On verra les Hollandois

Bientost réduit aux abois,

Et la Reine Guillemette,

Chercher la boëte à Perrette,

Lampon etc.

 

J’ay pitié du Savoyard;

Car il sera tost ou tard,

Pour remplir sa destinée

Ramoneur de chemineé.

Lampon etc.

 

Autre                                                           1690                                          [190]

Sur l’air: Lair la lair lanlair.

 

Chacun s’etonne avec raison,

De l’amour de la Maintenon;

Les Dames ne scavent qu’en croire.

Laire la, laire lan laire;

Laire la, laire lan la.

 

Que diroit ce petit Bossu (1),

S’il vivoit de ce voit cocu,

Par le plus grand Roy de la Terre?             le Roy Louis XIV.

Laire etc.

 

Il diroit que ce conquerant,

A tant pris qu’a la fin il prend,

Le reste de toute la terre.

Laire etc.

 

(1)   Scaron cu de jatte êtoit né fait comme un autre. Dans un froid excessif lui 4e. firent une débauche et s’en revinre nuds chez eux e. en moururent, Scaron en devint cu de jate. J’ay veu ailleurs que c’estoit pour avoir pris du mercure pour le guerir de la verolle.

 

Mademoiselle Scudery                   1690                                          [191]

sur des Preaux.

 

A l’aspect d’un bâton, Boileau tremblant, et blême,

Cria, tout beau Messieurs, ne précipités rien;

Quoi! sans confession assommer un Chrestien,

N’y lui donner le tems de songer à lui même.

 

Sur Boileau                            1690                                          [192]

 

Boileau ce rimeur satirique,

Ayant senti la vertu du bâton,

                  Demeura sans replique.

Ce remede quand on l’aplique,

Range la rime à la raison.

 

Sur Monsieur Santeuil                     1690                                          [193]

Poëte.

 

Avoir de quel air effroyable,

Roulantles yeux se tordant les mains,

Santeuil lit ses Cantiques vains.

Diroit on pas que c’est le Diable

Que Dieu force à louer ses Saints?

 

Chanson                                                    1690                                          [194]

Sue l’air Jardinier ne vois tu pas.

Sur les Jesuittes.

 

Scavez vous bien qui fait mal,

Sans mesures, et sans bornes?

C’est, je le diray tout net,

Quiconque porte au bonet

Trois cornes, trois cornes, trois cornes.

 

Chanson                                                    1690                                          [195]

Sur l’air des Triolets.

Aprés la Bataille de Fleurus par Mademoiselle Ithier.

 

Retirez vous pauvre Valdeck,

Vous n’avez plus rien a pretendre.

Ce Combat est un rude éschec,

Retirez vous pauvre Valdeck;

Allez chercher quelque rebec,

Et vous consolez à l’entendre.

Retirez vous pauvre Valdeck.

Vous n’avez plus rien a pretendre.

 

Luxembourg vous a confondu,

Vôtre malheur est sans ressource;

Lorsque vous faisiez l’entendu,

Luxembourg vous a confondu.

Pour vous tout espoir est perdu;

Eussiez vous de Cresus la bourse.

Luxembourg vous a confondu

Vôtre malheur est sans ressource.

 

Louis le plus grand de nos Rois,

Vous a fait sentir sa colere;

On reconnoit à ses éxploits

Louis le plus grand de nos Rois.                                                                        [196]

Voyez malheureux Hollandois,

Ce que c’est que de lui déplaire:

Louis le plus grand de nos Rois

Vous a fait sentir sa colere.

 

Vous feriez mieux pauvres Bourgeois,

Qui n’estes pas gens de rapiere

De vous retirer chez vous bien coys,

Vous ferez mieux pauvres Bourgeois;

Ne quittez plus une autre fois

Vos Fromages ny vôtre Bierre.

Vous ferez mieux pauvres Bourgeois

Qui n’estes pas gens de rapiere.

 

Autre                                                           1690                                          [197]

Sur l’air de Jean de vert.

 

Sur la Sambre, et non sur le Rhin.

Fut blessé Senneterre,                                     le Comte de Brinon Capitaine aux Gardes

Qui aprés avoir pris du vin,

Dit, grace au Dieu du verre;

Je me sens revenir le coeur,

Et je crois que je ferois peur

                  A Jean de vert.

 

Autre                                                           1690                                          [198]

Sur l’air de Jean de Nivelle ou Mordienne de vous.

Aprés la Bataille de Fleurus.

 

Te voila défait Valdek

                  Sans cervelle;

Luxembourg te fait vrai jean de nivelle;

Comment pourrez vous Valdek?

                  Comment pourrez vous

                  Réparez ce coup?

 

Lorsque Guillemot

                  Scaura la nouvelle

Il sera plus sot que jean de nivelle;

Comment pourrez vous Valdek?

                  Comment pourrez vous,

                  Réparez ce coup?

 

Chanson                                                    1690                                          [199]

Sur l’air: Reveillez vous belle endormie.

de Madame la Duchesse, envoyeé à Monsieur le Prince pour le jour de sa feste.

 

Dans ce grand jour de vôtre feste,

Chacun vous offre son present.

Le mien qui est le moins honneste,

Peut être aura son agrément.

 

Ce n’est qu’une Chanson badine

Que je pretends vous presenter;

La matiére en est noble et fine,

Préparez vous à la gouter.

 

Cette noble fine matiére

Sur quoi cette Chanson s’etend;

C’est celle qui sort du derriere,

Et qui d’abord au nez vous prend.

 

D’offrir des fleurs, c’est la coutume;

Mais si l’on fait cas de l’odeur,

Un bel et bon étron qui fume

Répand au coeur plus de senteur.

 

Ce Compagnon de Saint Antoine

Qui se vient presenter à vous,                                                         [200]

N’est devenu gras comme un Moine,

Qu’avec de si friand ragoust.

 

Cette délicate pasture,

Dont il remplit son éstomach,

Luy tenant lieu de nourriture

Vous pourra servir de tabac.

 

J’avois dessein de vous escrire,

Des Couplets un peu moins puans.

Si vous n’osez plus haut les lire,

Maschaunez-les entre vos dents.

 

Que pouvez vous penser ou dire

En lisant ce tas de rebus;

Si vous dites que c’est pour rire,

Vous aurez mis le nez dessus.

 

Si le mon d’Estron effarouche,

Pour ceux qui l’entendront chanter,

Quand il vous viendra dans la bouche,

Vous n’aurez plus qu’a l’avaler.

 

Mais ne faites point de mistere,

C’est un mets des plus succulens;

La merde ne doit pas déplaire,                                                                         [201]

Chacun la fait avec les dents.

 

N’ayez aucune répugnance,

Ce présent n’est pas des plus grans;

Mais vous voyez qu’en récompense,

Il ne manque pas de bon sens.

 

N’allez pas seul par gourmandise,

Taster de ce mets délicieux;

A vos amis chacun leur prise,

Ce ne sera pas trop pour eux.

 

Chanson                                                    1690                                          [202]

Sur l’air: des Trompettes.

Impromptus faits à Table, à la santé du Roy, aprés la Bataille de Fleurus.

 

Nous voila couvert de gloire,

Que nos coeurs soient rejoüis;

Amis ne cessez de boire,

A la santé de Louis.

Ta la la la etc.

 

Luxembourg a fait merveille,

A Valdeck il est fatal;

Ça vuidons cette Bouteille,

Pour ce brave Général.

Ta la la la etc.

 

On void sur mer et sur Terre,

Triompher nôtre grand Roy;

Tout ceux qui lui font la guerre,

Seront soûmis à sa Loix. Ta etc.

 

Pour faire honneur à Tourville,

Prenons tous le verre en main;

Il faut que toute la ville

Boive à ce héros malin. Ta etc.

 

Chanson                                                    1690                                          [203]

Sur l’air: Morguienne de vous.

Sur la Bataille de Fleurus en 1690.

 

On vous a défait

Valdek sans cervelle;

Luxembourg a fait

Un grand Jean de Nivelle.

Morguienne de vous,

Quel Prince êtes vous?

 

Quand Dom Guillemot

En scaura la nouvelle,

Il sera plus sot

Que Jean de Nivelle.

Morguienne etc.

 

Quoi! point de douceur?

Et toujours cruelle?

Avec vôtre honneur;

Vous nous la baillés belle.

Morguienne etc.

 

Autre                                                           1690                                          [204]

Sur l’air….

Imitons Baptiste (1) et Chaussons (2),

                  Point de Religion

                  Que celle des flacons.

N’aimons que les garçons

                  Sans Parens,

Crédit aux Marchans,

De l’Argent comptant,

Le v… bien bandant,

                  Sans émploy;

                  N’obeir qu’a soi,

                  C’est être ma foy,

Plus heureux que le Roy.

 

(1)   Monsieur Lully.

(2)   Monsieur Chausson fut brûlé en Greve pour sodomie en 16..

 

Autre                                                           1690                                          [205]

Sur l’air des Rochellois.

 

Bavieres fuit nôtre Dauphin,

Catinat fait trembler Thurin;

Noailles en vainqueur fait la guerre,

Tourville sur mer gagne un combat.

Luxembourg en gagne un sur terre,

Et Lauzun fait échec et mat.

 

Autre                                                           1690                                          [206]

Sur l’air: Scavez vous faire la difference.

 

Louvois (1) tu paroît a ta mine

Avoir étudié la Marine.

Colbert (2) eut le même destin;

Mais en Enfer il se console,

D’avoir perdu tant de Catin,

Te voyant perdre ta boussole.

 

(1)   Monsieur de Louvois desirant succeder a l’Intender. de la Marine, se fit instruire peu de tems avant la mort de Monsieur de Seignelay.

(2)   Monsieur Colbert dans la veu de devenir Chancelier, et de succeder à Monsieur le Tellier avoit apris le latin quelques anneés avant sa mort, et se fit recevoir Avocat.

 

Chanson                                                    1690                                          [207]

Sur l’air. Il fait tout ce qu’il deffend.

Sur l’Opéra d’Orpheé, la Musique est de Monsier de Lully, et les parolles de Monsieur de Boulay.

 

Ah! que ces fades sornettes,

Dans l’Opéra que je vois!

Orphée attiroit les bestes,

Il attiroit jusqu’aux bois,

Mais ce misérable Orpheé

N’attire que la hueé,

Et ses plus charmans effets,

Sont d’attirer les sifflets.

 

Francine, dit on, fait faire

Tout ce tintamare là,

Pour empescher son beaufrere ,

De réüssir à cela.

Par ce jeu le sot Francine,

Travaille pour sa cuisine,

Et pourroit bien voir enfin

Qu’un sifflet n’est pas du pain.

 

S’il produit toujours sa vache,

La sourdine Barbereau;

Si la des Matins ne cache                                                                    [208]

Son êtroit, et long museau;

Si le Marquis la Gambade,

Est toujours son camarade.

Si Colasse fait des Airs,

Tout s’en ira de travers.

 

Autre                                                           1690                                          [209]

Sur l’air: Il a battu son petit frere.

Sur le Prince d’Orange.

 

Est il mort le Prince d’Orange?

Chaque jour la nouvelle change

Quand l’un dit ouy, l’autre dit non;

S’il vit ce qui me met en peine;

C’est qu’a l’espreuve du Canon

Ait êté ce grand Capitaine.

 

Autre                                                           1690                                          [210]

Sur l’air…..

Courante du Marquis de Lassé, pour Madame la Dauphine.

 

Faut-il qu’un amant bien traité

                  S’en aplausisse?

                  Quoi! se peur il flaté

                  Que le mérite agisse,

                  Prés d’une beauté?

Qu’il scache que le plus charmant

N’est pas toujours le plus heureux amant;

Mais c’est celui qui du tendre caprice

                  Trouve le moment.

 

Chanson                                                    1690                                          [211]

Sur l’air de Jean de Vert.

Sur Monsieur de Maurevert.

 

Un guerrier fort doux et fort vert,

Que Maurevert on nomme;

Nous a fait voir que Jean de vert

Estoit un vray Jeanlogne.

Bona sera donc Jean de vert;

Cedez, cedez à Maurevert,

                  A Maurevert.

 

Autre                                                           1690                                          [212]

Sur le même Air.

Sur Monsieur de Sennecterre.

 

Sur la Sambre, et non sur le Rhin,

Fut blessé Sennecterre,

Qui aprés avoir pris du vin,

Dit; Graces à Dieu des verres,

Je me sens revenir le coeur,

Et je crois que je ferois peur

                  A Jean de vert.

 

Autre                                                           1690                                          [213]

Sur le même Air.

 

Tourville à vaincu sur les Eaües,

Luxembourg sur la terre;

Notre Dauphin par ses travaux,

Va terminer la guerre.

Grand Roy! tous ces évenemens

Ne se sont jamais veus du temps

                  De Jean de vert.

 

Autre                                                           1690                                          [214]

Sur le même Air.

 

Du gros Lanternier Gauderat,

J’admire la prudence,

Quand à table il juge d’un plat

Pour en remplir sa panse;

Mais pour décided les Procés,

J’aimerois mieux les lansquenais,

                  De Jean de vert.

 

Chanson                                                    1690                                          [215]

Sur l’air du Rigaudon.

Sur les Procez.

 

Hélas! Seigneur

Rendez moy la douceur,

Et le repos du coeur,

Que n’a point un plaideur.

Point de procez,

Quel bien inestimable!

Que de vivre en paix;

Sorty des plais

Que je sois méprisable,

Si j’y vais jamais.

 

Gens sans honneur,

Greffier & Procureur,

L’un et l’autre voleur,

Et l’Avocat menteur.

Huissier fripon,

Fait mainte fourberie

Pour moins d’un teston.

Leuray patron

De cette Confrairie

C’est le bon Larron.

 

Quarante Exploits                                                                                                      [216]

Bien comptez par mes doigts,

Avoir gagné six fois,

Toujours tirer la Croix.

Et cependant

Un Arrest sur Requeste,

Reçoit opposant,

Gagne Marchant!

Va te rompre la teste

En recommençant.

 

L’Avocat prest,

Bien instruit du procés,

Vous allez au Palais,

Vous donnez des placets;

Malgré vos pas,

Et maintes révérences.

Toujours chapeau bas,

Avoir votre audience,

Sans le taffetas.

 

Avoit troté

Tout l’hiver et l’ésté;

Pour toute charité

Vous êtes apointé.

Quelle lenteur!

De poursuivre une affaire                                                                                     [217]

Chez un Raporteur.

Se le plaideur

Ne fonce au Secretaire,

Je plains son malheur.

 

Dans un extrait

Qu’un secretaire a fait

On le tient pour soustrait.

Soins superflus,

La principale piéce,

Ne se trouve plus

J’ay bien perdu

Mon credit, mon adresse

Un bon tas d’éscus.

 

Chanson                                                    1690                                          [218]

Sur l’air……

Pour le Chtr de Bouillon beuvant avec le Chtr de Roches.

 

Chevalier sans peur et sans reproche,

Suis ton coeur et ses Nobles Bouillons;

Imitons ce brave de Roches:

N’espargnons rien dans cette débauche.

Baisons, beuvons, baisons jusqu’a rompre couillons

Moquons nous de ces gens retenus,

Qui prennent les plaisirs par mesure,

De Vénus et du Pere Bacchus;

Quand à nous, poussons la nature,

Jusqu’à tant qu’elle n’en puisse plus.

                                    par Beauregard.

 

Chanson                                                    1690                                          [219]

Sur l’air de Jean de vert.

Sur Monsieur de Sennecterre blessé à la Bataille de Fleurus.

 

Sur la Sambre, et non sur le Rhin

Fut blessé Sennecterre;

Qui aprés avoir pris du vin

Dit graces au Dieu des verres,

Je me sens revenir le coeur,

Et je crois que je ferois peur

                  A Jean de vert.

 

Autre                                                           1690                                          [220]

Sur l’air de la Gavote de Phaëton.

Sur les Ministres de ce tems.

 

Nous sommes quatre hommes en France,

                  D’un merite sans pareil.

Pelletier pour la Finance,

                  Le Tellier pour le Conseil;

Et pour la Guerre Louvois

                  Est un homme incomparable,

Et moy quand je suis à table,

                  Je vaux mieux que tous les trois.

 

Priere                                                          1690                                          [221]

par Monsieur de Valdeck.

 

Ȏ grand Dieu je vous remercie;

De ce que je suis revenu

De la Bataille de Fleuru;

Je croyois y perdre la vie.

Ne m’induisez jamais par indignation

En pareille tentation;

Mais faites par la bonté vôtre,

Quand le dangereux Luxembourg,

Qui m’a battu comme un Tambourg,

Prendra par un costé, que je prene par l’autre.

 

Chanson                                                    1690                                          [223]

Sur l’air: des Triolets.

Sur Louis Quatorze.

 

Louis quatorzieme du nom,

Se promene dedans Versailles;

Sur son palier, c’est un Lion,

Louis quatorzieme du nom:

Mais quand on tire le Canon,

Ou que sur le Rhin on bataille,

Louis quatorzieme du nom,

Se promene dedans Versailles.

 

Autre                                                           1690                                          [224]

Sur l’air. Scais tu pourquoi Manon me verse à boire.

Sur la campagne et les victoires de 1690.

 

Dans trois* Combats remporter la victoire,        *Fleurus, Navale & Staffarde.

Dans trois combats faire sentir son bras;

Dessus ses pas faire marcher la gloire

Et voir la Ligue à bas, ce sont des cas,

Que nous dira l’histoire et qu’on croira pas.

 

Chanson                                                    1690                                          [225]

Sur l’air de l’Archevesque de Paris.

Sur Louis XIV.

 

Sire, voulez vous me croire?

Profitez de ces deux mots

Pour  le bien de vôtre gloire.

Laissez là tous vos dévots,

C’est par eux que vôtre vie

N’est plus que pédanterie.

Vous voyez dans quel mépris,

Votre amy Jacques ils ont mis.                                      le Roy d’Angleterre.

 

Eh! que Diable vous importe!

Que je baise tout mon sou.

Que le Diable aprés m’emporte

Ou qu’il me torde le cou.

Lorsque la Scaron vous berne,

Qu’un jeune fou vous gouverne,                 Barbezieux

En Seigneur de prier Dieu,

Cela vous importe peu.

 

Chanson                                                    1690                                          [227]

Sur l’air: J’ay passé deux jours sans vous voir.

 

Ȏ ciel! quel est nôtre malheur!                                    Après le combat de la Hogue.

Sur mer, comme sur terre,

Louis en tous lieux est vainqueur

Tout cede à son tonnerre.

Hélas! faut il comme à Fleurus,

Nous voir icy encore vaincus.

 

Luxembourg ce vaillant héros

Y parût en Alcide,

Et Tourville dessus les flots,

N’est pas moins intrépide.

Hélas! aprés ces deux combats,

Que vont devenir les Estats?

 

Les Anglois croyoient sur la mer

Avoir un grand Empire,

Et qu’aucuns Roys de l’univers

N’osoient leur contredire.

Hélas! Louis leur fait bien voir

Qu’ils se flattoient d’un vain espoir.

 

Vainement nous étions unis

Pour conjurer sa perte;                                                                                          [228]

Nous n’en sommes que mieux punis;

Nôtre Flotte est déserte.

Hélas! malgré tous nos efforts

Il nous bat jusques dans nos Ports.

 

Nous voguons de tous les côtez

Sans trouver un azile;

Nous sommes partout arrêtez;

Rien n’échape à Tourville;

Hélas en vain nous le fuyons,

Il nous brûle et nous coule à fons.

 

Ah! que Louis est bien servy

Sur la Terre et sur l’Onde.

Chacun le veut rendre a l’envy

Le plus puissant du monde.

Helas! quelle rage pour nous

Quand nous voulons l’accabler tous.

 

Que nous sert de voir aujourd’huy

Tout l’Europe en ligue?

Rien ne reussit contre lui;

Il rompt toutes nos brigues.

Helas! tout ce qu’on entreprend

Ne sert qu’a le rendre plus grand.

 

Vois tous les maux que tu nous fais,                                           [229]

Maudit Prince d’Orange;

Crains à ton tour de tes forfaits

Que le Ciel ne se vange;

Hélas! nous ressentons des coups

Que tu mérites mieux que nous.

 

Sous une libre et douce loy,

Nous vivions sans traverse;

Falloit-il pour te faire Roy

Rompre nôtre Commerce?

Hélas! nous en sommes plus gueux,

Et tu n’en est pas plus heureux.

 

La chute est le sort des Tyrans,

Tu ne scaurois le croire.

Quand tu veux, comme les Titans

Porter si haut ta gloire;

Hélas! puisse-tu l’éprouver

Du Trône où tu sceus t’elever.

 

Sur la Place des Victoires.            1690                                          [230]

A la victoire.

 

Cadedis! quand je vois ne scais à quel propos

Sur le Chef de Louis poser une Couronne;

Je ne puis m’empescher de vous dire en deux mots,

Que véritablement je vous trouve bien bonne.

Eh! Qu’à t’il fait ce Monsieur le Heros?

Qu’écraser ses sujets, sans épargner personne;

A tous honnestes gens préférer les cagots;

Se laisser gouberner par l’antique Scaronne.

Aux Imbéciles, aux fats, confier les Affaires;

Par de honteuses Paix, finir d’injustes guerres;

Nous donner pour Bourbons de petits Montespans

Et vous vouler par là le couronner de gloire?

Mais non, je m’aperçois que vous êtes en suspens.

Cadedis haut le bras, Madame la victoire.

 

Chanson                                                    1690                                          [231]

Sur l’air des Feuillantines.

Sur N……. le Tellier Archevesque Duc de Reims.

 

Dans un amoureux combat,

                  Un Prélat,

Manque de force et s’abat;

N’est-ce pas une avanture?/ Qui paroit, qui paroit contre nature?

A se ……………………………..

 

Pour réparer cet affront

                  La d’Aumont,

Lui montra son blanc teston;

Mais malgré cet étalage

Il n’en fit, il n’en fit pas d’avantage.

 

Le Pere Gaillard amoureux,

                  Plus heureux.

Et cent fois plus vigoureux,

Répara par six reprises,

L’affront qu’il fit à l’église. / Cet affront, cet affront fait à l’église.

 

Autre                                                           1690                                          [232]

Sur l’air: de Marinne, ou: Il a battu son petit frere.

 

Le Chtr de Bouillon, au Prince de Richemont, fils naturel de Charles IId. Roy d’Angleterre et de Madame de Portsmouth (Pennencouet de Keroual)

 

Ȏ toy! dont la beauté charmante,

Passe de loin tout ce qu’on chante

De la beauté des immortels.

Si tu veux qu’on t’eleve un Temple,

Et qu’on te dresse des Autels,

Laisse toy faire/ f..tre à leur exemple.

 

Chanson                                                    1690                                          [233]

Sur l’air. Dormez roulette

C’est le François qui parle au Prince d’Orange à qui il a tant de fois tourné le dos.

 

Préparez vous Nassau,

Prenez viste un Clistere.

Ça en voicy un tout chaud

Tient l’apotiquaire.

Ça le derriere,

Ça mettez vous comme il faut;

C’est ici, et non en guerre,

Qu’il faut tourner le dos.

 

Réponse

Que voulez vous de moy,

Maudit Apotiquaire?

Je vous mets le canon

Dans le derriere,

Ah! quelle misere;

Je crois que je suis perdu,

Et jusqu’en Angleterre,

J’aurai le canon au cu.

 

Autre                                                           1690                                          [234]

Sur l’air: Or nous dites Marie

 

Illustre Présidente,

Nous direz vous comment,

Vous fûtes pénitente

De ce Curé galand?          Mauroy Curé des Invalides

Sa jambe violette,

Ses yeux pleins de douceurs,

Ses gans et sa toilette

L’ont fait mon Directeur.

 

Chanson                                                    1690                                          [235]

Sur l’air du Confiteor.

Sanleque fit ce couplet pour Mademoiselle Langlois.

 

J’estois assez bon Directeur

Quand je gouvernois d’autres belles;

Je reglois assez bien leur coeur.

J’avois de bons avis pour elles;

Mais, belle Iris, quand je vous vois,

Je garde mes avis pour moy.

 

                                                      Anneé 1691                                            [237]

 

Chanson                                                    1691                                          [239]

Sur l’air de Joconde.

Sur Monsieur de Mauroy Curé des Invalides.

 

L’amour range tous sous ses loix,

                  Quoique l’on puisse faire;

Témoin le Tartuffe Mauroy

                  A qui Doujat* sceut plaire.

Tous ces grands faiseurs d’oraisons

                  Et ces signes d’Apostres,

Sont sur les tendres passions,

                  Hommes comme les autres.

 

Quelque triste que soit le sort

Du Conseiller le Boindre,

Il auroit certe un fort grand tort

                  De gémir et se plaindre;

L’Argent, le Carosse, et le lit

                  Qu’il prit du Missionnaire,

Font voir qu’il est sans contredit

                  Un cocu volontaire.

 

Autre                                                           1691                                          [240]

Sur l’air Pierre Bagnolet

Sur ……… Gilbert frere de Madame d’Armemonville, fait President des Comptes

 

Messieurs de la Chambre des Comptes,

Laschez vitement tous vos Chats;

Serrez vos Registres et vos Comptes,

Gilbert est tout rempli de Rats.

                  Il a des Rats.                         Bis

                  Dans sa dépense

Dans sa dépense et dans ses draps.

 

Pour Belin (1) ce n’est pas grand domage,

Qu’il air pris femme en lieu si bas;

Il n’a pas gâté grand ménage,

En s’alliant avec les Rats.

 

(1)   Fermier general marié avec la soeur de Madame d’Armenonville.

 

Autre                                                           1691                                          [241]

Sur l’air de Lampon etc.

Sur Vivien l’Abbé Seigneur de Bulonde, Lieutenant géneral. leva le Siége de Coni en piémont l’an 1691.

 

Un certain bruit court ici,

Que Bulonde a pris Coni;

Il a menti s’il s’en vante,

Il n’a pris que l’epouvante.

Lampon lampon,

Camarade lampon.

 

Autre                                                           1691                                          [242]

Sur l’air: Quand Iris prend plaisir a boire.

 

Admirez les hauts faits de guerre,

Du valeureux Duc de Bavieres;

Il a pris Bellegrade autrefois;

Si l’on eut pû compter sur sa parole,

Il exterminoit les François;

Mais par bonheur tous ses exploits,

Ont abouty à Carmagnole.

 

Chanson                                                    1691                                          [243]

Sur l’air del’Echelle du Temple.

Sur la mort de Monsieur de Louvois.

 

Cy gist le Seigneur de Louvois,

Elevé favori du Roy

Par son habilité profonde;

Du Royaume il portoit le fais;

S’il fut si juste en l’autre monde,

C’est qu’il avoit seul les relais.

 

Chanson                                                    1691                                          [245]

Sur l’air des Triolets.

 

Avec le Duc de la Ferté,

Le premier Chansonnier de France,

Vouloir faire societé

Avec le Duc de la Ferté,

C’est bien grande témérité.

Je le dis comme je le pense,

Avec le Duc de la Ferté

Le premier Chansonnier de France.

 

Chanson                                                    1691                                          [247]

Sur l’air des Contrevéritez

Couplets faits à Rome; par Coulanges.

A Monsieur le Duc de Nevers.

 

                  Rome êtoit aimable,

                  Plaisant, agréable,

Pendant le regne de Nevers;

                  Toujours de jolis vers,

                  Toujours une Table,

                  De peu de Couverts,

De bon vin, surtout le Connestable.                   Un vin de fratoche qui donnoit le Connestable Colonne.

                Et cent mets divers.

 

                  Maintenant Coulanges,

                  Chose fort étrange;

Ne boit, ne mange, ny ne dort;

                  Voila son triste sort.

                  Absent de Thiange*,                                           *Madame la Duchesse de Nevers.

                  Il dépérit fort.

Si bientost il ne revoit cet ange,

                  C’est un homme mort.

 

                  Rome n’est plus Rome

                  Rome est pour moy comme,                                           [248]

Seroient les plus affreux déserts.

                  J’ay l’esprit à l’envers.

                  La goute m’assomme,

                  Et frappe mes nerfs;

En un mot, je ne suis plus cet homme,

                  Du temps de Nevers.

 

                  Qu’elle m’a sceu plaire,

                  Voire Tabatiere (1),

                  A Genes! quoi donc! en fait on?

                  Monsieur de Ratabon,

                  M’envoya n’aguieres.

                  Ce précieux don.

Le travail ne tient point du vulgaire.

                  Le ressort est bon.

 

Mais quelle espérance,                

                  Aprés tant d’absence?

Je conçois d’un tel souvenit,

                  Qui me pourra tenir?

                  Si jamais en France

                  Je puis obtenir,

Comme icy chez vous sans conséquence,

                  D’aller et venir.

 

Voyez la Reponse à cette Chanson qui commence ainsy

Croyez cher Coulanges.

 

(1)   Une Tabatiere que Monsieur de Nevers envoya a Monsieur Coulanges de Genes par Monsieur de Tatabon qui y etoit lors Resident.

 

Autre                                                           1691                                          [249]

Sur le même Air.

En revenant de Rome. Sur une mauvaise nuit qu’on eut à Radicofani, par le bruit épouvantable d’une infinité de bestiaux de toutes les façons assemblez au tour de l’Hostellerie qui est en pleine campagne, pour une foire le lendemain.

 

                        Rien ne me contente,

                        Et tout m’espouvante,

A Radicofanci, grands Dieux!

                        Je n’ay devant les yeux

                        Qu’une trouppe errante

                        De monstres affreux.

N’est-ce point que Circé la méchante

                        Habite en ces lieux?

                                                      par Coulanges.

 

Autre                                                           1691                                          [250]

Sur l’air: A la venuë de Noël

Sur la prise de Mons

 

A la venuë de Bontemps,

Ce fut grande joye à Paris,

Jamais on ny fut plus content,

L’on vit sauter grands et petits.

 

Bonne nouvelle il aportoit

Que mons* avons capitulé                             *la ville de Mons

Et que Guillaume s’aprochoit,

Pour voir entrer sa Majesté.

 

Autre

Sur l’air: Alleluya

Sur le mesme sujet

 

Quand Bontemps se fut presenté

De la part de sa Majesté;

Madame tout haut entonna, Alleluya.

 

Enfin, dit elle, Mons est pris,

Qu’on fasse des feux dans Paris;

Bientost la Ligue tombera, Alleluya.

 

Chanson                                                    1691                                          [251]

Sur l’air. Si Bourdaloue

Contre les Femmes.

 

Les femmes de l’anneé présente

Sont de nature de Melon;

Il en faut entamer cinquante

Pour en trouver un qui soit bon.

 

Autre                                                           1691                                          [252]

Sur l’air: Depuis Janvier etc.

 

Ne soyez point si délicat,

Mon Neveu, je vous fais Légat.

Laissez tous vos Pages à Rome

La France est un méchant état,

On y fit mourir un saint homme;

Mon Neveu je vous fais Légat.

 

Chanson                                                    1691                                          [253]

Sur l’air Si Bourdaloüe.

Sur Mauroy pere de Saint Lazare et Curé des Invalides.

 

Si Mauroy le Missionnaire

Rentre jamais dans son couvent,

On punira bien son derriere

Des fautes qu’à fait le devant.

 

Autre                                                           1691                                          [254]

Sur l’air: L’amour plaît malgré ses peines.

de l’Abbé Martinet.

 

L’amour disoit en colere;

Vraiment, si je suis tout nud,

C’est que ma putain de mere

Mange tout chez la Cornu.

 

Autre                                                           1691                                          [255]

Sur l’air du branle de Metz.

Sur les fréquentes visites de François de Harlay Archevesque de Paris, chez la Duchesse de Lesdiguieres (Gondi)

 

Que sur la fin de vôtre âge

Vôtre goût paroist mauvais;

Et l’on ne croiroit jamais

Qu’un tel objet vous engage;

Si par vôtre assiduité

L’on ne s’en fut bien douté.

 

La Varenne plus jolie,

Dites, pourquoi la quitter?

Puisque vous vouliez changer,

Pour contenter vôtre envie,

Vous deviez donc choisir mieux

Pour vous rendre plus heureux.

 

Cherchez donc qui vous ragoute

Quelque mets plus délicat;

Autrement charmant Prélat,

Ma foyvous ne voyés goute;

Profitez de mes avis

A vieux chat tendre souris.

 

Réponse                                                                                                          [256]

Si je vois cette Déesse

C’est que j’aime le fracas;

Ce n’est pas pour ses appas,

Ni pour sa tendre jeunesse;

Mais sa seule qualité

A flaté ma vanité.

 

Hélas! cette bonne Dame

Est dans la dévotion,

En sortant de sa maison,

Elle vient à nôtre Dame,

D’une tres grande ferveur

Entretenir son Pasteur.

 

Chanson                                                    1691                                          [257]

Sur l’air……………

Sur le Pape Alexandre VIII (Ottobuoni)

Le Saint Pere en l’autre monde,

Les Cardinaux ont passé l’Onde.

Mangeons gras, le Siége est vaccant.

De manger de tout nous avons licence.

                        Le Cardinal prédestiné

                        En faveur de son 1er. né.

                                    Nous donnera,

                                    Nous donnera,                   

                                    Son indulgence.

 

Autre                                                           1691                                          [258]

Sur le petit Air de la Fronde.

Sur Monsieur de Barbezieux.

 

L’on doit être surprix du choix

D’un des plus grands Rois de la terre

D’avoir pris un jeune Bourgeois,

Pour le Ministre de la guerre,

Qui passe le jour à l’orgner

Comme la nuit a yvrogner.

 

Pour paroître de qualité

Il veut avoir une Princesse (1)

Par les Conseils de la Ferté.

Elle répond à sa tendresse;

Ce fut derriere un paravant

Qu’elle en fit un heureux amant.

 

(1)   la Duchesse de Valentinois fille de Monsieur le Comte d’Armagnac.

 

Chanson                                                    1691                                          [259]

Sur l’air. Quand le péril est agréable.

Contrele P. de Mauroy Missionnaire.

 

Tout Saint Lazare est en colere

De voir Mauroy ce grand béat

Se déclarer un Apostat,

Un fourbe, un Adultere.

 

Que deviendront, disent ces Peres,

Aprés un coup si malheureux,

Nos longs toupets, nos cours cheveux?

Et nos mines séveres?

 

Que dira-t’on de nos retraites,

Qui nous faisoient chérir des sots?

Passeront nous pour des dévots

Dans toutes les Gazettes?

 

Ne voit on pas ce séminaire

Rempli sans cesse de Marchands;

Qui nous veulent rendre garands

Des faits de ce faux frere.

 

Enfin Joly (1) dans cette Eglise

 

(1)   General de Saint Lazare. Lorsqu’on lui vint dire l’affaire de Mauroy, fit entrer les Marchands l’Eglise disant qu’il alloit prier Dieu pour la conversion des pecheurs.

 

A fait entrer ces bonnes gens;                                                         [260]

Le temps n’est plus des innocens,

Cela n’est plus de mise.

 

Vous voyés que sans mistere

Pour réparer un si grand tort;

Il nous faut faire quel qu’effort

Pour nous tirer d’affaire.

 

Il vaut mieux pendant sa vie

Boire sans cesse du bon vin,

Que d’avoir jamais le chagrin

De s’en fuir pour Silvie.

 

Autre                                                           1691                                          [261]

Sur l’air: Or nous dites Marie

 

Le P. Bouhours accusé d’avoir fait un Enfant à une Niéce de Monsieur de Vauban laquelle accoucha chez un Procureur où elle avoit êté mise par ce pere en pension. On fit les Couplets qui suivent en Dialogue, a l’imitation d’Ariste et d’Eugene.

 

Angelique

Ah! mon Reverend pere,

On dit je ne scai quoi,

Dans nôtre Monastere;

Qui nous remplit d’effroy.

C’est une chose étrange

Qu’un homme de mon nom

Qu’on prendroit pour un Ange

Passe pour un Démon.

 

Pour apaiser nos meres,

Découvrez vous à moi;

Révélez le mistere

De ce que je ne scay quoi.

Croyez que c’est l’envie

Qui seme ce faux bruit,

Voyez la Calomnie                                                                                    [262]

Comme elle me poursuit.

 

Angel.          On dit que c’est l’affaire

                        De vôtre Procureur;

                        Cet homme là mon pere

                        Est un franc chicanneur.

Eugene.      Mais ce qui me chagrine,

                        Est un je ne scai quoi

                        Que la pauvre Delphine

                        A mis bas malgré moi.

 

Angel.          Mais, quel est donc le traitre?

                        Et quel est l’indiscret,

                        Qui dit l’avoir veu naître?

                        Malgré vôtre secret,

Eugene.      Vous connoissez arriste,

                        Il vous dira le fait;

                        C’est quelque Janseniste

                        Qui m’a lancé ce trait.

 

Angel.          Un Cléante, un Philarque

                        Disciples de Pascal,

                        Arnaud l’hérésiarque,

                        Vous auront fait ce mal.

Eugene.      J’en suis seur Angelique,

                        N’en doutez nullement.

                        D’autant que je m’aplique                                         [263]

                        Au nouveau Testament (1).

 

Angel.          Est-ce un mal qu’on traduise

                        Les Dogmes de la Foy?

                        Est-ce un mal qu’on détruise

                        Certain je ne scay quoi

Eug.               Ils craignent ma préface,

                        Ils s’en prendront à moy;

                        Car leur grave efficace

                        Est ce je ne scay quoi.

 

Angel.          Mais ils voudroient peut être,

                        Que leur je ne scai quoi,

                        Eut produit & fait naître

                        Vôtre je ne scay quoi.

Eug.               Sans grace on se presente,

                        Les deux premiers parens

                        La grace est suffisante

                        Pour faire des enfans.

 

Angel.          Mais tout de bon mon pere,

                        Craignez vous sans raison

                        Qu’on vous fasse une affaire

                        De cette trahison?

Eug.               J’en suis quitte Delphine,

 

(1)   Il travailloit à la traduction qui n’a pas eu un heureux evenement.

 

Grace à mon bienfaiteur (2),                                                             [264]

L’enfant qu’on nous destine,

Est pour le Procureur.

 

(2)   L’Archevesque de Paris (Chanvalon) accommoda cette affaire, et fit taire le Procureur, qui d’abord avoit fait grand bruit. Ce fut le President de Lamoignon qui engagea, pour faire plaisir aux Jesuittes, le procureur de prendre l’enfant auquel il avoit travaillé peut être plus efficacement que le P. Bouhours plus vieux que lui. Monsieur de Lamoignon se fit donner les Lettres du R.P. et les garda. Il s’en servit lorsque les Jesuittes voulurent entreprendre Monsieur Baillet Precepteur de son fils, il les arresta en leur disant le plaisir qu’il leur avoit fait, et qu’il êtoit le maître de renouveller l’affaire par les Lettres.

 

Autre                                                           1691                                          [265]

Sur l’air de Joconde.

Sur le même sujet que la précédente.

 

Sur ce triomphe de l’amour,

                  Disent les Jansenistes,

N’oubliez le Pere Bouhours;

                  La gloire des Jesuites,

Autrefois on les accusoit,

                  Du vice d’Italie;

Mais la dévote qu’il aimoit,

                  Les Peres justifie.

 

En lui faisant un bel enfant,

                  Ne croyés pas critiques,

Qu’il ait fait un péché si grand,

                  Il craint Dieu et s’en pique;

Mais quand sans songer au Seigneur

                  On cede à la nature

L’emportement d’un tendre coeur,

                  Ne rend point l’ame impure.

 

Autre                                                           1691                                          [266]

Sur l’air Tarare ponpon.

 

Le Général Joly d’une humeur fort bizare,

Deffendoit à Mauroy la tendre passion;

Sur le ton de Fanfare, l’Invalide, répond

Mon bon pere Tarare ponpon.

 

L’amour de deux rivaux pour Philis se déclare

Rubentel vieux soldat, Mauroy jeune Caton;

La Caton fit fanfare; car il eut du bon bon,

Le Sodat fit tarare ponpon.

 

Chanson                                                    1691                                          [267]

Sur l’air de Pierre Bagnolet.

 

Hollondois chantez bien la game

Au Général de vos Estats;

Et toute la terre vous blame

De lui donner tous vos Ducats.

                  N’en douter pas;               bis

Castanaga (1) baisoit sa femme

Quand Valdeck arriva bien las.

 

Camarades sans nous abattre

Ne songeons qu’a doubler le pas;

Luxembourg fait le Diable à quatre;

Ayons des pieds, s’il a des bras.

                  Car des éstats,                                     bis

Nous avions ordre de nous battre,

De vaincre nous ne l’avions pas.

 

(1)   Antoine Agourto Marquis de Castanaga, Gouverneur général des pays bas espagnols.

 

Autre                                                           1691                                          [268]

Sur l’air de Lanlurlu.

 

De Frandres et d’Espagne,

Les Ambassadeurs,

De la Grand’ Bretagne;

Et les Electeurs

Se sont venus plaindre,

D’avoir partout entendu,

                  Lanlurlu lanlurlu.

 

On a fait deffense,

De ne plus chanter,

La Chanson qu’on chante,

De lanlurelu:

Si plus tu la chante

Tu seras ma foy pendu,

                  Lanlurlu lanlurlu.

 

Chanson                                                    1691                                          [269]

Sur l’air: Heureux l’amant qui baise sa Maîtresse.

 

Chez la Messié pere Bouhours badine

                  Chez la Messié.

                  Il se croit un Xavier;

Entre ses bras il void la Cochinchine

                  Chez la Messié

Il se croit un Xavier.

 

Embarquons nous sans craindre la tempeste,

                  Embarquons nous,

                  Dit il, à ses genoux;

C’est là mon sort, oh! la bele conqueste!

                  Embarquons nous,

                  Dit il, à ses genoux.

 

En vray Mauroy il a fait le voyage,

                  En vrai Mauroy.

                  Il a planté la Foy.

Dans peu de tems on verra son ouvrage,

                  En vrai Mauroy,

                  Il a planté la Foy.

 

Nos Directeurs, grand Roy, peuplent le monde,

                  Nos Directeurs,

                  Se font des Serviteurs                                                          [270]

En ta faveur leur amour est fécond.

                  Nos Directeurs

                  Se font des Serviteurs.

 

Et depuis quand changent ils de maniere?

                  Et depuis quand,

                  Prennent ils le devant?

Que deviendra desormais le derriere?

                  Et depuis quand

                  Prennent ils le devant?

 

Autre                                                           1691                                          [271]

Sur l’air: de flon flon.

A Monsieur le Prince de Turenne dans un embarras en place d’Espagne (à Rome) où ce jour là ce faisoit le cours: par Coulanges.

 

Quoique de bonne mine,

Et de grande Maison;

Dans vôtre Poltronchine (1);

Je crains sur mon Chignon,

Et flon flon la riradondaine,

Et flon flon la riradondon.

 

(1)   Carosse à Brancard ainsi apellé à Rome.

 

Autre                                                           1691                                          [272]

Sur l’air: Tranquilles Coeurs.

Faite à Rome dans l’endroit, où êtoit autrefois le grand Cirque; par Coulanges.

 

Où sont allez tant de héros?

Où sont leurs Palais magnifiques?

Je ne vois partout que des os;

Partout que des restes antiques;

Et l’on ne trouve plus au Palais des Cezars

Que Serpens & Lézards.

 

Chanson                                                    1691                                          [273]

Sur l’air Tranquilles Coeurs.

En revenant de Rome.

par Coulanges.

 

Défaits enfin de ces Abbés,

Qui se donnoient un air capable;

Et des gens, qui, de tous côtés

S’en venoient nous presser à table.

Du moindre desjeuner, nous faisons plus de cas

                  Que des plus grands repas.

 

                  Je vais les attendre à Paris,

                  Tous ces Abbés de conséquence.

                  Que d’icy je les vois petits

                  Devant certaine Révérence (1)!

Tel qui parloit si haut, en France de retour,

                  Se trouvera bien court.

 

(1)   le Pere de la Chaise Confesseur du Roy.

 

Autre                                                           1691                                          [274]

Sur l’air: Où êtes vous allez mes belles amourettes?

Faite à Rome, par Coulanges.

Sur le Cardinal de Bouillon.

 

Puisqu’enfin le Ciel a permis

Que je sois hors de France

Sur les bords du Tibre assis:

Je songe souvent à Paris;

Et je passe le tems tout rempli d’espérance

D’y revoir bientôt mes bons amis.

 

Chanson                                                    1691                                          [275]

Sur l’air: Je ne scaurois

Sur la Prise de Mons en 1691. en presence du Prince d’Orange campé à N.D. de Hal.

 

Louis ayant quitté Versailles, / Louis est parti de Versailles

Nous a fait viste venir; / Pour nous venir avertir.

Il renverse nos murailles.

Nassau viens nous secourir.

                  Je ne scaurois;

Il faut donner la Bataille,

                  J’en mourrois.

 

Sur Louis XIII.                                         1691                                          [277]

& Louis XIV

 

Louis XIII. gagna la Bataille d’Avin,

Dessy Lamboy, prit l’Alsace et Thurin;

Toujours vainqueur sur la terre et sur l’onde.

Peut être eut il tenté de conquérir tout le monde;

Si le Ciel de tout temps ne l’avoit destiné

Pour triomphe à son Fils, à Louis Dieudonné.

 

Ce Roy fait oublier tous les Rois ses Ayeux,

Ses grand exploits sont gravez sans les cieux.

De sa valeur l’Europe est étonneé.

Louis d’intelligence avec sa destineé;

Dans ses vastes projets craint si peu de revers,

Que son grand nom suffit contre tout l’univers.

 

Chanson                                                    1691                                          [279]

Sur l’air de Jean de Vert.

Sur le mariage de Madame la Presidente Barentin, avec N…. Damas de Cormaillon Gentilhomme de Bourgogne Ingenieur, avanturier à qui elle fit la fortune. Il fut tué au Siege de Namur en 1692.

 

Eut on crû que la Barentin,

Qui faisoit tant la fiere,

Se fut coïffeé d’un blondin,

Qui n’a que la rapiere;

Qui ne peut pas servir delongtems

Une femme qui fut du tems

                  De Jean de Vert.

 

Scavez vous que la Barentin

A son douzieme lustre,

A fait avec un beau blondin,

Un mariage illustre?

Qui n’a pour but que le déduit,

Et qui fait icy plus de bruit,

                  Que Jean de Vert.

 

Si de l’aiguillon de la chair

Vous sentirez la piqueure;

Barentin sans payer si cher,                                                             [280]

Une mince figure;

Pour peu de chose un gros manan,

Vour eût fait ce qu’on fit du tems

                  De Jean de Vert.

 

Vôtre étoille cher Cormaillon,

N’est pas des plus commmune.

Sans crainte d’être Cornaillon

Vous avez fait fortune;

Vous ne serez cocu ny gueux,

N’est-ce pas être plus heureux

                  Que Jean de Vert.

 

Chanson                                                    1691                                          [281]

Sur l’air de Tarare ponpon

Sur la Condamnation de Mauroy Curé des Invalides.

 

Monsieur l’Official Critique et fort bizare,

A condamné Mauroy a dix ans de prison;

                  Sur le ton de fanfare;

Mais sans doute il répond,

Official tarare ponpon.

 

Monseigneur de Lion (1), qui n’est point un barbare,

Et qui scait que l’amour ne veut point de prison

                  Rira de la fanfare;

                  Dira sur le dicton

Official tarare ponpon.

 

Le Pape (2) d’aujourd’huy d’un mérite si rare,

Pour l’amour d’une Iris, se moque de prison;

                  Blamera la fanfare;

                  Je l’entends qui répon,

                  Official tarare ponpon.

 

(1)   Neuville Villeroy Archevesque de Lion.

(2)   Alexandre VIII. Pape.

 

Chanson                                                    1691                                          [283]

Sur l’air de Lanlurlu.

Par Coulanges.

 

On offre à Dom Live (1),

Ou femme, ou chapeau;

Cette alternative

Trouble son Cerveau;

Son éstoit est d’être, ou cardinal ou cocu,

                  Lanlurlu, lanlurlu.

 

                  Tous les Pignatelli

                  Au Ciel font des voeux,

                  Pour qu’on les apelle

                  Au rang de Neveux.

Le Pape s’en moque, le Népotisme est tondu,

                  Lanlurlu etc.

 

                  Maintenant dans Rome

Le Sbirre (2) sans peur,

                  Va comme un autre homme,

                  On lui fait honneur.

Nôtre Pape est ferme, c’est un vieillard résolu.

                  Lanlurlu etc.

 

(1)   Dom Livio fort riche et mal basti neveu du feu Pape InnocentXI. Odescalqui.

(2)   Sbirres sont des Sergens. La franchise des quartiers des Ambassadeurs qui fut longtems contesteé, et enfin accordeé à Alexandre Smit.

 

Vouloit le Saint Pere,                                                           [284]

Le jeune Ottobon,

Qui lui laissât faire

Poupone & Poupon;

Il a fait des siennes, tant que son Oncle a vécu

                  Lanlurlu etc.

 

                  Quand Dom Marco (1) passe

                  Je mets mon Chapeau,

                  Et fais la grimace,

                  A ce laid museau.

Mon Dieu, le sot homme! comme il fait l’entendu,

                  Lanlurlu etc.

 

                  Il est ridicule

                  Que je sois parti,

                  Sans baiser la mule,

                  De Pignatelli (2);

Ce n’est pas ma faute, il s’estoit cassé le cul

                  Lanlurlu lanlurlu.

 

(1)   Un neveu du Pape Ottobon qui ostoit à peine son Chapeau, et qu’on ne regarda plus dés que son oncle fut mort.

(2)   Quand ce Pape fut fair j’estois malade, et quand je fus pour le voir, il avoit fait une si furieuse chute que je ne pus avoir cet honneur.

 

Autre                                                           1691                                          [285]

Sur l’air de Jean de Verd.

Faite à Gennes, par Coulanges.

 

Puisqu’enfin nôtre Ambassadeur             l’Abbé d’Estrées. nommé Ambassadeur à Rome.

A remis pied à terre,

Peut on lui rendre trop d’honneur?

Armons nous tous d’un verre,

Et beuvons pour hausser le tems;

Car ce sont là les sentimens

Des gens de mer, des gens de mer.

 

Il est constant que Ratabon (1)

Fait honneur à la France;

Le Roy doit avoir tout de bon

Esgard à sa Dépense.

L’heureux abry que le Gavon (2)

Des gens de mer, des gens de mer.

 

Vivons icy tranquillement,

Faisons y bonne chere;

 

(1)   Lors Resident à Gennes, y vivant aussi noblement qu’un Ambassadeur.

(2)   C’est où je logeois dans la Galere.

 

Il ne faut pas légerement                                                                    [286]

Remonter en Galére.

Le plus seur, est en ce païs

De se conformer à l’avis

Des gens de mer, des gens de mer.

 

Bon mot                                                     1691                                          [287]

d’Alexandre Viii. (Ottoboni)

 

L’autre jour un Ambassadeur

De sa Majesté Catholique,

Dans une Audience publique,

Voulant par un discours trompeur

Faire accroire à Nôtre Saint Pere

Que la France êtoit aux abbois,

Et reduite à telle misere

Qu’elle périroit dans six mois.

 

Le Saint Pere aprés un sousrire,

Répondit, rien n’est plus certain;

Car elle va chercher du pain

Chez les Alliez de l’Empire.

 

Sur la mort de Monsieur de Seignelay    1691                        [288]

 

Cy gît, ce n’est pas grand domage

Que pour Tourville, et pour Cavois,

Un Ministre d’Estat peu sage;

Qui s’il eût imité Louvois

Eut fait un bien meilleur usage

Des grands biens qu’il en partage;

Mais chacun dit tout d’une voix

Que cet imprudent personnage.

Amangé tout & par delà

Ce que ton pere nous vola.

 

Chanson                                                    1691                                          [289]

Sur l’air de Joconde.

A Monsieur le Cardinal de Bouillon au Conclave de 1691.

Par Coulanges.

 

Que par vous la Maison Conti

Ait un dixieme Pape;

Faites-nous le Duc de Poly

Neveu de pied en cape;

Qu’Aquasparte de son costé                        la Duchesse.

Soit la plus riche Niece.

Ah! remettez la Papauté

Dans l’ancienne Noblesse.

 

Autre                                                           1691                                          [290]

Sur l’air: Tourelouribo.

Impromptu fait à Rome, par Coulanges, en voyant passer le Cardinal Cibo.

 

Voila le Doyen du sacré Colege,

                  Cibo, Tourelouribo;

C’est un vieillard qui Papege,

                  Cibo, tourelouribo;

Mais c’est un Pape de Neige

                  Haho! tourelouribo.

 

Autre                                                           1691 (Fevrier)                      [291]

Sur l’air des Rochelois.

Pour Monsieur l’Abbé de Noirmoustier (la Tremoille), qui affectoit quelquefois à Rome trop de sévérité pour les parties de plaisir.

 

Pourquoi sans rime et sans raison,

Prendre lamine d’un Tronson? (1)

Et se déguiser de la sorte?

Nôtre Saint Pere (2) est assez mal,

Et point du tout il ne comporte

De se masquer ce Carnaval.

 

A Rome il faut être charmant,

Et suivre son temperament,

A Laon, trancher du grand Vicaire, (3)

Vivre enfin selon les Païs.

Quant à moi je n’estime guere

Le nez d’un Rominagrobis.

 

(1)   Autrefois Supérieur du Séminaire de Saint Sulpice.

(2)   Alexandre VIII. Pape Ottoboni qui se mouroit dans le tems du Carnaval.

(3)   L’Abbé avoit êté en France grand vicaire de l’évesque de Laon.

 

Autre                                                           1691                                          [292]

Sur l’air: Quoi! camper en cette saison?

A Monsieur l’Abbé de Polignac, à Gennes.

par Coulanges.

 

                  Quoi! partir le premier de Juillet?

Chargé pour la Cour d’un gros paquet,

                  Et garder à Gennes le mulet?

Voila n’aller pas si vîte qu’un trait,

                  Voila n’aller pas si viste.

 

                  Vous dirés, manque de seureté,

Le meilleur Courrier est arresté.

                  Ouida; mais en bonne vérité;

Un Port est-il sans Félouques, l’Abbé?

                  Un Port est-il sans Felouques?

 

Autre                                                           1691                                          [293]

Sur l’air des Triolets.

Sur la Goute, à Rome aprés le départ de Madame la Duchesse de Nevers. par Coulanges.

 

Chacun me presente le poing;

De peur qu’un faux pas je ne fasse.

Sans aide je ne marche point,

Chacun me presente le point

Que je deviens oiseau de chasse.

Chacun me presente le poing

De peur qu’un faux je ne fasse.

 

Ah! mon Dieu le cruel destin!

De tomber en métamorphose,

Ma goute en est le grand chemin,

Ah! mon Dieu le cruel destin!

Et que l’ennuy de vivre enfin,

Toujours perché sur quelque chose.

Ah! Mon Dieu le cruel destin!

De tomber en métamorphose.

 

Le dernier jour du mois de Mars,

Fut le dernier jour de ma vie.

Diane à six heures trois quarts,                                                                       [294]

Le dernier jour du mois de Mars

Quitta le séjour des Cezars,

Pour retourner en sa Patrie,

Le dernier jour d mois de Mars

Fut le dernier jour de ma vie.

 

Autre                                                           1691                                          [295]

Sur l’air de la grosse Bourguignone.

Adieu à 21. Officiers des Galeres de France restez à Rome pour accompagner Monsieur l’Ambassadeur (l’Abbé d’Estreés) qui de tems en tems 6. à 6. s'en retournerent en France.

 

Sans Messieurs des Galeres,

Pourrons nous vivre icy?

Cabannes, Savonnieres,                les 6. 1ers. qui partirent

La Brêteche, Eserinville,

Vous allez faire gile;

Ah! que l’Ordre signé par Pontchatrain

Me donne de chagrin!

 

Pour moi, cher Savonnieres,

Faites un Compliment,

Auxdeux freres Lubieres,

A Cigogne, a Fontblan,                     ceux qui êtoient partis.

A l’aîné la Brêteche.

Que rien ne vous empesche,

De caresser Montolieu, de ma part,

Dagu, Bissy, du Bar.

 

Embrassez bien Tourette,                                                                   [296]

Et Cologne à son tour;

Dites que je souhaitrre

Mille biens à Teincour.

Je fais la révérence

Au Chevalier de Vance;

Et je finis mes Complimens enfin,

Par Saint Pol, & Marin.

 

Sur le Marquis de Sourdis             1691                                          [297]

 

Fantassassins, si Sourdis pique et nous abandonne

Comme vous le scavez, et comme on nous l’ecrit;

Ce n’est pas qu’il ne soit brave de sa personne;

                  Mais c’est qu’il a l’ame trop bonne

                  Pour hazarder le Saint Esprit.

 

Sur Madame de Nesle                     1691                                          [298]

 

Or dites nous, dormez vous bien la belle?

Le coeur est il fermé comme les yeux?

Passant cette nuit par ces lieux,

J’ay souhaitté que le charmant Nesle

Fut au matin l’aimable Barbezieux.

 

Chanson                                                    1691                                          [299]

Sur l’air de l’Eschelle du Temple.

Au sujet de l’Opéra d’Astreé.

par Monsieur de Saint Gilles.

 

Je laisse à son gré Céladon,

Se refraichir dans le Lignon;

J’avois résolu d’en médire,

Bien des gens m’en avoient prié;

Mais est il besoin de Satire,

Quand le sujet est décrié?

 

Autre                                         1691                                          [300]

Sur le mesme Air.

Critique du couplet précédent.

 

Auteur d’une sote Chanson,

Qui veut critiquer Céladon;

Qui, diable ta dit, je te prie

Que le sujet soit décrié?

C’est sur toi que la raillerie,

Gille niais, va retomber.                                  Saint Gilles.

 

Si tu avois dit que les Airs,

Ne valoient pas mieux que les vers;

On t’eut passé cette Satire;

Mais que le sujet soit mauvais,

C’est donner occasion de dire,

Que tu n’est qu’un Gilles le niais.

 

Autre                                                           1691                                          [301]

 

Sur le même Air.

Réponse de Saint Gilles, à la Chanson précédente.

 

Naissant Auteur, esprit charmant,

Qui me raille si finement;

Vous êtes né pour la Satire.

Vous surpassez des Preaux;

C’est à vous ma foy, de médire.

Que vos commentemens sont beaux!

 

                  Sur le mesme sujet.

Votre Chanson a des attraits

Que les autres n’eurent jamais;

Elle me touche et je l’admire;

Mais aprenez moy vôtre nom,

Ou trouvez bon que j’ose dire,/ Si c’est un homme d’épeé qui soit l’auteur.

Que vous avez peur du bâton./ Que vous êtes un tres grand Poltron.

 

Autre                                                           1691                                          [303]

Sur l’air du role entier d’Amisodar dans Bellorophon. Que ce Jardin se change en un désert affreux.

Ordre au Maitre d’hostel de Monsieur le Duc de Chaulnes, pour un diner à Rome, où survint Madame la Duchesse de Nevers.

 

Rien n’est plus ennuyeux que tous ces grands repas,

                  Cher Honoré, nous voulons peu de plas,

                  Du vin exquis, et de plus d’une sorte.

Et que pour mieux manger, plat à plat on aporte;

C’est un metz excellent, pour le Duc de Nevers,

Qu’une Table fort libre, et peu de couverts.                          bis

 

Quel spectacle charmant se présente à mes yeux!

                  Une Divinité vient honorer la feste,

Dressons-lui des Autels, que pour elle on apreste

Le Nectar, le Nectar, qu’on boit dans les cieux.

Si vous vouliés pourtant, adorable Déesse,

                  N’estre icy bas qu’une Duchesse?

                  Au lieu de Parfums, et d’encens,

On pourroit vous offrir de cent mets differents.                                    bis

                  Cessez donc d’être immortelle;

                  Beuvez, et mangez comme nous,                                 bis

                  Voicy de meilleurs ragouts,                                             [304]

                  Poulardes, Perdrix, Sarcelles.

Un entremets parfait, des vins piquant et doux.

                  Cessés donc d’être immortelle;                                                     bis

                  Beuvés et mangez comme nous.

 

Chanson                                                    1691                                          [305]

Sur l’air: Ouy je le dis et le repete, ou Il a battu son petit frere.

Couplets fait à Rome, celui cy en passant devant le Palais Manchini aprés le départ de Madame la Duchesse de Nevers. par Coulanges.

 

Hélas! que ce Palais est vuide!

Je crois voir le Palais d’Armide (1);

Dépouillé de tous ses appas;

Enpartant de ces lieux aimables,

L’Enchanteresse de Damas,

Les a rendus insuportable.

 

(1)   Armide êtoit Reine de Damas. Madame de Nevers est de la Maison de Damas Thianges.

 

Autre                                                           1691                                          [306]

Sur le même Air.

Sur la retraite à Grosbois, de Monsieur de Fieubet Conseiller d’Estat; par Coulanges.

 

Je n’entends plus parler en France

Que de retraites d’importance,

De gens qui du monde sont las;

Pour moy s’il faut que je me cache,

Je reviens isi, sur mes pas,                            à Rome ou il êtoit

Me faire hermite au Mont Testache (1).

 

(1)   Sous ce Mont, sont des grotes remplies des meilleures vins d’Italie.

 

Chanson                                                    1691                                          [307]

Sur l’air. Reveillez vous belle endormi.

Critique de l’Opera d’Eneé. Par Madame des Houlieres. Les parolles sont de Fontenelle*, et la Musique de Colasse*. (au lieu de Capistron)

 

Moy qu’on a veu chanter Achille;

Moy qui n’ay point chanté Thétis;

Je chante un heros que Virgille

Chanta dans Rome au tems jadis.

 

Gens éclairez, Doctes Cervelles,

Admirateurs de Capistron;

Ne pensez pas que Fontenelle

Soit indigne d’une chanson.

 

Venez voir l’Opéra d’Eneé,

Hatez vous pour vous bien placer;

Mais déja la Toille est leveé.

Silence je vais commencer.

 

                  Prologue.

La félicité se partage

Entre les hommes et les Dieux;

Encelade avec son bagage                                                                 [308]

Trébuche en attaquamy les cieux.

 

                  1er. Acte

L’ingrat déserteur de Cartage,

Rebut de l’Oracle et des flots,

Par un troisieme mariage,

Veut s’asseurer un long repos.

 

L’Infante a beaucoup de tendresse;

Mais elle n’en fait pas semblant.

Le Troyen laisse sa maîtresse

Pour causer avec sa Maman.

 

Ȏ Venus! Ȏ Maman mignonne!

Montrez que je vous dois le jour;

Faites qu’on aime en ma personne

Un petit frere de l’amour.

 

Le Roy veut devenit grand pere;

Et la paix lui semble un grand bien.

Turnus n’a pour lui qui la mere,

Latinus aime le Troyen.

 

                  IId Acte.

On ferme pour la paix prochaine

Le Temple habité par Janus,                                                             [309]

Junon brise tout, et la Reine

Se réjouit avec Turnus.

 

Dans un bocage qu’on révére

La Princesse va soupirer.

Le Roy vient consulter son pere

Qui daigne souvent l’eclairer.

 

La fortune est toujours volage,

Sa haine n’est passans retour;

De long malheurs sont le présage

Des bien qui viennent à leur tour.

 

Faunus prétend que l’avinie

A son gré choisisse un époux;

La jeune Princesse est ravie,

Et cede aux transports les plus doux.

 

Au sortir d’un facheux nuage

Didon l’arreste, et lui fait peur;

Mais bientost elle prend courage

L’ingrat Troyen lui fait horreur.

 

Il vient et dit transporté d’aise,

Princesse que je suis content.

Tout beau, Seigneur, ne vous déplaise,                                                      [310]

Turnus doit du moins l’estre autant.

 

Quel coup mortel! quelle response!

Junon, ce sont là de tes coups.

Ah Ciel! faut il que je renonce

A l’espoir d’un himen si doux?

 

                  IIIe. Acte.

Turnus querelle la Princesse,

Parce que ses voeux sont flotans;

Elle demande avec adresse

Qu’on lui donne un peu plus de tems.

 

Souffrez avec moins de colere

Que je ne précipite rien

Dans le grand choix que je dois faire;

Il ny va pas pout peu du mien.

 

Je vous aimay dés vôtre enfance;

Je suis vôtre cousin germain.

Mon Cousin, sans une dispense,

Je ne puis vous donner la main.

 

La Princesse souffre avec peine

Que l’on médise du Troyen,

Et quoiqu’ait dit l’ombre affriquaine,                                         [311]

Eneé est un homme d’ésprit.

 

Turnus est beaucoup plus sincere;

Il scait aimer comme Amadis;

Mais il ignore l’art de plaire

 

Que Turnus enseigne à son fils.

Quelles sont ces voix éclatantes?

Que veut dire ce bruit confus?

La Reine conduit les Bacchantes.

On celebre aujourd’huy Bacchus.

 

Dans cette bachique cohüe,

On forme un projet inhumain.

Lavinie est fort retenüe,

La Reyne la veut mettre entrain.

 

Que ferez vous pauvre Princesse?

Il faut heurler avec les Loups;

La Reine, Bacchus, tout vous presse.

De choisir Turnus pour époux.

 

                  IVe. Acte.

Le Troyen que ce choix assomme

La réduit à s’en excuser,

Turnus accepte ce galant homme                               [312]

Le Combat qu’il peut refuser.

 

Dans une Coquille doreé,

On voit la Déesse d’amour.

Elle est brillante, elle est pareé,

Et plus belle que le beau jour.

 

Comment vous portez vous ma mere?

Vous négligez bien vos enfans;

Quel destin, quelle Loy sévere,

Loin de moy vous tient si longtemps?

 

Mon fils connoît mieux ma tendresse,

Lavinie est fole de toy;

Mais le coeur de cette Princesse

Est un don que tu tiens de moy.

Item Turnus porte une hache

Teinte dans le Lac sousterrain;

Mais je t’aporte une rondache

Qu’a fait pour toy le bon Vulcain.

 

                  Ve. Acte.

Sur un présage assés frivole,

La Reyne rend graces au destin;

Turnus meurt, Junon s’en console,                                              [313]

Les Troyens vont parler latin.

 

Quoiqu’on ait souffert comme un Diable,

Quand on devient heureux amant.

Il reste un scrupule effroyable

D’avoir eu trop peu de tourment.

 

Autre                                                           1691                                          [314]

Sur le même Air.

Réponse à Madame des Houlieres, par Monsieur de Saint Gilles, sur les Chansons précedentes.

 

Moy qui viens de chanter Achille               Opéra

D’un stile agréable et bouffon;

Souffrirai-je qu’on dise en ville,

Que je n’ay pas fait ma chanson.

 

Réveillez vous belle endormie,

Ma gloire allons, réveillez vous;

Une redoutable énnemie,

Ravit nos coeurs les plus doux.

 

On dit qu’une Muse scavante,

A fait dans le sacré vallon,

Une Chanson divertissante,

Sur l’Opéra de Capistron.

 

Ce faux bruit m’assonne, il me tuë;

Je le feray cesser ma foy;

Achille dans son humeur bouruë

N’estoit pas si fâché que moy.

 

J’esprouve le sort de Virgile,                                                            [315]

Sur certains vers qu’on lui vola,

Il sentit émouvoir sa bile.

Il s’en plaignit, il en parla.

 

Ceux qui prennent moins de peine,

Sont, disoit il, les mieux payez;

Si nos Moutons portent la Laine

C’est pour faire nos draps rayés.

 

Le boeuf qui tire la Charuë,

N’a pas le fruit de son tourment;

Tandis qu’il travaille et qu’il süe,

Son maître mange le froment.

 

L’Abeil en son travail fidelle,

Forme son Miel du suc des fleurs;

Mais ce Miel n’est pas fait pour elle,

Un autre en goûte les douceurs.

 

Pourquoi charmante des Houlieres

M’enlevez vous dix huit couplets?

Quoi! n’estes vous pas assez fiére

Des beaux vers que vous avez faits?

 

Restituez donc à Saint Gilles,

Le foible hommeur de ses Chansons.                                         [316]

Contentez vous de vos Idilles,

Et retournez à vos Moutons.

 

Autre                                                           1691                                          [317]

Sur le même Air.

Réponse de Madame des Houlieres.

 

Si le public à l’aventure

A répondu sous nôtre nom;

L’agréable et vive peinture

De l’Opera de Capistron.

 

Il ne vous a point fait d’outrage,

N’en soyez pas mal satisfait;

Ce n’est pas tant pis pour l’ouvrage,

Quand on dit que nous l’avons fait.

 

Autre                                                           1691                                          [318]

Sur l’air de la Chacone d’Amadis.

 

Plaignons tous aujourdhuy,                          bis

                  Le malheur de Joly,                           bis

Il s’est mepris avec la Duchesse;

Car il a pris son C….. pour ses fesses.

                  De ce crime Dieu le punit,

                  Car il a mal au v….

 

Autre                                                           1691                                          [319]

Sur l’air du Prevost des Marchands.

Sur …………. Mauroy Superieur des Missionnaires aux Invalides, et Monsieur le Duc de Beauvillier.

 

Beauvillier est pris par le coeur,

Comme Mauroy son Directeur (1);

Il aime jusqu’à sa servante (2)./ Il f… tout jusqu’à sa servante,

L’auroit on crû si bon auteur?/ Qui l’auroit cru de si bon coeur,

Lui qui parût n’avoir de pente

Qu’à s’unir à son Directeur./ Que pour servir son Createur.

 

Qui voudroit blâmer ce caton,

Seroit dépourveu de raison.

Est il plus sage que son pere?

Ne scait on pas que Saint Aignan

Jusqu’à la mort fut un compere,

Aussi fortuné que galant.

 

Ils different pourtant entre eux,

Quoiqu’également amoureux.

                                                                                                                                                                                                     

(1)   Mauroy, connu pour ses galanteries, êtoit Directeur du Duc de Beauvillier.

(2)   Une des Filles servantes de la Duchesse de Beauvilliers se trouva grosse. Il est vraiqu’ilfut fait entendre aux Domestiques que celui qui avoit fait le delit se declarant on lui pardonneroit en épousant la fille. le reste de ce qui attaque personnellement le Duc est une charge sur lui faite a plaisir.

 

L’un en faisoit toujours trophée,                                                   [320]

Et l’autre bien plus finement

Ne fait bien qu’à la dérobeé,

Avec l’objet le plus charmant.

 

Mais que ce beau sexe est trompeur,

Dans sa plus obligeante humeur;

Le Duc découvre que sa belle,

Rendoit comme lui bienheureux

Quatre valets, que l’infidelle

Comptoit plus que lui vigoureux.

 

Comment si prit ce fin matois

Pour en scavoir tant à la fois?

Aprés ses Oraisons publiques;

Il dit d’un ton plein de courroux

A tous ses tremblans Domestiques,

Il est fripon entre vous.

 

Qui fillette ici déflora?

Et ma Maison deshonora?

Oui je vangerai cette injure

Avec toute sévérité.

Hors qu’un prompt aveu ne m’asseure

De la sincere vérité.

 

Devant le Duc se prosterna

Un qui dit qu’il la suborna,                                                                 [321]

Un second s’accusa de même.

Lui faisant cent soumissions,

Un trois, enfin un quatriême

Firent mêmes Confessions.

 

Aussitôt le Duc convaincu,

Qu’il etoit quatre fois cocu,

A la Duchesse s’en explique.

Disant de chasser à l’instant

Une soubrette assés lubrique,

Pour rendre ainsi chacun content.

 

La pauvrette accuse à son tour,

A quoi se borna son amour;

Conjurant sa chere maîtresse

De rabattre un peu de ses coups.

Luy protestant que sa grossesse

Venoit du seul Duc son époux.

 

Autre                                                           1691                                          [322]

Sur l’air de la marieé de Roland.

Sur la Défaite de Leuze.

 

Valdee en furie,

                  Crie,

Quoi donc! ma Gensdarmerie

                  Plie,

Devant les Francois?

Morbleu j’enrage

Viste du Charois                bis

Pour sauver mon bagage.

Autrement tout est pris

Si nous sommes suivis.

Qu’ils sont en courroux;

Grands Dieux quels coups,

Ils portent à nos gens par derriere!

Quels tailleurs de croupierent!

Croy moy Nassau,

Sauvons nous et quittons le trot,

Et prenons le galop.

 

Chanson                                                    1691                                          [323]

Sur l’air ……………

Par Mademoiselle de B……par Madame des Houlieres.

 

Vous regnez sur le Côteau, hoho,

Où Phoebus tient son empire,

Toujours sur un ton nouveau, hoho,

Luy même il met vôtre Lire,

Et je scay que quand vous voulez médire;

Il ordonne qu’on vous tire,

Du robinet de Boileau, ho ho.

 

Autre                                                           1691                                          [324]

Sur l’air de Joconde.

Pour Mademoiselle d’Armagnac

 

D’où vient que d’aucun de ses traits,

L’amour ne vous enflamme

A-t’il fait des desseins secrets?

Belle Iris sur vôtre ame

Aux yeux point trop belle?

Psiché l’etoit bien moins que vous,

Lorsqu’il brûloit pour elle.

 

Autre                                                           1691                                          [325]

Sur l’air de Jean de Vert.

Sur le Mareschal de Duras.

 

Foin de Bonne et des Allemans,

On a veu Jean farine,

Piller partour les païsans,

Pour fonder la cuisine.

Il a surpris fort peu de Gens;

Cela se faisoit il du tems

De Jean de Vert?

 

Autre                                                           1691                                          [326]

Sur l’air: Quand le peril est agréable.

Sur la Princesse de Turenne.

 

Jeune Princesse de Turenne

Laisse-tu perdre ton crédit

Reprends le verre dans ton lit,

Bois a perte d’haleine.

 

Souffre-tu qu’on te reproche

Sur l’amour comme sur le vin?

Que Bournonville & Lavardin

Te passent en débauche?

 

Chanson                                                    1691                                          [327]

Sur l’air de Lanlurlu.

Sur Innocent XII. qui fit une chute qui le rendit longtemps malade.

 

                  Il est ridicule,

                  Que je sois parti

Sans baiser la Mule

                  De Pignatelli;

Cependant je ne l’ay pû;

Car il s’estoit cassé le cul.

 

Sur la Prise de Mons.                        1691                                          [329]

 

Puis-je croire ce que je vois?

Tout cede à ton bras redoutable;

Mais pourquoi s’etonner, Grand Roy?

Car plus la chose est incroyable

Et plus elle est digne de toy.

 

A Mademoiselle….                             1691                                          [330]

 

Mons êtoit la seule Pucelle                           ville.

Que l’Espagne gardoit avec beaucoup de soin,

                  Louis en eut besoin,

La belle se rendit, vous eussiés fait comme elle.

 

Chanson                                                    1691                                          [331]

Voyage à Auxerre en 1692. à Mademoiselle Adam.

 

Vous demandez trop pressante Climene,

Tous les jours un couplet de ma façon;

Mon esprit plus froid qu’un glaçon,

Ne peut plus rien produire qu’avec peine,

Et la rime est mal avec ma raison.        

 

Mais cependant il faut vous satisfaire,

Si l’on ne veut se brouiller avec vous;

Ma Muse allons ranimons nous;

A Climene il s’agit icy de plaire,

Et ne pas s’attirer son courroux.

 

Le Mercredy dixieme de Septembre,

Je m’embarquay sur un coche à Paris;

Dieu! que je m’y trouvai surpris;

Si l’on ne m’eut placé dans une chambre,

Sur le Tillac je restois sans abris,

 

Je vis Moines de toutes les especes,

Des blancs, des noirs, des tannez, et des gris;

Les uns avoient bon coloris sur leurs habits.

D’autres portoient des piéces                                                        [332]

Qui n’haïssoient ny les jeux ny les ris.

 

Les Abbez gens à faire bonne chere

Ny manquoient point non plus que les filous;

Des filles faisant les yeux doux;

Des Marchands, des Plaideurs, des gens de guerre,

Des femmes, des vieux et des jeunes fous.

 

Du bonhomme Noé l’Arche fameuse,

Certainement portoit moins d’Animau,

On y vit des Originaux;

Et dans cette troupe si monstrueuse,

J’y remarquay des hommes tous nouveaux.

 

Au départ de Paris la Grandville,

On vit les uns, les autres observer.

Tous songeoient à se preserver

De certains gens dont la main habile,

Scait attraper ce qu’on veut conserver.

 

Un vieux Abbé fut portant assés beste                                      Provençal fort fier perdit 18. Louis d’or.

Pour s’aller joindre avec un grand coquin,

Qui lui gagnant tout son frusquin,

Le réduisit à venir à la Queste.

Lui qu’on avoit veu plus fier qu’un Tarquin

 

On eut encore la plaisante avanture                                          [333]

D’une fillette avecque son amant,

Qui l’ayant quitté sourdement,

S’estoit sauvé dessus nôtre voiture

Ne voulant point taster du Sacrement.

 

Mais sitôt que la pauvre creature

Eut eu le vent de cette trahison,

Avec les forces d’un Samson;

Elle partit pour joindre ce parjure,

Et déchirer ce malheureux garçon.

 

Tant et si bien courut par la Campagne,

Qu’elle attrapa le Coche prés d’Ablon;

Et dévouvrant ce Ganclon,

Qui ne vouloit plus l’avoir pour compagne;

Elle lui fit un joly carillon.

 

Traitre de chien lui dit elle en furie,

C’est donc ainsi que tu viole ta foy;

Tu ne connois ny Dieu ny Loix:

Ah! plustost l’on m’arrachera la vie,

Que de souffrir que tu partes sans moy.

 

Prens pitié de ta pauvre Marie-Anne,                                        c’estoit son nain.

Ajouta-t’elle en se radoucissant;

Au nom de nôtre amour naissant;                                                [334]

Reviens à moy, ou que je t’accompagne,

De mes faveurs, est tu méconnoissant?

 

De tout ce qui se passa sur le Coche,

C’est ce qui fut de plus divertissant,

De la voir en Lion rugissant

A son Amant faire un sanglant reproche

Et puis reprendre un ton tout languissant.

 

L’on eut cette petite Commédie,

Depuis Ablon jusqu’au point de Melun,

Où Marianne êtoit à Jeun;

Oubliant du galant la perfidie,

Souper, coucher avec lui, fut tout un.

 

Le lendemain je ne scay ce qu’ils firent,

Car je quittay la voiture de l’eau,

Et sortîmes de ce Batteau,

Sur l’avis des gens sages qui nous dirent

Qu’on seroit dans peu loin de Montreau.

 

Nous montâmes dans une Cariolle,

Qui nous menoit assez gaillardement;

Bien empaillez, le nez au vent,

Nous y faisions plus d’une capriolle;

Mais aussi nous n’allions pas lentement.

 

Sens nous fournt commodité plus belle,                                  [335]

Une Chaise pour aller à Senant,

C’est un Château appartenant

A une aimable et bonne Demoiselle,

Qui nous receût tres agréablement.

 

Elle descend d’une illustre famille,

Qui dés longtemps en France est en renom;

La grande Darquien c’est son nom.

En Pologne l’on scait comme elle brille;

Sur le tronçon, en voit un rejetton.                                              le Mareschal de Montigni de ses Ayeux.

 

Cette fille jamais ne dégénere,

De la vertu de ses Nobles Ayeux,

La pudeur paroist dans ces yeux.

A son air l’on connoist quel fut son pere,

Et qu’elle apartient à nos Demy Dieux.

 

Danc ce Château j’etois fort à mon aise;

Mais cependantil fallut en partir,

Ce ne fut point sans ressentir

Lorsqu’on fut prest à monter dans la chaise,

Un chagrin qui pouvoit m’anéantir.

 

Estant enfin arrivé dans Auxerre,

Je logeay chez des Peres sans surplis;

J’y bus beaucoup de Rossolis;                                                         [336]

J’y fis aussi bonne et fort grosse chere;

Mais bon Dieu qu’ils avoient de mauvais Lits.

 

Cette nuit là Climene; Ah! quel domage!

Je ne dormis gueres plus qu’un Lutin,

Depuis le soir jusqu’au matin,

Au Dieu Morpheé on me vint rendre homage:

Pour l’attirer j’y perdis mon latin.

 

J’estois si mal de cette nuit facheuse,

Que dans peu j’eus perdu mon embonpoint,

Sans un dîné qui vint à point;

Dieu benit la Marquise* généreuse                                            *de Saint Phal.

Qui voulut si bien remplir mon pourpoint.

 

Le Mercredy une brave Comtesse,                                               de Courson                            Sept. 4. temps.

Entreprit de nous traiter en poisson;

J’y mangeay d’excellent Saumon;

Que ce repas eût de la délicatesse!

Mais surtout le vin s’y trouva bon.

 

Le Jeudy je disnay chez la Marquise,

Qui voulut bien nous avoir sans façon;

Je lui chantay cette Chanson,

Et quoiqu’elle ne soit pas fort exquise,

Fallut lui en donner une leçon.                                                       [337]

 

C’est bien la plus noble et la plus belle Ame

Qui soit dans tout le Pays Auxerrois;

Elle plairoit même à des Roys;

Car elle a ce qu’il faut à une Dame

Pour ranger les plus grands coeurs, sous ses Loix.

 

Chés elle on voit briller la politesse,

Beaucoup d’esprit, encore plus d’enjoüement,

De la beauté, de l’agrément;

Certain air de grandeur et de Noblesse,

Qui ravit, et qui plaît infiniment.

 

La Compagne de cette aimable,                                                    Mademoiselle Faverille

N’avoit que trop de quoi plaire à mes yeux;

Je vous le dis du sérieux;

J’allois sentir une nouvelle flame

Pour peu que je fus resté sur les lieux.

 

Je ne scaurois vous peindre cette ville,

Sinon que ce n’est pas un lieu charmant;

On n’y vit point civillement;

Le peuple est dur, impoli, peu docile,

Et ne parle que fort grossiérement.

 

Les Femmes y sont affreusement laides.                                [338]

Ah! grand Dieu, les effroyables museaux!

Leurs bras sont comme des fuseaux.

A l’amour ce sont d’excellens remedes;

Vous ny voyez aussi que noires peaux.

 

De leur esprit je ne peux vous rien dire,

Avecque elles, j’ay peu daigné causer;

On les voit toutes niaiser;

Ou du prochain cruellement médire,

Croyant par là se singulariser.

 

Des hommes, les uns sont toujours à boire,

Et les autres passent leur temps à jouër.

Le Sexe ils ne peuvent louër;

De le brusquer ils font toute leur gloire;

On en voit peu aux Dames se dévoüer.

 

Le Dimanche je partis pour la Motte,                                         le 21 Septembre.

Afin d’y boire avec un mien parent;

Nous n’allions point d’un pas trop grand,

Et cependant nôtre Histoire anecdotte,

Dit que son fils culbuta en courant.

 

A cela prés fort gay fut le voyage,

Grosse chere on nous fit en Pigeonneaux,

Poulets de grains, tendres Perdreaux;                                      [339]

Jeunes Lapins, Dindons de moyen âge,

Accompagnés de fort bons Cailleteaux.

 

Par un mauvais temps contre nôtre attente,

Nous partîmes le Mardy pour Courson,                                    23. Septembre.

Le Carosse êtoit assés bon,

Et cependant sans la double soupante,

Nous étions étendus de nôtre long.

 

Je vis enfin arriver avec joye                                                             le 29 Septembre.

L’heureux moment fixé pour mon retour,

Ah Dieu! que j’en benis le jour;

Quand on m’auroit donné force monnoye,

On n’auroit pû me faire mieux sa cour.

 

Je m’embarquay le coeur plein d’allegresse,

L’esprit content, l’oeil sec, le front serain,

Et m’esloignant de ce terrain;

Je fis de ny plus venir, la promesse,

Quand on voudroit m’en faire souverain.

 

Je vous dis donc adieu, ville d’Auxerre;

Adieu à tous vos grossiers habitans,

Ils sont pour moi trop médisans;

Je ne pourrois vivre dans une Terre,

Où l’on trouve si peu d’honnestes gens.                                  [340]

 

Quelques uns d’eux m’ont fait assés grand chere,

Je l’avoüe, et leur en suis obligé;

Pour eux je me sens affligé;

Qu’ils sont à plaindre ayant l’Ame sincere,

Où l’honneste homme est si outragé.

 

Marchez Chartiers, tirez nous d’affaire;

Faites courir un peu plus vos Chevaux:

N’epargnez point ces animaux.

Patron dite à vos gens ce qu’il faut faire;

Courage enfans nous payerons vos travaux.

 

Prenez garde que le coche n’arreste;

Au travail que chacun soit assidu;

A Paris je suis attedu;

S’il nous alloit venir quelque tempeste,

Que ce seroit pour nous de tems perdu.

 

Quittons Joigny, laissons-là Villeneuve;

Pour à Sens de meilleure heure arriver demain,

Qu’on nous fasse lever de grand matin

Pour reprendre le Fleuve,

Et Mercredy le voyage achever.

 

Je vois Paris, qu’un chacun se réjoüisse;                                 [341]

Chantons enfans chantons Gaudeamus,

Laissons-la tous les Oremus;

Qu’à cet aspect ma rate s’epanoüisse,

Desja mes Sens s’en touvent tous émûs.

 

Oh Dieu! que ce soir l’on me verra boire,

Et que je vais manger, rire et chanter;

Ne songeons plus à lamenter;

Je suis abord il faut crier victoire.

Allons nous en sans tant parlementer.

 

Enfin aprés trois semaines d’absence,

Je me retrouve avec vous mes chers amis;

Eloigné de vous, je gemis,

Dés que je me vois en vôtre presence,

De mes fatigues je suis tout remis.

 

               Envoy

Ces Couplets vont à vous Climene,

Recevez-les au moins de fort bon coeur,

Et pensez un peu au Rimeur

Qui les a faits sur les bords de la Seine

Pour vous plaire & vous mettre de belle humeur.

 

                                                          Année 1692                                        [343]     

 

1692.                                         [345]

                                                                                                                

Sur Mathurin Savary nommé Evesque de Seez en 1682. et sacré en 1693. Il êtoit jadis Marchand; Il parût la 1re. fois à Seez avec un Justeaucorps violet garni de boutons d’or et une veste en or et violet.

 

Avez vous veu la veste

Que Monseigneur avoit?

On dit que c’est un reste

D’etoffe qu’il vendoit.

 

Chanson                                                    1692                                          [346]

Suisse ou Flamant de Monsieur de Bousset.

 

Mon foy sti Roy té France l’estre ein crand movement, l’y fenir tous les ans prendre ma lochement; l’autre l’an qui n’est plus l’y fenir en personne faire sortir té Mons tout nostre Carnisson, moy chafre tant Namur ein four chouli Maison, tant mon café pon fin, faut ché l’apantonne; moy s’en fa tant Mastrickchi sis en seureté, & si lé Roy té France y fenit pour la prendre, pien plitost que sortit en crante lâcheté, moy poiré tout mon fin, moy poiré tout mon fin, afant que te la renter; moy poiré tout mon fin, moy poiré tout mon fin afant que témoy la rentre. moy poiré tout mon fin; moy poreé tout mon fin afant que te la rentre.

 

                                                                        1692 (Fevrier)                      [347]

Ce fut a peu prés dans ces termes que le le Saint Pere s’exprima après avoir leu la Lettre que Monsieur de Rebenac Envoyé Extraordinaire de Louis XIV. lui donna en presence du Cardinal d’Estrées & du Duc de Chaunes Ambassadeur de France. Par cette Lettre, Louis XIV. prie bien humblement sa Sainteté, premierement de regarder Monsieur de Rebenac son Envoyé sur le même pied qu’il regarda autrefois le Doge de Gennes, qu’il fit venir à Paris, l’asseurant qu’il ne l’envoye que pour lui demander pardon des Offenses qu’il a commises contre le Saint Siége. Secondement qu’il déteste et désaprouve tout ce qui fut arresté dans l’Assembleé des Evesques de l’an 1682. en 3e.  lieu, qu’il biffera de sa propre main en presence de son Nonce Apostholique, toutes les Déclaraons, Ordonnances & autres procédures qui ont été enregistreés en Parlement, contre l’autorité du Saint Siége Apostholique. Et enfin il asseure le Pape, qu’il confesse et reconnoît son infallibilité, tant dans le spirituel, que dans le temporel. Ce dernier Article plût si fort au Saint Pere, qu’il fit aussitost assembler les Cardinaux Cazanata, Panciatici, & Albani, qui resolurent unaniment que sa Sainteté devoit envoyer les Bulles aux évesques de France, à condition qu’ils prestcroient tous serment entre

                 

                                                                        1692                                          [348]

les mains de son Nonce qui est à Paris, Qu’ils reconnoissent les 4. Propositions du Clergé de France pour érronées, et qu’ils ne souffriroient plus à l’avenir qu’on enseignat rien sur cette matiére. Cette résolution ayant êté prise, le Saint Pere fit en même tems expediter des Bulles pour plusieurs évesques, et le lendemain le Cardinal d’Estrées, le Duc de Chaune Ambassadeur de Louis XIV. et le Marquis de Rebenae son Envoyé extraordinaire, vinrent avec un grand cortege remercier le Pape de sa bonté paternelle et lui presenterent avec un profond respect un blanc signé du Roy avec un Sceptre et une Couronne de Diamans de la valeur de cent mil francs, que le Marquis de Révenac mit aux pieds du Saint Pere, à qui il dit tout haut.

                  Saint Pere nous venons au nom de nôtre Roy,

                  Confesser qu’il depend absolument de toy,

                  Nous mettons à tes pieds son Sceptre et sa Couronne,

                  Dis nous ta volonté, commande, parle, ordonne,

                  Remplis ce Blanc signé selon ton bon Plaisir,

                  Car Louis veut enfin contenter ton désir.

 

Pasquin qui s’etoit trouvé dans l’Assembleé, voyant que le Marquis de Rebenac en demeuroit là, et que ces Messieurs faisoient leurs reverences pour se retirer, poursuivit ainsi.

                  Son oeil tout penitent ne pleure qu’eau benite,

                  Il ne peut plus trouver de repos dans son gîte,

                  Et son Esprit trouble de cent crimes commis

                  De ses meilleurs sujets à fait ses ennemis.

                  Parce qu’il ne sait plus où donner de la teste.

                  Tres sainte Pere il vous vient aujourd’huy faire feste.

 

Les François furent fort surpris d’entendre ce langage, le Duc de Chaune ayant ouy que c’estoit Pasquin, fit courir après, mais il se sauva dans la foule, et comme il prend toutes sortes de figures selon qu’il veut, il fut impossible de le reconnoitre, malgré les François il chanta encore cet Air en se retirant.

 

                  Quand le Coq chantoit hautement,         bis

                  Pierre pleuroit amerement;                         bis

                  A present que le Coq soupier,

                  Le Saint Pere n’en fait que rire,

                  Lire boula, lire lan lire

                                    Lan la la,

                                    Lire boula.

 

                  Ce Coq dit-on asseurement

                  Couve sous un oeuf un serpent;                                                     [350]

                  Mais pour éviter sa piquure,

                  Il ne faut pas que l’on l’endure

                  Lire boula, lire lan lure,

                                    Lan la, la

                                    Lire boula.

 

A la reserve du Coq qui chante, comme le Roy fait aujourd’huy, de la joye qu’il a d’avoir deux enfans, que l’on a trouvés sous une feuille de chou; Car il fait remarquer que quand le Roy voulut légitimer en Parlement Madame de Blois, et le Duc de Maine, le 1er. President demanda qu’elle êtoit leur mere, le Procureur du Roy répondit que sa Majesté les connoissoit pour ses enfans et que cela devoit suffire, le President n’estant point satisfait de cette réponse demanda si le Roy les avoit enfantés par la teste ou par la cuisse, comme fit autrefois Jupiter. Non reprit aussitost le Procureur il les a trouvés sous une feuille de Chou; Ah! dit le Président

                  Cette regle de droit est donc fausse aujourdhui.

                  Un enfant peut toujours bien connoitre sa mere,

                                    Mais pour scavoir quell est le pere,

                  Il peut souvente fois prendre un autre pour lui.

 

Monsieur Talon Avocat du Roy, voyant que le Parlement faisoit difficulté reconnoitre ces enfans pour legitimes, s’ecria en plein Bareau.

 

                  Pour couvrir un double Adultere,

                  Louis à bien raison de cacher ce mistere.

 

Dés qu’il eut prononcé cette parolle, le President recueillit les voix et dit au Greffier.

 

                  Escrivez que deux Anonimes,

                  Qu’on a trouvés dessous un chou,

                  Estant sortis d’un même trou,

                  Sont déclarez pour légitimes.

 

Cette Affaire fit pour lors tant de bruit qu’on en fit ce vaudeville qu’on chantoit hautement dans Paris. Sur l’air de Joconde.

 

                  Oui! Mademoiselle de Blois,

                  Avec le Duc de Maine,

                  Causeront un jour aux Francois,

                  Du mal & de la peine

                  Puisque Louis les a trouvez,

                  N’est-ce pas assez dire;

                  Il veut qu’ils soient légitimez

                  Pour troubler son empire.

 

La Quintessence                                 1692 (17 Mars)                   [353]

des Nouvelles.

 

Le Dessert vient toujours sur la fin d’un repas,

                  Quand on joüe des Comédies,

                  Des Opéra, des Tragédies,

La farce pour dessert jamais ne manqué pas

                  Ainsi suivant cette méthode,

Aprés avoir joué mon petit Opéra,

                  Je veux dans une Période

En dire une au lecteur qui le détrompera.

 

Tout le monde croit que Madame de Montespan est bien considéreé à la Cour; mais on se trompe fort, toutes les Princesses du sang la regardent comme les Paons de la Fable regardoient le jay qui s’étoit paré de leurs plumes; dans les occasions elle ne manquent pas de lui donner un coup de bec. Madame la Duchesse d’Orleans lui en donna un bien sensible, dans une visite qu’elle fut lui rendre au Palais Royal le 6. du courant. Cette Princesse qui avoit êté avertie de sa venuë, avoit donné ordre à une de ses Demoiselles d’aler prendre Madame de Monstespan au haut de l’éscalier, et de lui dire tout haut en l’introduisant dans sa Chambre;

 

                  C’est Madame de Montespan,                                      [354]

                  Qui vous vient faire un compliment.

 

Madame qui êtoit assise dans un fauteuil, tenant un Livre en sa main, fit d’abord semblant de ne pas entendre. Cependant Madame de Montespan s’aprocha, et aprés lui avoir fait une profonde reverence, lui dit, Je viens, Madame, vous témoigner la joye que je ressens de l’honneur que vous m’avez fait. Quel honneur vous ai-je fait? reprit la Duchesse. Quoi! Madame poursuivit la Montespan, n’est-ce pas un grand honneur pour moy d’etre entreé dans vôtre illustre Alliance? Il est vrai, Madame, repondit la Duchesse en s’emportant, que c’est un grand honneur pour vous; mais un tres grand deshonneur pour moy. Quoi! reprit la Montespan un peu en colére, quel meilleur parti pouviez vous esperer pour le Duc de Chartres, que celui qu’il a pris, d’epouser la Fille d’un des plus grands Rois du monde & qui est votre niece et sa Cousine germaine. Je veux croire charitablement, puisqu’il le faut, répondit la Duchesse, que le Roy en peut être le pere. Je dis charitablement, ajouta t-elle, car des personnes de vôtre sorte sont bien sujettes à caution. Comment des personnes de ma sorte! repliqua la Montespan en furie; Je suis une femme comme une autre. Il est vrai, repartit la Duchesse, qu’il y a des femmes qui vous ressemblent. Il n’y en a même par malheur que trop dans cette Cour, qu’on a raison d’apeller, Communis generis. Je n’entends point le Latin, reprit la Montespan, qui voulut changer l’entretien, mais je vous avoüe, que j’ay toujours fort aimé les honnêtes Compagnies. Je n’en doute nullement, dit la Duchesse; mais poursuivit-elle, en lui demandant; Les honnestes Compagnies vous aiment-elles? cette demande surprit fort la Montespan qui ne scavoit que répondre et qui fut bien aise de voir entrer Madame de Montpensier qui vint fort a propos pour romper cet entretien. Aprés quelques momens de conversation, la Montespan se retira avec Madame de Montpensier à qui elle temoigna n’estre pas contente de l’accueil que Madame la Duchesse d’Orleans lui avoit fait; mais elle fut encore bien mortifiée, d’entendre chanter en passant sur le pont neuf ces deux Couplets.

                                    Sur l’air Lire lan la.

                  Un chacun parle librement,        bis

                  De la faveur de Montespan,        bis                                               [356]

                  Les Dames n’en font rien que rire,

                  Lire lan la, lire lan lire,

                  Lan la lire lan la.

 

                  Mais pour Madame, ce dit on,   bis

                  Elle est facheé avec raison,         bis

                  Et n’oseroit pourtant rien dire;

                  Lire lan la lire lan lire,

                  Lan la, lire lan la.

 

Chanson                                                    1692                                          [359]

Sur l’air des Triolets.

faite à la Harelle en Juillet 1692.

l’Abbé Savary à Mademoiselle du Petitfort.

 

Mon Petitfort vous m’avez pris,                                    le 22 Juillet.

De vous je n’ay pû me deffendre;

De vos beautez je suis épris,

Mon Petitfort vous m’avez pris.

Et vos beaux yeux tous plein d’esprit,

Ont force mon coeur à se rendre.

Mon Petitfort vous m’avez pris,

De vous je n’ay pû me deffendre.

 

Belle et charmante Petitfort,                       C’est le pere de l’Abé qui parle.

Je vois que de prés l’on vous presse;

Certain Abbé vous parle fort,

Belle et charmante Petitfort.

Je lui pardonne, il n’a pas tort,

De vous marquer tant de tendresse,

Belle et charmante Petitfort,

Je vois que de prés l’on vous presse.

 

Petit Abbé de Savary

Retirez vous au séminaire,                                                                [360]

C’est tout de bon qu’on vous le dit;

Petit Abbé de Savary.

Laissez moi toute seule icy;

C’est bien assez d’un petit pere.

Petit Abbé de Savary

Retirez vous au séminaire.

 

Mon cher Abbé de Savary

Revenez tost du séminaire;

C’est tout de bon qu’on vous le dit

Mon cher Abbé de Savary;

Fanchon voudroit vous voir icy

A la place du Petit Pere.

Mon cher Abbé de Savary,

Revenez tost du séminaire.

 

Autre                                                           1692                                          [361]

Sur l’air d’un Rigaudon.

Sur le même sujet.

 

Mon pauvre Abbé,                              c’est Mademoiselle Petitfort qui parle

Quitte là la Poësie;

Qui mene à la folie,

Deviens plus sensé:

Tu fais l’amant

D’une jeune voisine

Depuis peu de tems;

Mais elle dit que tu as bien la mine

De perdre l’esprit

Va t’en au séminaire

Aprendre ton métier,

Et a dire un Breviaire

Qui sera ta moitié;

Iris ne te rendra jamais heureux,

Et méprise tes feux.

 

Autre                                                           1692                                          [362]

Sur l’air: Laire la laire lan laire.

Sur le même sujet.

 

Aimable et charmante beauté;

Je vais boire à vôtre santé;

Ne pourrai-je jamais vous plaire?

                  Laire la , laire lan laire,

                  Laire la laire lan la.

 

Je suis arrivé sur les lieux,

Pour vous y presenter mes voeux;

Escoutez moi donc sans colere,

                  Laire etc.

 

J’ay du coeur, j’ay de l’enjouëment,

Je n’aime tout au plus qu’un an;

Voyez si c’est là vôtre affaire.

                  Laire etc.

 

Autre                                                           1692                                          [363]

Sur l’air Ah! qu’elle y va gayement.

En allant à Saint Just chez Monsieur de Savary. le 23. Juillet.

 

Beautez et Nonnes chéminants

Ah! qu’elles y vont gayemens;

Ayant déjêuné gentiment

Tout le long de la Prairie.

Ah! qu’elles y vont les jolies;

Ah! qu’elles y vont gayemens.

 

Ayant déjeuné gentiment.

Ah! etc.

Vont à Saint Just gaillardement.

Tout le long etc.

 

Vont à Saint Just gaillardement,

Ah! etc.

Sans le Congé de leur maman.

Tout le long etc.

 

Sans le Congé de leur maman,

Ah! etc.

Le grand Maître en sera content; (1)                        

Tout le long etc.

 

(1)    Monsieur de Savary grand Maître des eaux et Forests de Normandie

 

Le grand Maître en sera content,                                                  [364]

Ah! etc.

Il s’en ira tout triomphant,

Tout le long etc.

 

Il s’en ira tout triomphant,

Ah! etc.

D’avoir attrapé le moment,

Tout le long etc.

 

D’avoir attrapé le moment,

Ah! etc.

De pouvoir conter son tourment.

Tout etc.

 

De pouvoir conter son tourment,

Ah! etc.

A la beauté qu’il aime tant.                           Mademoiselle de Petitfort.

Tout etc.

 

A la beauté qu’il aime tant,

Ah! etc.

Qui lui répond en gambadant.

Tout etc.

 

Qui lui répond en gambadant.

Ah! etc.

Vous ne seres point mon amant.                                                   [365]

Tout etc.

 

Vous ne serez point mon amant; Ah! etc.

Car j’ay un autre engagement.

Tout etc.

 

Car j’ay un autre engagement,

Ah! etc.

Que je veux aimer constamment.

Tout etc.

 

Que je veux aimer constamment.

Ah! etc.

Adieu, faites en tout autant.

Tout etc.

 

Adieu faites en tout autant,

Ah! etc.

Allons retrouver la maman.

Tout etc.

 

Allons retrouver la maman,

Ah! etc.

Embrassons-la bien tendrement;

Tout etc.

 

Autre                                                           1692                                          [366]

Sur l’air Beuvons à nous quatre

Arrivant à Saint Just pour diner le 24. Juillet.

 

Voicy les voisines,

Et bonjour le voisin,

Nous sommes de faim.

 

                  En partant.

 

Salut à nôtre hoste,

Mille remercimens;

Faisons lui nos complimens

Regagne la coste

Tous bien tristement.

 

Autre                                                           1692 (le 25. Juillet)          [367]

Sur l’air des Triolets

Sur Madame Savary qui se piquoit de scavoir les regles de faire des Vers et qui les citoit pendant qu’on badinoit en faisant des laire lan laire, raportant pour l’exemple un couplet qu’elle disoit avoir fait il y avoit longtemps.

par Madame Raft et Madame du P…..

 

Va t’en au Diable Savary,

Tu nous met toujours en colere;

Et quoi! jusque dans nôtre lit,

Va t’en au Diable Savary.

Venir trancher du bel esprit,

Et troubler nos laire lan laire.

Va t’en au Diable Savary,

Tu nous mets toujours en colere.

 

Autre                                                           1692                                          [368]

Sur l’air de Jean de Vert.

Sur le même sujet.

 

Vit on jamais rien de plus sot

Que cette mine fiere?

Qui vient icy mal apropos

Nous conter des chimeres.

Voyez un peu ce bel esprit

Pour se vanter d’avoir escrit

                  A Jean de Vert.

 

Autre                                                           1692                                          [369]

Sur le même Air.

Sur Monsieur Mordant qui avoit quitté le 24. de juillet Madame l’Abbesse sans lui tenir compagnie comme il le devoit.

 

Mordant ne manque point d’esprit;

Mais bien de politique.

Il fait paroître son dépit,

Et d’un rien il se pique.

Cela se fait il a present?

On l’auroit pû souffrir du tems

                  De Jean de vert.

 

Autre                                                           1692 (28 Juillet)                                   [370]

Sur l’air Alleluya.

A mon retour de Villarceaux.

 

Lorsque je partis de ce lieu,                          Monsieur Mordant

Je vous fis un fort triste adieu;

Mais Dieu mercy m’i revoila.

                  Alleluya.

 

Je vous revois bonne maman,

Il y a pour le moins un an,

Que mon malheur m’en arracha.

                  Alleluya.

 

Chere maman pardonnez moy,

Je vous le jure sur ma foy,

Jamais cela n’arrivera.

                  Alleluya.

 

Que Villarceaux est ennuyant,

Que j’y ay vescu tristement,

Nulle de vous le croira.

                  Alleluya.

 

Cependant rien n’est plus certain

Que même dez le grand matin;                                                       [371]

Je baillois à ces grilles là,

                  Alleluya.

 

A la fin je suis prez de vous,

Cheres soeurs réjouissons nous;

Chantons dansons et cetera.

                  Alleluya.

 

Divertissons nôtre maman,

C’est le devoir d’un bon enfant,

Et puis le Ciel nous benira.

                  Alleluya.

 

Autre                                                           1692                                          [372]

Sur l’air des Ennuyeux.

Mon voyage à Villarceaux

 

De mon voyage je reviens,

Et voicy quelle est l’histoire:

Je partis si je m’en souviens,

A cinq heures, ce fut sans boire;

Quand j’arrivay chez le Curé,

J’estois, ma foy bien altéré.                          le 24. juillet a Heubecourt

 

Je l’avois cherché dans Vernon,

Sans en aprendre de nouvelles;

Car ce villain petit garcon

Etoit allé avec des belles

Se promener jusqu’à Bissy,

Sans de moy prendre aucun soucy.

 

En entrant dedans la Maison

J’envoyay Jacquet à la Cave,

Qui m’apporta, en franc oison

Un vin couleur de betterave,

Dont je ne bus qu’un petit coup,

Ne le trouvant pas à mon gout.

 

Le Prieur ayant aperçeu                                                                                        [373]

Du pauvre jacquet lourdise,

Et voyant qu’il s’etoit deçeu

Lui fit reparer sa sottise,

L’envoyant tirer du bon vin,

Dont je bus jusqu’au lendemain.

 

Estant ainsi en liberté,

Et nous regardant comme freres;

Aprés avoir bien caqueté,

Nous reprenions en mains les verres.

A ce qui te plaist mon amy,

Et tope et tinque grand mercy.

 

Lorsque minuit vint à sonner,

Nous sonnâmes aussi retraite;

Nous nous mimes à raisonner,

L’un l’autre denos amourettes:

Toute aimable du Petitfort

Nous parlâmes de vous bien fort.

 

Enfin le lendemain matin,

M’estant greffé sur Rossinante;

Je pris tristement le chemin

D’une maison bien ennuyante;

Que Villarceaux est un couvent,

Où passe bien mal son tems.

 

Du Petitfort qu’eussiez vous fait,                                                  [374]

Dans cette affreuse solitude?

On ny voit point de Berthemet

Pour en charmer l’inquiétude:

Vive la Harelle ou vernon,

Dites, jamais s’i ennuye t’on?

 

J’aurois peine à vous exprimer,

Comment j’y passois les journées;

Vous pouvez vous imaginer,

Qu’elles me sembloient des anneés;

Mais ces discours sont superflus,

J’en suis sorti n’en parlons plus.

 

Lorsque je voulus en partir,                                            le 27.

Il survint un vilain orage,

Qui pouvoit me faire périr,

Si je me fus mis en voyage;

Par prudence il fallut rester

Pour ne me pas aller noyer.

 

Mais le Tonnere êtant passé,

Je songeay à me mettre en route;

L’orage leur dis-je est cessé,

C’est en vain que vous parlés toutes;

Je veux aller trouver Mordant,

Car il m’attend asseurement.

 

Je pris congé de ces Nonains,                                                          [375]

Malgré toute leur résistance

De rester jusqu’au lendemain,

Elles me firent grande instance;

Mais je leur dis le bon Mordant

M’attend ce soir bien seurement.

 

Adieu vous dis, mes cheres soeurs;

Adieu ma chere Divigeé;

Croyés moi, essuyés vos pleurs;

Vous vous montrez trop affligeé,

Il faut enfin nous séparer,

Car Mordant m’attend à souper.

 

Rocinante à beaucoup d’esprit

Depuis Bray jusqu’à son étable;

Sans lui parler elle m’a mis

Dans un chemin fort agréable;

Rocinante en a bien apris

A l’école du bon Fyfy.

 

Dés que je fus chez le Prieur,

Je chantay mon historiette;

Combien crois tu, ma chere soeur,

Qu’on bût de son vin de Farguette?

Nous en soufflâmes seurement

Trois pintes bien tranquillement.

 

Nous raisonnons ainsi tous deux,                                                 [376]

De tout ce qui nous pouvoit plaire,

Aux tendres objets de nos voeux,

Nous buvions comme des comperes.

Et dans cet agréable employ,

Minuit nous attrapa ma foy.

 

Il êtoit question ce matin

De revenir à la Harelle;

La crainte du méchant chemin

M’a fait Monter une haridelle,

Sans selle, bride, et étrier,

Comme un pauvre Menestrier.

 

Ainsi huché sur le Grison,

J’ay suivi Dame Rocinante,

Sans aucun accident, sinon,

Qu’ayant une épaule méchante,

Si je ne me fus bien tenu

Par terre il m’auroit etendu.

 

Ne songeons qu’à nous rejouir,

Je suis encore à la harelle;

Mais je n’ay plus guere à jouir

D’une Compagnie aussi belle;

Il faut retourner à Paris,

Adieu donc les jeux & les ris.

 

Dieu! que l’on m’y verra chagrín,                                                  [377]

Et que j’y feray triste mine;

J’y pleuray soir & matin,

Ne voyant plus cette blondine,

Qui par la douceur de ses yeux

Me rejouissoit dedans ces lieux.

 

Charmante Abesse excuses moy,

Prenes pitié de ma foiblesse,

Prés de vous je trouvois de quoy

Charmer l’ennuy et la tristesse;

Mais helas! il me faut partir,

Je peux bien dire adieu plaisir.

 

Autre                                                           1692                                          [378]

Sur l’air Et son son

Par Mademoiselle du Petitfort.

 

Une dévote a leü dans la Sainte Evangile,

Qu’il faut jeuner au feu toute plante infertile.

                  Et son son.

 

Qu’on ne la traite point de badine et de folle,

Elle a de point en point suivi la parabolle,

                  Et son son.

 

C’est par le bon avis d’un pere Trinitaire,

Que la devote a pris ce parti salutaire.

                  Et son son.

 

Elle explique tres bien la tres Sainte Ecriture,

Elle a pour son sauveur fait une créature.

                  Et son son.

 

Autre                                                           1692                                          [379]

Sur l’air de l’Echelle du temple.

En partant de Vernon pour Mantes le 31. Juillet en compagnie de Messieurs Tallement, et de Madame sa soeur, de Madame de Milly mere et fille, de Mesdesmoiselles Fontenay mere et filles, de Mademoiselle Passerat, et de Monsieur de Malherbe.

 

La Compagnie de Tallement,

Part de Vernon fort tristement;

De quitter cette aimable ville

Où l’on passoit si bien le tems

A danser dessous la charmille

Au son de plusieurs Instrumens.

 

Lorsqu’on se mit dans le bateau

La Conté pleura comme un veau;

Laugeois* en eut l’Ame affligeé,                                  *Conseiller au Parlement.

Et de Milly pareillement,

Qui voyant sa femme embarqueé

Se retira tout dolemment.

 

Un Abbé* qu’on ne nomme pas,                                   *d’Anviray

Soupira quittant les appas,

D’une tres charmante Baronne;                                  de Clermont       [380]

Les larmes lui vinrent aux yeux,

Et il ne put trouver personne

Pour le consoler dans ces lieux.

 

Au moment de l’embarquement,

Tout le monde chercha Mordans*;           fils, Lieutenant general de vernon.

Mais comme il a le coeur fort tendre,

Il ne voulut point dire adieu;

Et l’on craint qu’il ne s’aille pendre

A Forge ou dans quelqu’autre lieu            Il partoit en jour là pour Forge.

 

Le bon Monsieur de Fontenay,

N’avoit pas, ma foy, la coeur gay;

On vit aussi pleurer des Nonnes,

Et l’aimable du Petitfort,

Conduisant ses belles personnes,

Parut triste dessus le Port.

 

Autre                                                           1692                                          [381]

Sur l’air de Mais.

Par Mademoiselle du Petitfort, à la Harelle.

 

Soeur Savary l’Abesse te destine

Pour au Couvent aller chanter matiné;

                  Mais

Si tu fais trop la Mutine,

Tu n’en reviendra jamais.

 

Autre                                                           1692                                          [382]

Sur le même Air.

Couplets faits en revenant de vernon et envoyez à Mademoiselle du Petitfort le 3. Aoust 1692.

 

Du Petitfort que je ressens d’allarmes!

Et qu’à Paris je repandray de larmes.

                                    Pour,

Avoir connu tous vos charmes;

Je vais resver nuit et jour.

 

Malgré l’oubli qui suit toujours l’absence,

Vous me verrés signaller ma constance;

                                    Mais,

                  Quelle rude penitence

                  Si vous ne m’aimiez jamais.

 

J’en fais l’aveu, j’étios un peu volage;

Mais desormais l’on me verra tres sage,

                                    Loin,

                  De friponner d’avantage

                  Vous seule aurez tous mes soins.

 

Je n’auray plus cette ancienne foiblesse,

D’aller partout prodiguer ma tendresse;                                                  [383]

                                    Non,

                  J’ay fait un voeu de sagesse,

                  Auprés de vous dans Vernon.

 

J’en ay conté jadis a chaque belle,

Et l’on ma veu à toutes infidelle;

                                    Mais

                  J’ay juré dans la Harelle

                  De ne vous quitter jamais.

 

Voila tout ce qu’à pû faire ma muse,

Car tres souvent la badine s’amuse;

                                    Mais

De vôtre bonté j’abuse;

                  Vôtre valet à jamais.

 

A repartir il faut que je m’apreste,

Que n’est-ce helas! pour aller ou vous êtes.

                                    Oh!

                  Que j’en ferois grande feste;

                  Mais je vous tourne le dos.

 

Autre                                                           1692                                          [384]

Sur le même air

Couplets faits en allant à Clairefontaine. le 4. Aoust 1692.

 

Pere Merry, t’est le plus habile homme,

Qui fut jamais de Paris jusqu’a Rome;

                                    Car

                  Tu donne tes ordres comme

                  Si tu estois Maitre ez Arts.

 

                  Sur celuy des Ennuyeux.

Hier au soir en arrivant

Dedans la ville de Chevreuse;

On nous receut fort gallemment,

Et l’histoire en est curieuse,

L’on sonna, l’on carillonna,

Comme on eut fait pour le Legat.

 

                  Sur celuy de Landerirette.

A mon maître aussitost je dis,

Soyez certain de tout cecy,

                                    Landerirette.

Se fait par ordre de Merry,

                                    Landeriri.

 

On fit cesser le Carillon,                                                                                         [385]

Pour faire entendre le violon,

                  Landerirette.

Le tout par ordre de Merry,

                  Landeriri.

 

Aprés cela j’aurois juré

Trouver le soupé préparé,

                  Landerirette.

Par les bons ordres de Merry,

                  Landeriri.

 

Mais en entrant au Cabaret,

Nous ne trouvâmes rien de prest,

                  Landerirette.

Où Diable est ton ordre Merry,

                  Landeriri.

 

Eh! pourquoi leur dis-je tout haut?

N’avez vous rien tenu de chaud?

                  Landerirette.

Vous n’avez donc point veu Merry?

                  Landeriri.

 

Pardon mon Pere, excusez moy,

Dit la maîtresse en grand émoy;

                  Landerirette,                                                                             [386]

Je n’ons point l’ordre de Merry,

                  Landeriri.

 

Ne fallout point de violon,

De Cloches, ny de Carillon,

                  Landerirette.

Il falloit à soupé Merry,

                  Landerri.

 

Prends y bien garde un autrefois,

Au lieu de rester dans tes bois,

                  Landerirette.

Va donner tes Ordres Merry

                  Landeriri.

 

Ce coup nous te pardonnerons,

Doucement nous te traiterons,

                  Landerirette;

Mais regale nous bien Merry.

                  Landeriri.

 

 

                                                                        1692                                          [387]

Parodie de Monsieur l’Abbé de Lubert, après la Prise de Namur 1692. Sur les 3. 1ers. Scenes du 1er. Acte d’Atis.

 

                                    Scêne 1re.

                                    les Flamans.

 

Allons, allons accourez tous

                  Guillaume vient en Flandres.

Trop heureux Allemands venés icy l’attendre;

                  Mille peuples seront jalloux

                  De tant d’or que pour vous

                  Sa rigueur à sceu prendre.

 

                                    Scêne 2e.

                                    Nassau.

 

                  Allons, accourez tous,

Je viens pour vous deffendre.

                                    les Flamans.

Quand nos champs sont parez de ces vives couleurs,

                  Qui regnent sur les fleurs,

Quand le Ciel l’adoucit, que l’herbe vient a croître;

Le carnage chez nous commence de paroître,

Et nous fondons en pleurs.

                  La valeur du François s’eveille;

                  Et court au 1er. bruit de Mars,

                  Il bat, il force nos ramparts,                                            [388]

                  Le Statouder encore sommeil.

                                    Nassau.

Vous devez mieux juger du parti que je prens.

J’en veux à des guerriers dont les fougues legeres,

Passent avec fureur ainsi que des torrents;

                  Je scai que des efforts si grands,

                  Ont un sort qui ne dure gueres.

                                    les Flamans.

                  Il faudroit secouir Namur,

                                    Nassau.

                  Mes bras ne scauroient te deffendre;

                  Mais croyés moy, c’est un coup seur,

                  J’ay deux bons yeux pour le voir prendre.

                                    les Flamans.

                  Vôtre flegme en la guerre, et vos rares secrets,

                                    Poussent à bout les plus discrets.

                                    Nassau.

                  Les Francois prennent une ville,

Et vos yeux aussitost me voyent de travers;

Pour un Château perdu vous en aurez dix mille,

                  Quand j’auray conquis l’univers.

                                    les Flamans.

Que de fols ont signé la Ligue avec l’Empire,

                  L’Espagne doit s’en repentir.

                  L’Hollandois voudroit en sortir,

                  Le petit Savoyard soupire,

Les Anglois ont cherché ce qu’on leur fait sentir;                                [389]

Si leurs maux sont outrez, leur crime est encore pire.

François que triomphez, que vous êtes heureux!

Vos Biens sont a l’abri sous un Roy glorieux,

Et nous prés d’expirer nous n’oserions nous plaindre:

                  Et malgré nos tourmens rigoureux,

                  Et malgré ceux qui sont à craindre.

Francois qui etc.

                                    Nassau.

J’ay crû chers Alliés pouvoir tout entreprendre,

Et trouver les François aussi laches que vous.

Mais je n’ay point trouvé de foible pour les prendre.

 

                                    Scêne 3e.

                                    les Flamans.

                  Allons, accourez tous,

                  Nassau va nous deffendre.

                                    Nassau.

                  Si les François sont assés fols,

                  Pour assiéger, laissons les prendre;

Je vous promets qu’un jour je leur feray bien rendre.

Mais je n’ay pas encore animé mon courroux.

                                    les Flamans.

                  Allons accourez tous,

                  Nassau va nous deffendre.

                                    Nassau.

Ecoutez leurs canons, ecoutez leurs Tambours,

Ils remplissent mon coeur d’une frayeur étange.                                [390]

                                    les Flamans.

                  C’est à vous que l’on a recours;

                  Venez vaillant Prince d’Orange.

Les Bourgeois de Namur demandent du secours;

                                    Louis redoutable,

                                    Courageux aimable,

                  Voudroit devenir leur Roy;

                  Doivent ils subir sa Loy?

                                    Nassau.

Il faudroit contre lui gagner une victoire.

Je le scais comme vous, et je le voudrois bien.

                                    les Flamans.

Oui s’il ne vous en coutoit rien;

                  Car telle est votre gloire.

                                    Nassau.

                  Souvent quand on s’est avancé,

                  Pour la deffense des murailles.

                  On y trouve ses funerailles,

                  Ou du moins on est relancé.

                  Que les Armes de la France,

                  Soient beaucoup a redouter,

                  Aprés tant d’expérience.

                  Je ne puis en douter.

                                    les Flamans.

                  Allez Guillaume avec Baviere;

                  Faites mieux à Namur qu’à Mons

                                    Nassau.                                                                       [391]

Mais les François sont des démons,

                  Qui ne me craignent guere.

                                    les Flamans.

Serez vous insensible à l’espoir des Lauriers?

                                    Nassau.

                  Avec cent mille guerriers,

J’evite les combats autant qu’il m’est possible

                  Si j’etois battu par malheur,

                  Je connois bien mon coeur,

                  Il seroit trop sensible.

S’ils prennent des Châteaux et des villes sur nous,

                  Cela ne doit pas vous surprendre.

                  Tous ensemble avec Nassau.

                  Fuyons, et courons tous,

                  Namur vient de se rendre.

 

Chanson                                                    1692                                          [392]

Sur l’air des folies d’Espagne.

Par Mademoiselle F….. à Monsieur d’U………. à Pignerole.

 

Nos ennemis ont quitté votre Ville,

Et semblent s’en éloigner pour toujours;

Je devrois donc avoir l’esprit tranquille,

Puisque je ne crains plus rien pour vos jours.

 

Si j’allois vous soupçonner d’inconstance,

Seroit-ce à tort? parlez moy franchement;

Quant tous les jours on me fait confidence,

Que vous avez un autre engagement.

 

Complainte des Flamans              1692                                          [393]

Sur l’air des Folies d’Espagne.

 

Hélas! Nassau, quel sera nôtre azile

Contre Louis? qui peut nous proteger?

Si tous les ans il nous prend une ville?

Où pourrons nous à la fin nous loger?

 

Tu nous flattois de faire des merveilles,

Pour arrester le cours de ses Exploits;

Mais devant lui tu baisse les Oreilles,

Quand ta valeur nous réduit aux abois.

 

Pauvres Flamans que nous sommes a plaindre,

D’etre Artisans nous mêmes de nos maux;

De tous côtés nous avons tout a craindre,

Quand verrons nous la fin de nos maux?

Quoi! falloit-il épuiser nôtre bourse,

Sans nous donner aucun soulagement?

Quelle sera Nassau nôtre resource?

Quand nous t’aurons donné tout notre Argent.

 

Tu nous flattois d’une belle entreprise

Qui nous devoit render heureux a jamais;

Par ces discours tu nous mets en chemise

Sans rien tenir de ce que tu promets.                                        [394]

 

Tu préparois pour faire une descente,

Un Armement formidable aux François;

Ces grands aprets ont trompé nôtre attente,

Et Furne enfin couronne tes Exploits.                       s’empara de Furne mois de Septembre.

 

Devant Namur nous croyons voir le Siége;

Mais tu nous dis qu’il n’est pas encore tems,

Et nous voyons que c’est un autre piége

Que cet hiver à nos bourses tu tends.

 

Tout come nous l’Anglois est miserable,

Et l’Hollandois n’en est pas plus heureux.

Touchant l’argent nostre sort est semblable;

S’il prend sur nous, il prend bien plus sur eux.

 

Aprés avoir fait gémir tant de monde,

Aprends Nassau quels sont pour toy nos voeux;

Nous prions Dieu que le Ciel te confonde,

Et nous sauve d’un fleau si dangereux.

 

Chanson                                                    1692 (Septembre)            [395]

Sur l’air Scavez vous bien beauté cruelle.

Par Mademoiselle F….. à Monsieur d’I………

 

Mon coeur est plein d’Allegresse,

Voyant finir les beaux jours;

Bien loin d’en être en tristesse,

Je ne fais que chanter toujours;

Quel plaisir que l’hiver se presse;

Car je verray mes amours.

 

L’Esté, pour moy, est sans charmes,

L’Automne à plus d’agrement;

L’Hyver fait cesser mes larmes,

En me ramenant mon Amant;

Mais que je sentiray d’allarmes,

Aux aproches du printemps.

 

Il est doux lorsqu’on est tendre

De retrouver son Berger;

Il est bien facheux d’aprendre,

Qu’on ne doit le voir que leger;

Tous les jours l’on me fait entendre,

Que vous n’aimez qu’a changer.

 

J’aprends pour toutes nouvelles                                                                     [396]

Que vous avec des Cloris;

Et que vous courrez les belles

A Pignol comme à Paris.

Dites moy, vous écoutent ells?

Je trembre pour leurs maris.

 

Si vous aimez Célimene,

Songer à vous excuser;

Ou craignez qu’elle reprenne

Son coeur qu’on vous voit abuser.

Qu’amour prés d’elle vous ramene,

Sans ailleurs vous amuser.

 

Chanson                                                    1692                                          [397]

Sur l’air de l’Eschee du temple.

Sur le Combat de Steinkerque.

 

Aprés Mons et Namur vaincus,

La Ligue qui n’en pouvoir plus;

Pour surcroit perdre une Bataille.

Avec plus de cent mille bras;

Guillaume ne fait rien qui vaille

Dans les Siéges ny les Combats.

 

De nôtre Monarque vainqueur,

N’osant éprouver la valeur;

A ses yeux Namur il vit prendre,

Croyant que ce seroit en vain

Qu’on songeroit à se deffendre,

Quand Louis tient son foudre en main.

 

Mais quand ce soleil des François,

Aprés ses rapides Exploits, paroist

En repos dans la France;

Guillaume qui prenoit l’essor,

Voit que par sa seule influence,

Ce grand Astre l’accable encor.

 

Oui sur les Drapeaux de Louis,                                                        [398]

On fait des Exploits inoüis;

Pour lui la victoire agissante,

De ses Soldats fait des Héros,

Et son Étoille triomphante,

Fait triompher ses Généraux.

 

Guillaume aprens donc en ce jour

Ce qu’est le brave Luxembourg;

Ta deffaite en dit des nouvelles;

Le Ciel renverse tes Projets,

Veut à des peuples fidelles

Ouvrir les yeux sur tes forfaits.

 

Autre                                                           1692                                          [399]

Sur le même Air

Sur Louis Quatorze.

 

Louis est sage et généreux,

Dans ses desseins il est heureux;

A ses amis il est fidelle.

Les autres Monarques jaloux

Disent qu’il seroit leur modelle,

S’il alloit moins souvent aux coups.

 

Autre                                                           1692                                          [400]

Sur le même Air

Pendant le Siége de Namur.

 

Je ne m’estonne nullement,

Qu’Atlas porte le Firmament,

Comme dit la Métamorphose,

Puisque nous voyons en ce jour,

Que toute la France repose,

Sur la bosse de Luxembourg.

 

Chanson                                                    1692                                          [401]

Sur l’air……

 

Sur la terre et sur l’onde,

Tout ce qui voir le jour;

Il n’est rien dans le monde

Qui soit exemt d’amour;

Il faut être homme de mer, / Pour bien aimer Les Matelots,

Aiment au milieu ds flots.

 

Les Officiers de terre,

N’aiment pas constamment;

Ils sont comme le verre,

Sujets au changement.

                  Pour bien aimer

Il faut être homme de mer,

                  Les Matelots,

Aiment au milieu des Flots.

 

Un homme de Marine,

En agit autrement;

Car plus on le chagrine,

Et plus il est constant.

                  Pour etc.

 

Nous connoissons les costes

Et l’Étoille du Nord,                                                                [402]

Et comme bons Pilotes,,

Nous venons à bon port.

                  Pour etc.

 

Embarquez vous, Medames,

Ne craignez point les eaux;

Pour eteindre nos flames,

Venez sur nos vaisseaux.

                  Pour etc.

 

Les vents et les tempestes,

Les Brulots, les Rochers,

Ne sont que des fleurettes,

Aux amoureux rochers.

                  Pour etc.

 

On dit que la Sirene,

Par ses amoureux tons,

Ravit, charme, et entraîne

Ilauque et les Tritons.

                  Pour etc.

 

Chanson                                                    1692                                          [403]

Sur l’air Vivons comme le voisin vit

Ce Couplet est de Monsieur le Grand Prieur, pour Fanchon Moreau de l’Opéra.

 

Aprés avoir quitté Paris

Où tout plaisir abonde.

Avec du vin & mon Iris

J’irois au bout du monde.

 

Autre                                                           1692                                          [404]

Sur l’air de Joconde.

Adresseé à Boileau des Préaux.

 

Apollon si chéry des belles

A pris plaisir a l’egarer,

Et les Muses qui sont fémelles

Ont refusé de l’inspirer.

 

(1)   On s’est trompé sur l’air de cette Chanson, ou bien il y auroit 4. vers d’obmis parce qu’il en faut 8. Pour l’air de Joconde.

 

Chanson                                                    1692                                          [405]

Sur l’air: du Traquenard.

Le Comte de Grimbergue présentement le Prince de Barbançon qui etoit Gouverneur de Namur. Il avoit épousé Mademoiselle de Lalain sa Cousine, qui etoit fort belle et de peu d’esprit.

 

Mon Cousin que faites vous?

                  Ma Cousine je vous f.

Ah! vraiment mon Cousin

Vous prenez bien de la peine

Ah! vraiment mon Cousin

Prenez en jusqu’a demain.

 

Autre                                                           1692                                          [406]

Sur l’air: Tranquilles coeurs

par Coulanges.

Pour Monsieur le President le Coigneux, en partant de Morfontaine, pour Paris aprés les Vaccations.

 

                  Chevreuils & Cerfs courez les Champs,

                  Le Coigneux retourne à la ville;

                  Dieux! que vois d’icy, de gens

                  Qui lui vont eschauffer la bille;

Les Plaideurs, les Procez, les chagrins, les ennuys,

                                    L’attendent à Paris.

 

                  Adieu plaisirs, adieu repos,

                  Il s’en va bien changer de vie,

                  Endosser la Robbe à tuyaux;

                  Entendre un Avocat qui crie,

Et préférer enfin contrainte et gravité,

                                    A toute liberté.

 

Chanson                                                    1692                                          [407]

Sur l’air: des Rochelois.

Sur N….. Bolo ou Boleau.

 

Que Bolo a les yeux charmans!

Qu’on voit en elle d’agrémens!

Ȏ! Vénus que l’on croit si belle.

Viens te faire voir en ces lieux,

Pour déciderla querelle

Qui pouroit n’aître entre vous deux.

 

Je ne veux point de Jugement,

Je veux par accommodement

Finir entre vous cette guerre.

Que Bolo, de l’avis des Dieux,

Soit la plus belle de la terre,

Et moy la plus belle des Cieux.

 

Que Vénus a fait prudemment

D’eviter un tel Jugement!

De l’aveu de la Cour Celeste,

Avec tant de divins appas;

Boleau l’eut emporté de reste,

Faisant voir ce qu’on ne voit pas.

 

Epitaphe                                                   1692                                          [408]

De Monsieur de Louvois

 

                  Icy gît sous qui tout plioit,

Et qui de tout avoit une connoissance parfait,

                  Louvois que personne n’aimoit,

                  Et que tout le monde regrette.

 

Chanson                                                    1692                                          [409]

Sur l’air….

On dit que cette Chanson est de Monsieur Dangeau pour Madame la Princesse de Conty.

 

On a que trop de plaisir à vous rendre,

Ce que l’amour demande par vos yeux.

Ah! Princesse, seriez vous tendre?

Seriez vous pour le plus amoureux?

 

Autre                                                           1692                                          [410]

Sur l’air………

A Madame la Comtesse de Portland.

 

Belle Comtesse, l’honneur de l’Angleterre;

Vous me traittez avec trop de rigeur,

D’avoir quitté un Climat plein de guerre,

Pour la venir déclarer à mon coeur.

                                                                        Brunel.

 

Chanson                                                    1692                                          [411]

Sur l’air de Joconde.

 

Guillaume est un Roy vigilant,                     Prince d’Orange ou le Roy d’Angleterre.

Sa prudence est extrême;

Jamais sans verd on ne le prend;

Il voit tout par lui même.

Anglois de ce grand conquerant

Vous devez tout attendre;

Louis ne prend rien à present

Qu’il ne le voye prendre.

 

Il n’est Nassau, namur, ni mur,/ Ma foi Nassau Namur n’a mur,

N’y doublé Fort qui tienne;

Louis de son coup toujours seur,

Ordonne qu’on le prenne.

Luxembourg avec les François

Feront une barriere,

Que tu ne veux, et ne scaurois,

Franchir avec Baviere.

 

Il est fâcheux, on le scait bien,

Pour des guerriers habiles,

De voir, sans entreprendre rien,

Forcer de telles villes;

Mais au moins, Nassau, tu scauras.

Comment il faut les prendre;                                                           [412]

Si Mons ne te suffisoit pas,

Namur doit te l’aprendre.

 

                  Au Roy d’Espagne.

Vivez toujours, Prince, en repos

Dans le coeur de l’Espagne.

Le grand Nassau vôtre héros

Le/ Se fait voir en champagne.

Fiers Espagnols de vos Estats

Ne soyez pas en peine,

Nassau ne l’ignorera pas

En cas qu’on vous les prenne.

 

                  Le Prince d’Orange aux Alliez.

Enfin amis sans contredit,

Je scais prendre une ville;

Mons et Namur m’en ont instruit.

Je vais en prendre ille,

Je vous promets que dans un an

Ma troupe formidable

Se montrera prés de Dinant,

Si Dieu m’est favorable.

 

Chanson                                                    1692                                          [413]

Sur l’air de la Tambonne.

Sur Monsieur le Prince de Condé.

 

Sortez donc Prince;

Nos Provinces

Ont besoin de vos bras;

Montrez que vous êtes Prince,

Ou Enfant de treize mois.

 

Autre                                                           1692                                          [414]

Sur l’air: Quand Iris prend plaisir à boire.

Sur le Prince d’Orange.

 

Quand Nassau partit d’Angleterre,

Il dit qu’au bruit de son Tonnerre,

Trembleroient la Terre & les Cieux;

Mais Louis le Grand à bien sceu le confondre,

Sur Mons* faisant briller ses yeux;                             *ville.

Il a constraint cet audacieux

De regagner le Port de Londres.

 

Sonnet                                                        1692                                          [415]

Sur la Reduction de Namur.

 

Namur ville autant d’importance

Qu’il en soit dans les Pays bas;

Aprés Mons passe aussi le pas,

Et subit le jour de la France.

 

Un Prince nous donne espérance

D’un secours qu’il ne tente pas,

Et souffre avec cent mille bras

Qu’on capitule en sa presence.

 

C’est donc pour en être témoin

Qu’il vient vite et de si loin

Avec une escorte si grande.

 

Heureux aprés ce noble effort,

S’il peut avoir un Passeport

Pour s’en retourner en Hollande.

 

Complainte                                             1692                                          [416]

de la garnison de Namur.

Sur l’air des Ennuyeux.

 

Louis, disoit on, êtoit vieux,

Ce héros n’aimoit plus la guerre;

Nous ne devions plus en ces lieux

Entendre gronder son tonnerre;

Mons en fut le premier témoin;

Ma foy Louis ne vieillit point.

 

Nous l’avons veu de nos remparts

A la teste de ses Armeés

De la présence de ce Mars,

Toutes nos troupes allarmeés,

Diront partout, s’il est besoin;

Ma foy Louis ne vieillit point.

 

Mes bons amis c’est fait de nous,

Et du reste de votre Flandre;

Nassau se moque de nous tous.

Barbançons songeone à nous rendre

Sauvons le moule du pourpoint,

Ma foy Louis ne vieillit point.

 

Grand Baviere si tu m’en crois,                                                                         [417]

Aprés ta honteuse champagne

Retourne pour jamais chez toy;

Va dire à toute l’Allemagne,

Pleurant ta goute dans un coing,

Ma foy Louis ne vieillit point.

 

Si tu ne prétens en ces lieux,

Que voir Louis, prendre des villes;

Guillaume tout seul en vaut deux.

Peu de gens y sont plus hábiles;

Sans craindre laisse lui ce soin,

Ma foy Louis ne vieillit point.

 

Chanson                                                    1692                                          [418]

Sur l’air…..

Sur Monsieur de Barbançon.

 

Tout mary qu’on met en Chanson,

S’en prend à tort à Barbançon,

Qui ne songe plus a médire:

Car sa femme l’a convaincu,

Qu’il est malhonneste d’escrire,

D’un pauvre Diable de cocu.

 

Chanson                                                    1692                                          [419]

Sur l’air du Menuet de Furstemberg.

A Madame la Comtesse de Saint Geran.

 

Voicy le tems adorable Silvie;                      le printemps

Voicy le tems d’escouter les Amans;

Le Rossignol jour et nuit y convie;

Tout est amour dans nos bois, dans nos champs.

Voicy les tems adorable Silvie,

Voicy le tems d’escouter les amans.

 

Ah! quel plaisir sur la verte prairie,

De soulager ses amoureux tourmens

Voicy le tems etc.

 

Autre                                                           1692                                          [420]

Sur l’air des Ennuyeux

Remerciement pour une Chaise de commodité, construite aux Dépens de 3. personnes. par Coulanges.

 

Grace à Madame le Coigneux (1)

Ma Chaise est bonne et bien garnie;

Grace à son Courin généreux (2).

De gallons elle est enrichie,

Lamoignon (3) s’est mise en grands frais

En velours, à trois quartiers prés.

 

De velours passablement neuf,

Trois quartiers achevoient l’affaire,

Gaster sa Tarte pour un oeuf;

Voila ce qu’elle vient de faire,

L’on en eût doublé le dossier.

Et j’ay besoin du Tapissier.

 

(1)   La Presidente le Coigneux de la maison de Navailles.

(2)   Le Duc de Lauzun.

(3)   Madame de Lamoignon.

 

Autre                                                           1692                                          [421]

Sur l’air de Grizelidis.

Pour le Pere Bourdalouë qui preschoit à Saint Cheron parroisse de Basville, le jour de la feste du Saint.

 

C’est aujourd’huy la feste

La feste du Patron;

Tout le monde s’apreste

Pour entendre un sermón

Des plus exquis;

Qui dira que sans teste,

Dieu receût Saint Cheron,

                  En Paradis.

 

                  par Coulanges.

 

Sur Monsieur de Coulanges         1692                                          [422]

par Monsieur de Nevers; à Saint Martin à la fin de 9.bre 1692.

 

                  Jamais on ne s’en passera,

On veut Coulanges aux champs, on le veut à la ville,

A Saint Martin, à Meudon, à Basville;

                  On se l’arrache enfin,

                  Et c’est à qui l’aura.

 

Chanson                                                    1692                                          [423]

Sur l’air Dormez Roulette.

Entretien du Prince et de la Princesse d’Orange, aprés le Siége de Namur; par le Chevalier de Rochefort.

 

Vous paroissez chagrin.

Oh! qu'avez vous Guillaume?

Ma femme je n’ay rien.

Comment va mon Royaume?

Fort bien Guillaume.

Et vous, comment vous va?

Passablement bien ma femme; mais j’ay mal a l’Estomach.

 

Vous vous fatiguez trop,

Conservez vous de grace;

Mais dites moy un mot

De l’importante place.

Le Roy de France enfin apris Namur,

Mais qu’il fera de depense pour en réparer les murs.

 

Comment avez vous pû

Voir prendre cette ville

Sans avoir combattu?

Ce trait n’est pas habile;

Le grand Bavieres differoit de jour en jour                              [424]

D’outrepasse la Riviere pour aller à Luxembourg.

 

N’estoit-ce pas à vous,

Comme Roy d’Angleterre,/ Comme Roy d’importance,

De commander à tous

De faire diligence?

Pour aller battre ce Luxembourg si méchant,

Ou de le faire combattremême sans y être present.

 

C’estoit bien mon dessein;

Mais je n’ay pû le faire;

Car rien n’est plus mal sain

Pour moy, qu’une Riviere;

J’avois mon âne qui m’incommodoit bien fort,

Et avec cela, ma femme, je n’estois pas le plus fort.

 

Que faire maintenant

Pour vôtre renommeé?

Allez prendre Dinant

Avec vôtre Armeé.

Le Roy de France à Versailles est de retour.

Profités de son absence pour surprendre Luxembourg.

 

Ma femme, croyés vous

Que cela soit facile?

Nous avons contre nous                                                                                        [425]

Un Général habile.

Luxembourg veille, .. rien n’eschape à son esprit,

Et pendant que tout sommeil, partout des Ordres il escrit/ il observe l’ennemi.

 

Vous qui passés partout

Pour un grand politique;

Faites quelque grand coup,

Qui lui fasse la nique.

Que faut il faire ma femme? dites le moy,

Je suis tout prest pour vous plaire, c’est vous qui m’aves fait Roy.

 

Il faut absolument

Que vous chassis de Flandres

Luxembourg, et ses gens,

Et les villes reprendre,

Que son grand maître a pris sur les Flamans.

Pour vous faire connoitre pour Guillaume le Grand.

 

Vous ne repondez rien,

Mon bon ami Guillaume/ Cher ami de mon ame;

Ne parlay-je pas bien

Comme un habile Dame?

Oui da ma femme, vous faites un beau projet,

Mais, qui sera l’habile homme qui le mettra en effet?

 

J’ay veu prendre Namur

J’en ay l’ame saisie;                                                             [426]

Mais dans peu à coup seur

Elle sera reprise,

Dans mon Royaume je retourne tout expres

Pour chercher les moyens comme j’en chasserai les François.

 

Avant de s’engager

En si grande entreprise,

Il faudroit vous purger.

Couchez vous sans remise,

Dormez Guillaume, ayez soin de/ prenez bien vôtre repos.

J’auray soin de vos Royaumes, ayez soin de vôtre peau.

 

Réveillez vous Nassau,

Prenez vîte un Clistere,

En voicy un tout chaud

Que tient l’Apoticaire;

Ça le derriere, tournez vous bien comme il faut,

C’est icy, non pas non pas en guerre, qu’il vous faut tourner le dos.

 

Que me faites vous donc,

Monsieur l’Apoticaire?

Je vous mets le Canon;

Sire, laissez moy faire;

Quelle misere, je crois que je suis perdu.

Quoi! jusqu’en Angleterre j’auray le canon au cu?

 

                                                                        1692                                          [427]

Complainte du Prince d’Orange à la Flandres et aux Alliez, après la Prise de Namur 1692.

Sur l’air de la Plainte de Priam, dans l’Opera d’Achille.

 

                  Le Prince d’Orange.

Restes infortunés des villes de la Flandres;

Allemans, Espagnols, et vous pauvres Flamans.

Suspendez vos regrets, écoutés mes sermens.

Je jure d’obliger la France de tout rendre.

                  La Flandres.

Ne songeons qu’a fléchir le coeur

De ce terrible vainqueur.

                  Le Prince d’Orange.

Vous voyez Ligue deplorable,

Un Roy qui fut longtems le plus puissant des Rois,

C’est ce même Nassau qui mettra sous vos Loix,

Du plus grand des héros, l’Empire redoutable:

C’est moy que le dernier de mes fameux exploits

Vient de rendre si formidable

A tous les vaisseaux des François…………………. Pose

 

La perte de Namur est un coup tres funeste;

Mais ma valeur vous la rendra.

Ma douleur chés les morts plûtôt m’emportera,                                 [428]

Que de ne pas deffendre au moins ce qui vous reste.

Vous le scavez, vous que j’ateste?

Combien j’ay fait d’efforts pour secourir Namur,

On vous a pris cette ville importante,

Et pour comble d’horreur, ma Majesté présente:

Mais dans peu vous verrez à quel point je suis seur

De vous faire rentrer triumphant dans Namur.

Sitôt que vous serez rentré dans cette Place,

Je souhaite, je veux, et j’entens que l’on fasse

Eriger en mon nom un pompeux monument.

Ce sera pour servir de Temple à vôtre gloire,

Puisque tout l’avenir avec étonnement

Y verra quelque jour cette grande victoire.

                  La Flandres.

Que pourrois-je espérer d’un si faible secours?

Quand je vois tous les jours

Quelle est vôtre impuissance?

Je méprise tous vos discours;

Que pouvez vous, helas! contre le Roy de France?

Laissez moy de Louis implorer la bonté;

A mes soupirs il sera favorable.

N’augmentés pas l’excés de mon adversité

En le rendant inexorable.

 

Chanson                                                    1692                                          [429]

Sur l’air: Je ne scaurois.

 

L’Electeur venant de boire,                           de Bavieres.

Dit à Nassau l’autre jour.

Courons vîte à la victoire

Vengeons nous de Luxembourg.

                  Je ne scaurois.

Je risquerois trop ma gloire,

                  J’en mourrois.

 

Mais reprit il, sans rien faire,

Verrons nous prendre à nos yeux

Le rempart de la Frontiere?

Croyez moi vengeons nous mieux.

                  Je ne scaurois

Du moins passons la Riviere,

                  J’en mourrois,

 

Craignez vous cet adversaire,

Luy repartit l’Electeur?

Je prens mon humeur guerriere.

Quittez, quittez vôtre peur,

                  Je ne scaurois,

Je crains bien moins le Tonnerre,

                  J’en mourrois.

 

Sitost répliqua Bavieres,                                                                     [430]

A quoi bon venir ici?

Retournons viste en arriere;

Et quittons ce país cy;

Je le voudrois; mais je ne scaurois,

S’il me prenoit par derriere

                  J’en mourrois.

 

Je vais donc boire et reboire,

Nassau, resvez nuit et jour.

J’abandonne la victoire

Au démon de Luxembourg;

Je le voudrois; mais je ne scaurois,

Quitter le vin pour la gloire,

                  J’en mourrois.

 

Autre                                                           1692                                          [431]

Sur l’air: Reveilles vous.

 

Nassau jure en sa conscience

Que si lui même n’avoit veu,

Prendre Namur en sa presence;

Non, il ne l’auroit jamais crû.

 

Autre                                                           1692                                          [432]

Sur l’air: Quand Iris prend plaisir.

 

Puisqu’enfin, Louis, que rien ne t’étonne

Assiege Namur en personne,

Il sera bientost sous nos Loix.

Ce Conquerant si chéri de Belonne,

Ce parfait model des Rois

A toujours réduit aux abois

                  Les Ennemis                         bis

                  De sa Couronne.

 

Autre                                                           1692                                          [433]

Sur l’air. Je veux qu’on sonne pour cloches tous les pots du Cabaret, ou Les sauts de Bordeaux.

 

Pourquoi grand Prince d’Orange.

As-tu sitost disparû?

Et que fais donc ta phalange

Dans les plaines de Fleurus?

En ce lieu, troupes superbes,

Nous ouvrimes vôtre flanc,

Et vous n’y voyez point d’herbes

Qui n’ait bû de vôtre sang.

 

Vos pareils en ce carnaje

Fuyoient comme des troupeaux.

Verra-ton vôtre courage

S’animer sur les Tombeaux,

Pour courir à leur vengeance?

Déployez tous vos Drapeaux

Où prendrez vous patience

Quand Louis prend vos Châteaux?

 

A cette digne Conqueste,

Borne, Louis, tes exploits

Qui contre ta seule teste

 

Réunissent tant de Rois;                                                                                       [434]

Donne la paix à la terre,

Et nul peuple désormais

Ne craindra plus que la guerre

Ensanglante ses guerets.

 

Autre                                                           1692                                          [435]

Sur l’air de la marche du Prince d’Orange.

 

Le Prince d’Orange Nassau,

A pris son vol un peu trop haut.

                  De cet Icare,

                  De ce barbare,

De cet Icare la cire fond

Qu’on va voir Bellorophond

Luy creuser un gouffre profond.

 

On dit qu’on a veu dans Paris,

Le Prince d’Orange endormi

                  Courir la poste,

                  Dans une hoste,

Courir la poste sur un Cochon.

                  Madelon, ce dit on,

A veu ce grand Champion

Qui venoit assiéger Dijon.

 

Autre                                                           1692                                          [436]

Sur l’air: Moy.

 

Sur Barbezieux ait eu l’art de me (1) plaire,

M’en dois-je faire une grande affaire?

                                    Si

Maman (2) baisoit bien le pere,

J’ay droit de baiser le fils.

 

(1)   Madame de Blansac fille de la Mareschalle de Rochefort.

(2)   La Mareschalle de Rochefort.

 

Autre                                                           1692                                          [437]

Sur l’air: Les Oiseaux vivent sans contrainte.

Sur la Comtesse de Vienne (la Vieuville)

 

Chez la Vienne on vit sans contrainte,

On y f…… sans crainte;

                  L’époux est doux,

Tout y rit, tout y cherche à plaire,

Nous pouvons en être jaloux.

Si l’esprit ne s’y trouve guere,

                  En amour ils sont tous,

                  Moins bestes que nous.                 bis

 

Autre                                                           1692                                          [438]

Sur l’air de Mais

Sur la même personne que la précédente.

 

Qu’est devenu le sceau de porcelaine,

Où tu faisois refraichir ta bedaine?

                                    Mais

                  S’il est dans ton C…..la Vienne

                                    Il n’en reviendra jamais.

 

Un Colonel a pris martel en teste,

D’une Comtesse il se fait grande feste;

                                    Mais,

                  C’est sa premier conqueste,

                  Ne le trouvons pas mauvais.

 

Chanson                                                    1692                                          [439]

Sur l’air de la Sarabande de Lully.

Réponse de la des Chars à la Chanson précédente.

 

Vous me voyez telle qu’on ma dépeinte,

Je vous paroist toujours dans la contrainte;

Mais en particulier je fais la rage;

Est il quelque Nigaud que je n’engage?

                  Tout est receu chez moy,

                  Vous scavez pourquoi.

 

Autre                                                           1692                                          [440]

Sur l’air….

Monsieur le Prince (de Condé) fit cette Chanson à Chantilly lorsque nôtre Flotte fut battue par les Anglois & Hollandois, au Combat de la Hogueen 1692.

 

Tout est en feu sur la terre et l’Onde,

Tandis qu’en paix nous venons icy;

Libres de soucis de l’autre monde,

Gueris des erreurs de celui cy.

Tout est en feu sur la terre & l’Onde

Tandis qu’en paix nous venons icy.

 

Chanson                                                    1692                                          [441]

Sur l’air de l’Ouverture du grand Ballet, ou Marais beau séjour de la réjoüissance.

 

L’on voit dans ces lieux la Reine (1) des Danseuses;/ Icy vous voyez la Reine des Danseuses

                  L’on dit qu’elle est cagneuse,

                  Plus méchante qu’un lutin,

                  Plus séche qu’un sapin;

                  Avec son long menton,

Sa bouche est pleine de tampons,

                  Ses Levres de vermillons;

                  Ses soucies qui se touchent

                  De noir ont plus d’une couche,

                                    Et son cu

Vient du Palais, et ne vaut qu’un écu.

                  Son Esprit estun Roman,

                  Qu’un sot (2) trouve charmant;

La belle vous paroist farouche,

                  Elle ne l’est nullement.

 

(1)   La Desehart Chanteuse et Danseuse à l’Opéra.

(2)   Beaubour Receveur general des Finances.

 

Autre                                                           1692                                          [442]

Sur l’air: Ma mere mariez moy.

 

Que la guerre est un metier

Qui commence à m’ennuyer;

Condé, Turenne aux enfers,

Et pour Général n’avoir que Bouflers.

Condé, Turenne aux Enfers,

Tout ira bien de travers.

 

Chanson                                                    1692                                          [443]

Sur l’air: Laire la, laire la laire.

 

Namur tout entier est pris,

Dont Guillaume est bien surprise

Comme l’est la Ligue entire

Laire la, laire lanlaire,

Laire la, laire lanla.

 

Guillaume aux gens de sa cour,

Dit parlant de Luxembourg;

Je suis seur de le défaire.

Laire la etc.

 

Alors un de ses Dragons,

Lui dit ce sera comme à Mons.

Où l’on fir le cry derriere.

Laire la etc.

 

Aprés tant de Campemens,

Et de si grands mouvemens,

Faire de l’eau toute claire.

Laire la etc.

 

Guillaume tout interdit

A ce Dragon répondit,

C’est la faute de Bavieres,                                                                 [444]

Laire la etc.

 

De crainte d’avoir des coups.

Mon Prince retirons nous;

Allons boire à Londre de la biere;

Laire la etc.

 

Chanson                                                    1692                                          [445]

Sur l’air de Joconde.

A Madame la Princesse d’Enrichemont lors de sa 1re. Entreé dans sa Principauté, Ses vassaux lui ayant fait fraper une Médaille en 1692.

 

Les habitans d’Enrichemont

Pour vous marquer leur zele,

Inventent chaque jour, dit on,

Quelque feste nouvelle.

Princesse parmi les plaisirs,

Que fait vôtre présence;

Songez quelque fois aux soupirs,

Qu’on pousse en vôtre absence.

 

Lorsque vos sujets vos vassaux

Viennent vous rendre hommage,

Et que sur de brillans métaux,

Ils gravent vôtre Image.

Souvenez vous que ces honneurs,

Ne sont rien qu’en modele,

Et que dans le fonds de nos coeurs,

Elle est cent fois plus belle.

 

Autre                                                           1692                                          [446]

Sur l’air…..

 

A Courson je trouvai la Dame en couche,

Laquelle êtoit de repos sur son lit,

Son travail fut pourtant petit;

Du Ciel ayant obtenu une bouche

Propre a les mettre au monde a petit bruit.

 

C’est le talent de toute sa famille

Les Nigots, n’en use pas autrement;

Leurs enfans sortent aisément,

Et l’on n’en peut douter dans cette ville,               Auxerre

Qui les air fait jamais si brusquement.

 

La Marquise de Courson est fille de Nigot qui avoit les Coches d’Auxerre et Secretaire du Roy. Elle êtoit accoucheé sans sage femme, en moins d’une demie heure. Elle venta toujours ce talent, disant que ses soeurs et elle accouchoient toujours sans peine.

 

Chanson                                                    1692                                          [447]

Sur l’air des folies d’Espagne.

Sur la prise de Namur.

 

Grand Nassau, redoutable Baviere,

Grand Valdeck, vigoureux Brandebourg.

Gardez vous de passer la Riviere,

Pour ne pas rencontrer Luxembourg.

 

La voila cette imprenable ville,

Qui se rend au plus puissant des Rois,

Et Nassau recule en homme habile,

Pour pouvoir s’en fuir une autre fois.

 

Quant à vous Prince prudent et sage,

Gouverneur depuis quelques momens.

Rendez grace au Roy qui vous degage

Du grand pois de ce gouvernement.

 

Autre                                                           1692                                          [448]

Sur l’air: En Janvier jusqu’en avril. ou du brave Comte de Tallard, ou des Rochellois.

 

En Janvier jusqu’en Avril,

Sans craindre danger ni péril.

Luxembourg affamé de gloire

Forme de genereux desseins,

Dont il a perdu la mémoire,

Depuis May jusqu’ à la Toussaint.

 

Autre                                                           1692                                          [449]

Sur l’air Tranquilles coeurs.

Sur le Mariage du Marquis de Bellefonds. (Gigault)

 

Monsieur Gigault préparez vous

Au Saint devoir du mariage;

Vous allez devenir époux,

Faites bien vôtre personnage.

Contentés de Fanchon les secrets apetits,

Elle vous met au pis.

 

Baisés baisés si vous pouvez

Jusques au lever de l’aurore;

Quand Fanchon dira c’est assez,

Croyez qu’elle en demande encore.

Toujours au cabaret la vérité se dit

Et jamais dans le lit.

 

N’allez pas vous entretenir

Des maux qui suivent l’himeneé,

Vous pourriez perdre le plaisir,

De vôtre plus belle journeé.

Jouissez de vôtre heureux destin,

Repentez vous demain.

 

Autre                                                           1692                                          [450]

Sur l’air de Jean de vert.

Sur Monsieur de Damas Seigneur de Cormaillon qui avoir épousé Madame la Présidente Barentin.

 

Vôtre etoile cher Cormaillon,

N’est pas des plus commune;

Sans crainte d’être Cornaillon,

Vous avez fait fortune

Vous ne serez cocu ny gueux,

N’est-ce pas être plus heureux

que Jean de vert?

 

Triolets                                                                        1692                                          [451]

Sur la Signature du Formulaire.

 

Il est vrai, car il est moulé

Qu’il faut signer le Formulaire,

En vain on a tant reculé,

Il est vrai car il est moulé

Janseniste soit apellé.

Celui qui ne le voudra faire;

Il est vrai, car il est moulé,

Il faut signer le Formulaire.

 

C’est être hérétique de Cour,

Que de refuser de souscrire.

Ce fait est clair comme le jour,

C’est être hérétique de Cour,

Que de refuser de souscrire.

 

En conservant l’humilité

Je me conserve ma prébende,

Et je trouve ma seureté

En conservant l’humilité.

Ȏ heureuse facilité!

De signer tout ce qu’on demande;                                               [452]

En conservant l’humilité

Je me conserve ma Prebende.

 

Martin Steyaert travaille en vain

A faire triompher Moline,

Pour oppose saint Augustin

Martin Steyaert travaille en vain.

Car de cet Auteur tout divin

On defend trop bien la doctrine

Martin Stryaert travaille en vain

A faire triompher Moline.

 

Chanson                                                    1692                                          [453]

Sur l’air des Rochelois.

Sur le Mareschal de Luxembourg. A l’occasion de la Lettre escrite au Roy par ce Mareschal apres le combat de Steenkerke.

 

Voulez vous brave Luxembourg,

Scavoir ce qu’on dit à la Cour,

De vôtre derniere Bataille?                           de Steinkerke.

Chacun y publie hautement

Que vous n’avez fait rien qui vaille,

Non de coeur, mais de Jugement.

 

Quoique disent les Courtisans,

Vôtre Lettre à ses partisans.

Elle est escrite par merveille;

Mais il en falloit sans façon,

N’en déplaise à Monsieur Abeille             son secretaire.

Retrancherle joly garcon (1).

 

(1)   en parlant du Marquis de Rochefort Colonel de Bourbonnois.

 

Autre                                                           1692                                          [454]

Sur l’air de l’Echelle du Temple.

Expédition projetteé pour l’Angelterre.

 

Le dessein êtoit beau

D’aller établir de nouveau

Dans le Royaume Britanique,

Jacques l’Eglise, et les Couvens

Avec un pouvoir despotique;

Mais on a compté sans les vents.

 

Autre                                                           1692                                          [455]

Sur l’air de l’échelle du Temple.

Balet proposé pout la leveé du Siege de Namur.

 

Le Prince d’Orange enragé

D’aprendre Namur assiegé;

Harangue sa nombreuse Armeé

Pour la disposer au Combat;

Mais ses feux tournant en fumeé,

Ainsi qu’ à Mons n’a pris qu’un rat.

 

Il avoit promis aux Francois

Un ballet au son des hautbois,

Qui pour repondre à son afiche,

Lui laisserent un beau terrain,

Et comme il danse en écrévisse,

On ne peut lui donner la main.

 

Quoi que le parti fut égal,

Louis eut tout lhonneur du bal;

Valdeck et le Duc de Bavieres

Craignant la danse de Fleurus,

Leur courante en fut plus légere

En sorte qu’on ne les vit plus.

 

A la barbe de Barbençon,                                                                    [456]

Le Château dansa tout de bon,

On ne sortit point de Cadence.

Ath, Mastrick et Charleroy,

A leur rang entreront en danse.

Ostende & Gand tremblent d’effroy.

 

Bavieres est trop homme d’honneur,

Orenge en creve dans le coeur

Il vouloir envahir la Flandres;

Et comme il ny pût réussir

Il nous la regardera prendre

Pour se vanger avec plaisir.

 

Chanson                                                    1692                                          [457]

Sur l’air….

Sur la Prise de Namur.

 

Le Stathouder des Estats,

Est, dit on, des plus habiles;

C’est un grand preneur de villes,

Un grand donneur de Combats;

Mais Louis sous sa puissance

Met Namur & son Château;

Et le fait en la presence

De ce valeureux Nassau.

 

Autre                                                           1692                                          [458]

Sur l’air: Ouy je le dis et le repete.

l'Espagnol aux Alliez.

 

Bien qu’à notre domage,

Vous ayex eu de l’avantage,

Sur quelques vaisseaux des François;

Avouez que depuis la Guerre

Ils n’ont perdu qu’un peu de bois,

Et que je perds beaucoup de Terre.

 

Chanson                                                    1692                                          [459]

Sur l’air. Un Chapeau de paille.

 

Sur la signature du Formulaire que l’on commençoit a introdure dans les Pays bas. Imitation de celle faite lors de la signature du Formulaire en France. On la trouvera parmi les Ouvrages de Monsieur de Coulanges.

 

Ils sont perdus les pauvres Jansenistes,

                  L’on n’en parlera plus;

Nous triomphons nous autres Molinistes,

                  Nous les avons vaincus;

Sans alleguer ny Peres, ny Conciles,

                  Nous sommes habiles nous.       bis

 

En son Colege aux gens de robe noire,

                  La pluspart bons enfans;

Monsieur Steyaert enflé de vaine gloire;                                 Steyaert Professeur a Louvain

                  Crioit en ménaçant,

Vous signerez parbleu le Formulaire

                  J’en fais mon affaire moy.             bis

 

Le grand Steyaert, s’etant mis en voyage

                  Pour tromper les Prelats;

Voyant l’effet de sa pieuse rage,

                  Chantoit aux Prélats,                                                           [460]

Je suis venu, j’ay veu, J’ay mis en fuite,

                  Je fais le Jesuite moy,

                  Je fais le Jesuite.

 

Chanson                                                    1692                                          [461]

Sur l’air de Joconde.

 

Sur le triomphe de l’amour

                  Disent les Jansénistes,

N’oubliez le Pere Bouhours,

                  La gloire des Jesuites;

Autrefois on les accusoit

                  Du vice d’Italie;

Mais la dévote qu’il aimoit,

                  Les Peres justifie.

 

En lui faisant un bel enfant,

                  Ne croyez pas critiques

Qu’il ait fair un peché si grand;

                  Il craint Dieu et s’en pique;

Mais quand sans songer au Seigneur,

                  On cede à a nature,

L’eportement d’un tendre coeur

                  Ne rend point l’ame impure.

 

Autre                                                           1692                                          [462]

Sur ….. de Nangis, à présent la Comtesse de Blanzac (la Rochefoucault) fille de la Mareschale de Rochefort.

 

Nangis, vôtre amant est ben las

De baiser vos maigres appas;

Munissez vous d’un plus fidele,

Vôtre bon coeur/ cocu le veut fort bien;

Mais surtout soufflez la Chandelle

Que la grand maman n’envoye rien.

 

Chanson                                                    1692                                          [463]

Sur l’air des Rochelois.

Sur le Combat de Stenkerke.

 

Luxembourg fait en se jouant,

Comme Cezar en s’apliquant,

Ses impromptus vallent des veilles,

Eh si Nassau ne l’eut surpris,

L’on n’auroit point veu de merveilles

Qui n’ont d’exemple que chez luy.

 

Réponse

 

Taisez vous censeurs indiscrets

Gens comme lui sont toujours prêts;

S’il dort souvent, c’est pour mistere,

Et pour tromper son Ennemy,

Qui n’auroit point tenté d’affaire

S’il n’eût crû le prendre endormi.

 

Autre                                                           1692                                          [464]

Sur l’air ………….

 

Le Chevalier de Mone

Montre à la Bunelay

Un v….. long comme une aune,

Large et dur comme un ais;

Mais il ne la f….. pas en C…..

Pour plaire à la Cologon.

 

Elle a le C….. trop large

Pour placer ce gros v…..

Son v…. est à la marge

Qui pleure de dépit;

Mais il est si prés du C…..

Qu’il croit être f…..tu.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Recueil

de

Chansons,

Vaudevilles, Sonnets,

Epigrammes, Epitaphes

Et autres vers

Satiriques & Historiques

avec des Remarques curieuses

Années 1687 à 1692.

 

Vol XXVI.

 

Chanson                                                    1687                                          [1]

Sur l’Air de Joconde.

Le Seigneur Lachau-Montauban de la Maison de la Tour-Gouvernet, et Brigadier des Armées du Roy, et le Seigneur de la Roche sur Buys, se battirent à coups de poings ayant leur épée au costé.

 

L’attente de nôtre grand Roy

                  N’a pas êté trompée,

Quand il fit la severe Loy

                  Contre les gens d’éspee!

On ne se bat plus à la Cour

                  Que les mains dans la poche.

Immobile comme une Tour,

                  Et froid comme une Roche.

 

Autre                                                           1687                                          [2]

Sur l’air: Laire la lair lan laire.

 

Belle Mouchy  si vos appas

Ne font pas un plus grand fracas,

Que le Canon de vôtre pere,

Laire la, laire lan l’aire,

Laire la, laire lan la.

 

Je lui conseille en bon amy,

D’aller se retirer chez luy;

Et vous en quelque monastere.

Laire la etc.

 

Chanson                                                    1687                                          [3]

Sur l’air: Helas brunette mes amours.

Monsieur de Saint Gilles Mousquetaire, à Mademoiselle de Mouchy.

 

Ménagez un peu vos regars,

On ne peut s’en deffendre.

Vous allez voir de toutes parts

Cent malheureux se pendre.

Helas! sans un petit espoir

J’aurois déja fait mon devoir.

 

Mais j’ose espérer, mon feu,

Où le respect éclate

Vous touchera peut être un peu;

C’est l’espoir qui me flatte.

Hélas! sans ce charmant espoir,

J’aurois déja fait mon devoir.

 

Mourir d’amour à vos genoux;

Ȏ sort digne d’envie!

Vivre amoureux auprés de vous,

C’est une douce vie:

Helas! donnez moi cet espoir

Il me seroit doux de l’avoir.

 

Réponse                                                                                                                                              [4]

 

Mousquetaire mon pauvre enfant,

Oste de ta cervelle

Un dessein extravagant.

Crois un ami fidelle;

Hazarde moins sur ton espoir,

Je te dispense d’en avoir.                                                                                                      

 

Désespoir

 

Mourons je ne puis faire mieux.

Ȏ mort viens à mon aide,

Unique espoir des malheureux.

C’est à toi que je cede.

Helas! quand on n’a plus d’espoir,

Il faut mourir, c’est un devoir.

 

Epitaphe.

 

Malgré ces tendres sentimens.

On réduit à se pendre

Un modele des vrais amans;

Cy gist sa triste cendre;

Honteux d’avoir pris trop d’espoir

Il descend au sombre manoir.

 

Chanson                                                    1687                                          [5]

Sur l’air………….

Sur Monsieur du Cambout.

 

Par charité chrétienne

Donnez chasses à Cambout,

De toilles sont les siennes,

Que tous les soirs, la boiteuse Julienne

Avec du fil lui recout.

 

Autre                                                           1687                                          [6]

Sur l’air Si Bourdaloue

Pour briller sur la scêne,

Le pauvre Capistron

A pris pour son Mêcene

Un Bougeois de Vernon.                                   L’Abbé de Chaulieu

 

Chanson                                                    1687                                          [7]

Sur l’air: Tranquilles coeurs.

 

Laide guenon qui court partout,

Crois-tu te faire aimer par force?

En horreur l’amour se résout

Dés qu’on entend nommer la Force.

Si tu veux des amans qui chérissent tes fers

Cherchent-les aux Enfers.

 

Laide guenon quand tu te vois

Reconnois que tu vois le Diable.

Je te le jure sur ma foy

Que tu est au lit détestable.

Va t’en donc chez Jeanot avec Furstemberg

Y passer tout l’hyver.

 

Cher Chevalier, que faites vous

De cette Carcasse infectée?

Tu te perds lorque tu la f….

Elle est de vérolle empestée.

Helas! tu fais bien voir par tes feux odieux

Que l’amour est sans yeux.

 

Autre                                                           1687                                          [8]

Sur l’air de Mais.

 

Prés de Conflans il s’est donné Bataille, (1)

Le Général c’est le Duc de Noailles;

                  Mais

Pour peu que l’affaire vaille,

Il n’en tastera jamais.

 

(1) Conflans sur oise, ou plustost au camp de la plaine Douelle où Commandoit le Duc de Noailles, depuis Marechal de France.

 

Autre                                                           1687                                          [9]

Sur l’air du branle de Metz.

Monsieur de Saint Gilles Mousquetaire à Mademoiselle Marion.

 

Dans une belle assemblée;

J’estois assis prés d’Iris,

Lorsque mon coeur fut épris,

De sa belle jouë enflée;

Faut il qu’une fluction

Cause tant de passion?

 

Son beau teint n’estoit pas blanc,

Son oeil êtoit enchanté,

Sa bouche un peu de côté

Avoit une grace extrême.

Faut il qu’une fluction

Cause tant de passion?

 

Vénus êtoit potelée,

Les amours êtoient jouflus;

Pour moi je n’aimerai plus

Qu’une beauté boursouflée.

Faut il qu’une fluction

Cause tant de passion?

 

Autre                                                           1687                                          [10]

Sur l’air de Joconde.

Sur Monsieur le Tellier Archevesque de Reims.

 

Cet Archevesque aux larges reins,

Si connu dans la France

Pour l’immensité de ses biens,

Et par son arrogance;

Voyant que Madame vouloit                        d’Orleans.

Lui joüer une piéce,

S’en console, et baise en secret

La Belinghen sa Niece.

 

Chanson                                                    1687                                          [11]

Sur l’air de Joconde.

 

Corrompre une fille de bien

                  D’une fine maniere,

Et du prochain prendre le bien,

                  Lubin le pourra faire;

Mais par l’ordre de son gardien,

                  Avaler de l’eau claire;

Faites la boire à vôtre chien

                  Lubin ne le peut faire.

 

Autre                                                           1687                                          [12]

Sur l’air: Laire la, laire lan laire.

Sur l’Ordre du Saint Esprit.

 

Les Peres ne nous ont point dit

Si le Pigeon du Saint Esprit,

Estoit Ramier, ou de voliere.

Laire la, laire lan laire;

Laire la laire lan la.

 

Chanson                                                    1687                                          [13]

Sur l’air: Toute l’Europe est sous les Armes.

Pour Mademoiselle de Chasteauneuf, contre le Seigneur de Chenevieres. son nom de famille est Masparo.

 

Nostre Seigneur est sous les Armes,

                  Il s’occupe soir & matin

A chasser dans les Bleds, a tirer au raisin,

Lorsqu’à servir le Roy chacun trouve des charmes;

                  Lui comme un grand guerrier,

                  Même des plus vaillans

A la Moisson fait tous les ans la guerre,

Pour faire voir à tous ses habitans

Qu’un Fusil à la main avec la Gibeciere,

Un Seigneur peur ruiner toute sa terre.

 

Autre                                                           1687                                          [14]

Sur l’air: C’est la pure vérité.

Sur le même que la précédente.

 

Masparo ce beau Seigneur,

Passe pour un grand Chasseur;

Ce n’est qu’une médisance.

On dit que son ignorance

A tirer sur le Gibier,

Lui donne mauvaise chance,

C’est la pure vérité.

 

On dit qu’il est la terreur

Du Perdreau qui meurt de peur;

Ce n’est qu’une médisance;

On dit qu’avec violence

Il tire aux épies de bled,

En abat grande abondance,

C’est la pure vérité.

 

On dit qu’il est protecteur,

De cinq soeurs filles d’honneur,

Ce n’est qu’une médisance.

On dit que sans conscience

Tous leurs Bleds il a gâté.

Dont il fera pénitence,                                                                          [15]

C’est la pure vérité.

 

On dit qu’il a résolu

De les fouëter a cul nud,

Ce n’est qu’une médisance;

On dit que sa véhemence

Leur fait beaucoup de pitié,

La justice est bonne en France,

C’est la pure vérité.

 

On dit que de son procez,

Il espere un bon succez,

Ce n’est qu’une médisance;

On dit qu’elles font dépence

Pour le faire condamner

Par une bonne sentence,

C’est la pure vérité.

 

Sa femme par son crédit

Tous ses témoins a séduit;

Ce n’est qu’une médisance.

Ils ont de la conscience,

Et beaucoup de probité,

Ont tout dit a l’audience,

C’est la pure vérité.

 

Chanson                                                    1687                                          [17]

Sur l’air de l’amour malade

 

N’avez vous point veu par la rüe

La Pardaillan sur une grüe?

                  En vertu gadin,

Avec un jupon de satin,

                  Dans le Faubourg.

Chacun s’est écrié, voici venir la mere d’amour;

                  Elle a la mine,

                  Cette divine,

D’aller droit à Luxembourg.

 

En croupe êtoit la Capviolle,

Portant la Cape à l’Espagnolle,

                  Et son violon;

De la grüe êtoit a l’arçon

                  Par ses attraits.

Ces enfans attirez faisant fort grand bruit,

                  Couroient aprés,

                  Dont de collere,

                  La belle mere,

Fesse la grüe aux Marais.

 

En arrivant prés le Calvaire,

La Chasteauroux fraiche et legere

                  Aparut soudain                                                                                          [18]

Tenant la Castagnette en main,

                  Un vieilleux

Pour la faire dancer jouoit volte et pavane des mieux

                  Cette Assemblée

                  Fut approuvée

Et réjouit fort les yeux.

 

Mongeron avec la Montagne

Etoient sur un Cheval d’Espagne,

                  Et la Vilvenart

Sur un petit poulain a part;

                  Dans ce moment

La grüe leve le cul et jette bien loin la Pardaillan,

                  Dont cette belle,

                  Dessoubs l’aisselle,

Se fit un trou en tombant.

 

Pour la Pardaillan je soûpire,

Helas! je suis sous son empire,

                  Depuis le moment,

Que je connus son enjouement;

                  Dans un valon

Contre tous assaillans, je soûtiens plus bouffy,

                  Qu’un ballon;

                  Que Capviolle,

                  Est une folle.

                  Avec son violon.

 

Adieu                                                           1687                                          [19]

de Madame la Princesse d’Orange.

Sonnet.

 

Va Prince généreux, où ton devoir t’apelle;

Je consens que tes yeux évitent ma douleur.

Je connois ta tendresse, et je crains pour ton coeur;

Pars viste, et va cueillir une gloire immortelle.

 

La Carriere où tu cours ne peut être plus belle,

Les Loix et les Autels implorent ta valeur;

S’il est beau de marcher sur les pas d’un vainqueur,

Regarde ton Autel, et suis ce beau modelle.

 

Mais si dans le combat tu peux, songer à moy,

Souviens toy des soupirs de la fille d’un Roy

Qui craint pour son époux qui tremble pour son pere.

 

Ménage donc tes jours où jay tant d’interrest,

Et détournant ton bras d’une teste si chere,

Laisse au Ciel tout le soin d’accomplir ses Arrests.

 

Chanson                                                    1687                                          [21]

Sur l’air du branle de Metz.

Par Monsieur de Saint Gilles, pour Madame ……. Landais.

 

La bergere qui m’enchante

Est toute pleine d’appas:

On dit qu’elle a pour les chats

Une amitié surprenante,

Et pour les tendres amans,

Peu de tendres sentimens.

 

Autrefois Vénus la belle,

Sensible aux voeux d’un amant,

Pour adoucir son tourment,

Changea sa chatte en donzelle;

Et moy je deviendrai fou,

Si je ne deviens matou.

 

N’est-ce pas un bien extrême

Pour un Chat bien enflamé,

D’etre tendrement aimé,

D’une bergere qu’il aime?

Pour moi je deviendrai fou

Si je ne deviens matou.

 

Dans ce nouveau personnage,                                                                          [22]

Je vivrois modestement;

Je ne serois point gourment;

Je n’irois point au fromage.

Je ne serois au logis

Redoutable qu’aux souris.

 

Avec une douce patte,

Je gratterois doucement;

Il est fâcheux en aimant,

D’egratigner quand on gratte,

Et les plus tendres amours

Ont la patte de velours.

 

Jamais d’une ardeur nouvelle

Mon coeur ne s’en flamera;

Ma bergere me sera

Toujours constante et fidelle;

Je perdrai plustost le jour

Que de perdre mon amour.

 

Si la moindre espérance,

Mon coeur ose se flatter;

Mais craignons de l’irriter,

Eviter ce qui l’offense;

Il vaut mieux lui faire voir

Qu’on peut aimer sans espoir.

 

Autre                                                           1687                                          [23]

Sur l’air: Il a battu son petit frere.

Sur Monsieur de Madaillan qui êut la teste cassée/ coupée pour avoir couché avec sa fille.

 

Se lassant des C… de sa race

Il leur fit faire volte face;

Puis descendant jusque aux garçons,

Baisant Masles comme Femelles,

Et tout cela chez les Gascons

Ne passe que pour bagatelle.

 

A Duc de la Feuillade                        1687                                          [24]

Mareschal de France

 

Hé! pourquoi diable le Feuillade,

Le plus fou de tous les esprits,

Avec sa place incommodeet maussade,

Fait il enrager tous Paris?

De tous côtez sa dépense inouye,

Fait que l’on s’en moque aujourd’huy:

Mais ce qui plus m’anime contre luy;

C’est qu’il ait renfermé le Roy dans sa folie.

 

Chanson                                                    1687                                          [25]

Sur l’air: Reveillez vous etc.

 

Quand la Mouchi fait l’agréable

Chez le beau fils de Perauté;

Est-ce pour manger à sa table?

Ou pour coucher à ses costez.

 

Chanson                                                    1687                                          [27]

Sur l’air des Trompettes du Carrousel.

Sur l’Opera d’Acis et Galathée.

les parolles dont de Monsieur Capistron, et la Musique de Monsieur Lully.

 

Ma foy vôtre Galathée

Et le Sot Berger Acis,

N’aprochent point de Persée*,                                     *opéra de Monsieur Lully joué en 1682.

Ny du vaillant Amadis*.                                                      *Opera id joué en 1684.

                  Capistron.

Laissés-là, la Chanson,

Vous aurez un affront,

Prenez un autre ton,

Ou bien sur vôtre front

Les Lauriers faneront.

 

Que veut dire Polipheme

Avec son Flageolet?

Quant ce géant dit qu’il aime;

Je crois qu’il me bout du lait.

                  Capistron.

Laissez là etc.

 

Scilla qui fait la soubrette,

Ne scait pas bien son métier,

Elle doit dans sa retraite,

Retenir ce Chaudronnier.                                                                   [28]

Capistron;

Laissez là etc.

 

Quand Comus dit que les festes,

Parlant à ses Compagnons,

Parmi vous soient toujours prestes.

Les prent-il pour des Oisons?

                  Capistron.

Laissés là etc.

 

Hé quoi! dans la passacaille

Où la Moreau doit charmer;

On ne voit que qu’on qui vaille,

Qu’on serrer, et qu’on s’armer.

                  Capistron etc.

 

Que dans l’ardeur qui le presse

Un amant est détesté

S’il refuse à sa maîtresse

Un moment de liberté.

                  Capistron etc.

 

Chanson                                                    1687                                          [29]

Sur l’air: Il fait tout ce qu’il deffend.

Couplets faits sur le mariage du Duc de Guiche, avec Mademoiselle de Noailles. Il ne fit rien à sa femme la nuit de ses noces.

 

Du Cap de bonne espérance

J’estois parti ce matin;

Pour allaer a joüissance;

Mais j’ay manqué le chemin.

La Mer d’amour est étrange.

Le vent à toute heure y change;

Cependant j’y fais toujours

Des voyages de long cours.

 

Quand sur le Golphe du tendre,

Je m’embarquay l’autre jour,

Dans peu je croyois me rendre

Dedans l’Isle de l’amour.

La Mer paroissoit tranquille,

Leur trajet court, et facile:

Mais sur Mer pour compter bien,

Il ne faut compter sur rien.

 

La surprise de l’Orage

Ayant fait baisser le Mast,

Jetta le triste équipage

Dans un terrible embarras;                                                               [30]

Je perdis la tramontane,

Mon vaisseau qui fit la cane,

Quoique le tems devint beau,

Ne put revenir sur l’eau.

 

J’avois un vent favorable,

Doublé le Cap de pudeur;

Et cet écueil redoutable

Qu’on apelle l’honneur,

Le Ciel êtoit sans nuage,

Et je touchois le rivage;

Mais le vent changea d’abord,

Et je fis naufrage au port.

 

Chanson                                                    1687                                          [31]

Sur l’air de Joconde.

Le Solitaire de Chaulnes, devenu homme du monde, c’est un jet d’eau qu’on apelloit de ce nom, parce qu’il êtoit dans un lieu écarté et brute, qui enfin est devenu un lieu délicieux, du consentement de Madame la Duchesse de Chaulnes qui s’y êtoit toujours opposée. par Coulanges.

 

A Chaulnes dans un lieu désert

                  S’etablit un hermite,

Dix ans durant, clos, et couvert;

                  Sous la terre il habite.

Maintenant, las de ce repos

Au monde il cherche à plaire.

N’est-ce pas là de nos dévotes

                  La conduite ordinaire?

 

La Duchesse dans ce moment

                  A l’hermite propice,

Loin d’improuver son changement,

                  Se rend sa bienfaitrice;

De ses nouveaux habits prend soin;

Luy fait faire la barbe,

Et donne quatre cens de foin (1)

Pour lui nourrit un Barbe. (2)

 

(1)   Elle abandonne un Pré qui raportait beaucoup de foin.

(2)   Augmentation d’un cheval pour faire aller la Machine qui éleve l’eau, et qui rend ce jet d’eau plus considérable.

 

Chanson                                                    1687                                          [33]

Sur l’air. Je suis encore trop jeunette etc.

A Madame la Duchesse de Chaulnes, qui par un brouillard épais alloit voir travailler ses Ouvriers à Chaulnes au mois de Novembre.

 

Madame au mois de Decembre,

                  Janvier, Fevrier, Mars,

Ainsi qu’au mois de Novembre.

N’allez point tant au brouillard;

                  Je ne scaurois.

Tenez vous dans votre chambre,

                  J’en mourrois.

 

                                                                        1687                                          [35]

Les derniers jours d’Appartemens, avant le départ du Roy, Monsieur le Grand Prieur (le Duc de Vendôme), causant avec le Duc de la Ferté, dans l’endroit de la Collation, aperçêut Madame de Bregy, et une autre beauté de son âge avec elle, qui venoient pour manger et ayant remarqué qu’elles se jettoient souvent sur des Fromages. Il dit au Duc qu’il alloit les coaglionner, et qu’il y auroit grand plaisir de voir ces vieilles avaller un pareil ragôut. Le Duc rit et trouva cela plaisant. Monsieur le Grand Prieur execute aussitôt son dessein, & cracha tant qu’il pût sur les petits Fromages. Dans ce moment Monseigneur passa qui s’aperçeut de ce qu’il venoit de faire et l’apella, lui disant que cela êtoit fort villain et infame, & que si le Roy scavait cela il le trouveroit fort mauvais. Quelques gens en remarquerent autant et le Roy le sceut. Estant asouper, ayant pris sa mine haute, et sévére, il dit, qu’il y avoit des gens assés hardis pour faire des insolences sur la Collation, et que s’il scavoit qui c’est, il en feroit un exemple, & se tournant du côté de Monseigneur, vous scavez qui c’est, dites le moi; Monseigneur se deffendit; mais le Roy lui ayant ordonné d’une maniere à ne lui oser désobéir. Il répondit qu’il avoit veu le Grand Prieur, et le Duc de la Ferté

 

                                                                                                                              [36]

qui êtoient ensemble, le Roy dit, c’est assez, quelqu’un qui entendit nommer le Duc de la Ferté, envoya au plus vite le chercher, et l’avertir de ce qui venoit de se passer. Comme le Roy sortit de table, il s’aprocha, et lui dit, Sire je suis bien malheureux d’avoir déplû en quelque chose à votre Majesté et aprés lui en avoir demandé pardon, je lui diray la chose comme elle est, et la conta comme elle s’etoit passée; Qu’il avoit tort de ne s’y être pas opposé; mais que l’idée de voir ces femmes faire un aussi méchant repas, l’avoit fait rire & consentir à ce que l’autre avoit proposé et exécuté. Le Roy lui répondit, je scavois la chose; mais soyez sage. Le Grand Prieur êtoit allé à Paris au sortir de l’Appartement, si bien que Monsieur le Duc de Vendosme se mit en devoir d’implorer la bonté du Roy; mais d’abord sa Majesté lui deffendit de lui en parler: Il revint le lendemain à la charge, & fit si bien que le Roy lui dit, qu’il vouloit bien à sa considération n’en pas faire un exemple tel qu’il méritoit; mais qu’il ne se presenta pas devant lui. Je ne crois pas que la chose soit encore accommodée.

Monsieur de Coulanges dinant ces jours passez avec Monsieur de Louvois, comme on lui aporta plusieurs choses que l’on avoit prises par ses ordres aux

                                                                                                                              [37]

Couriers, à qui il est deffendu de se charger que de Lettres mises dans le paquet, et non autrement. Entre plusieurs hardes confisquées, il se trouva une quaisse, Coulange, lui dit, au moins Monsieur je vous demande la Confiscation des Portraits, elle lui fut accordée. On ouvre la boëtte, il parût bien du cotton, et en si grande quantité que l’on crût d’abord que c’estoit pour ce moquer que l’on en avoit tant mis, à la fin on trouva une petite boëte dans laquelle êtoit un Portrait d’un homme frisé, et sous les Armes, Monsieur de Louvois lui donna. Dieu scait la joye! Le paquet êtoit adressé à Madame de Serre à l’hostel de …… rue de Condé. Il admire le Portrait, il s’en joue, il le montre partout, contant l’histoire, ayant dessein de le rendre à la Dame, & pour cet effet, aprés avoir confié cette avanture à bien des gens, il envoya chercher Madame de Serre, que l’on trouva jolie et fort bienfaite, et comme elle entendoit que l’on s’informoit d’elle, elle s’informa aussi soigneusement qui c’estoit; le Laquais ne lui voulut pas nommer son maître; mais lui dit un nom en l’air, qu’elle ne connût pas, et ajouta que son maître avoit à luy parler, elle lui donna heure pour le lendemain aprés diner. Coulanges au lieu d’y aller lui même y envoya son

                                                                                                                              [38]

Laquais avec la Boëte, en lui disant comme la chose êtoit arrivée, et que son maître s’etant trouvé à l’ouverture, s’en êtoit chargé pour avoir le plaisir de lui rendre. Mon Dieu que je lui suis obligé! elle ouvre, elle cherche, et trouve le Portrait, ses remercimens augmenterent, et l’envie de scavoir qui lui avoit rendu un si bon office; mais le Laquais qui avoit ordre de n’en rien faire fut fidelle, et dit seulement qu’il logeoit au marais. La Dame en dévélopant le portrait aperçêut des vers que Coulanges y avoit mis sur l’air de Joconde, elle les lêut, et les trouva fort jolis, et demanda s’ils êtoient de la facon de celuy qui lui faisoit une aussi agréable galanterie? le Laquais répondit que ouy; Elle les lêut, les relût, et les chanta: Il ne tiendra qu’à vous d’en faire autant, car les voicy.

                  Délivrez nous d’un Jugement,

                  Peut être téméraire.

                  Est-ce le Portrait d’un amant,

                  D’un époux, ou d’un frere?

                  Quel qu’il soit il a des attraits:

                  Vous êtes jeune belle Iris,

                  Cachez un peu mieux vos secrets,

                  La Poste est infidelle.

 

                                                                                                                              [39]

Hé mon Dieu! dit la Dame, est-ce que je n’auray point la jye de connoître un aussi honeste homme, et aussi spirituel? Je vous prie de bien dire à vôtre maître que j’ay une passion extrême de le connoître, et que je le conjure de me venir veoir, affin que j’aye le plaisir de le bien remercier moy meme, et comme je ne doute point quil ne m’accorde cette faveur et que je suis icy à 200. lieues de mon mary, et obsédée par un beau frere qu’il pourroit même trouver céans; Qu’il fasse come s’il y venoit voir un tableau, qu’il a apris que je voulois vendre. Cependant Monsieur de Coulanges, qui n’est aparemment pas si galand que la Dame le croit, ne s’est pas trouvé pressé de l’aller voir. Madame de Grignan & le Chtr de Grignan son beaufrere ayant sceu ce détail voulurent y ajouter quelque chose du leur. Le Chevalier fit le Couplet qui suit au nom de la Dame, et le fit écrire et cacheter bien proprement, et on le donna au Portier de Monsieur de Coulanges. Il est sur le même Air de Joconde

                  Ce Portrait n’est pas d’un amant,

                  D’un amy n’y d’un frere;

                  Corrigez vous d’un Jugement

 

                                                                                                                              [40]

Qui seroit téméraire;

                  Comme vous je scay que souvent

                  La Poste est infidelle;

                  Mais cela m’est indifferent

                  Je ne suis pas comme elle.

Monsieur de Coulanges revenant chez lui trouva cette réponse, et aprés s’en être diverti, on lui aprit le véritable lieu d’où elle venoit: voila en quel état est l’avanture; je ne crois pas qu’elle aille plus loin de sa part; mais d’autres gens ont envie d’y aller pour luy.

 

Chanson                                                    1687                                          [41]

Sur l’air: Cher amy que mon ame est ravie.

Pour Madame la Duchesse de Chaunes, aprés sa grande maladie en 1687.

 

Quel plaisir adorable Duchesse

De vous voir revenir en santé!

Scavez vous que vous avez êté

Au point de causer une extrême tristesse?

Mais enfin vous avez résisté.

Rions maintenant, beuvons, chantons sans cesse,

Et dansons au son des Chalumeaux,

Courantes et branles nouveaux.

                                                      par Coulanges.

 

Autre                                                           1687                                          [42]

Sur l’air de Joconde.

La colere du Capitaine du Château de Chaulnes, contre les Ouvriers qui ne venoient pas à l’heure marquée. par Coulanges.

 

Où sont donc tous ces ouvriers?

Ces coquins passent l’heure.

Où sont allez tous ces Chartiers?

Nôtre ouvrage demeure.

Dites pourquoi tardez vous tant?                                les voit venir.

Marchez vite canaille.

Madame est là qui vous attend (1)

Sur son Trosne de paille.

 

(1)   la Duchesse qui sur une Chaise de paille prend plaisir à voir travailler ses ouvriers.

 

Année 1688                                                                                                  [43]

 

Chanson                                                    1688                                          [45]

Sur l’air: Il fait tout ce qu’il deffend.

Sur LOUIS XIV.

 

Qu’à Marly le Roy s’occupe

Du soin de ses beaux Jardins,

Et qu’il soit toujours la dupe

Des Bigots et des Putains,

Sans Général, sans Ministre.

Dieux! quel avenir sinistre!          

Je me f….. de son destin,

Pourveu que j’aye du vin.

 

Autre                                                           1688                                          [46]

Sur le même Air.

 

Ah grands Dieux! sans ma vieillesse,

Que mon sort seroit heureux;

Je vois toute la jeunesse

Vouloir tout ce que je veux.

Et chacune, dit, vieux restre

Ne veux tu pas me le mettre:

Tout compté, tout rabatu,

Je suis toujours le f…..tu.

 

Autre                                                           1688                                          [47]

Sur le même Air.

Sur Monsieur le Prince de Conty.

 

Que Conty toujours murmure

De n’estre pas Général;

Qu’avec aigreur il censure

Ce qu’il feroit bien plus mal;

Qu’aux voeux de tout le Royaume,

Louis n’accorde Vendosme;                                            Vendosme le Duc.

Je me f…… de leur destin

Pourveu que j’aye du vin.

 

Autre                                                           1688                                          [48]

Sur Colasse, Musicien qui acheva l’Opera d’Achille, commencé par Lully.

 

                  Petit Colasse                                         Petit Colasse

Que ta musique a de grace.                           Ta musique nous glace

Ton opera plus qu’un autre plaît                                 J’aimerois mieux

Quelque grace                                      Faire chanter l’oublieux.

Que les Dieuz, Lully, te fasse,

Tes Airs charmand

Te feront monter d’un cran:

                  Petit Colosse etc.

 

Quoique tu fasse,

Tu n’aura jamais de grace

                  Dans tes récis.

Tu ne scais ce que tu dis;

                  Petit Colasse.

 

En vain Francine,

Sans aucun droit,

S’imaine par ses Concers,

Charmer tout l’univers.

                  Petit Colasse.

 

A la louange d’Innocent XI.          1688 (Décembre)              [49]

Pape. Il se nommoit avant son exaltation Benoît Odescalchi.

 

Pauperibus sua dat gratis, nec munera curat,

                  Curia Papalis, ut modo perspicimus,

Laus tua, non tua fraus, virtus non copia rerum,

                  Scandere te fecit, culmen ad eximium.

Conditio tua sit stabilis, nec tempore parvo

                  Vivere te faciat, hic Deus omnipotens.

 

Les mesmes Vers retournez, contre lui.

 

Omnipotens Deus, hic faciat te vivere,

                  Parvo tempare, nec stabilis sit tua conditio.

Eximium ad culmen, fecit te scandere,

                  Rerum copia, non virtus, fraus tua non tua laus,

Perspicimus modo, ut Papalis curia

                  Curat munera, nec gratis dat sua pauperibus.

 

Chanson                                                    1688                                          [50]

Sur l’air…..

 

Nos champs sont pleins de Generaux,

Qui s’en vont par mons et par vaux.

De Lauzan est déja parti

Ce grand homme de guerre,

Pour s’en aller tout conquerir

Avec le bon Roy d’Angleterre.

 

Chanson                                                    1688                                          [51]

Sur l’air…#

 

Quand Proserpine apercêut

La femme à Guillaume;                                                      Marie d’Angleterre

Aussitost la Dame crût

Perdre son Royaume;

Mais son noir mary Pluton;

Luy jurason grand juron.

On vaut mieux sous terre,

Que dans l’Angleterre.

 

Autre                                                           1688                                          [52]

Sur l’air: Dodo au secours de Guillemo.

 

Notre pauvre Prince impuissant

Devient fou faute d’argent,

Ne pouvant continuer la guerre

Contre tous les gros Milors Anglois

Luy disent tout d’une voix.

Reposez, faites un bon somme dodo,

Faites dodo Guillemo.

 

Abregé de l’Opéra d’Achille.       1688                                          [53]

Les parolles sont de Capistron, et la Musique de Colasse.

Sur l’air: Reveillez vous belle endormie.

Par Monsieur de Saint Gilles.

 

Or escoutez la noble histoire

De l’Opéra de Capistron;

Je veux asseurer sa mémoire

Par une immortelle Chanson.

 

Agamemnon, outrage Achile,

Qui dit, qu’il s’en repentira.

Il se promene dans une Isle;

Vénus lui donne l’Opéra.

 

Patrocle meurt, Hector l’assomme;

Certe, ce fut mal apropos;

Car on voyoit en ce jeune homme

Tous les sentimens d’un héros.

 

Achille en son humeur bouruë,

Chasse Vénus tres brusquement;

Il s’embarque, il combat, il tuë:

Hector descend au monument.

 

Le Roy Priam, sa bru, sa fille,

Ont tous trois le coeur bien serré;                                                [54]

Polixene est assez gentille,

Achille la trouve a son gré.

 

S’en est fait, ce héros l’adore,

Arcas en va dire deux mots;

Briscis croit qu’on l’aime encore,

Achille lui tourne le dos.

 

Cette Princesse m’embarasse;

Où couchera-t’elle ce soir?

Chez Agamemnon, plus de place;

Achille ne veut plus la voir.

 

Briscis est tres allarmée;

Junon lui montre les Enfers.

Les Diables font de la fumée;

La clarté revient dans les Airs.

 

Au premier bruit de quelque treve,

Les villageois s’en vont dansans,

Avant que la tréve s’acheve

Ils voudroient labourer les camps.

 

Polixene veut bien se rendre,

Andromaque a beau raisonner,

Et les Almanachs de Cassandre,

N’ont rien qui puisse l’estonner.                                                                     [55]

 

Tous les beaux Conseils qu’on lui donne,

Ne sont bons que pour l’enflamer:

Un coeur que le peril étonne,

N’est ma foy pas digne d’aimer.

 

Priam reçoit dans sa famille

L’invincible fils de Thétis;

Trop heureux de donner sa fille,

Au fier vainqueur d’Hector, son fils.

 

Un changement si favorable,

Comble aujourdhuy tous ses désirs.

Auroit il crû son coeur capable

D’avoir encore quelques plaisirs?

 

Vous, que nôtre sort interresse

Dans cet évenement heureux.

Peuples, montrez vôtre allégresse,

Par les ébats les plus pompeux.

 

Polixene semble interdite

Devant son époux prétendu;

Je ne scais ce qu’elle médite.

Achille en est tout confondu.

 

Hé! parlez donc beauté charmante,                                           [56]

M’aimerez vous de bonne foy?

Monsieur, je suis obéissante;

Mon papa répondra pour moy.

 

Bref, Paris assassine Achille,

Polixene se veut fraper,

Du même trait elle s’enfile;

La Toille tombe on va souper.

 

Or vous scavez la noble histoire,

De l’Opéra de Capistron;

Je viens d’asseurer sa mémoire,

Par une immortelle Chanson.

 

Réponse                                                    1688                                          [57]

à Monsieur de Coulanges.

 

Pourquoi de nos jeunes galans

Te faire un sujet de satire?

Pourquoi des Coquetes du tems

Dans tes Chansons, chercher a rire?

Coulanges, si tu n’estois vieux

Des jeunes tu parlerois mieux.

 

Pour cajoler et cetera;

Va t’en chercher Dame gigogne,

Les Infants de l’Opéra

Ne sont pas pour un vieux yvrogne,

Et la plus salope catin,

Te renvoye au vertu gadin.

 

Qu’une femme soit en Manteau,

En fontange, en écharpe, en mule,

En malitie à Patrons nouveaux.

Est-ce un amour si ridicule?

Ouy, si c’estoit pour ton esbat

Qu’Elle se tint preste au Combat.

 

Vas dans le fons d’un Cabaret

Débiter tes rimes boufonnes;

Ce n’est pour toi qu’en Corset                                                         [58]

Se mettent nos jeunes mignonnes.

Ho! le plaisant fileur d’amout

Qu’un gouteux de la vieille Cour.

 

Pourquoi blesser dans vos chansons

Nos usages les plus commodes?

Il faudroit bien d’autres leçons

Pour renformer toutes nos modes,

Tous vos atours du tems jadis

Ne font point honte à nos habits.

 

Faites nous voir que nos amans,

N’ont ni mérite, ni tendresse;

Otez leur tous leurs agrémens,

Vous nous reverrez sans foiblesse,

Une Tabatiere à la main

Rend t’elle un homme si vilain?

 

S’il est couché dans un fauteuil,

Des genoux croisez l’un sur l’autre.

Ne croyez pas à ce coup d’oeil

Nôtre gout different du vôtre;

Mais quand d’ailleurs le marché plaist

Le Marchand passe tel qu’il est.

 

Ne scait on pas que nos guerriers

Ont des vertus bien reconnuës?

Et nous n’en serions pas émues;

Chez nous qui se fait estimer

N’est pas loin de se faire aimer.

 

Dans nôtre faubourg Saint Germain,

Nous n’aimons point les vieux usages.

Croyez vous qu’en vertugadin

Nos grandes meres êtoient plus sages?

Que sert quand on est sans témoins

D’un peu d’etoffes, plus ou moins?

 

Feuilletez bien vôtre Almanach,

Vous trouverez que ces matronnes,

Sand vin, sans jeu, et sans Tabac,

Faisoient come nous les dragonnes,

Et sous leur grotesque harnois

Cachoient d’amour un feu gregeois.

 

Les hommes sont faits pour aimer,

Les femmes sont faites pour plaire.

Quand deux beaux yeux ont pû charmer;

L’habit ne fait rien a l’affaire.

Les vrais amans dans leurs combats

Se sont toujours veus pourpoint bas.

 

Les hommes sont trop de bon goût                                              [60]

Pour s’arrester à la parure;

On ne les voit que troppartout

Quitter le velours pour la bure,

Et nos amans et nos amis

Courent la grisette à Paris.

 

S’ils ne cherchoient à l’Opéra

Ces Infantes à beau corsage,

Ce n’est pas en ce païs là,

Qu’ils feroient leur second ménage.

Ce n’est pas l’or de leurs habits

Qui met leurs coeurs à si haut prix.

 

Trouvez vous le goût si mauvais

De chercher là quelque Deésse?

Elles joignent a de beaux traits

L’esprit et la délicatesse.

L’himen ne veut que de grands noms;

Mais l’amour veut bien des fanchons.

 

Chacun a son petit réduit,

Où sans orgueil, et sans grimace;

Loin de la contrainte et du bruit,

On fait tout de tres bonne grace;

Ce sont les filles d’Apollon

Qui font chanter sur le haut ton.

 

Il en est en ce païs là                                                                              [61]

Dont le coeur répond aux manieres,

Qui partout comme à l’Opéra,

Soûtiennent leurs vrais caracteres;

Et qui dans toute leur maison,

N’ont rien de bourgeois que le nom.

 

Les modes, les noms, les éstats,

Sont tous sujets à la satire;

Souvent qui chante ne scait pas

Ce qu’on pense quand il fait rire.

Tel qui rit des deffauts d’autruy,

Rit de ce qu’on rit de luy.

 

Coulanges ce n’est pas pour toy

Que ce dernier couplet raisonne;

Ma Muse s’est fait une Loy

De chanter sans chooquer personne;

Je parle à ceux qui sont en train

De mordre sur le genre humain.

 

Chanson                                                    1688                                          [63]

Sur l’air des Trompettes.

Au départ du Roy d’Angleterre.

 

Quand on suit le Soleil, jamais on ne s’egare,

Dit Jacques, je meuray mon Gendre à la raison

                  Sur leton de fanfare,

                  Guillaume lui répond

Mon beaupere tarrare ponpon.

 

Chanson                                                    1688                                          [65]

Sur le bon bransle.

Sur le Roy d’Angleterre.

 

Le Roy d’Angleterre est party,

Et la Flotte s’ebranle;

Pour un projet assez hardy,

Et fort beau s’il y réüssit.

Il va pour mettre en branle

L’Ecosse, qui à ce qu’on dit,

Au manche déja tremble.

 

Des gens de là lui ont écrit,

Sire, on attend labranle;

L’Argent êtant rare à Paris,

N’en empruntez pas à Louis

Pour les frais de ce branle;

Nous vous ferons plûtost crédit

Jusqu’à la fin du branle.

 

C’est ce qui l’a déterminé

A mettre tout en branle,

Le Roy seulement a donné

De quoi le mettre en seureté

Pour commencer le branle;

Il faut qu’il y soit couronné,                                                               [66]

Sinon, f….tre du branle.

 

Chanson                                                    1688                                          [67]

Sur l’air de Joconde.

 

Un petit fils au grand Condé

                  Commence de paroitre,

A sa valeur, à sa fierté,

                  Peut on le méconnoître?

Douai le feu de tes remparts,

                  Respecte sa personne;

On croit que c’est un nouveau Mars,

                  Ou le fils de Bellone.

 

Un Enguien dans ses jeunes ans, (1)

                  D’un coup de son tonnerre

Foudroye en Piemont les Titans

                  Qui nous faisoient la guerre;

Bourbon de même sang que luy,

                  Même ardeur dans ses veines

Doit faire aux Titans d’aujourd’huy

                  Sentir les mêmes peines.

 

Rocray, Fribourg, Norlingue et Lens,

                  S’offrent à sa mémoire, (2)

Et lui montrent en même tems,

                  Le Chemin de la gloire,

Pour le suivre dans les Combats

(1)   Francois de Bourbon Comte d’Enguien a l’age de 24 ans gagne la Fameuse Bataille de Cerisole sur le Marquis du Gas général de l’Empereur Charlesquint en 1544.

(2)   Le Grand Condé n’avoit pas 22 ans accomplis lorqu’il gagne la Bataille de Rocray en 1643. Il gagna les 2. années suivantes les Batailles de Fribourg et de Norlingue.

 

La victoire s’apreste.                                                                                      [68]

Guerriers que ne ferez vous pas,

                  S’il marche à vôtre teste?

 

Bientost par ce Prince, on verra

                  Nos allarmes cessées;

Le souvenir s’effacera,

                  De nos pertes passées.

Déja pâlir à son seul nom

                  Eugêne de Savoye,

Qui sent bien que de ce Lion

                  Il doit être la proye.

 

Chanson                                                    1688                                          [69]

Sur l’air des Triolets.

 

Ȏ trio le plus accomply!

Trio le plus sain de nôtre age;

Vaubrun, Caumartin & Choisy                                       3 Abbez

Ȏ trio le plus accomply!

Mais de ce trio tant joly

Je donne a choisir le plus sage.

Ȏ trio le plus accomply!

Trio le plus sain de nôtre age.

 

Vaubrun des Abbez le mieux fait,                                Vaubrun

Sur ses consors à l’avantage

D’être fourny comme un mulet.

Vaubrun des Abbés le mieux fait,

Et des Bautrus le noble extrait,

Parmy les femmes fait la rage.

Vaubrun des Abbez le mieux fait

Sur ses Consors a l’avantage.

 

Caumartin, quel nombre d’Ayeux             accusé d’avoir fait la lettre contre l’évesque de Noyon.

Releve déja ta noblesse!

Les Clermont ne valent pas mieux,

Caumartin quel nombre d’Ayeux,

Et tu te mets au dessus d’eux.

Par ton scavoir, par ta sagesse;                                                     [70]

Caumartin quel nombre d’Ayeux

Releve déja ta noblesse!

 

Je vanterois la probité

Et je dirois, ce que je pense,

De Choisy sur la chasteté

Je vanterois la probité

Si de la Font et de Gardeblé

J’avois pû garder le silence,

Je vanterois la probité

Et je dirois ce que je pense.

 

Autre                                                           1688                                          [71]

Sur l’air du Confiteor.

Contrevérités.

 

Maintenon disoit l’autre jour,

Louvois mignon ah! que je t’aime!

Qui n’auroit pour toy de l’amour!

Mignon Louvois, des beaux la crême;

Ton visage est rempli d’atraits

Comme Mayence de Mousquets.

 

Autre                                                           1688                                          [72]

Sur l’air Mais.

 

Des Caumartins l’arrogance séquelle,  

Fair aux Clermont intartade nouvelle;

                  Mais

Si quelqu’un tombe sur elle

C’en sera fait pour jamais.

 

On parle fort du pere et du grand pere.

Loin au delà l’on ne remonte guerre;

                  Mais,

Si quelqu’un le vouloit faire,

Le retour seroit mauvais.

 

Chanson                                                    1688                                          [73]

Sur l’air: Laire lan laire.

Sur la Prise de Philisbourg, par Monseigneur le Dauphin.

 

Monseigneur est donc de retour

Du voyage de Philisbourg?

Le Palatin ne tient guere;

Laire la, laire lan laire,

Laire la, laire lan la.

 

Quel plaisir pour ce nouveau Mars,

De voir qu’affrontant les hazards;

Tout lui cede comme à son pere.

Laire etc.

 

Le coeur charmé de ses hauts faits,

Mille beautez plus que jamais;

Vont prendre le soin de lui plaire.

Laire etc.

 

Mais pour elles je crains bien fort,

Qu’animez d’un plus beau transport,

La gloire ne lui soit plus chere.

Laire etc.

 

Que les Bergers de nos cantons                                                                       [74]

Craindrons pour leurs pauvres Moutons,

De Loups il ne prendra plus guere.

Laire etc.

 

Ce jeune Mars dans les combats

S’en va faire plus de fracas,

Qu’Achile autrefois n’en pût faire.

Laire etc.

 

Le Rhin dans ses flots écumeux,

Craint d’en sentir encore les feux.

Il tremble comme un pauvre here.

Lere etc.

 

On dit qu’au milieu de ses eaux

Le front tout couvert de Roseaux;

Ce grand Fleuve se désespere,

Laire etc.

 

Ses yeux ont êté les temoins

Des explois fameux et des soins,

Du fils aussi bien que du pere.

Laire etc.

 

Ce beaucoup dessai, sur ses bords,

Fait voir que de plus grands efforts;                                            [75]

Vont suivre cette ardeur guerriere,

Laire la laire lan laire.

Laire la laire lan la.

 

Autre                                                           1688                                          [76]

Sur l’air des Ennuyeux.

 

Vouloir sans rime et sans raison

Contre Noyon toujours escrire.                                                      l’évesque

Contre les Saints de sa maison,

Composer sanglante satire.

De l’Evesché c’est le chemin

Que tient l’Abbé de Caumartin.

 

Estre lourd et mauvais plaisant,

Faire grand chere aux Bergeries,                                                   Terre a l’Abbé de Caumartin.

Estre d’un esprit malfaisant,

Estre dure dans ses railleries.

De l’évesché  c’est le chemin,

Que tient l’Abbé de Caumartin.

 

Faire le scavant, l’estre peu,

Estre fier jusqu’a l’insolence.

Aimer la femme, aimer le jeu

Estre vrai, sac de médisance.

De l’évesché c’est le chemin,

Que tient l’Abbé de Caumartin.

 

Chanson                                                    1688                                          [77]

Sur l’air: ho ho ho tourlouribeau ou Marie Salisson.

Sur l’entreprise du Prince d’Orange contre l’Angleterre en 1688.

 

Le Prince d’Orange en Angleterre,

                  Ho ho tourlouribeau;

Est allé voir son beau pere;

                  Ho ho tourlouribeau.

Il ny fera que de l’eau claire,

                  Ho ho tourlouribeau

 

Ha! que ce jeune homme est inciville,

                  Ho. etc.

De s’en aller comme un drille,

                  Ho. etc.

Prendre Londres la grande ville,

                  Ho. etc.

 

Il avoit mis exprés dans la Manche,

                  Ho. etc.

Huit cent chevaux sur des Planches,

                  Ho. etc.

Ils sont noyez comme on pense,

                  Ho. etc.

 

Grand Prince soyez en asseurance,

                  Ho. etc.

Car si le grand Bourbon de France,

                  Ho. etc.

Va prendre votre deffense,

                  Ho. etc.

 

Le Roy Jacques bon Catholique,

                  Ho. etc.

Se rit de la politique,

                  Ho. etc.

De ces maudits hérétiques.

                  Ho. etc.

 

Suivons le Dauphin* qu’un chacun révere,                             *s’en allant à Philisbourg.

                  Ho etc.

Il est allé à la guerre,

                  Ho. etc.

A quitté son propre pere.

                  Ho. etc.

 

Année 1689                                            [79]

 

Sonnet                                                        1689                                          [81]

A Madame la Duchesse du Maine, sur l’acquisition de Sceaux.

 

Seignelay qui pour vous bâtit salle et …...portique,

Enflamé de la gent qui porte………………….fabala:

Fut des Dames l’amour, des maris l’……….Attila,

Aima jusqu’aux beautez qui montent la….Bourique.

 

Mais avec les vertus de la chaste………….….…..Monique,

Vous chassez loin de Sceaux l’amour qui s’y….coula,

En signant vôtre Contract vous lui dites…………hola,

Fussiez vous relegué jusqu’au pole………………..Artique.

 

Ainsi le pauvre enfant de ces lieux sort………….Camus,

Heureux d’avoir ailleurs droit de…………………...Comittimus;

Mais il vous faut des biens exempts de………….sindereze.

 

Vos devoirs sont reglez même au coup de……..Marteau,

Sage comme les Saints qu’a peint Paul…………..Veroneze,

Vous aimez jusqu’au soin de rendre le……………Château.

 

Chanson                                                    1689                                          [82]

Sur l’air: Que fais tu Bergere etc.

Sur Monsieur de Feuquieres (de Pas)

 

Que fais tu Feuquieres

Si loin de la Cour?

Preste à ma priere,

Icy ton retour;

Tes amis se plaignent

Que tu sois absent;

Tes maîtresses craignent

Ton coeur inconstant.

 

Chanson                                                    1689                                          [83]

Sur l’air de Jean de vert

 

Non non je m’etonne pas

Qu’on nomme Jean Farine

Monsieur le Mareschal Duras;

Sa politique est fine,

Il en scait faire de l’Argent,

Bien mieux qu’on ne faisoit du tems,

                  De Jean de vert.

 

Parlons pour finir ce discours

Du Mareschal d’Humieres;

Il a bien fait voir à Valcourt,

Qu’il abonde en lumieres;

Il a bien un plus beau talent

Pour faire nettoyer ses gens

                  Que Jean de vert.

 

Barbezieres est un imposteur, (1)

En bravour, en naissance,

Il n’a fait acte de valeur.

Au Siége de Mayence

Si l’on n’a d’autres Commandans,

Nous ne reverrons plus le tems,

                  De Jean de vert.

 

(1)   Brigadier de Dragons qui se jetta dans la place pendant le siége.

 

Chanson                                                    1689                                          [85]

Sur l’air de grosse bourguignonne.

Sur le mariage de Monsieur de la Fayette avec Mademoiselle de Marillac, dont est venu Madame de la Tremoille. Decembre 1689.

 

Chantons de la Fayette

Le galant compliment,

Qu’il fit à sa poulette

En qualité d’Amant.

Chantons son avanture,

Et sa noble posture.

Jamais amant ne s’est mieux présenté,

Pour être marié.

 

Dedans une Assemblée,

D’amis et de parens,

La Lisette pareé

Attendoit son amant;

Il paslit à sa veuë,

Tremble, rougit et suë;

En ne scachant qu’il devoit saluer;

Il sortit/ s’assit sans parler.

 

Lisette/ La belle consulteé,

Sur son nouvel/ futur époux,                                                             [86]

Dit dans cette Assemblée;

Qu’il lui paroissoit doux,

Et d’une humeur honneste,

Quoique peut être beste;

Mais qu’aprés tout pour elle un sot mari,

Etoit un bon party.

 

De la jeune Lisette

On aprouva l’avis,

Et une amie discrette,

Aussitôt reparty;

Il yra à sa Terre

Comme Monsieur son pere.

Et vous, ferez des Romans à Paris.

Avec les beaux ésprits.

 

La Lisette à sa mere

Demandoit l’autre jour

Comment se peut il faire

Qu’on demeure si court?

Sera-t’il aussi sage le jour du mariage?

Pour moy je n’aime la timidité

Qu’à un certain dégré.

 

Ah! l'aimable jeunesse

Que celle de Vieuxbourg;                                                                    [87]

Il a de la tendresse,

J’ay pour luy de l’amour.

On dit que s’il lamente;

Je ne suis point contente.

Ah! si je pouvois choisir un mari

Vieuxbourg seroit choisi.

 

Autre                                                           1689                                          [88]

Sur l’air: des Lampons.

 

Le Roy met à ce qu’on dit

Un impost sur chaque v….

Monsieur en a la régie (1)

En dépit de la Reinie (2).

                  Lampon, lampon

                  Camaradon lampon.

 

(1)   le Duc d’Orleans frere unique du Roy.

(2)   Lieutenant general de Police.

 

Chanson                                                    1689                                          [89]

Sur l’air: Il a battu son petit frere.

Sur le LOUIS XIV.

 

Vray pieux Monarque de France,

Regarde Heidelberg et Mayence,

Mal attaqué, mal deffendu.

De ces deux chefs de confiance,

L’un ne songe qu’a faire éscus,

L’autre à faire peu de Dépense.

 

Autre                                                           1689                                          [90]

Sur l’air des Rochelois.

 

Saint Ruth, Calvo, Larré, Bouflers (1),

Ce ne sont point des Ducs et Pairs,

Et ne pretendent pas de l’estre,

Par plus d’une bonne raison.

Mais ils servent si bien leur maître

Qu’ils mériteroient le Baston.

 

(1)   Ils étoient tous quatre Lieutenans généraux; le dernier fut fait depuis Maréchal de France.

 

Autre                                                           1689                                          [91]

Sur le même Air.

 

Tessé, d’Huxelles et de Sourdis

Le mériteroient bien aussi.

Sans compter le maure Feuquiere;

Mais pour nos deux grands Généraux,

Les prudens Duras et d’Humieres,

Ils en méritent de nouveaux.

 

Autre                                                           1689                                          [92]

Sur l’air des Ennuyeux.

 

Lanjamet vain, rempli d’orgueil (1),

Dis nous malgré ton arrogance,

Aprés quatre ans d’habit de deuil,

Que tu portois par indigence;

Quelle aumône ta deffrayé

Ce bel habit de drap rayé?

 

(1)   Gentilhomme de Bretagne qui n’avoit d’autre metier que d’être Courtisan.

 

Chanson                                                    1689                                          [93]

Sur l’air de Flon flon.

Pour le Cardinal Maldachin, quand il annonça de la Loge de Saint Pierre, l’élection du Cardinal Ottoboni, pour être Pape sous le nom d’Alexandre VIII.

 

Quand Maldachin en chape

                  De la Loge cria

Qu’Ottobon êtoit Pape;

                  La trompette sonna.

Et flon flon lariradondaire,

Et flon flon lariradondon.

 

Autre                                                           1689                                          [94]

Sur l’air du Confiteor.

Sur Monsieur de Pontchartrain Controlleur general des Finances.

 

Pontchartrain ne resvez pas tant

Au moyen que vous devez prendre

De donner au Roy de l’Argent,

Vous n’avez qu’à lui faire rendre

Ce qu’ont pris soin de mettre a part,

Et la Couleuvre* et le Lezare**.

 

*Monsieur de Colbert

*Monsieur de Louvois

 

Autre                                                           1689                                          [95]

Sur l’air: Sonnons le Tocsin.

 

Dieux! quelle différence

De Lorraine à Duras;

L’un n’a pris que Mayence,

Dont je fais peu de cas;

Mais l’autre mil fois plus fin,

                  Diguedin,

En a pris tout le vin.

 

Autre                                                           1689                                          [96]

Sur l’air: Sur le Rhin parût une beste.

 

Martinet cet homme exécrable,

Est déja réprouvé du Ciel;

La preuve en est que Saint Michel

L’a battu comme un Diable.

 

Réponse.

 

Que fait le grand Condé chez lui,

Ce grand héros, ce bel esprit?

C’est dont tout le monde murmure,

Il a pris Martinet pour son Voiture.

 

Chanson                                                    1689                                          [97]

Sur l’air de Jean de vert

 

Saint Paul en terrible valeur

De chevrette ferreé

Pour de l’Argent donnoit son coeur

A sa vieille effronteé;

Mais las d’un si vilain micmac,

Il a renvoyé la d’Orlac

A Jean de vert.

 

Pidou n’a pas de vanité,

Il répand sur la terre

Pourtant sa belle parenté,

Doit rendre une ame fiere.

La Francine et la Saint Olon

Estoient les maîtresses, dit on

De Jean de vert.

 

Noisy pour avoir de l’Argent                          Maupeou.

Fait une belle addaire,

Car la laide femme qu’il prend                    Catelan.

Lui vient d’un chien de pere;

Qui pourveu qu’il ait profité

Sur un bon gage auroit presté

A Jean de vert.

 

Sur le fils du grand Colbert                                                                 [98]

A des biens qu’il vous offre;

Louvois tient les siens à couvert

Dans le fonds de son coffre

Deux procédez si differens

Font bien causer les descendans

De Jean de vert.

 

Quoi! Louvois ne devoit il pas

En faisant bonne mine

Remplacer lui seul de ses Ducats

La nouvelle Tontine?                                          creé en 1689 au mois de Decembre.

Des Ministres moins opulans,

Auroient bien fait cela du tems,

De Jean de vert.

 

Il est constant que Ratabon,

Fait honneur à la France.

Le Roy dit avoir tout de bon

Esgard à sa dépense.

L’heureux abri que sa maison;

L’affreux séjour que le Gaudron

De Jean de vert.

 

Autre                                                           1689                                          [99]

Sur l’air de Joconde.

 

A la porte de Saint Martin

L’on arresta Banille                                            ou Baville.

Avec huit bouteilles de vin

Venant de Belleville:

Les Maltotiers fort vigilans

Fermerent la Barriere,

Messieurs vous n’êtes point exempt

Des Droits de la rapiere.

 

Autre                                                           1689                                          [100]

Sur l’air de Joconde.

 

La France faisant tous les jours

Du progrés dans la gloire.

Nous devons luy prester secours

A force de bien boire.

Pour moy je prétends que du Roy

Je soustiens la dépense;

Puisqu’a mesure que je bois

J’augmente sa finance.

 

Chanson                                                    1689                                          [101]

Sur l’air des Rochelois.

Réponse à une Chanson faite par Monsieur Dangeau au sujet du Jardin de Trianon.

 

Vous ne dites Monsieur Dangeau

Sur Trianon, rien de nouveau.

L’on n’est pas surpris qu’il vous plaise;

Vôtre épouse à tous les momens

Y voit les spectacles à son aise.

Cela rend les maris contens.

 

Sur des Jardins, loüer le Roy,

Nous semble petit, croyez moy.

C’est un héros extraordinaire;

Les zéphirs portent dans les Airs

Les grandes choses qu’il fait faire

Pour en informer l’univers.

 

Dans votre troisieme sixain,

Vous dites qu’en ce lieu divin.

Les vertus sont en asseurance;

L’on croit que vous n’y pensés pas.

Avec vous quelque connoissance

Qu’ailleurs on ait fait des faux pas?

 

Le quatrieme auroit passé                                                                [102]

Si solide êtoit bien placé.

L’on ne dit point solide gloire

Sur le fait des amusemens.

Ne vous en faites point accroire,

Vous n’aurez point de nôtre encens.

 

Chanson                                                    1689                                          [103]

Sur l’air J’ay fait beaucoup de bruit.

Sur le Baron de Beauvais.

 

Vaillant guerrier de Saint Denis

Grand conservateur des Perdrix.

Baron, ta garde accoutumeé

Te manque bien dans le besoin;

Car à celle de ton Epeé

Tu n’as jamais fié ton pourpoint.

 

Autre                                                           1689                                          [104]

Sur le même Air.

 

Le Buffet de grande aparence,

Ce linge si blanc et si fin,

Sont plus pour la magnificence,

Que pour la bonté du festin.

La Poudre a manqué dans Mayence,

Nous pourrions bien manquer de vin.

 

Chanson                                                    1689                                          [105]

Sur l’air: Non non, je ne suis pas seul a médire.

Voyage de Rome en 1689 pour l’élection d’un Pape, qui fut Alexandre VIII. Ottoboni. par Coulanges.

 

Sur Mer, je reprens l’air des Itineraires,

                  Pour chanter les Galeres,

                  Au nombre de vingt huit.

                  Qui voguans jour et nuit,

                  Seurement ont porté

Ambassadeur Cardinaux maint Abé

                  En terre de Papauté.

                  L’agréable voiture!

                  Mais survint une avanture

                                    Qui fit peur,

Et troubla le repos du voyageur.

Il parût un soir six vaisseaux ennemis,

                  Qu’aisement on eut pris,

                  Si la nuit qui fut trop obscure.

                  Ne nous eût fait changer d’avis.

 

Tout fut preparé dans les Galeres pour aller à eux. Ils faisoient une tres bonne manoeuvre; mais ayant pris la route de Corse, et la nuit êtant venuë on abandonna l’entreprise.

 

Autre                                                           1689                                          [106]

Sur le mesme Air.

Arrivée à Rome le 23. Sept’. 1689.

par Coulanges.

 

Hé quoi! je revois ce fameux Colizeé,

                  Au bout de mainte anneé.

                  Je revois le Panteon,

                  Le Palais de Néron,

                  L’arc du grand Constantin.

Le Temple de Faustine et d’Antonin,

                  Et le Mont Capitolin.

                  Je revois Marc-Aurele,

                  Les Chevaux de Praxitele;

                  Et je sens

Tous les plaisirs que j’avois à vingt ans;

J’ay la même humeur, & la même santé;

                  Je suis en liberté.

Fortune, tu m’as fait querelle;

Mais tu ne m’as point maltraité.

 

L’Auteur avoit êté à Rome en 1657. sous le Pontificat d’Alexandre VII de la Maison de Chigi.

 

Chanson                                                    1689                                          [107]

Sur l’air: Vive la jeunesse qui ne vit que d’amour; faite à Villeroy, par Coulanges.

A Madame la Comtesse de Saint Geran.

 

Prés de la belle Duchesse, bis                     la maréchale de Villeroy

Je chante icy sans cesse

La nuit et le jour;

Je vis sans tristesse,

Dans ce beau séjour.

 

Je chante icy sans cesse; bis

La contrainte m’opresse,

Je crains mon retour;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

La contrainte m’opresse; bis

La liberté, Comtesse

Fait tout mon amour;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

La liberté Comtesse, bis

Vaut bien mieux que la presse,

Qu’on voit à la Cour,                                                                               [108]

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Vaut bien mieux que la presse, bis

Je chante à la grand Messe,

Et crie comme un sourd;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Je chante à la grand Messe, bis

Ainsi que la Duchesse;

On m’ensense à mon tour;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Ainsi que la Duchesse, bis

Je reçois la Noblesse,

Des lieux d’alentour;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Je reçois la Noblesse, bis

Toute nôtre jeunesse

Dans tout le jour;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Toute nôtre jeunesse, bis                                                                   [109]

En sautant se despaisse;

Au Fifre, au Tambour;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

En sautant se despaisse, bis

Pour sauter on me laisse,

J’ay le cul trop lourd.

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Pour sauter on me laisse, bis

L’un donne à sa maîtresse

Des pieces de four;

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

L’un donne à sa maîtresse, bis

Et l’autre la caresse,

L’apelle m’amour.

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

Et l’autre la caresse, bis

Nul, en fait de tendresse

Ne demeure court.                                                                                  [110]

Je vis sans tristesse

Dans ce beau séjour.

 

La Beste                                  1689 Mars                                               [111]

où l’on jouë toutes les nations de l’Europe.

 

le Cardinal de Furstemberg donne les cartes.

Les Jesuites les meslent.

La Hollande dit c’est ma beste qui joue.

Le Prince d’Orange dit à tout part par Madame.

La France, je fais et prends de mon Roy.

L’Allemagne on nuit au contre.

La Pollogne dit, je paris pour le contre.

La Savoye dit, si le contre perd je quitte le Jeu..

Le Dannemarck. je ne scais ce que je dois faire.

L’Angleterre je me défais de mon Roy.

La République de Venise; je ne puis jouer à ces jeux là.

L’Escosse dit, je garde mon Roy pour empescher la volle.

Le Portugal dit, je ne fais, ni bien, ny mal.

La Suede, je ne jouë point sur ma bourse.

L’Espagne dit, je ne puis jouer que je ne perde.

La République de Gennes dir, si j’avois le jeu de nuire au Contre, je le ferois.

Le Pape, dit je renonce à tout.

Le Roy d’Angleterre, dit qui renonce fait la Beste.

 

Le Turc, dit prenons garde que le Contre ne fasse la volle             [112]

L’Irlande, dit, si celui qui fait jouer entre dans mon jeu, il a perdu.

La Suisse, dit nous vous verrons jouer.

 

Chanson                                                    1689                                          [113]

Sur l’air de Joconde.

Sur la Barbereau de l’Opéra.

 

Si vôtre coeur doit s’embrazer

                  D’une flame nouvelle,

Le mien se doit interresser

                  Que la cause en soit belle,

Parmi le sautillant Troupeau:

                  Voulez vous bien m’en croire,

N’adorez que la Barbereau.

                  Il y va de ma gloire.

 

Autre                                                           1689                                          [114]

Sur l’air……

Couplet de Monsieur le Duc de la Ferté.

 

Plaignons tous en ce jour

Le malheur de du Bourg.

Il a aimé ma fille, et ma femme;

Il m’a aimé de plus cet infame;

Mais le plus grand de ces forfaits

C’est d’escrire à Louvois.

 

Chanson                                                    1689                                          [115]

Sur l’air: Lere la, lere lan lere.

 

Scavez-vous qui demeure court,

Devant le Siege de Valcourt?

C’est le Mareschal d’Humiere,

                  Lere la, lere lan lere,

                  Lere la, lere lan la.

 

Cet hiver chez Barbereau                                actrice de l’opera.

Ce grand Général du Bureau,

Tiendra son Conseil de guerre,

                  Lere la, lere lan lere,

                  Lere la, laire lan la.

 

Autre                                                           1689                                          [116]

Sur l’air de Joconde.

En allant à Rome, et descendant au Port de Robinet en Provence; par Coulanges.

 

Rosne je te fais mes adieux;

                  Je quitte ton rivage.

A chercher Iris en ces lieux

Mon tendre amour m’engage

Pour cet objet rare & charmant,

Et dont je suis esclave;

Je quitterois fort aisement,

Et Rome & le Conclave.

 

Autre                                                           1689                                          [117]

Sur l’air de Joconde.

A Monsieur le Prince de Turenne qui êtoit à Rome par Coulanges.

 

Que dites vous? que faites vous?

                  Trop aimable Turenne?

Vous me laissez longtems chés nous;

                  Cela me met en peine;

Polignac est un favory,

                  Qu’on estime et qu’on aime;

Mais hélas! entre vous et luy,

                  Est-ce trop d’un troisiême?

 

Autre                                                           1689                                          [118]

Sur le même Air.

 A Monsieur l’Abbé de Polignac, qui êtoit allé porter un Paquet de conséquence en France, et qui resta un tems infiny à Gennes, manque d’une voiture assez seure pour passer: par Coulanges.

 

Il est certain qu’un bon Courrier

                  Doit faire diligence;

Il ne faut point pour ce mestier

                  Tant, & tant de prudence:

Abbé vous avez en deux mots

                  Eu trop de retenüe;

Il falloit passer sous les flots,

                  Ou bien perçer la nüe.

 

Chanson                                                    1689                                          [119]

Sur l’air: Ofily et Filix.

Sur l’Affaire de la Régale avec la Cour de Rome.

 

La Sorbonne deffend la Loy,

Et le Clergé l’Edit du Roy;

On ne scait qui l’emportera,

                  Alleluya

 

Harlay (1), la Chaise (2) et Chanvalon (3),

Et le President de Novion (4)

N’ont voulut que le Roy cedât,

                  Alleluya.

 

Qu’on nous tienne pour insensez

S’ils sont jamais canonisez,

A moins qu’un bon mea culpâ,

                  Alleluya.

 

(1)   Alors Procureur general et depuis 1er. President en 1689.

(2)   Jesuitte Confesseur du Roy.

(3)   l'Archevesque de Paris.

(4)   Alors 1er. President.

 

Autre                                                           1689                                          [120]

Surl’air……

Par Rousseau contre ceux qui alloient au Caffé de la Laurent.

 

Que Boindin de son haut caquet

Désormais ne nous étourdisse;

Que la Grange de son fausset,

En ces lieux jamais ne glapisse.

Que par quelque jeune plumet

Le Caffé soit bientost défait

De Saurin et de sa sequelle,                                           Sorin

Qu’a mentir Villiers si sujet.

Aille ailleurs porter sa nouvelle.

 

Voyez les Stances de Rousseau sur le mesme sujet, qui commençent ainsi. Que le rechapé des prisons.

 

Chanson                                                    1689                                          [121]

Sur l’Air: Jardinier ne vois tu pas?

Quand LOUIS prit le devant,

Il laissa le derriere;

Il abandonna ce lieu

Pour apanage à Monsieur

Son frere, son frere, son frere.

 

Autre                                                           1689                                          [122]

Sur l’air de flon flon ettc.

 

La Camarde la Force

Dans son célébre trou,

Sur le tant moins des noces

A fait faire à Briou,

Flon flon flon laridadondaine

Flon flon flon laridadondé.

 

Chanson                                                    1689                                          [123]

Sur l’air de Jean de vert

 

Vous êtes plus médisant,

Marquis de la Bourlie

Vôtre esprit court et suffisant,

N’entend pas raillerie;

Mais à force d’etre brutal,

Il en prend aussi souvent mal.

Qu’à Jean de vert.

 

Autre                                                           1689                                          [124]

Sur l’air: Helas s’il n’estoit pas mort.

Sur la mort de la Reine d’Espagne.

 

Pleurés François pleurez tous

Que vôtre douleur soit forte;

Aux larmes abandonnez vous,

La Reine d’Espagne est morte.

 

Le poison par son effort,

De ses jours tranche la trame;

N’est-ce pas un triste sort

Pour une si bonne Dame?

 

Ah! qui l’auroit jamais crû

Que cette belle Princesse,

Recevoir la mort eut dû,

Par une main si traîtresse.

 

Helas! trop bien elle êtoit

Avec le Roy son cher Prince.

Sa belle mere voyoit

Que son crédit êtoit mince.

 

Sans le témoigner au Roy,

Cette marastre enrageé,

A contre la bonne foy

La Princesse empoisonneé.

 

Sa douleur ni ses attraits,

N’ont point sa rage arresteé;

A de semblables forfaits

L’Autriche est accoutumeé.

 

Le Roy lui dit tout en pleurs;

Car il aimoit bien sa femme,

De vôtre âge dans la fleur,

Faut il vous perdre Madame?

 

Consolez vous mon époux,

Luy répondit la Princesse.

Adieu vous dit pour toujours,

Hélas! je tombe en foiblesse.

 

Oubliez, Prince, ma mort,

De bon coeur je la pardonne;

Ne vous plaignez point du sort.

C’est ainsi que Dieu l’ordonne.

 

Adieu mes femmes adieu,

Retirez vous vites en France,

Il ny a plus dans ce lieu                                                                                           [126]

Pour vous aucune asseurance.

 

Voyez toutes de ma part

Le Roy de France en personne;

Je vous dis icy sans fard

Que j’aimois bien sa couronne.

 

Je salüe le Dauphin,

Et son illustre famille;

Monsieur et Madame enfin,

Le Duc leur fils, et leur fille.

 

Je laisse mes Diamans

A mes deux soeurs que j’embrasse.

Et Monsieur pareillement.

Priez pour m’obtenir grace.

 

Prions Jesus de grand coeur,

Prions tous ce Roy de gloire

Qu’il la mette en son bonheur,

La tirant du Purgatoire.

 

Chanson                                                    1689                                          [127]

Sur l’air de l’amour malade.

Coulanges.

 

La Trousse, Montgerou (1), Berniere,

Se baignoient dedans la Riviere;

                  Chacune crioit

Sitost qu’un mortel s’en aprochoit;

Et cependant ce bon pauvre apparut qui leur dit

Plus ras qu’un gros Feuillan;

                  Je suis Hercule,

                  En Canicule.

Je prens ce déguisement.

 

C’est moy, j’ay quitté ma Massüe,

Et je la quitte quand je süe.

                  J’ai quitté ma peau.

Pour venir vous carresser dans l’eau.

                  Ses beaux corps nuds.

Montrez moy vos Testons, les miens ne sont ils pas velus?

                  Je suis allegre,

                  Sans être maigre

Entre eux assez doucement.

 

A ces parolles ces trois belles,

Ne furent plus beautez cruelles;

                  Mais chaque beauté

Lui parut pleine d’humanité;                                                           [128]

                  Ce Dieu charmant

Pour elles ne fut plus qu’un objet tout rempli d’agrement

                  Et la journée

                  Fut terminée

Entre eux assez doucement.

 

Chanson                                                    1689                                          [129]

Sur l’air…….

Sur Monsieur de Pontchartrain Controlleur général des Finances.

 

Défiez vous, peuple de France

Du Ministre de nos Finances,

Que l’on apelle Pontchartrain;

C’est un Pont de planches pouries,

Un char tiré par des furies

Dont Bourvalais mene le train.

 

Epigramme                                              1689                                          [130]

Sur la taxe des Arts et Metiers.

 

Pour soulager l’etat, Pontchartrain, ton génie

A trouvé le secret de taxer les Metiers;

Et même jusqu’aux Gargotiers,

Et loueur de Chambre garnie;

Mais on dit que tes sages soins

Garde pour les derniers besoins

Deux Communautez fort nombreuses,

Les Savetiers, les Ravaudeuses;

Pour l’Estat c’est un grand apuy.

Ȏ combien tu scauras en tirer de Finances!

Car eux seuls font aujourd’huy

Tout le Commerce de la France.

 

Chanson                                                    1689                                          [131]

Sur l’air de Jean de Nivelle.

Sur Gabriel Estienne Texier Comte d’Hautefeuille, Lieutenant général des Armées du Roy, épousa en 1689. Marie-Françoise-Elizabeth Rouxel de Grancey.

 

Hautefeuille est bien marié        bis

A l’aînée des Granceys;                                    bis

On nous a dit pour nouvelle,

Qu’il avoit trouvé pucelle.

Ne se seroit il point trompé?

                  Jean de Nivelle,

Hautefeuille est bien marié.

 

Aux voeux d’un Prince, dit-on,   bis

Fort amy de sa Maison,                                    bis

Elle ne fut point rebelle.

L’auroit-il laissé pucelle,

Comme dit nôtre épouse?

                  Jean de Nivelle.

Hautefeuille est bien marié.

 

Meres, j’apelle d’abus,                                    bis

De tous vos soins superflus;       bis

Que vos filles soient pucelles                                                          [132]

Pourveu qu’on les croit telles;

Hautefeuille à bien épousé

                  Jean de Nivelle,

La fille aînée des Granceys.

 

Autre                                                           1689                                          [133]

Sur l’air des Triolets.

Ces Couplets sont de Danchet pour Madame de Cantleu (Madame des Marets)

 

Cedez vieux Châteaux de Roman,

Canteleu scait bien mieux nous plaire;

Tous les plaisirs y sont charmans;

Cedés vieux châteaux de Roman.

Une belle y fait plus d’amans

Qu’Armide autrefois n’en sceût faire.

Cedez vieux Chasteaux de Roman,

Canteleu scait bien mieux nous plaire.

 

Tous se rend à son air vainqueur,

Il exerce un pouvoir suprême,

Abbez, Curés, et Sénateurs,

Tout se rend à son air vainqueur;

Trop heureux en perdant son coeur

Qui ne perd pas la raison même.

Tout se rend à son air vainqueur

Il exerce un pouvoir suprême.

 

Sur la mort du Pape Innocent XI                 1689                        [134]

 

Peu pour lui, rien pour ses parens,

                  Tout pour les pauvres.

 

Il a ouvert le Jubilé, et les Portes du Paradis pour tout le monde, et il est mort ne les vouland point fermer.

 

Chanson                                                    1689                                          [135]

Sur l’air de Jean de vert.

Sur Monsieur de Montesquiou Comte d’Artagnan.

 

Le petit Comte d’Artagnan

En sage de l’Armeé,

Loin de s’entester follement

D’un peu de renommeé

En seureté dans un Moulin

Attaquoit Valcourt* d’aussi loin,               *ville

Que Jean de vert.

 

D’en sauver plus d’un ce moulin

Eut, dit on, l’avantage;

Du Vivier, Lizieux & Courtin,

Pleins du même courage

Daquin qui s’en fuyoit aussi,

S’y sauve, et croit être suivy

De Jean de vert.

 

Quittez donc Comte d’Artagnan

La pique et la rapiere;

Dessus les pas de vos parens,

Retournez en arriere,

Reprend le petit collet                                                                          [136]

Vous serez  en vray Prestolet

De Jean de vert.

Blâmer le Comte d’Artagnan,

C’est une médisance.

Quoi donc! le plus grand des talens,

N’est-ce pas la prudence?

La valeur dont on fait état,

N’est-ce pas la vertu d’un goujar

De Jean de vert?

 

L’habile Major d’Artagnan,

Excelle en manigance.

Il scait en manede de temps

Tirer la quitessence;

Mais il ne songe rien qu’a soy,

Et moins à l’interrest du Roy

Qu’à Jean de vert.

 

Un esprit adroit, fourbe et fin,

Est son noble partage;

Par là l’on arrive à sa fin

Mieux que par le courage.

Tous les braves sont indigens.

Ils laissent ferailler les gens.

De Jean de vert                                                                                                            [137]

 

Sa femme d’un farouche esprit (1)

La vielle Majoresse (2):

Veuve d’un Boucher de Poissi,

Se croit une Déesse:

Mais quand on la voit on la prend

Pour une sibille du tems

De Jean de vert.

 

La fausse valeur d’Artagnan

Voudroit tout entreprendre

Son esprit gâté de Roman

Ne songe qu’à pourfendre.

S’il fut né un siecle plutost,

Il auroit pû casser les os,

De Jean de vert.

 

(1)   Sa 1ere. femme. Il a epousé en 2de. N……l’Hermite.

(2)   Je crois qu’elle s’apelloit Visdelou qui lui donne de quoi achepter la charge de ……. dans le Regiment des Gardes. Elle est morte sans enfans.

 

Autre                                                           1689                                          [138]

Sur l’air de Joconde.

Sur le Parlement.

 

Amy garde toy de plaider;

L’injustice est trop grande.

Résous toy plûtôt d’accorder

Ce que l’on te demande;

Le Palais est plein de brigans;

Sauve toy de leurs pattes,

Et la Grand Chambre en ce tems

Fourniroit vingt Pirates.

 

Chanson                                                    1689                                          [139]

Sur l’air: Ouy je le dis et le repete.

Sur Monsieur le Mareschal de Duras.

 

Quand Duras ce grand Capitaine

Galopant a perte d’haleine,

Vers Heidelberg tourna ses pas;

Quoique l’on en ait voulu dire,

Pour combattre il n’alloit pas;

Il alloit pour s’y faire escrire.

 

Année 1690                          [141]

 

Sur Monsieur de Guerchois

par Monsieur Greard    

 

                  Vous dont la sublime éloquence

                  A consacré le nom à la postérité.

Pourquoi dans le désir d’une autre dignité

                  Vous condamnés-vous au silence?

                  De l’employ qui vous a tenté,

Je connois lagrandeur, l’éclat, l’autorité;

                  Mais enfin vous avez beau faire

                  Pour vous y signaler;

Vous n’acquererés jamais tant d’honneur à vous taire

                  Que vous en eûtes a parler.

 

Chanson                                                    1690                                          [145]

Sur l’air de Jean de vert.

 

Monsieur le premier Président,                                   Harlay.

Monsieur le Doyens frere,

Et Monsieur de la Faluere.

Sont trois aussi sotes gens

Qu’il y en avoit

Du tems de Jean de vert.

 

Chanson                                                    1690                                          [147]

Sur l’air de Charivary.

Sur Monsieur Richelet (1).

 

Ta servante est donc ta femme,

Vieux Richelet?

Mais ta soeur bien plus infame,

Longtemps a fait,

Avec le Boureau de Paris,

                  Charivary.

 

(1)   Avocat de Parlement de l’Academie Françoise et auteur d’un Dictionnaire pour la langue françoise.

 

Chanson                                                    1690                                          [149]

Sur l’air de l’Eschelle du Temple.

Aprés la Bataille de Staffarde.

 

Le Duc de Savoye au Combat,

S’en est fui devant Catinat;

Les Ramoneurs inblanchissables,

Qui lui rendoient fort leurs devoirs,

Ne se sont pas trouvé si Diables

Comme nos gens les trouvoient noirs.

 

Catinat dit à nos Soldats

Mes Enfans ne les craignez pas;

Pour dissiper cette assembleé,

Faites dessus eux plusieurs foid

Dévotement avec l’éspeé

Bon nombre de signes de croix.

 

Les gens du Duc mal asseurez,

Se voyant aussi conjurez,

Lui disoient en raison probable

Qu’il faisoit chaud en cet endroit,

En s’enfuyant/ Et s’enfuyoient à tous les Diables

Apres la/ Suivant sa chaise qui couroit.

 

Les Cavaliers & leurs Chevaux,                                                                         [150]

Pour n’estre pris par Diabloteaux,

Coururent en grande diligence;

Qu’on dit en leur langue, presto,

De peur de trouver même chance

Se débarbouiller dans le Pô.

 

Chanson                                                    1690                                          [153]

Sur l’air. Reveillez vous belle endormie.

A Madame de Lamoignon, par Monsieur de Coulanges.

 

Prenez bien garde à Thiessonville

Le drôle guigne Soligny;

Il est fort grand bruit dans la ville

Que l’oiseau veut faire son nid.

 

Avertissez la Présidente

Qu’elle détourne ce malheur;

Car pour devenir confidente,

Elle a trop d’esprit, et d’honneur.

 

Il servit cruel à son âge,

Qu’estant aimable, et sans deffauts.

Elle fit son aprentissage

Pour garder déja les manteaux.

 

Autre                                                           1690                                          [154]

Sur l’air des Fichus.

 

Tourville vous a joué d’un tour

Comme le Gobin Luxembourg;

                  L’Arriéreban aussi

Y va d’un coeur réjouy;

Outre plus Messieurs de Noailles

Commandans sur terre et sur mer,

Vous ont battu canaille,

Et montré leur coeur guerrier.

 

A Monsieur le Duc de Luxembourg           1690                        [155]

Sur la Bataille de Fleurus.

 

Tu viens de combattre en soldat,

Tu viens de vaincre en capitaine;

Luxembourg, tu fais plus dans ce fameux combat,

Tu consoles Louis de la mort de Turenne.

 

Ce qu’il a fait est admirable,

Et chacun se dit tour a tour;

Tout ce qu’on a crû des héros de la Fable.

Nous le voyons dans Luxembourg.

 

Chanson                                                    1690                                          [157]

Sur l’air des Triolets.

Dialogue entre le Pere Bouhours & un prétendu Janseniste, sur le Péché Philosophique en 1690.

 

                  Bouhours.

Les Jesuites de bonne foy,

Vont droit en toutes leurs affaires;

Leur exemple tient lieu de Loy;

Les Jesuites de bonne foy

Ne tiennent point leur quant à moy.

Ils sont deux, affables, et sinceres.

 

                  Janseniste.

Est-ce donc là cette candeur

Et cette anciennce modestie?

Fut il plus impudent menteur?

Est-ce etc.

Quelle abominable douceur!

Quelle execrable modestie!

 

                  Bouhours

Nos Peres ont ils rien écrit

Qui puisse autoriser le crime?

Ont ils rien fait? ont ils rien dit?

Nos Peres ont ils rien écrit.                                                               [158]

Leur morale sans contredit,

N’a que de tres saintes maximes.

 

                  Janseniste.

Pere Bauny l’Agneau de Dieu,

Pour ostez les péchez du monde,

De la morale à fait un jeu.

Pere etc.

De cet auteur (1) digne du feu,

Vient l’erreur en rimes fécondes.

 

                  Bouhours.

Un Régent pour passer le tems,

Dans quelques heures ennuyeuses,

Amusoit quelques jeunes gens.

Un etc.

Dévelopoit à contretemps

Quelques questions curieuses.

 

                  Janseniste.

De ce Régent le sentiment

Est celui de la Comagnie,

Quoique vous blamiez fortement

De ce etc.

Vous rougissez presentement

Qu’on connoisse vôtre infamie.

 

(1)   Il a fait une somme des péchez, dans laquelle en Casuiste facile, il permet beaucoup de chose tres condamnables: on avoit de lui a cause qu’il delivroit de la maladie des scrupules: Ecce agnus Dei qui tollis peccata mundi.

 

Bouhours.                                                                                             [159]

Cela s’est passé dans un coin,

Dans un lieu peu considérable

Dans une Province fort loin.

Cela etc.

Certes il êtoit bien besoin

D’en faire un cancan effroyable.

 

Janseniste.

Une ville de Parlement,

Est donc chez vous une bicoque?

Vous traittez agréablement

Une etc.

Est-ce parler sincerement?

Du public ainsi l’on se moque.

 

Bouhours.

Le sujet de tout ce grand bruit

N’etoit qu’une faible étincelle,

Qui n’auroit jamais rien produit.

Le sujet etc.

Mais vôtre malice grossit

Une légere bagatelle.

 

Janseniste.

De Dijon jusqu’à Louvain

Cette étincelle êtoit voleé,

Le feu prenoit deja grand train

De Dijon etc.

Sans qu’une charitable main.

De l’eteindre se fut meslée.                                                             [160]

 

Bouhours.

Est-ce charité que cela,

Que noiricir des gens de mérite?

Au lieu de mettre le hola?

Est-ce etc.

C’est pain béni à ces gens là

De calomnier un Jesuitte.

 

Bouhours.

Si quelqu’un de nous est l’auteur

De ce Péché Philosophique;

Certes nous en avons horreur.

Si etc.

Nous le détestons de bon coeur.

L’aveu n’est il pas authentique.

 

Janseniste.

Hé! vous parlez de charité,

Vous qui ne l’avez point dans l’ame:

Vous corrompez la vérité.

Hé! etc.

Pour terrasser l’iniquité,

Un juste zele nous enflame.

 

Janseniste.

Le beau doute Pere Bouhours,

Qu’en vôtre écrit on vous voit mettre.

D’où peuvent n’aitre ces Détours?

Le beau etc.

De Paschal sans tant de discours,                                                [161]

Lisez la quatrîeme Lettre.

 

Bouhours.

Jansenistes rétractez vous,

Et que la chose soit publique;

Demandez pardon à genoux.

Jansenistes etc.

La grace est accordez à tous,

Autrement Dieu seroit inique.

 

Janseniste.

Le Pape n’entendit donc rien

A l’erreur qu’il a fulmineé,

Ne parlant que des gens de bien?

Les etc.

A l’Iroquois comme au Chrestien

La même grace est donc donneé?

 

Bouhours.

Jansenistes ne parlez plus,

Suivez l’exemple qu’on vous donne,

Des cinq points par vous sôutenus,

Jansenistes etc.

Condamnez de Jansenius.

Et les écrits et la personne.

 

Bouhours.

Cet évesque herétique en vain

A parlé trop fort sur la grace.

Il a suivy saint Augustin.                                                                      [162]

Cet etc.

Abjurez-le comme Calvin

Où l’on fera sur vous main baisse.

 

Janseniste.

A Rome un fourbe se trouvant

Au bout de toute sa malice,

Lorsqu’il veut prendre un innocent.

A Rome etc.

Va le dénoncer a l’instant

Aux bons Peres du Saint Office.

 

Janseniste.

N’est-ce pas ce qu’on voit chez vous,

Sitost qu’un homme vous attriste,

Il doit succomber sous vos coups?

N’est-ce pas etc.

Vous criez partout en courroux

A l’hérétique, au Janseniste.

 

Janseniste.

Ah! mon bon pere croyez moi,

Rentrez dans la galanterie;

C’est là vôtre plus bel employ.

Ah! etc.

Et laissez là de bonne foy,

Ce fatras de Philosophie.

 

Janseniste.

Aussi bien n’entendez vous pas

Ces subtiles Scholastiques,                                                              [163]

Vous n’en fietes jamais grand cas,

Aussi etc.

Vous aimez bien mieux faire amas

De ces fleurettes poëtiques.

 

Janseniste.

Qu’Arnault lise Saint Augustin,

Que mille fois il le commente,

Il vous faut Buffi-Rabutin.

Qu’Arnault etc.

Trouve-t’on dans ce vieux latin

Cette politesse charmante?

 

Chanson                                                    1690                                          [164]

Sur l’air des Triolets.

Après le siege de Mayence.

 

Duras dit fiez vous à moy

Nous allons secourir Mayence,

Portant la terreur avec soy,/ Je porterai partout l’effroy

Duras dit fiez vous à moy;

Mais si jamais plus on le croit

Avec toutes ses asseurances,

Nous courrons risque dans deux mois

De nous en retourner en France.

 

Chanson                                                    1690                                          [165]

Sur l’air…..

Sur Monsier de Sanlecque Chanoine régulier de Sainte Genevieve, Prieur de Garnay, nommé à l’évesché de Bethléem en 1701. et mort en 1714. agé de 64.

 

Permettez, mon Reverend Pere,

Qu’un malheureux Prieur Curé,

Vous dépeine icy sa misere,

C’est a dire son Prieuré.

 

Ce Bénefice dont la Dixme

Vaut bien cent éscus d’argent clair;

Est dans un si profond abisme

Que J’entends tout le bruit de l’Enfers.

 

De là j’ay bien ouy des Ames

De Hollandois, et de Flamans                      Bataille de Fleurus.

Qui se calbutoient dans les flames.

Prés des fourneaux pleins d’allemans.

 

Dans mon église l’on patrouille

Si l’on ne prend bien garde à soy;

Et le Crapaud et la Grenouille

Chante quelque fois avec moy.                                                                         [166]

 

On ne voit là que des mazures,

Cinq cent gueux couverts de haillons;

Point de Dévote a Confiteor,

Point de pénitente à bouillon.

 

Chanson                                                    1690                                          [167]

Sur l’air……..

Monsieur l’Abbé de Sanlecque ne voulant pas lire avec des Lunettes un papier que trois jeunes Dames lui presenterent à la fin d’un repas oùil avoit bien bû, contrefit l’ivrogne pour s’en deffendre, et se tira d’affaire par la chanson suivante.

 

Ai je donc changé de Climat?

Pourquoi ces tenebres epaisses?

Ah! j'ay trop admiré l’eclat.

De la beauté des trois Déesses.

Quand on devient chauve souris,

On n’a plus les yeux de Paris.

 

Autre                                                           1690                                          [168]

Sur l’air……

Impromptu fait par le même un moment aprés

 

Une Uranie

Quand elle plaît,

Elle paroist

Un grand génie.

En est on fou?

C’est une muze.

En est on sou?

C’est une buze.

 

Chanson                                                    1690                                          [169]

Sur l’air….

Sur le mariage de Monsieur et Madame la Marquise de la Salle.

 

Plus d’une cabale,

Pour plus d’une rivale,

En vain à la Salle,

Inspiroit de l’amour.

La plus charmante,

Est triomphante;

Qu’elle nous chante

Cent fois le jour

J’aime le plus beau de la cour.

 

Mais que dit on d’elle?

On dit, elle est trop belle,

Pour une mortelle,

Elle a de trop beaux yeux.

Dés qu’on l’admire,

C’est un martire,

Chacun soupire,

Mesme les Dieux.

Moins vous la voyés, c’est tant mieux.

 

Autre                                                           1690                                          [170]

Sur l’air du nouveau Marly. Etreine à Madame la Marquise de la Salle.

 

Un grand Astrologue du tems,

Belle, a compté tous les instans;

Il trouve en toy deux destinées;

Ta beauté, même sas Atours

Plein soixante dix anneés;

Mais ton esprit plaira toujours.

 

Chanson                                                    1690                                          [171]

Sur l’air….

Sur les Coëffures.

 

La Battant l’oeil n’est plus joly,

                  La mode en est passée;

Il est bon quand on sort du lit;  

                  Mais quand on est pareé,

C’est la Coëffure à beau Tignon

                  Qui sert aux Dames de bouchon.

 

Sans la Coëffure à beau Tignon,

                  Peut on faire visite?

De nos Dames le beau Chignon

                  Fait le plus grand mérite,

Et sans le Tignon si charmant,

                  On ne peut plus faire d’amant.

 

Autre                                                           1690                                          [172]

Sur l’air des Lampons.

Pour le Roy d’Angleterre.

 

A quoi bon me renvoyer,                bis

En Irlande guerroyer?                      bis

Je ne veux plus me deffendre.

Je cede tout à mon Gendre;

                  Lampons, lampons.

                  Camarades lampons.

 

De mon Trosne renversé,              bis

Et d’Angleterre chassé;                                    bis

Je vais vivre en asseurance,

Dans le Royaume de France.

                  Lampons etc.

 

Quand le Roy Jacques partit,      bis

Pour s’en revenir à Paris;

Il dit à Monsieur son Gendre,

Ayez bien soin de l’Irlande.

                  Lampons etc.

 

Chanson                                                    1690                                          [173]

Sur l’air: Autrefois je chantois Achille

Sur Monsieur de Pontchartrain

 

La justice que l’on doit rendre

N’eut pas fait choix de Pontchartrain;

Mais à présent qu’elle est a vendre,

Peut elle être en meilleure main?

 

Autre                                                           1690                                          [174]

Sur l’air. Vous m’entendez bien.

Sur les Filles de Madame.

 

Toutes les filles de chez vous

Ne trouveront jamais d’époux;

Elles n’ont croix, ny pille,

                  Hé bien!

Et le reste a fait gille,

Vous m’entendés bien.

 

Chanson                                                    1690                                          [175]

Sur l’air du Bransle de Metz.

Au sujet de la Bataille de Fleurus.

 

Valdeck se bat a merveille,

Il a battu Luxembourg,

Et beaucoup mieux qu’a Valcourt;            ville

Les François ont sur l’Oreille.

On dit que ce Général

Pour en porter la nouvelle;

On dit que ce Général

Pensa crever son Cheval.

 

Il a passé par Nivelle,

Et ne s’est point arresté;

Il arriva tout croté

A la porte de Bruxelles,

Quoi! ne connoissés vous pas,

Dit il, à la sentinelle,

Quoi! ne connoisséz vous pas

Le Général des Estats?

 

J’ay remporté la victoire

J’ay battu les énnemis,

Avec vous mes chers amis

J’en viens partager la gloire.                                                            [176]

Ah! que vôtre Gouverneur,

Pour peu qu’il veuille croire.

Ah! que vôtre Gouverneur

Me recevra de bonne coeur.

 

Pour achever la défaite,

J’ay laissé tout mon canon,

Toute ma munition,

Mes Timballes, et mes Trompettes,

Mes Estendars & drapeaux,

Tant la victoire est complette;

Mes Estendars & Drapeaux

Et bon nombre de Chapeaux/Chevaux.

 

Du détail de la Bataille,

Je ne vous en diray rien,

Puisque je me porte bien.

Je reponds de nos murailles;

J’ay laissé là tout mon train

Pour chasser cette Canaille.

J’ay laissé là tout mon train;

Mes enfans ne craignez rien.

 

J’ay partagé mon Armeé.

Un tiers est sous Charleroy,        ville

Et l’autre, à ce que je crois,                                                               [177]

Me suit à grandes journées.

Les plus braves de mes gens

Sont encore dans la meslée.

Les plus braves de mes gens

Aux François montrent les dents.

 

Autre                                                           1690                                          [178]

Sur le même Air.

 

Valdeck ce foudre de guerre,

Dont on vante les Exploits;

S’est sauvé plus d’une fois

De devant Monsieur d’Humieres;

Mais Monsieur de Luxembourg

Ayant pris en main l’affaire;

Mais Monsieur de Luxembourg.

L’a bien vangé de Valcourt           ville.

 

Les Dames les plus galantes

De Bruxelles, de Charleroy,

L’attendoient en bel arroy

Avec Lauriers plus de trente:

Mais son malheureux succés,

Les trompa dans leur attente;

Mais son malheureux succés

Les changea tous en Ciprés.

 

Satire                                                          1690                                          [179]

Contre les petits Augustins

 

Les petits Augustins du fauxbourg Saint Germain,

Ont fait faire chezeux un concert tout divin.

On scait qu’on y chanta Tenebres en Musique;

Mais le détail en est extremement comique:

L’on trouvoit affiché à tous coins de Paris

En faveur de devots et curieux esprits.

Ames qui cherchez Dieu dans la belle harmonie,

Vous le rencontrerez dans nôtre simphonie,

Accourrez promptement, c’est l’illustre Opera

Avec les instrumens qui la composera;

Comme on êtoit pour lors dans la semaine sainte

Où l’Ame du Chrestien est de douleur atteinte,

Et quitte l’Opéra de craine du péché,

On tient qu’ils en ont eu meilleur marché,

Le service fut fait avec mélodie,

On n’entroit qu’en payant comme à la Comédie,

Ils avoient aposté dix ou douze fripons,

Et sept ou huit Archers ramassés sur les ponts.

La porte de l’église êtoit demie barreé,

Et fort severement en deffendoient l’entreé.

Une femme êtoit là qui recevoit l’Argent,

Et qui faisoit payer le riche et l’indigent,

Il est vrai qu’on êtoit assés bien à son aise

Car pour ses trente sols on avoit une chaise.                       [180]

Il y vint un Bourgeois qui n’avoit pas le sol,

Et qui probablement se fut tenu de bout;

Le Chef qui commandoit cette noble brigade,

Luy dit fort rudement, arreste camarade;

Ça donne trente sols pour entrer en ce lieu.

Et qui ne les a pas, ne priera donc pas Dieu?

Dit il, mais il jura le brave par la ventre,

Nous sommes sans quartier, qu’aucun sans payer n’entre

Car quiconque entrera sans payer trente sols,

Il aura sur le champ plus de dix mille coups.

Aprés voulut passer un bon et pauvre Prestre

Mais un Moine parut, et dit par la fenestre,

Monsieur, cherchez ailleurs du divertissement,

C’est tout dire en un mot, nous voulons de l’argent.

Il survint un gascon de ces gens sans ressource.

Qui l’épeé à la main plus viste qu’a la bourse,

Bous êtes des Coquins, dit il, je passeray,

Quiconque ose branler, mort, je l’escharperay.

Ces généreux soldats dirent de bonne grace,

Monsieur, est galant homme, il est juste qu’il passe.

Cadedis repond t’il, bous etes gens d’honneur,

Bonjour Monsieur je suis fort vôtre serviteur

Le Moine vit cela qui crevoit dans son ame;

Il les querella fort aussi bien que la femme.

Parût un Advocat fameux à ce qu’on dit;

Mais l’éloquence là n’avoit point de crédit;

Il avoit avec lui deux jeunes damoiselles,

Que je connois pour être aussi bonnes que belles.

Venez vous, lui dit on, pour entendre chanter?

Il faut donc vôtre argent bien et deument compter.

C’est donc, dit il pour trois, à trente sols par teste,

Quatre franes et demi, je ne suis pas si beste,

Il vaut mieux retourner chanter à la Maison.

Un Marchand de bon vin nous fera mieux raison;

Mercy Dieu voyons voir dit la grosse harangere.

Qui vint foudre sur eux, fortement en colere,

Malgré vous et vos dents j’entreray dans ce lieu.

Et qu’est-ce, pourquoi non? c'est la Maison de Dieu,

Et généreusement força le corps de garde,

Et passe à la faveur des coups de hallebardes.

Le Corporal cria, mes Peres au secours.

Venez ou cette femme entrera malgré nous.

Un gros Moine accourut qui la pousse et la tire,

Et la prend aux Cheveux, et sa coëffe déchire

Elle se deffendit le nommant gros cochon,

Luy tira par morceaux robe et coqueluchon,

Et jurant jour de Dieu, somme nous à la guerre?

Lui donne un coup de poing, et le jetta par terre.

Je vous laisse a penser s’il ne fut pas moqué,

Voila, dit on, voila le Moine défroqué;

Ce gros Moine a perdu son froc à la Bataille,

Pas un là, n’est pour lui, tout le monde le raille,                                  [182]

Un Novice le vit qui saisi de frayeur,

Cria l’on a tué nôtre Pere Prieur.

On sonne le toccin, tout le Couvent s’assemble,

Ils s’arment de bâtons et viennent tous ensemble,

On eut dit à les voir des Dragons furieux

Prest a bouleverser la terre et les Cieux.

Ah! cette pauvre femme eût êté déconfite:

Mais alors par bonheur elle avoir pris la fuitte.

Ces Moines ne pensant qu’a livrer des Combats,

Le peuple profita de cet embarras,

L’un assés doucement aprés l’autre s’ecoulle,

Et cinq cens par aprés passerent à la foulle.

Ils doublerent les gardes, et dirent d’un ton fier

Que l’on fasse surtout main basse et sans quartier

On chargea rudement et Prestre et femme grosse,

Gare, gare, dit on, il arrive un Carosse,

Il sort un Partisan, un celebre voleur.

Aussi riche en argent qu’il est pauvre en honneur,

Il tenoit par la main une assés belle femme,

Et qui dedans Paris passe pour une infame.

Cela n’empesche pas en payant l’écu blan

Un Moine ouvre la porte et passe librement;

Sur la fin de la piece et Bourgeois et grisettes,

Tous entroient pour cinq sols, comme aux Marionetes,

Vengez vous, juste Ciel! Vous avez des Carreaux.

Ecrasez propmptement ces méchans animeaux.                                [183]

Ah! mon Dieu quel désordre a présent dans l’église,

Sous le masque du bien le vice se déguise.

Ah! jamais un Ministre a-t’il pris un teston

Pour permettre d’aller au Presche à Charenton?

N’est-ce pas ce veau d’or que ces Moines honorent?

Ce n’est pas Jesus Christ, c’est la Croix qu’ils adorent.

Ces Moines en effet sont pires que Judas;

Car s’il prit de l’argent, il ne le garda pas.

Il fut le raporter avec l’ame contrite;

Mais ces Moines en font bien bouillir leur marmite,

Cela leur a fait tort, et l’on s’en paint et l’on dit,

Qu’a present dans Paris ils n’ont plus de crédit,

Que le frere questeur quoiqu’il dise, et qu’il fasse

Retourne au Couvent et flacon et bessasse,

Toi qui auparavant donnoit un pain entier,

Qui n’en donne a présent qu’un tres petit quartier,

La boëte du questeur êtoit tous les jours pleine,

Elle n’est qu’a demi au bout de la semaine.

Tel donnoit du vin pur, du vieux ou du nouveau,

Quile mesle a présent avec les deux tiers d’eau,

On lui ferme la porte, et pour lors il persiste;

On lui dit rudement, le bon Dieu vous assiste.

Allés frere questeur diner à l’Opera,

Nous n’irons plus chez vous quand on y chantera,

Chacun voit sans pitié ces misérables Moines

Que l’on a veu jadis plus gras que des Chanoines.

Ils demeurent d’accord en se voyant à bout.                        [184]

Pour vouloir trop gagner, que souvent l’on perd tout.

 

Chanson                                                    1690                                          [185]

Sur l’air: C’est la pure vérité.

 

Le Pontchartrain, se dit on,

Voit la femme du Gascon.             le Duc de Roquelaure.

Ce n’est qu’une médisance;

Elle pourra escarteler

De Phelypeaux et de France       Louis XIV.

C’est la pure vérité.

 

Chanson                                                    1690                                          [186]

Sur l’air: Sommes nous pas trop heureux.

Sur Jacques II. Roy d’Angleterre.

 

Bon Dieu! calmés ce grand vent

Qui semblant toujours contraire

Pour aller en Angleterre,

Retarde l’embarquement;

Jacques veut chasser son gendre

Avec de braves soldats;

Mais helas! s'il scait descendre,

Ce n’est que du Throsne en bas.

 

Chanson                                                    1690                                          [187]

Sur l’air de Lampon.

Sur le Duc de Savoye aprés la Bataille de Staffarde.

 

Le Duc de Savoye est pris (1),

On l’ameine à Paris;

Mon Dieu que nos Chemineés.

Vont être bien ramoneés!

Lampons, lampons,

Camarades lampons.

 

S’il n’est pas bon Cavalier,

Il est du moins bon courier;

Car on la veu dans la plaine

Courir a perte d’haleine,

Lampon etc.

 

On m’a mandé de Paris,

Que Catinat m’a tout pris;

Il a menti s’il s’en vante;

Voila ma Chaise roulante.

Lampon etc.

 

Nôtre pauvre Prince impuissant

 

(1)   Il fut poursuivie par un Cornette de Cavalerie, qui pensa le prendre prisonnier.

 

Devient fou faute d’argent                                               [188]

Ne pouvant continuer la guerre

Contre le Roy son beau pere.

Lampon etc.

 

Tous les gros Milords Anglois

Lui disant tout d’une voix.

Reposez faite un bon somme;

Car pour vous point de Royaume.

Lampon etc.

 

L’étoille du grand Louis,

Fait perir ses ennemis;

Presque nul ne s’en echape

Non pas même jusqu’au Pape.

Lampon etc.

 

Elle abregea les vieux ans

De ce matin d’Innocent;                                  XI.

Et sur le chemin de Vienne

Surprit le Duc de Lorraine,

Lampon etc.

 

Le vieux Schomberd en sabré

Et son parti délabré

L’on confirme la nouvelle,

Que Guillaume en a dans l’aisle;                                                   [189]

Lampon etc.

 

Il n’est pas un Electeur,

Qui ne meure de frayeur,

Et sa Majeste Lipüe,                         Leopol.

Craint même qu’on ne la tüe.

Lampon etc.

 

Que feriez vous pauvres gens,

Si vos efforts impuissans,

Ne servent à nostre France

Que pour croistre sa puissance?

Lampon etc.

 

On verra les Hollandois

Bientost réduit aux abois,

Et la Reine Guillemette,

Chercher la boëte à Perrette,

Lampon etc.

 

J’ay pitié du Savoyard;

Car il sera tost ou tard,

Pour remplir sa destinée

Ramoneur de chemineé.

Lampon etc.

 

Autre                                                           1690                                          [190]

Sur l’air: Lair la lair lanlair.

 

Chacun s’etonne avec raison,

De l’amour de la Maintenon;

Les Dames ne scavent qu’en croire.

Laire la, laire lan laire;

Laire la, laire lan la.

 

Que diroit ce petit Bossu (1),

S’il vivoit de ce voit cocu,

Par le plus grand Roy de la Terre?             le Roy Louis XIV.

Laire etc.

 

Il diroit que ce conquerant,

A tant pris qu’a la fin il prend,

Le reste de toute la terre.

Laire etc.

 

(1)   Scaron cu de jatte êtoit né fait comme un autre. Dans un froid excessif lui 4e. firent une débauche et s’en revinre nuds chez eux e. en moururent, Scaron en devint cu de jate. J’ay veu ailleurs que c’estoit pour avoir pris du mercure pour le guerir de la verolle.

 

Mademoiselle Scudery                   1690                                          [191]

sur des Preaux.

 

A l’aspect d’un bâton, Boileau tremblant, et blême,

Cria, tout beau Messieurs, ne précipités rien;

Quoi! sans confession assommer un Chrestien,

N’y lui donner le tems de songer à lui même.

 

Sur Boileau                            1690                                          [192]

 

Boileau ce rimeur satirique,

Ayant senti la vertu du bâton,

                  Demeura sans replique.

Ce remede quand on l’aplique,

Range la rime à la raison.

 

Sur Monsieur Santeuil                     1690                                          [193]

Poëte.

 

Avoir de quel air effroyable,

Roulantles yeux se tordant les mains,

Santeuil lit ses Cantiques vains.

Diroit on pas que c’est le Diable

Que Dieu force à louer ses Saints?

 

Chanson                                                    1690                                          [194]

Sue l’air Jardinier ne vois tu pas.

Sur les Jesuittes.

 

Scavez vous bien qui fait mal,

Sans mesures, et sans bornes?

C’est, je le diray tout net,

Quiconque porte au bonet

Trois cornes, trois cornes, trois cornes.

 

Chanson                                                    1690                                          [195]

Sur l’air des Triolets.

Aprés la Bataille de Fleurus par Mademoiselle Ithier.

 

Retirez vous pauvre Valdeck,

Vous n’avez plus rien a pretendre.

Ce Combat est un rude éschec,

Retirez vous pauvre Valdeck;

Allez chercher quelque rebec,

Et vous consolez à l’entendre.

Retirez vous pauvre Valdeck.

Vous n’avez plus rien a pretendre.

 

Luxembourg vous a confondu,

Vôtre malheur est sans ressource;

Lorsque vous faisiez l’entendu,

Luxembourg vous a confondu.

Pour vous tout espoir est perdu;

Eussiez vous de Cresus la bourse.

Luxembourg vous a confondu

Vôtre malheur est sans ressource.

 

Louis le plus grand de nos Rois,

Vous a fait sentir sa colere;

On reconnoit à ses éxploits

Louis le plus grand de nos Rois.                                                                        [196]

Voyez malheureux Hollandois,

Ce que c’est que de lui déplaire:

Louis le plus grand de nos Rois

Vous a fait sentir sa colere.

 

Vous feriez mieux pauvres Bourgeois,

Qui n’estes pas gens de rapiere

De vous retirer chez vous bien coys,

Vous ferez mieux pauvres Bourgeois;

Ne quittez plus une autre fois

Vos Fromages ny vôtre Bierre.

Vous ferez mieux pauvres Bourgeois

Qui n’estes pas gens de rapiere.

 

Autre                                                           1690                                          [197]

Sur l’air de Jean de vert.

 

Sur la Sambre, et non sur le Rhin.

Fut blessé Senneterre,                                     le Comte de Brinon Capitaine aux Gardes

Qui aprés avoir pris du vin,

Dit, grace au Dieu du verre;

Je me sens revenir le coeur,

Et je crois que je ferois peur

                  A Jean de vert.

 

Autre                                                           1690                                          [198]

Sur l’air de Jean de Nivelle ou Mordienne de vous.

Aprés la Bataille de Fleurus.

 

Te voila défait Valdek

                  Sans cervelle;

Luxembourg te fait vrai jean de nivelle;

Comment pourrez vous Valdek?

                  Comment pourrez vous

                  Réparez ce coup?

 

Lorsque Guillemot

                  Scaura la nouvelle

Il sera plus sot que jean de nivelle;

Comment pourrez vous Valdek?

                  Comment pourrez vous,

                  Réparez ce coup?

 

Chanson                                                    1690                                          [199]

Sur l’air: Reveillez vous belle endormie.

de Madame la Duchesse, envoyeé à Monsieur le Prince pour le jour de sa feste.

 

Dans ce grand jour de vôtre feste,

Chacun vous offre son present.

Le mien qui est le moins honneste,

Peut être aura son agrément.

 

Ce n’est qu’une Chanson badine

Que je pretends vous presenter;

La matiére en est noble et fine,

Préparez vous à la gouter.

 

Cette noble fine matiére

Sur quoi cette Chanson s’etend;

C’est celle qui sort du derriere,

Et qui d’abord au nez vous prend.

 

D’offrir des fleurs, c’est la coutume;

Mais si l’on fait cas de l’odeur,

Un bel et bon étron qui fume

Répand au coeur plus de senteur.

 

Ce Compagnon de Saint Antoine

Qui se vient presenter à vous,                                                         [200]

N’est devenu gras comme un Moine,

Qu’avec de si friand ragoust.

 

Cette délicate pasture,

Dont il remplit son éstomach,

Luy tenant lieu de nourriture

Vous pourra servir de tabac.

 

J’avois dessein de vous escrire,

Des Couplets un peu moins puans.

Si vous n’osez plus haut les lire,

Maschaunez-les entre vos dents.

 

Que pouvez vous penser ou dire

En lisant ce tas de rebus;

Si vous dites que c’est pour rire,

Vous aurez mis le nez dessus.

 

Si le mon d’Estron effarouche,

Pour ceux qui l’entendront chanter,

Quand il vous viendra dans la bouche,

Vous n’aurez plus qu’a l’avaler.

 

Mais ne faites point de mistere,

C’est un mets des plus succulens;

La merde ne doit pas déplaire,                                                                         [201]

Chacun la fait avec les dents.

 

N’ayez aucune répugnance,

Ce présent n’est pas des plus grans;

Mais vous voyez qu’en récompense,

Il ne manque pas de bon sens.

 

N’allez pas seul par gourmandise,

Taster de ce mets délicieux;

A vos amis chacun leur prise,

Ce ne sera pas trop pour eux.

 

Chanson                                                    1690                                          [202]

Sur l’air: des Trompettes.

Impromptus faits à Table, à la santé du Roy, aprés la Bataille de Fleurus.

 

Nous voila couvert de gloire,

Que nos coeurs soient rejoüis;

Amis ne cessez de boire,

A la santé de Louis.

Ta la la la etc.

 

Luxembourg a fait merveille,

A Valdeck il est fatal;

Ça vuidons cette Bouteille,

Pour ce brave Général.

Ta la la la etc.

 

On void sur mer et sur Terre,

Triompher nôtre grand Roy;

Tout ceux qui lui font la guerre,

Seront soûmis à sa Loix. Ta etc.

 

Pour faire honneur à Tourville,

Prenons tous le verre en main;

Il faut que toute la ville

Boive à ce héros malin. Ta etc.

 

Chanson                                                    1690                                          [203]

Sur l’air: Morguienne de vous.

Sur la Bataille de Fleurus en 1690.

 

On vous a défait

Valdek sans cervelle;

Luxembourg a fait

Un grand Jean de Nivelle.

Morguienne de vous,

Quel Prince êtes vous?

 

Quand Dom Guillemot

En scaura la nouvelle,

Il sera plus sot

Que Jean de Nivelle.

Morguienne etc.

 

Quoi! point de douceur?

Et toujours cruelle?

Avec vôtre honneur;

Vous nous la baillés belle.

Morguienne etc.

 

Autre                                                           1690                                          [204]

Sur l’air….

Imitons Baptiste (1) et Chaussons (2),

                  Point de Religion

                  Que celle des flacons.

N’aimons que les garçons

                  Sans Parens,

Crédit aux Marchans,

De l’Argent comptant,

Le v… bien bandant,

                  Sans émploy;

                  N’obeir qu’a soi,

                  C’est être ma foy,

Plus heureux que le Roy.

 

(1)   Monsieur Lully.

(2)   Monsieur Chausson fut brûlé en Greve pour sodomie en 16..

 

Autre                                                           1690                                          [205]

Sur l’air des Rochellois.

 

Bavieres fuit nôtre Dauphin,

Catinat fait trembler Thurin;

Noailles en vainqueur fait la guerre,

Tourville sur mer gagne un combat.

Luxembourg en gagne un sur terre,

Et Lauzun fait échec et mat.

 

Autre                                                           1690                                          [206]

Sur l’air: Scavez vous faire la difference.

 

Louvois (1) tu paroît a ta mine

Avoir étudié la Marine.

Colbert (2) eut le même destin;

Mais en Enfer il se console,

D’avoir perdu tant de Catin,

Te voyant perdre ta boussole.

 

(1)   Monsieur de Louvois desirant succeder a l’Intender. de la Marine, se fit instruire peu de tems avant la mort de Monsieur de Seignelay.

(2)   Monsieur Colbert dans la veu de devenir Chancelier, et de succeder à Monsieur le Tellier avoit apris le latin quelques anneés avant sa mort, et se fit recevoir Avocat.

 

Chanson                                                    1690                                          [207]

Sur l’air. Il fait tout ce qu’il deffend.

Sur l’Opéra d’Orpheé, la Musique est de Monsier de Lully, et les parolles de Monsieur de Boulay.

 

Ah! que ces fades sornettes,

Dans l’Opéra que je vois!

Orphée attiroit les bestes,

Il attiroit jusqu’aux bois,

Mais ce misérable Orpheé

N’attire que la hueé,

Et ses plus charmans effets,

Sont d’attirer les sifflets.

 

Francine, dit on, fait faire

Tout ce tintamare là,

Pour empescher son beaufrere ,

De réüssir à cela.

Par ce jeu le sot Francine,

Travaille pour sa cuisine,

Et pourroit bien voir enfin

Qu’un sifflet n’est pas du pain.

 

S’il produit toujours sa vache,

La sourdine Barbereau;

Si la des Matins ne cache                                                                    [208]

Son êtroit, et long museau;

Si le Marquis la Gambade,

Est toujours son camarade.

Si Colasse fait des Airs,

Tout s’en ira de travers.

 

Autre                                                           1690                                          [209]

Sur l’air: Il a battu son petit frere.

Sur le Prince d’Orange.

 

Est il mort le Prince d’Orange?

Chaque jour la nouvelle change

Quand l’un dit ouy, l’autre dit non;

S’il vit ce qui me met en peine;

C’est qu’a l’espreuve du Canon

Ait êté ce grand Capitaine.

 

Autre                                                           1690                                          [210]

Sur l’air…..

Courante du Marquis de Lassé, pour Madame la Dauphine.

 

Faut-il qu’un amant bien traité

                  S’en aplausisse?

                  Quoi! se peur il flaté

                  Que le mérite agisse,

                  Prés d’une beauté?

Qu’il scache que le plus charmant

N’est pas toujours le plus heureux amant;

Mais c’est celui qui du tendre caprice

                  Trouve le moment.

 

Chanson                                                    1690                                          [211]

Sur l’air de Jean de Vert.

Sur Monsieur de Maurevert.

 

Un guerrier fort doux et fort vert,

Que Maurevert on nomme;

Nous a fait voir que Jean de vert

Estoit un vray Jeanlogne.

Bona sera donc Jean de vert;

Cedez, cedez à Maurevert,

                  A Maurevert.

 

Autre                                                           1690                                          [212]

Sur le même Air.

Sur Monsieur de Sennecterre.

 

Sur la Sambre, et non sur le Rhin,

Fut blessé Sennecterre,

Qui aprés avoir pris du vin,

Dit; Graces à Dieu des verres,

Je me sens revenir le coeur,

Et je crois que je ferois peur

                  A Jean de vert.

 

Autre                                                           1690                                          [213]

Sur le même Air.

 

Tourville à vaincu sur les Eaües,

Luxembourg sur la terre;

Notre Dauphin par ses travaux,

Va terminer la guerre.

Grand Roy! tous ces évenemens

Ne se sont jamais veus du temps

                  De Jean de vert.

 

Autre                                                           1690                                          [214]

Sur le même Air.

 

Du gros Lanternier Gauderat,

J’admire la prudence,

Quand à table il juge d’un plat

Pour en remplir sa panse;

Mais pour décided les Procés,

J’aimerois mieux les lansquenais,

                  De Jean de vert.

 

Chanson                                                    1690                                          [215]

Sur l’air du Rigaudon.

Sur les Procez.

 

Hélas! Seigneur

Rendez moy la douceur,

Et le repos du coeur,

Que n’a point un plaideur.

Point de procez,

Quel bien inestimable!

Que de vivre en paix;

Sorty des plais

Que je sois méprisable,

Si j’y vais jamais.

 

Gens sans honneur,

Greffier & Procureur,

L’un et l’autre voleur,

Et l’Avocat menteur.

Huissier fripon,

Fait mainte fourberie

Pour moins d’un teston.

Leuray patron

De cette Confrairie

C’est le bon Larron.

 

Quarante Exploits                                                                                                      [216]

Bien comptez par mes doigts,

Avoir gagné six fois,

Toujours tirer la Croix.

Et cependant

Un Arrest sur Requeste,

Reçoit opposant,

Gagne Marchant!

Va te rompre la teste

En recommençant.

 

L’Avocat prest,

Bien instruit du procés,

Vous allez au Palais,

Vous donnez des placets;

Malgré vos pas,

Et maintes révérences.

Toujours chapeau bas,

Avoir votre audience,

Sans le taffetas.

 

Avoit troté

Tout l’hiver et l’ésté;

Pour toute charité

Vous êtes apointé.

Quelle lenteur!

De poursuivre une affaire                                                                                     [217]

Chez un Raporteur.

Se le plaideur

Ne fonce au Secretaire,

Je plains son malheur.

 

Dans un extrait

Qu’un secretaire a fait

On le tient pour soustrait.

Soins superflus,

La principale piéce,

Ne se trouve plus

J’ay bien perdu

Mon credit, mon adresse

Un bon tas d’éscus.

 

Chanson                                                    1690                                          [218]

Sur l’air……

Pour le Chtr de Bouillon beuvant avec le Chtr de Roches.

 

Chevalier sans peur et sans reproche,

Suis ton coeur et ses Nobles Bouillons;

Imitons ce brave de Roches:

N’espargnons rien dans cette débauche.

Baisons, beuvons, baisons jusqu’a rompre couillons

Moquons nous de ces gens retenus,

Qui prennent les plaisirs par mesure,

De Vénus et du Pere Bacchus;

Quand à nous, poussons la nature,

Jusqu’à tant qu’elle n’en puisse plus.

                                    par Beauregard.

 

Chanson                                                    1690                                          [219]

Sur l’air de Jean de vert.

Sur Monsieur de Sennecterre blessé à la Bataille de Fleurus.

 

Sur la Sambre, et non sur le Rhin

Fut blessé Sennecterre;

Qui aprés avoir pris du vin

Dit graces au Dieu des verres,

Je me sens revenir le coeur,

Et je crois que je ferois peur

                  A Jean de vert.

 

Autre                                                           1690                                          [220]

Sur l’air de la Gavote de Phaëton.

Sur les Ministres de ce tems.

 

Nous sommes quatre hommes en France,

                  D’un merite sans pareil.

Pelletier pour la Finance,

                  Le Tellier pour le Conseil;

Et pour la Guerre Louvois

                  Est un homme incomparable,

Et moy quand je suis à table,

                  Je vaux mieux que tous les trois.

 

Priere                                                          1690                                          [221]

par Monsieur de Valdeck.

 

Ȏ grand Dieu je vous remercie;

De ce que je suis revenu

De la Bataille de Fleuru;

Je croyois y perdre la vie.

Ne m’induisez jamais par indignation

En pareille tentation;

Mais faites par la bonté vôtre,

Quand le dangereux Luxembourg,

Qui m’a battu comme un Tambourg,

Prendra par un costé, que je prene par l’autre.

 

Chanson                                                    1690                                          [223]

Sur l’air: des Triolets.

Sur Louis Quatorze.

 

Louis quatorzieme du nom,

Se promene dedans Versailles;

Sur son palier, c’est un Lion,

Louis quatorzieme du nom:

Mais quand on tire le Canon,

Ou que sur le Rhin on bataille,

Louis quatorzieme du nom,

Se promene dedans Versailles.

 

Autre                                                           1690                                          [224]

Sur l’air. Scais tu pourquoi Manon me verse à boire.

Sur la campagne et les victoires de 1690.

 

Dans trois* Combats remporter la victoire,        *Fleurus, Navale & Staffarde.

Dans trois combats faire sentir son bras;

Dessus ses pas faire marcher la gloire

Et voir la Ligue à bas, ce sont des cas,

Que nous dira l’histoire et qu’on croira pas.

 

Chanson                                                    1690                                          [225]

Sur l’air de l’Archevesque de Paris.

Sur Louis XIV.

 

Sire, voulez vous me croire?

Profitez de ces deux mots

Pour  le bien de vôtre gloire.

Laissez là tous vos dévots,

C’est par eux que vôtre vie

N’est plus que pédanterie.

Vous voyez dans quel mépris,

Votre amy Jacques ils ont mis.                                      le Roy d’Angleterre.

 

Eh! que Diable vous importe!

Que je baise tout mon sou.

Que le Diable aprés m’emporte

Ou qu’il me torde le cou.

Lorsque la Scaron vous berne,

Qu’un jeune fou vous gouverne,                 Barbezieux

En Seigneur de prier Dieu,

Cela vous importe peu.

 

Chanson                                                    1690                                          [227]

Sur l’air: J’ay passé deux jours sans vous voir.

 

Ȏ ciel! quel est nôtre malheur!                                    Après le combat de la Hogue.

Sur mer, comme sur terre,

Louis en tous lieux est vainqueur

Tout cede à son tonnerre.

Hélas! faut il comme à Fleurus,

Nous voir icy encore vaincus.

 

Luxembourg ce vaillant héros

Y parût en Alcide,

Et Tourville dessus les flots,

N’est pas moins intrépide.

Hélas! aprés ces deux combats,

Que vont devenir les Estats?

 

Les Anglois croyoient sur la mer

Avoir un grand Empire,

Et qu’aucuns Roys de l’univers

N’osoient leur contredire.

Hélas! Louis leur fait bien voir

Qu’ils se flattoient d’un vain espoir.

 

Vainement nous étions unis

Pour conjurer sa perte;                                                                                          [228]

Nous n’en sommes que mieux punis;

Nôtre Flotte est déserte.

Hélas! malgré tous nos efforts

Il nous bat jusques dans nos Ports.

 

Nous voguons de tous les côtez

Sans trouver un azile;

Nous sommes partout arrêtez;

Rien n’échape à Tourville;

Hélas en vain nous le fuyons,

Il nous brûle et nous coule à fons.

 

Ah! que Louis est bien servy

Sur la Terre et sur l’Onde.

Chacun le veut rendre a l’envy

Le plus puissant du monde.

Helas! quelle rage pour nous

Quand nous voulons l’accabler tous.

 

Que nous sert de voir aujourd’huy

Tout l’Europe en ligue?

Rien ne reussit contre lui;

Il rompt toutes nos brigues.

Helas! tout ce qu’on entreprend

Ne sert qu’a le rendre plus grand.

 

Vois tous les maux que tu nous fais,                                           [229]

Maudit Prince d’Orange;

Crains à ton tour de tes forfaits

Que le Ciel ne se vange;

Hélas! nous ressentons des coups

Que tu mérites mieux que nous.

 

Sous une libre et douce loy,

Nous vivions sans traverse;

Falloit-il pour te faire Roy

Rompre nôtre Commerce?

Hélas! nous en sommes plus gueux,

Et tu n’en est pas plus heureux.

 

La chute est le sort des Tyrans,

Tu ne scaurois le croire.

Quand tu veux, comme les Titans

Porter si haut ta gloire;

Hélas! puisse-tu l’éprouver

Du Trône où tu sceus t’elever.

 

Sur la Place des Victoires.            1690                                          [230]

A la victoire.

 

Cadedis! quand je vois ne scais à quel propos

Sur le Chef de Louis poser une Couronne;

Je ne puis m’empescher de vous dire en deux mots,

Que véritablement je vous trouve bien bonne.

Eh! Qu’à t’il fait ce Monsieur le Heros?

Qu’écraser ses sujets, sans épargner personne;

A tous honnestes gens préférer les cagots;

Se laisser gouberner par l’antique Scaronne.

Aux Imbéciles, aux fats, confier les Affaires;

Par de honteuses Paix, finir d’injustes guerres;

Nous donner pour Bourbons de petits Montespans

Et vous vouler par là le couronner de gloire?

Mais non, je m’aperçois que vous êtes en suspens.

Cadedis haut le bras, Madame la victoire.

 

Chanson                                                    1690                                          [231]

Sur l’air des Feuillantines.

Sur N……. le Tellier Archevesque Duc de Reims.

 

Dans un amoureux combat,

                  Un Prélat,

Manque de force et s’abat;

N’est-ce pas une avanture?/ Qui paroit, qui paroit contre nature?

A se ……………………………..

 

Pour réparer cet affront

                  La d’Aumont,

Lui montra son blanc teston;

Mais malgré cet étalage

Il n’en fit, il n’en fit pas d’avantage.

 

Le Pere Gaillard amoureux,

                  Plus heureux.

Et cent fois plus vigoureux,

Répara par six reprises,

L’affront qu’il fit à l’église. / Cet affront, cet affront fait à l’église.

 

Autre                                                           1690                                          [232]

Sur l’air: de Marinne, ou: Il a battu son petit frere.

 

Le Chtr de Bouillon, au Prince de Richemont, fils naturel de Charles IId. Roy d’Angleterre et de Madame de Portsmouth (Pennencouet de Keroual)

 

Ȏ toy! dont la beauté charmante,

Passe de loin tout ce qu’on chante

De la beauté des immortels.

Si tu veux qu’on t’eleve un Temple,

Et qu’on te dresse des Autels,

Laisse toy faire/ f..tre à leur exemple.

 

Chanson                                                    1690                                          [233]

Sur l’air. Dormez roulette

C’est le François qui parle au Prince d’Orange à qui il a tant de fois tourné le dos.

 

Préparez vous Nassau,

Prenez viste un Clistere.

Ça en voicy un tout chaud

Tient l’apotiquaire.

Ça le derriere,

Ça mettez vous comme il faut;

C’est ici, et non en guerre,

Qu’il faut tourner le dos.

 

Réponse

Que voulez vous de moy,

Maudit Apotiquaire?

Je vous mets le canon

Dans le derriere,

Ah! quelle misere;

Je crois que je suis perdu,

Et jusqu’en Angleterre,

J’aurai le canon au cu.

 

Autre                                                           1690                                          [234]

Sur l’air: Or nous dites Marie

 

Illustre Présidente,

Nous direz vous comment,

Vous fûtes pénitente

De ce Curé galand?          Mauroy Curé des Invalides

Sa jambe violette,

Ses yeux pleins de douceurs,

Ses gans et sa toilette

L’ont fait mon Directeur.

 

Chanson                                                    1690                                          [235]

Sur l’air du Confiteor.

Sanleque fit ce couplet pour Mademoiselle Langlois.

 

J’estois assez bon Directeur

Quand je gouvernois d’autres belles;

Je reglois assez bien leur coeur.

J’avois de bons avis pour elles;

Mais, belle Iris, quand je vous vois,

Je garde mes avis pour moy.

 

                  Anneé 1691                                            [237]

 

Chanson                                                    1691                                          [239]

Sur l’air de Joconde.

Sur Monsieur de Mauroy Curé des Invalides.

 

L’amour range tous sous ses loix,

                  Quoique l’on puisse faire;

Témoin le Tartuffe Mauroy

                  A qui Doujat* sceut plaire.

Tous ces grands faiseurs d’oraisons

                  Et ces signes d’Apostres,

Sont sur les tendres passions,

                  Hommes comme les autres.

 

Quelque triste que soit le sort

Du Conseiller le Boindre,

Il auroit certe un fort grand tort

                  De gémir et se plaindre;

L’Argent, le Carosse, et le lit

                  Qu’il prit du Missionnaire,

Font voir qu’il est sans contredit

                  Un cocu volontaire.

 

Autre                                                           1691                                          [240]

Sur l’air Pierre Bagnolet

Sur ……… Gilbert frere de Madame d’Armemonville, fait President des Comptes

 

Messieurs de la Chambre des Comptes,

Laschez vitement tous vos Chats;

Serrez vos Registres et vos Comptes,

Gilbert est tout rempli de Rats.

                  Il a des Rats.                         Bis

                  Dans sa dépense

Dans sa dépense et dans ses draps.

 

Pour Belin (1) ce n’est pas grand domage,

Qu’il air pris femme en lieu si bas;

Il n’a pas gâté grand ménage,

En s’alliant avec les Rats.

 

(1)   Fermier general marié avec la soeur de Madame d’Armenonville.

 

Autre                                                           1691                                          [241]

Sur l’air de Lampon etc.

Sur Vivien l’Abbé Seigneur de Bulonde, Lieutenant géneral. leva le Siége de Coni en piémont l’an 1691.

 

Un certain bruit court ici,

Que Bulonde a pris Coni;

Il a menti s’il s’en vante,

Il n’a pris que l’epouvante.

Lampon lampon,

Camarade lampon.

 

Autre                                                           1691                                          [242]

Sur l’air: Quand Iris prend plaisir a boire.

 

Admirez les hauts faits de guerre,

Du valeureux Duc de Bavieres;

Il a pris Bellegrade autrefois;

Si l’on eut pû compter sur sa parole,

Il exterminoit les François;

Mais par bonheur tous ses exploits,

Ont abouty à Carmagnole.

 

Chanson                                                    1691                                          [243]

Sur l’air del’Echelle du Temple.

Sur la mort de Monsieur de Louvois.

 

Cy gist le Seigneur de Louvois,

Elevé favori du Roy

Par son habilité profonde;

Du Royaume il portoit le fais;

S’il fut si juste en l’autre monde,

C’est qu’il avoit seul les relais.

 

Chanson                                                    1691                                          [245]

Sur l’air des Triolets.

 

Avec le Duc de la Ferté,

Le premier Chansonnier de France,

Vouloir faire societé

Avec le Duc de la Ferté,

C’est bien grande témérité.

Je le dis comme je le pense,

Avec le Duc de la Ferté

Le premier Chansonnier de France.

 

Chanson                                                    1691                                          [247]

Sur l’air des Contrevéritez

Couplets faits à Rome; par Coulanges.

A Monsieur le Duc de Nevers.

 

                  Rome êtoit aimable,

                  Plaisant, agréable,

Pendant le regne de Nevers;

                  Toujours de jolis vers,

                  Toujours une Table,

                  De peu de Couverts,

De bon vin, surtout le Connestable.                   Un vin de fratoche qui donnoit le Connestable Colonne.

                Et cent mets divers.

 

                  Maintenant Coulanges,

                  Chose fort étrange;

Ne boit, ne mange, ny ne dort;

                  Voila son triste sort.

                  Absent de Thiange*,                                           *Madame la Duchesse de Nevers.

                  Il dépérit fort.

Si bientost il ne revoit cet ange,

                  C’est un homme mort.

 

                  Rome n’est plus Rome

                  Rome est pour moy comme,                                           [248]

Seroient les plus affreux déserts.

                  J’ay l’esprit à l’envers.

                  La goute m’assomme,

                  Et frappe mes nerfs;

En un mot, je ne suis plus cet homme,

                  Du temps de Nevers.

 

                  Qu’elle m’a sceu plaire,

                  Voire Tabatiere (1),

                  A Genes! quoi donc! en fait on?

                  Monsieur de Ratabon,

                  M’envoya n’aguieres.

                  Ce précieux don.

Le travail ne tient point du vulgaire.

                  Le ressort est bon.

 

Mais quelle espérance,                

                  Aprés tant d’absence?

Je conçois d’un tel souvenit,

                  Qui me pourra tenir?

                  Si jamais en France

                  Je puis obtenir,

Comme icy chez vous sans conséquence,

                  D’aller et venir.

 

Voyez la Reponse à cette Chanson qui commence ainsy

Croyez cher Coulanges.

 

(1)   Une Tabatiere que Monsieur de Nevers envoya a Monsieur Coulanges de Genes par Monsieur de Tatabon qui y etoit lors Resident.

 

Autre                                                           1691                                          [249]

Sur le même Air.

En revenant de Rome. Sur une mauvaise nuit qu’on eut à Radicofani, par le bruit épouvantable d’une infinité de bestiaux de toutes les façons assemblez au tour de l’Hostellerie qui est en pleine campagne, pour une foire le lendemain.

 

                        Rien ne me contente,

                        Et tout m’espouvante,

A Radicofanci, grands Dieux!

                        Je n’ay devant les yeux

                        Qu’une trouppe errante

                        De monstres affreux.

N’est-ce point que Circé la méchante

                        Habite en ces lieux?

                                                      par Coulanges.

 

Autre                                                           1691                                          [250]

Sur l’air: A la venuë de Noël

Sur la prise de Mons

 

A la venuë de Bontemps,

Ce fut grande joye à Paris,

Jamais on ny fut plus content,

L’on vit sauter grands et petits.

 

Bonne nouvelle il aportoit

Que mons* avons capitulé                             *la ville de Mons

Et que Guillaume s’aprochoit,

Pour voir entrer sa Majesté.

 

Autre

Sur l’air: Alleluya

Sur le mesme sujet

 

Quand Bontemps se fut presenté

De la part de sa Majesté;

Madame tout haut entonna, Alleluya.

 

Enfin, dit elle, Mons est pris,

Qu’on fasse des feux dans Paris;

Bientost la Ligue tombera, Alleluya.

 

Chanson                                                    1691                                          [251]

Sur l’air. Si Bourdaloue

Contre les Femmes.

 

Les femmes de l’anneé présente

Sont de nature de Melon;

Il en faut entamer cinquante

Pour en trouver un qui soit bon.

 

Autre                                                           1691                                          [252]

Sur l’air: Depuis Janvier etc.

 

Ne soyez point si délicat,

Mon Neveu, je vous fais Légat.

Laissez tous vos Pages à Rome

La France est un méchant état,

On y fit mourir un saint homme;

Mon Neveu je vous fais Légat.

 

Chanson                                                    1691                                          [253]

Sur l’air Si Bourdaloüe.

Sur Mauroy pere de Saint Lazare et Curé des Invalides.

 

Si Mauroy le Missionnaire

Rentre jamais dans son couvent,

On punira bien son derriere

Des fautes qu’à fait le devant.

 

Autre                                                           1691                                          [254]

Sur l’air: L’amour plaît malgré ses peines.

de l’Abbé Martinet.

 

L’amour disoit en colere;

Vraiment, si je suis tout nud,

C’est que ma putain de mere

Mange tout chez la Cornu.

 

Autre                                                           1691                                          [255]

Sur l’air du branle de Metz.

Sur les fréquentes visites de François de Harlay Archevesque de Paris, chez la Duchesse de Lesdiguieres (Gondi)

 

Que sur la fin de vôtre âge

Vôtre goût paroist mauvais;

Et l’on ne croiroit jamais

Qu’un tel objet vous engage;

Si par vôtre assiduité

L’on ne s’en fut bien douté.

 

La Varenne plus jolie,

Dites, pourquoi la quitter?

Puisque vous vouliez changer,

Pour contenter vôtre envie,

Vous deviez donc choisir mieux

Pour vous rendre plus heureux.

 

Cherchez donc qui vous ragoute

Quelque mets plus délicat;

Autrement charmant Prélat,

Ma foyvous ne voyés goute;

Profitez de mes avis

A vieux chat tendre souris.

 

Réponse                                                                                                          [256]

Si je vois cette Déesse

C’est que j’aime le fracas;

Ce n’est pas pour ses appas,

Ni pour sa tendre jeunesse;

Mais sa seule qualité

A flaté ma vanité.

 

Hélas! cette bonne Dame

Est dans la dévotion,

En sortant de sa maison,

Elle vient à nôtre Dame,

D’une tres grande ferveur

Entretenir son Pasteur.

 

Chanson                                                    1691                                          [257]

Sur l’air……………

Sur le Pape Alexandre VIII (Ottobuoni)

Le Saint Pere en l’autre monde,

Les Cardinaux ont passé l’Onde.

Mangeons gras, le Siége est vaccant.

De manger de tout nous avons licence.

                        Le Cardinal prédestiné

                        En faveur de son 1er. né.

                                    Nous donnera,

                                    Nous donnera,                   

                                    Son indulgence.

 

Autre                                                           1691                                          [258]

Sur le petit Air de la Fronde.

Sur Monsieur de Barbezieux.

 

L’on doit être surprix du choix

D’un des plus grands Rois de la terre

D’avoir pris un jeune Bourgeois,

Pour le Ministre de la guerre,

Qui passe le jour à l’orgner

Comme la nuit a yvrogner.

 

Pour paroître de qualité

Il veut avoir une Princesse (1)

Par les Conseils de la Ferté.

Elle répond à sa tendresse;

Ce fut derriere un paravant

Qu’elle en fit un heureux amant.

 

(1)   la Duchesse de Valentinois fille de Monsieur le Comte d’Armagnac.

 

Chanson                                                    1691                                          [259]

Sur l’air. Quand le péril est agréable.

Contrele P. de Mauroy Missionnaire.

 

Tout Saint Lazare est en colere

De voir Mauroy ce grand béat

Se déclarer un Apostat,

Un fourbe, un Adultere.

 

Que deviendront, disent ces Peres,

Aprés un coup si malheureux,

Nos longs toupets, nos cours cheveux?

Et nos mines séveres?

 

Que dira-t’on de nos retraites,

Qui nous faisoient chérir des sots?

Passeront nous pour des dévots

Dans toutes les Gazettes?

 

Ne voit on pas ce séminaire

Rempli sans cesse de Marchands;

Qui nous veulent rendre garands

Des faits de ce faux frere.

 

Enfin Joly (1) dans cette Eglise

 

(1)   General de Saint Lazare. Lorsqu’on lui vint dire l’affaire de Mauroy, fit entrer les Marchands l’Eglise disant qu’il alloit prier Dieu pour la conversion des pecheurs.

 

A fait entrer ces bonnes gens;                                                         [260]

Le temps n’est plus des innocens,

Cela n’est plus de mise.

 

Vous voyés que sans mistere

Pour réparer un si grand tort;

Il nous faut faire quel qu’effort

Pour nous tirer d’affaire.

 

Il vaut mieux pendant sa vie

Boire sans cesse du bon vin,

Que d’avoir jamais le chagrin

De s’en fuir pour Silvie.

 

Autre                                                           1691                                          [261]

Sur l’air: Or nous dites Marie

 

Le P. Bouhours accusé d’avoir fait un Enfant à une Niéce de Monsieur de Vauban laquelle accoucha chez un Procureur où elle avoit êté mise par ce pere en pension. On fit les Couplets qui suivent en Dialogue, a l’imitation d’Ariste et d’Eugene.

 

Angelique

Ah! mon Reverend pere,

On dit je ne scai quoi,

Dans nôtre Monastere;

Qui nous remplit d’effroy.

C’est une chose étrange

Qu’un homme de mon nom

Qu’on prendroit pour un Ange

Passe pour un Démon.

 

Pour apaiser nos meres,

Découvrez vous à moi;

Révélez le mistere

De ce que je ne scay quoi.

Croyez que c’est l’envie

Qui seme ce faux bruit,

Voyez la Calomnie                                                                                    [262]

Comme elle me poursuit.

 

Angel.          On dit que c’est l’affaire

                        De vôtre Procureur;

                        Cet homme là mon pere

                        Est un franc chicanneur.

Eugene.      Mais ce qui me chagrine,

                        Est un je ne scai quoi

                        Que la pauvre Delphine

                        A mis bas malgré moi.

 

Angel.          Mais, quel est donc le traitre?

                        Et quel est l’indiscret,

                        Qui dit l’avoir veu naître?

                        Malgré vôtre secret,

Eugene.      Vous connoissez arriste,

                        Il vous dira le fait;

                        C’est quelque Janseniste

                        Qui m’a lancé ce trait.

 

Angel.          Un Cléante, un Philarque

                        Disciples de Pascal,

                        Arnaud l’hérésiarque,

                        Vous auront fait ce mal.

Eugene.      J’en suis seur Angelique,

                        N’en doutez nullement.

                        D’autant que je m’aplique                                         [263]

                        Au nouveau Testament (1).

 

Angel.          Est-ce un mal qu’on traduise

                        Les Dogmes de la Foy?

                        Est-ce un mal qu’on détruise

                        Certain je ne scay quoi

Eug.               Ils craignent ma préface,

                        Ils s’en prendront à moy;

                        Car leur grave efficace

                        Est ce je ne scay quoi.

 

Angel.          Mais ils voudroient peut être,

                        Que leur je ne scai quoi,

                        Eut produit & fait naître

                        Vôtre je ne scay quoi.

Eug.               Sans grace on se presente,

                        Les deux premiers parens

                        La grace est suffisante

                        Pour faire des enfans.

 

Angel.          Mais tout de bon mon pere,

                        Craignez vous sans raison

                        Qu’on vous fasse une affaire

                        De cette trahison?

Eug.               J’en suis quitte Delphine,

 

(1)   Il travailloit à la traduction qui n’a pas eu un heureux evenement.

 

Grace à mon bienfaiteur (2),                                                             [264]

L’enfant qu’on nous destine,

Est pour le Procureur.

 

(2)   L’Archevesque de Paris (Chanvalon) accommoda cette affaire, et fit taire le Procureur, qui d’abord avoit fait grand bruit. Ce fut le President de Lamoignon qui engagea, pour faire plaisir aux Jesuittes, le procureur de prendre l’enfant auquel il avoit travaillé peut être plus efficacement que le P. Bouhours plus vieux que lui. Monsieur de Lamoignon se fit donner les Lettres du R.P. et les garda. Il s’en servit lorsque les Jesuittes voulurent entreprendre Monsieur Baillet Precepteur de son fils, il les arresta en leur disant le plaisir qu’il leur avoit fait, et qu’il êtoit le maître de renouveller l’affaire par les Lettres.

 

Autre                                                           1691                                          [265]

Sur l’air de Joconde.

Sur le même sujet que la précédente.

 

Sur ce triomphe de l’amour,

                  Disent les Jansenistes,

N’oubliez le Pere Bouhours;

                  La gloire des Jesuites,

Autrefois on les accusoit,

                  Du vice d’Italie;

Mais la dévote qu’il aimoit,

                  Les Peres justifie.

 

En lui faisant un bel enfant,

                  Ne croyés pas critiques,

Qu’il ait fait un péché si grand,

                  Il craint Dieu et s’en pique;

Mais quand sans songer au Seigneur

                  On cede à la nature

L’emportement d’un tendre coeur,

                  Ne rend point l’ame impure.

 

Autre                                                           1691                                          [266]

Sur l’air Tarare ponpon.

 

Le Général Joly d’une humeur fort bizare,

Deffendoit à Mauroy la tendre passion;

Sur le ton de Fanfare, l’Invalide, répond

Mon bon pere Tarare ponpon.

 

L’amour de deux rivaux pour Philis se déclare

Rubentel vieux soldat, Mauroy jeune Caton;

La Caton fit fanfare; car il eut du bon bon,

Le Sodat fit tarare ponpon.

 

Chanson                                                    1691                                          [267]

Sur l’air de Pierre Bagnolet.

 

Hollondois chantez bien la game

Au Général de vos Estats;

Et toute la terre vous blame

De lui donner tous vos Ducats.

                  N’en douter pas;               bis

Castanaga (1) baisoit sa femme

Quand Valdeck arriva bien las.

 

Camarades sans nous abattre

Ne songeons qu’a doubler le pas;

Luxembourg fait le Diable à quatre;

Ayons des pieds, s’il a des bras.

                  Car des éstats,                                     bis

Nous avions ordre de nous battre,

De vaincre nous ne l’avions pas.

 

(1)   Antoine Agourto Marquis de Castanaga, Gouverneur général des pays bas espagnols.

 

Autre                                                           1691                                          [268]

Sur l’air de Lanlurlu.

 

De Frandres et d’Espagne,

Les Ambassadeurs,

De la Grand’ Bretagne;

Et les Electeurs

Se sont venus plaindre,

D’avoir partout entendu,

                  Lanlurlu lanlurlu.

 

On a fait deffense,

De ne plus chanter,

La Chanson qu’on chante,

De lanlurelu:

Si plus tu la chante

Tu seras ma foy pendu,

                  Lanlurlu lanlurlu.

 

Chanson                                                    1691                                          [269]

Sur l’air: Heureux l’amant qui baise sa Maîtresse.

 

Chez la Messié pere Bouhours badine

                  Chez la Messié.

                  Il se croit un Xavier;

Entre ses bras il void la Cochinchine

                  Chez la Messié

Il se croit un Xavier.

 

Embarquons nous sans craindre la tempeste,

                  Embarquons nous,

                  Dit il, à ses genoux;

C’est là mon sort, oh! la bele conqueste!

                  Embarquons nous,

                  Dit il, à ses genoux.

 

En vray Mauroy il a fait le voyage,

                  En vrai Mauroy.

                  Il a planté la Foy.

Dans peu de tems on verra son ouvrage,

                  En vrai Mauroy,

                  Il a planté la Foy.

 

Nos Directeurs, grand Roy, peuplent le monde,

                  Nos Directeurs,

                  Se font des Serviteurs                                                          [270]

En ta faveur leur amour est fécond.

                  Nos Directeurs

                  Se font des Serviteurs.

 

Et depuis quand changent ils de maniere?

                  Et depuis quand,

                  Prennent ils le devant?

Que deviendra desormais le derriere?

                  Et depuis quand

                  Prennent ils le devant?

 

Autre                                                           1691                                          [271]

Sur l’air: de flon flon.

A Monsieur le Prince de Turenne dans un embarras en place d’Espagne (à Rome) où ce jour là ce faisoit le cours: par Coulanges.

 

Quoique de bonne mine,

Et de grande Maison;

Dans vôtre Poltronchine (1);

Je crains sur mon Chignon,

Et flon flon la riradondaine,

Et flon flon la riradondon.

 

(1)   Carosse à Brancard ainsi apellé à Rome.

 

Autre                                                           1691                                          [272]

Sur l’air: Tranquilles Coeurs.

Faite à Rome dans l’endroit, où êtoit autrefois le grand Cirque; par Coulanges.

 

Où sont allez tant de héros?

Où sont leurs Palais magnifiques?

Je ne vois partout que des os;

Partout que des restes antiques;

Et l’on ne trouve plus au Palais des Cezars

Que Serpens & Lézards.

 

Chanson                                                    1691                                          [273]

Sur l’air Tranquilles Coeurs.

En revenant de Rome.

par Coulanges.

 

Défaits enfin de ces Abbés,

Qui se donnoient un air capable;

Et des gens, qui, de tous côtés

S’en venoient nous presser à table.

Du moindre desjeuner, nous faisons plus de cas

                  Que des plus grands repas.

 

                  Je vais les attendre à Paris,

                  Tous ces Abbés de conséquence.

                  Que d’icy je les vois petits

                  Devant certaine Révérence (1)!

Tel qui parloit si haut, en France de retour,

                  Se trouvera bien court.

 

(1)   le Pere de la Chaise Confesseur du Roy.

 

Autre                                                           1691                                          [274]

Sur l’air: Où êtes vous allez mes belles amourettes?

Faite à Rome, par Coulanges.

Sur le Cardinal de Bouillon.

 

Puisqu’enfin le Ciel a permis

Que je sois hors de France

Sur les bords du Tibre assis:

Je songe souvent à Paris;

Et je passe le tems tout rempli d’espérance

D’y revoir bientôt mes bons amis.

 

Chanson                                                    1691                                          [275]

Sur l’air: Je ne scaurois

Sur la Prise de Mons en 1691. en presence du Prince d’Orange campé à N.D. de Hal.

 

Louis ayant quitté Versailles, / Louis est parti de Versailles

Nous a fait viste venir; / Pour nous venir avertir.

Il renverse nos murailles.

Nassau viens nous secourir.

                  Je ne scaurois;

Il faut donner la Bataille,

                  J’en mourrois.

 

Sur Louis XIII.                                         1691                                          [277]

& Louis XIV

 

Louis XIII. gagna la Bataille d’Avin,

Dessy Lamboy, prit l’Alsace et Thurin;

Toujours vainqueur sur la terre et sur l’onde.

Peut être eut il tenté de conquérir tout le monde;

Si le Ciel de tout temps ne l’avoit destiné

Pour triomphe à son Fils, à Louis Dieudonné.

 

Ce Roy fait oublier tous les Rois ses Ayeux,

Ses grand exploits sont gravez sans les cieux.

De sa valeur l’Europe est étonneé.

Louis d’intelligence avec sa destineé;

Dans ses vastes projets craint si peu de revers,

Que son grand nom suffit contre tout l’univers.

 

Chanson                                                    1691                                          [279]

Sur l’air de Jean de Vert.

Sur le mariage de Madame la Presidente Barentin, avec N…. Damas de Cormaillon Gentilhomme de Bourgogne Ingenieur, avanturier à qui elle fit la fortune. Il fut tué au Siege de Namur en 1692.

 

Eut on crû que la Barentin,

Qui faisoit tant la fiere,

Se fut coïffeé d’un blondin,

Qui n’a que la rapiere;

Qui ne peut pas servir delongtems

Une femme qui fut du tems

                  De Jean de Vert.

 

Scavez vous que la Barentin

A son douzieme lustre,

A fait avec un beau blondin,

Un mariage illustre?

Qui n’a pour but que le déduit,

Et qui fait icy plus de bruit,

                  Que Jean de Vert.

 

Si de l’aiguillon de la chair

Vous sentirez la piqueure;

Barentin sans payer si cher,                                                             [280]

Une mince figure;

Pour peu de chose un gros manan,

Vour eût fait ce qu’on fit du tems

                  De Jean de Vert.

 

Vôtre étoille cher Cormaillon,

N’est pas des plus commmune.

Sans crainte d’être Cornaillon

Vous avez fait fortune;

Vous ne serez cocu ny gueux,

N’est-ce pas être plus heureux

                  Que Jean de Vert.

 

Chanson                                                    1691                                          [281]

Sur l’air de Tarare ponpon

Sur la Condamnation de Mauroy Curé des Invalides.

 

Monsieur l’Official Critique et fort bizare,

A condamné Mauroy a dix ans de prison;

                  Sur le ton de fanfare;

Mais sans doute il répond,

Official tarare ponpon.

 

Monseigneur de Lion (1), qui n’est point un barbare,

Et qui scait que l’amour ne veut point de prison

                  Rira de la fanfare;

                  Dira sur le dicton

Official tarare ponpon.

 

Le Pape (2) d’aujourd’huy d’un mérite si rare,

Pour l’amour d’une Iris, se moque de prison;

                  Blamera la fanfare;

                  Je l’entends qui répon,

                  Official tarare ponpon.

 

(1)   Neuville Villeroy Archevesque de Lion.

(2)   Alexandre VIII. Pape.

 

Chanson                                                    1691                                          [283]

Sur l’air de Lanlurlu.

Par Coulanges.

 

On offre à Dom Live (1),

Ou femme, ou chapeau;

Cette alternative

Trouble son Cerveau;

Son éstoit est d’être, ou cardinal ou cocu,

                  Lanlurlu, lanlurlu.

 

                  Tous les Pignatelli

                  Au Ciel font des voeux,

                  Pour qu’on les apelle

                  Au rang de Neveux.

Le Pape s’en moque, le Népotisme est tondu,

                  Lanlurlu etc.

 

                  Maintenant dans Rome

Le Sbirre (2) sans peur,

                  Va comme un autre homme,

                  On lui fait honneur.

Nôtre Pape est ferme, c’est un vieillard résolu.

                  Lanlurlu etc.

 

(1)   Dom Livio fort riche et mal basti neveu du feu Pape InnocentXI. Odescalqui.

(2)   Sbirres sont des Sergens. La franchise des quartiers des Ambassadeurs qui fut longtems contesteé, et enfin accordeé à Alexandre Smit.

 

Vouloit le Saint Pere,                                                           [284]

Le jeune Ottobon,

Qui lui laissât faire

Poupone & Poupon;

Il a fait des siennes, tant que son Oncle a vécu

                  Lanlurlu etc.

 

                  Quand Dom Marco (1) passe

                  Je mets mon Chapeau,

                  Et fais la grimace,

                  A ce laid museau.

Mon Dieu, le sot homme! comme il fait l’entendu,

                  Lanlurlu etc.

 

                  Il est ridicule

                  Que je sois parti,

                  Sans baiser la mule,

                  De Pignatelli (2);

Ce n’est pas ma faute, il s’estoit cassé le cul

                  Lanlurlu lanlurlu.

 

(1)   Un neveu du Pape Ottobon qui ostoit à peine son Chapeau, et qu’on ne regarda plus dés que son oncle fut mort.

(2)   Quand ce Pape fut fair j’estois malade, et quand je fus pour le voir, il avoit fait une si furieuse chute que je ne pus avoir cet honneur.

 

Autre                                                           1691                                          [285]

Sur l’air de Jean de Verd.

Faite à Gennes, par Coulanges.

 

Puisqu’enfin nôtre Ambassadeur             l’Abbé d’Estrées. nommé Ambassadeur à Rome.

A remis pied à terre,

Peut on lui rendre trop d’honneur?

Armons nous tous d’un verre,

Et beuvons pour hausser le tems;

Car ce sont là les sentimens

Des gens de mer, des gens de mer.

 

Il est constant que Ratabon (1)

Fait honneur à la France;

Le Roy doit avoir tout de bon

Esgard à sa Dépense.

L’heureux abry que le Gavon (2)

Des gens de mer, des gens de mer.

 

Vivons icy tranquillement,

Faisons y bonne chere;

 

(1)   Lors Resident à Gennes, y vivant aussi noblement qu’un Ambassadeur.

(2)   C’est où je logeois dans la Galere.

 

Il ne faut pas légerement                                                                    [286]

Remonter en Galére.

Le plus seur, est en ce païs

De se conformer à l’avis

Des gens de mer, des gens de mer.

 

Bon mot                                                     1691                                          [287]

d’Alexandre Viii. (Ottoboni)

 

L’autre jour un Ambassadeur

De sa Majesté Catholique,

Dans une Audience publique,

Voulant par un discours trompeur

Faire accroire à Nôtre Saint Pere

Que la France êtoit aux abbois,

Et reduite à telle misere

Qu’elle périroit dans six mois.

 

Le Saint Pere aprés un sousrire,

Répondit, rien n’est plus certain;

Car elle va chercher du pain

Chez les Alliez de l’Empire.

 

Sur la mort de Monsieur de Seignelay    1691                        [288]

 

Cy gît, ce n’est pas grand domage

Que pour Tourville, et pour Cavois,

Un Ministre d’Estat peu sage;

Qui s’il eût imité Louvois

Eut fait un bien meilleur usage

Des grands biens qu’il en partage;

Mais chacun dit tout d’une voix

Que cet imprudent personnage.

Amangé tout & par delà

Ce que ton pere nous vola.

 

Chanson                                                    1691                                          [289]

Sur l’air de Joconde.

A Monsieur le Cardinal de Bouillon au Conclave de 1691.

Par Coulanges.

 

Que par vous la Maison Conti

Ait un dixieme Pape;

Faites-nous le Duc de Poly

Neveu de pied en cape;

Qu’Aquasparte de son costé                        la Duchesse.

Soit la plus riche Niece.

Ah! remettez la Papauté

Dans l’ancienne Noblesse.

 

Autre                                                           1691                                          [290]

Sur l’air: Tourelouribo.

Impromptu fait à Rome, par Coulanges, en voyant passer le Cardinal Cibo.

 

Voila le Doyen du sacré Colege,

                  Cibo, Tourelouribo;

C’est un vieillard qui Papege,

                  Cibo, tourelouribo;

Mais c’est un Pape de Neige

                  Haho! tourelouribo.

 

Autre                                                           1691 (Fevrier)                      [291]

Sur l’air des Rochelois.

Pour Monsieur l’Abbé de Noirmoustier (la Tremoille), qui affectoit quelquefois à Rome trop de sévérité pour les parties de plaisir.

 

Pourquoi sans rime et sans raison,

Prendre lamine d’un Tronson? (1)

Et se déguiser de la sorte?

Nôtre Saint Pere (2) est assez mal,

Et point du tout il ne comporte

De se masquer ce Carnaval.

 

A Rome il faut être charmant,

Et suivre son temperament,

A Laon, trancher du grand Vicaire, (3)

Vivre enfin selon les Païs.

Quant à moi je n’estime guere

Le nez d’un Rominagrobis.

 

(1)   Autrefois Supérieur du Séminaire de Saint Sulpice.

(2)   Alexandre VIII. Pape Ottoboni qui se mouroit dans le tems du Carnaval.

(3)   L’Abbé avoit êté en France grand vicaire de l’évesque de Laon.

 

Autre                                                           1691                                          [292]

Sur l’air: Quoi! camper en cette saison?

A Monsieur l’Abbé de Polignac, à Gennes.

par Coulanges.

 

                  Quoi! partir le premier de Juillet?

Chargé pour la Cour d’un gros paquet,

                  Et garder à Gennes le mulet?

Voila n’aller pas si vîte qu’un trait,

                  Voila n’aller pas si viste.

 

                  Vous dirés, manque de seureté,

Le meilleur Courrier est arresté.

                  Ouida; mais en bonne vérité;

Un Port est-il sans Félouques, l’Abbé?

                  Un Port est-il sans Felouques?

 

Autre                                                           1691                                          [293]

Sur l’air des Triolets.

Sur la Goute, à Rome aprés le départ de Madame la Duchesse de Nevers. par Coulanges.

 

Chacun me presente le poing;

De peur qu’un faux pas je ne fasse.

Sans aide je ne marche point,

Chacun me presente le point

Que je deviens oiseau de chasse.

Chacun me presente le poing

De peur qu’un faux je ne fasse.

 

Ah! mon Dieu le cruel destin!

De tomber en métamorphose,

Ma goute en est le grand chemin,

Ah! mon Dieu le cruel destin!

Et que l’ennuy de vivre enfin,

Toujours perché sur quelque chose.

Ah! Mon Dieu le cruel destin!

De tomber en métamorphose.

 

Le dernier jour du mois de Mars,

Fut le dernier jour de ma vie.

Diane à six heures trois quarts,                                                                       [294]

Le dernier jour du mois de Mars

Quitta le séjour des Cezars,

Pour retourner en sa Patrie,

Le dernier jour d mois de Mars

Fut le dernier jour de ma vie.

 

Autre                                                           1691                                          [295]

Sur l’air de la grosse Bourguignone.

Adieu à 21. Officiers des Galeres de France restez à Rome pour accompagner Monsieur l’Ambassadeur (l’Abbé d’Estreés) qui de tems en tems 6. à 6. s'en retournerent en France.

 

Sans Messieurs des Galeres,

Pourrons nous vivre icy?

Cabannes, Savonnieres,                les 6. 1ers. qui partirent

La Brêteche, Eserinville,

Vous allez faire gile;

Ah! que l’Ordre signé par Pontchatrain

Me donne de chagrin!

 

Pour moi, cher Savonnieres,

Faites un Compliment,

Auxdeux freres Lubieres,

A Cigogne, a Fontblan,                     ceux qui êtoient partis.

A l’aîné la Brêteche.

Que rien ne vous empesche,

De caresser Montolieu, de ma part,

Dagu, Bissy, du Bar.

 

Embrassez bien Tourette,                                                                   [296]

Et Cologne à son tour;

Dites que je souhaitrre

Mille biens à Teincour.

Je fais la révérence

Au Chevalier de Vance;

Et je finis mes Complimens enfin,

Par Saint Pol, & Marin.

 

Sur le Marquis de Sourdis             1691                                          [297]

 

Fantassassins, si Sourdis pique et nous abandonne

Comme vous le scavez, et comme on nous l’ecrit;

Ce n’est pas qu’il ne soit brave de sa personne;

                  Mais c’est qu’il a l’ame trop bonne

                  Pour hazarder le Saint Esprit.

 

Sur Madame de Nesle                     1691                                          [298]

 

Or dites nous, dormez vous bien la belle?

Le coeur est il fermé comme les yeux?

Passant cette nuit par ces lieux,

J’ay souhaitté que le charmant Nesle

Fut au matin l’aimable Barbezieux.

 

Chanson                                                    1691                                          [299]

Sur l’air de l’Eschelle du Temple.

Au sujet de l’Opéra d’Astreé.

par Monsieur de Saint Gilles.

 

Je laisse à son gré Céladon,

Se refraichir dans le Lignon;

J’avois résolu d’en médire,

Bien des gens m’en avoient prié;

Mais est il besoin de Satire,

Quand le sujet est décrié?

 

Autre                                         1691                                          [300]

Sur le mesme Air.

Critique du couplet précédent.

 

Auteur d’une sote Chanson,

Qui veut critiquer Céladon;

Qui, diable ta dit, je te prie

Que le sujet soit décrié?

C’est sur toi que la raillerie,

Gille niais, va retomber.                                  Saint Gilles.

 

Si tu avois dit que les Airs,

Ne valoient pas mieux que les vers;

On t’eut passé cette Satire;

Mais que le sujet soit mauvais,

C’est donner occasion de dire,

Que tu n’est qu’un Gilles le niais.

 

Autre                                                           1691                                          [301]

 

Sur le même Air.

Réponse de Saint Gilles, à la Chanson précédente.

 

Naissant Auteur, esprit charmant,

Qui me raille si finement;

Vous êtes né pour la Satire.

Vous surpassez des Preaux;

C’est à vous ma foy, de médire.

Que vos commentemens sont beaux!

 

                  Sur le mesme sujet.

Votre Chanson a des attraits

Que les autres n’eurent jamais;

Elle me touche et je l’admire;

Mais aprenez moy vôtre nom,

Ou trouvez bon que j’ose dire,/ Si c’est un homme d’épeé qui soit l’auteur.

Que vous avez peur du bâton./ Que vous êtes un tres grand Poltron.

 

Autre                                                           1691                                          [303]

Sur l’air du role entier d’Amisodar dans Bellorophon. Que ce Jardin se change en un désert affreux.

Ordre au Maitre d’hostel de Monsieur le Duc de Chaulnes, pour un diner à Rome, où survint Madame la Duchesse de Nevers.

 

Rien n’est plus ennuyeux que tous ces grands repas,

                  Cher Honoré, nous voulons peu de plas,

                  Du vin exquis, et de plus d’une sorte.

Et que pour mieux manger, plat à plat on aporte;

C’est un metz excellent, pour le Duc de Nevers,

Qu’une Table fort libre, et peu de couverts.                          bis

 

Quel spectacle charmant se présente à mes yeux!

                  Une Divinité vient honorer la feste,

Dressons-lui des Autels, que pour elle on apreste

Le Nectar, le Nectar, qu’on boit dans les cieux.

Si vous vouliés pourtant, adorable Déesse,

                  N’estre icy bas qu’une Duchesse?

                  Au lieu de Parfums, et d’encens,

On pourroit vous offrir de cent mets differents.                                    bis

                  Cessez donc d’être immortelle;

                  Beuvez, et mangez comme nous,                                 bis

                  Voicy de meilleurs ragouts,                                             [304]

                  Poulardes, Perdrix, Sarcelles.

Un entremets parfait, des vins piquant et doux.

                  Cessés donc d’être immortelle;                                                     bis

                  Beuvés et mangez comme nous.

 

Chanson                                                    1691                                          [305]

Sur l’air: Ouy je le dis et le repete, ou Il a battu son petit frere.

Couplets fait à Rome, celui cy en passant devant le Palais Manchini aprés le départ de Madame la Duchesse de Nevers. par Coulanges.

 

Hélas! que ce Palais est vuide!

Je crois voir le Palais d’Armide (1);

Dépouillé de tous ses appas;

Enpartant de ces lieux aimables,

L’Enchanteresse de Damas,

Les a rendus insuportable.

 

(1)   Armide êtoit Reine de Damas. Madame de Nevers est de la Maison de Damas Thianges.

 

Autre                                                           1691                                          [306]

Sur le même Air.

Sur la retraite à Grosbois, de Monsieur de Fieubet Conseiller d’Estat; par Coulanges.

 

Je n’entends plus parler en France

Que de retraites d’importance,

De gens qui du monde sont las;

Pour moy s’il faut que je me cache,

Je reviens isi, sur mes pas,                            à Rome ou il êtoit

Me faire hermite au Mont Testache (1).

 

(1)   Sous ce Mont, sont des grotes remplies des meilleures vins d’Italie.

 

Chanson                                                    1691                                          [307]

Sur l’air. Reveillez vous belle endormi.

Critique de l’Opera d’Eneé. Par Madame des Houlieres. Les parolles sont de Fontenelle*, et la Musique de Colasse*. (au lieu de Capistron)

 

Moy qu’on a veu chanter Achille;

Moy qui n’ay point chanté Thétis;

Je chante un heros que Virgille

Chanta dans Rome au tems jadis.

 

Gens éclairez, Doctes Cervelles,

Admirateurs de Capistron;

Ne pensez pas que Fontenelle

Soit indigne d’une chanson.

 

Venez voir l’Opéra d’Eneé,

Hatez vous pour vous bien placer;

Mais déja la Toille est leveé.

Silence je vais commencer.

 

                  Prologue.

La félicité se partage

Entre les hommes et les Dieux;

Encelade avec son bagage                                                                 [308]

Trébuche en attaquamy les cieux.

 

                  1er. Acte

L’ingrat déserteur de Cartage,

Rebut de l’Oracle et des flots,

Par un troisieme mariage,

Veut s’asseurer un long repos.

 

L’Infante a beaucoup de tendresse;

Mais elle n’en fait pas semblant.

Le Troyen laisse sa maîtresse

Pour causer avec sa Maman.

 

Ȏ Venus! Ȏ Maman mignonne!

Montrez que je vous dois le jour;

Faites qu’on aime en ma personne

Un petit frere de l’amour.

 

Le Roy veut devenit grand pere;

Et la paix lui semble un grand bien.

Turnus n’a pour lui qui la mere,

Latinus aime le Troyen.

 

                  IId Acte.

On ferme pour la paix prochaine

Le Temple habité par Janus,                                                             [309]

Junon brise tout, et la Reine

Se réjouit avec Turnus.

 

Dans un bocage qu’on révére

La Princesse va soupirer.

Le Roy vient consulter son pere

Qui daigne souvent l’eclairer.

 

La fortune est toujours volage,

Sa haine n’est passans retour;

De long malheurs sont le présage

Des bien qui viennent à leur tour.

 

Faunus prétend que l’avinie

A son gré choisisse un époux;

La jeune Princesse est ravie,

Et cede aux transports les plus doux.

 

Au sortir d’un facheux nuage

Didon l’arreste, et lui fait peur;

Mais bientost elle prend courage

L’ingrat Troyen lui fait horreur.

 

Il vient et dit transporté d’aise,

Princesse que je suis content.

Tout beau, Seigneur, ne vous déplaise,                                                      [310]

Turnus doit du moins l’estre autant.

 

Quel coup mortel! quelle response!

Junon, ce sont là de tes coups.

Ah Ciel! faut il que je renonce

A l’espoir d’un himen si doux?

 

                  IIIe. Acte.

Turnus querelle la Princesse,

Parce que ses voeux sont flotans;

Elle demande avec adresse

Qu’on lui donne un peu plus de tems.

 

Souffrez avec moins de colere

Que je ne précipite rien

Dans le grand choix que je dois faire;

Il ny va pas pout peu du mien.

 

Je vous aimay dés vôtre enfance;

Je suis vôtre cousin germain.

Mon Cousin, sans une dispense,

Je ne puis vous donner la main.

 

La Princesse souffre avec peine

Que l’on médise du Troyen,

Et quoiqu’ait dit l’ombre affriquaine,                                         [311]

Eneé est un homme d’ésprit.

 

Turnus est beaucoup plus sincere;

Il scait aimer comme Amadis;

Mais il ignore l’art de plaire

 

Que Turnus enseigne à son fils.

Quelles sont ces voix éclatantes?

Que veut dire ce bruit confus?

La Reine conduit les Bacchantes.

On celebre aujourd’huy Bacchus.

 

Dans cette bachique cohüe,

On forme un projet inhumain.

Lavinie est fort retenüe,

La Reyne la veut mettre entrain.

 

Que ferez vous pauvre Princesse?

Il faut heurler avec les Loups;

La Reine, Bacchus, tout vous presse.

De choisir Turnus pour époux.

 

                  IVe. Acte.

Le Troyen que ce choix assomme

La réduit à s’en excuser,

Turnus accepte ce galant homme                               [312]

Le Combat qu’il peut refuser.

 

Dans une Coquille doreé,

On voit la Déesse d’amour.

Elle est brillante, elle est pareé,

Et plus belle que le beau jour.

 

Comment vous portez vous ma mere?

Vous négligez bien vos enfans;

Quel destin, quelle Loy sévere,

Loin de moy vous tient si longtemps?

 

Mon fils connoît mieux ma tendresse,

Lavinie est fole de toy;

Mais le coeur de cette Princesse

Est un don que tu tiens de moy.

Item Turnus porte une hache

Teinte dans le Lac sousterrain;

Mais je t’aporte une rondache

Qu’a fait pour toy le bon Vulcain.

 

                  Ve. Acte.

Sur un présage assés frivole,

La Reyne rend graces au destin;

Turnus meurt, Junon s’en console,                                              [313]

Les Troyens vont parler latin.

 

Quoiqu’on ait souffert comme un Diable,

Quand on devient heureux amant.

Il reste un scrupule effroyable

D’avoir eu trop peu de tourment.

 

Autre                                                           1691                                          [314]

Sur le même Air.

Réponse à Madame des Houlieres, par Monsieur de Saint Gilles, sur les Chansons précedentes.

 

Moy qui viens de chanter Achille               Opéra

D’un stile agréable et bouffon;

Souffrirai-je qu’on dise en ville,

Que je n’ay pas fait ma chanson.

 

Réveillez vous belle endormie,

Ma gloire allons, réveillez vous;

Une redoutable énnemie,

Ravit nos coeurs les plus doux.

 

On dit qu’une Muse scavante,

A fait dans le sacré vallon,

Une Chanson divertissante,

Sur l’Opéra de Capistron.

 

Ce faux bruit m’assonne, il me tuë;

Je le feray cesser ma foy;

Achille dans son humeur bouruë

N’estoit pas si fâché que moy.

 

J’esprouve le sort de Virgile,                                                            [315]

Sur certains vers qu’on lui vola,

Il sentit émouvoir sa bile.

Il s’en plaignit, il en parla.

 

Ceux qui prennent moins de peine,

Sont, disoit il, les mieux payez;

Si nos Moutons portent la Laine

C’est pour faire nos draps rayés.

 

Le boeuf qui tire la Charuë,

N’a pas le fruit de son tourment;

Tandis qu’il travaille et qu’il süe,

Son maître mange le froment.

 

L’Abeil en son travail fidelle,

Forme son Miel du suc des fleurs;

Mais ce Miel n’est pas fait pour elle,

Un autre en goûte les douceurs.

 

Pourquoi charmante des Houlieres

M’enlevez vous dix huit couplets?

Quoi! n’estes vous pas assez fiére

Des beaux vers que vous avez faits?

 

Restituez donc à Saint Gilles,

Le foible hommeur de ses Chansons.                                         [316]

Contentez vous de vos Idilles,

Et retournez à vos Moutons.

 

Autre                                                           1691                                          [317]

Sur le même Air.

Réponse de Madame des Houlieres.

 

Si le public à l’aventure

A répondu sous nôtre nom;

L’agréable et vive peinture

De l’Opera de Capistron.

 

Il ne vous a point fait d’outrage,

N’en soyez pas mal satisfait;

Ce n’est pas tant pis pour l’ouvrage,

Quand on dit que nous l’avons fait.

 

Autre                                                           1691                                          [318]

Sur l’air de la Chacone d’Amadis.

 

Plaignons tous aujourdhuy,                          bis

                  Le malheur de Joly,                           bis

Il s’est mepris avec la Duchesse;

Car il a pris son C….. pour ses fesses.

                  De ce crime Dieu le punit,

                  Car il a mal au v….

 

Autre                                                           1691                                          [319]

Sur l’air du Prevost des Marchands.

Sur …………. Mauroy Superieur des Missionnaires aux Invalides, et Monsieur le Duc de Beauvillier.

 

Beauvillier est pris par le coeur,

Comme Mauroy son Directeur (1);

Il aime jusqu’à sa servante (2)./ Il f… tout jusqu’à sa servante,

L’auroit on crû si bon auteur?/ Qui l’auroit cru de si bon coeur,

Lui qui parût n’avoir de pente

Qu’à s’unir à son Directeur./ Que pour servir son Createur.

 

Qui voudroit blâmer ce caton,

Seroit dépourveu de raison.

Est il plus sage que son pere?

Ne scait on pas que Saint Aignan

Jusqu’à la mort fut un compere,

Aussi fortuné que galant.

 

Ils different pourtant entre eux,

Quoiqu’également amoureux.

                                                                                                                                                                                                     

(1)   Mauroy, connu pour ses galanteries, êtoit Directeur du Duc de Beauvillier.

(2)   Une des Filles servantes de la Duchesse de Beauvilliers se trouva grosse. Il est vraiqu’ilfut fait entendre aux Domestiques que celui qui avoit fait le delit se declarant on lui pardonneroit en épousant la fille. le reste de ce qui attaque personnellement le Duc est une charge sur lui faite a plaisir.

 

L’un en faisoit toujours trophée,                                                   [320]

Et l’autre bien plus finement

Ne fait bien qu’à la dérobeé,

Avec l’objet le plus charmant.

 

Mais que ce beau sexe est trompeur,

Dans sa plus obligeante humeur;

Le Duc découvre que sa belle,

Rendoit comme lui bienheureux

Quatre valets, que l’infidelle

Comptoit plus que lui vigoureux.

 

Comment si prit ce fin matois

Pour en scavoir tant à la fois?

Aprés ses Oraisons publiques;

Il dit d’un ton plein de courroux

A tous ses tremblans Domestiques,

Il est fripon entre vous.

 

Qui fillette ici déflora?

Et ma Maison deshonora?

Oui je vangerai cette injure

Avec toute sévérité.

Hors qu’un prompt aveu ne m’asseure

De la sincere vérité.

 

Devant le Duc se prosterna

Un qui dit qu’il la suborna,                                                                 [321]

Un second s’accusa de même.

Lui faisant cent soumissions,

Un trois, enfin un quatriême

Firent mêmes Confessions.

 

Aussitôt le Duc convaincu,

Qu’il etoit quatre fois cocu,

A la Duchesse s’en explique.

Disant de chasser à l’instant

Une soubrette assés lubrique,

Pour rendre ainsi chacun content.

 

La pauvrette accuse à son tour,

A quoi se borna son amour;

Conjurant sa chere maîtresse

De rabattre un peu de ses coups.

Luy protestant que sa grossesse

Venoit du seul Duc son époux.

 

Autre                                                           1691                                          [322]

Sur l’air de la marieé de Roland.

Sur la Défaite de Leuze.

 

Valdee en furie,

                  Crie,

Quoi donc! ma Gensdarmerie

                  Plie,

Devant les Francois?

Morbleu j’enrage

Viste du Charois                bis

Pour sauver mon bagage.

Autrement tout est pris

Si nous sommes suivis.

Qu’ils sont en courroux;

Grands Dieux quels coups,

Ils portent à nos gens par derriere!

Quels tailleurs de croupierent!

Croy moy Nassau,

Sauvons nous et quittons le trot,

Et prenons le galop.

 

Chanson                                                    1691                                          [323]

Sur l’air ……………

Par Mademoiselle de B……par Madame des Houlieres.

 

Vous regnez sur le Côteau, hoho,

Où Phoebus tient son empire,

Toujours sur un ton nouveau, hoho,

Luy même il met vôtre Lire,

Et je scay que quand vous voulez médire;

Il ordonne qu’on vous tire,

Du robinet de Boileau, ho ho.

 

Autre                                                           1691                                          [324]

Sur l’air de Joconde.

Pour Mademoiselle d’Armagnac

 

D’où vient que d’aucun de ses traits,

L’amour ne vous enflamme

A-t’il fait des desseins secrets?

Belle Iris sur vôtre ame

Aux yeux point trop belle?

Psiché l’etoit bien moins que vous,

Lorsqu’il brûloit pour elle.

 

Autre                                                           1691                                          [325]

Sur l’air de Jean de Vert.

Sur le Mareschal de Duras.

 

Foin de Bonne et des Allemans,

On a veu Jean farine,

Piller partour les païsans,

Pour fonder la cuisine.

Il a surpris fort peu de Gens;

Cela se faisoit il du tems

De Jean de Vert?

 

Autre                                                           1691                                          [326]

Sur l’air: Quand le peril est agréable.

Sur la Princesse de Turenne.

 

Jeune Princesse de Turenne

Laisse-tu perdre ton crédit

Reprends le verre dans ton lit,

Bois a perte d’haleine.

 

Souffre-tu qu’on te reproche

Sur l’amour comme sur le vin?

Que Bournonville & Lavardin

Te passent en débauche?

 

Chanson                                                    1691                                          [327]

Sur l’air de Lanlurlu.

Sur Innocent XII. qui fit une chute qui le rendit longtemps malade.

 

                  Il est ridicule,

                  Que je sois parti

Sans baiser la Mule

                  De Pignatelli;

Cependant je ne l’ay pû;

Car il s’estoit cassé le cul.

 

Sur la Prise de Mons.                        1691                                          [329]

 

Puis-je croire ce que je vois?

Tout cede à ton bras redoutable;

Mais pourquoi s’etonner, Grand Roy?

Car plus la chose est incroyable

Et plus elle est digne de toy.

 

A Mademoiselle….                             1691                                          [330]

 

Mons êtoit la seule Pucelle                           ville.

Que l’Espagne gardoit avec beaucoup de soin,

                  Louis en eut besoin,

La belle se rendit, vous eussiés fait comme elle.

 

Chanson                                                    1691                                          [331]

Voyage à Auxerre en 1692. à Mademoiselle Adam.

 

Vous demandez trop pressante Climene,

Tous les jours un couplet de ma façon;

Mon esprit plus froid qu’un glaçon,

Ne peut plus rien produire qu’avec peine,

Et la rime est mal avec ma raison.        

 

Mais cependant il faut vous satisfaire,

Si l’on ne veut se brouiller avec vous;

Ma Muse allons ranimons nous;

A Climene il s’agit icy de plaire,

Et ne pas s’attirer son courroux.

 

Le Mercredy dixieme de Septembre,

Je m’embarquay sur un coche à Paris;

Dieu! que je m’y trouvai surpris;

Si l’on ne m’eut placé dans une chambre,

Sur le Tillac je restois sans abris,

 

Je vis Moines de toutes les especes,

Des blancs, des noirs, des tannez, et des gris;

Les uns avoient bon coloris sur leurs habits.

D’autres portoient des piéces                                                        [332]

Qui n’haïssoient ny les jeux ny les ris.

 

Les Abbez gens à faire bonne chere

Ny manquoient point non plus que les filous;

Des filles faisant les yeux doux;

Des Marchands, des Plaideurs, des gens de guerre,

Des femmes, des vieux et des jeunes fous.

 

Du bonhomme Noé l’Arche fameuse,

Certainement portoit moins d’Animau,

On y vit des Originaux;

Et dans cette troupe si monstrueuse,

J’y remarquay des hommes tous nouveaux.

 

Au départ de Paris la Grandville,

On vit les uns, les autres observer.

Tous songeoient à se preserver

De certains gens dont la main habile,

Scait attraper ce qu’on veut conserver.

 

Un vieux Abbé fut portant assés beste                                      Provençal fort fier perdit 18. Louis d’or.

Pour s’aller joindre avec un grand coquin,

Qui lui gagnant tout son frusquin,

Le réduisit à venir à la Queste.

Lui qu’on avoit veu plus fier qu’un Tarquin

 

On eut encore la plaisante avanture                                          [333]

D’une fillette avecque son amant,

Qui l’ayant quitté sourdement,

S’estoit sauvé dessus nôtre voiture

Ne voulant point taster du Sacrement.

 

Mais sitôt que la pauvre creature

Eut eu le vent de cette trahison,

Avec les forces d’un Samson;

Elle partit pour joindre ce parjure,

Et déchirer ce malheureux garçon.

 

Tant et si bien courut par la Campagne,

Qu’elle attrapa le Coche prés d’Ablon;

Et dévouvrant ce Ganclon,

Qui ne vouloit plus l’avoir pour compagne;

Elle lui fit un joly carillon.

 

Traitre de chien lui dit elle en furie,

C’est donc ainsi que tu viole ta foy;

Tu ne connois ny Dieu ny Loix:

Ah! plustost l’on m’arrachera la vie,

Que de souffrir que tu partes sans moy.

 

Prens pitié de ta pauvre Marie-Anne,                                        c’estoit son nain.

Ajouta-t’elle en se radoucissant;

Au nom de nôtre amour naissant;                                                [334]

Reviens à moy, ou que je t’accompagne,

De mes faveurs, est tu méconnoissant?

 

De tout ce qui se passa sur le Coche,

C’est ce qui fut de plus divertissant,

De la voir en Lion rugissant

A son Amant faire un sanglant reproche

Et puis reprendre un ton tout languissant.

 

L’on eut cette petite Commédie,

Depuis Ablon jusqu’au point de Melun,

Où Marianne êtoit à Jeun;

Oubliant du galant la perfidie,

Souper, coucher avec lui, fut tout un.

 

Le lendemain je ne scay ce qu’ils firent,

Car je quittay la voiture de l’eau,

Et sortîmes de ce Batteau,

Sur l’avis des gens sages qui nous dirent

Qu’on seroit dans peu loin de Montreau.

 

Nous montâmes dans une Cariolle,

Qui nous menoit assez gaillardement;

Bien empaillez, le nez au vent,

Nous y faisions plus d’une capriolle;

Mais aussi nous n’allions pas lentement.

 

Sens nous fournt commodité plus belle,                                  [335]

Une Chaise pour aller à Senant,

C’est un Château appartenant

A une aimable et bonne Demoiselle,

Qui nous receût tres agréablement.

 

Elle descend d’une illustre famille,

Qui dés longtemps en France est en renom;

La grande Darquien c’est son nom.

En Pologne l’on scait comme elle brille;

Sur le tronçon, en voit un rejetton.                                              le Mareschal de Montigni de ses Ayeux.

 

Cette fille jamais ne dégénere,

De la vertu de ses Nobles Ayeux,

La pudeur paroist dans ces yeux.

A son air l’on connoist quel fut son pere,

Et qu’elle apartient à nos Demy Dieux.

 

Danc ce Château j’etois fort à mon aise;

Mais cependantil fallut en partir,

Ce ne fut point sans ressentir

Lorsqu’on fut prest à monter dans la chaise,

Un chagrin qui pouvoit m’anéantir.

 

Estant enfin arrivé dans Auxerre,

Je logeay chez des Peres sans surplis;

J’y bus beaucoup de Rossolis;                                                         [336]

J’y fis aussi bonne et fort grosse chere;

Mais bon Dieu qu’ils avoient de mauvais Lits.

 

Cette nuit là Climene; Ah! quel domage!

Je ne dormis gueres plus qu’un Lutin,

Depuis le soir jusqu’au matin,

Au Dieu Morpheé on me vint rendre homage:

Pour l’attirer j’y perdis mon latin.

 

J’estois si mal de cette nuit facheuse,

Que dans peu j’eus perdu mon embonpoint,

Sans un dîné qui vint à point;

Dieu benit la Marquise* généreuse                                            *de Saint Phal.

Qui voulut si bien remplir mon pourpoint.

 

Le Mercredy une brave Comtesse,                                               de Courson                            Sept. 4. temps.

Entreprit de nous traiter en poisson;

J’y mangeay d’excellent Saumon;

Que ce repas eût de la délicatesse!

Mais surtout le vin s’y trouva bon.

 

Le Jeudy je disnay chez la Marquise,

Qui voulut bien nous avoir sans façon;

Je lui chantay cette Chanson,

Et quoiqu’elle ne soit pas fort exquise,

Fallut lui en donner une leçon.                                                       [337]

 

C’est bien la plus noble et la plus belle Ame

Qui soit dans tout le Pays Auxerrois;

Elle plairoit même à des Roys;

Car elle a ce qu’il faut à une Dame

Pour ranger les plus grands coeurs, sous ses Loix.

 

Chés elle on voit briller la politesse,

Beaucoup d’esprit, encore plus d’enjoüement,

De la beauté, de l’agrément;

Certain air de grandeur et de Noblesse,

Qui ravit, et qui plaît infiniment.

 

La Compagne de cette aimable,                                                    Mademoiselle Faverille

N’avoit que trop de quoi plaire à mes yeux;

Je vous le dis du sérieux;

J’allois sentir une nouvelle flame

Pour peu que je fus resté sur les lieux.

 

Je ne scaurois vous peindre cette ville,

Sinon que ce n’est pas un lieu charmant;

On n’y vit point civillement;

Le peuple est dur, impoli, peu docile,

Et ne parle que fort grossiérement.

 

Les Femmes y sont affreusement laides.                                [338]

Ah! grand Dieu, les effroyables museaux!

Leurs bras sont comme des fuseaux.

A l’amour ce sont d’excellens remedes;

Vous ny voyez aussi que noires peaux.

 

De leur esprit je ne peux vous rien dire,

Avecque elles, j’ay peu daigné causer;

On les voit toutes niaiser;

Ou du prochain cruellement médire,

Croyant par là se singulariser.

 

Des hommes, les uns sont toujours à boire,

Et les autres passent leur temps à jouër.

Le Sexe ils ne peuvent louër;

De le brusquer ils font toute leur gloire;

On en voit peu aux Dames se dévoüer.

 

Le Dimanche je partis pour la Motte,                                         le 21 Septembre.

Afin d’y boire avec un mien parent;

Nous n’allions point d’un pas trop grand,

Et cependant nôtre Histoire anecdotte,

Dit que son fils culbuta en courant.

 

A cela prés fort gay fut le voyage,

Grosse chere on nous fit en Pigeonneaux,

Poulets de grains, tendres Perdreaux;                                      [339]

Jeunes Lapins, Dindons de moyen âge,

Accompagnés de fort bons Cailleteaux.

 

Par un mauvais temps contre nôtre attente,

Nous partîmes le Mardy pour Courson,                                    23. Septembre.

Le Carosse êtoit assés bon,

Et cependant sans la double soupante,

Nous étions étendus de nôtre long.

 

Je vis enfin arriver avec joye                                                             le 29 Septembre.

L’heureux moment fixé pour mon retour,

Ah Dieu! que j’en benis le jour;

Quand on m’auroit donné force monnoye,

On n’auroit pû me faire mieux sa cour.

 

Je m’embarquay le coeur plein d’allegresse,

L’esprit content, l’oeil sec, le front serain,

Et m’esloignant de ce terrain;

Je fis de ny plus venir, la promesse,

Quand on voudroit m’en faire souverain.

 

Je vous dis donc adieu, ville d’Auxerre;

Adieu à tous vos grossiers habitans,

Ils sont pour moi trop médisans;

Je ne pourrois vivre dans une Terre,

Où l’on trouve si peu d’honnestes gens.                                  [340]

 

Quelques uns d’eux m’ont fait assés grand chere,

Je l’avoüe, et leur en suis obligé;

Pour eux je me sens affligé;

Qu’ils sont à plaindre ayant l’Ame sincere,

Où l’honneste homme est si outragé.

 

Marchez Chartiers, tirez nous d’affaire;

Faites courir un peu plus vos Chevaux:

N’epargnez point ces animaux.

Patron dite à vos gens ce qu’il faut faire;

Courage enfans nous payerons vos travaux.

 

Prenez garde que le coche n’arreste;

Au travail que chacun soit assidu;

A Paris je suis attedu;

S’il nous alloit venir quelque tempeste,

Que ce seroit pour nous de tems perdu.

 

Quittons Joigny, laissons-là Villeneuve;

Pour à Sens de meilleure heure arriver demain,

Qu’on nous fasse lever de grand matin

Pour reprendre le Fleuve,

Et Mercredy le voyage achever.

 

Je vois Paris, qu’un chacun se réjoüisse;                                 [341]

Chantons enfans chantons Gaudeamus,

Laissons-la tous les Oremus;

Qu’à cet aspect ma rate s’epanoüisse,

Desja mes Sens s’en touvent tous émûs.

 

Oh Dieu! que ce soir l’on me verra boire,

Et que je vais manger, rire et chanter;

Ne songeons plus à lamenter;

Je suis abord il faut crier victoire.

Allons nous en sans tant parlementer.

 

Enfin aprés trois semaines d’absence,

Je me retrouve avec vous mes chers amis;

Eloigné de vous, je gemis,

Dés que je me vois en vôtre presence,

De mes fatigues je suis tout remis.

 

               Envoy

Ces Couplets vont à vous Climene,

Recevez-les au moins de fort bon coeur,

Et pensez un peu au Rimeur

Qui les a faits sur les bords de la Seine

Pour vous plaire & vous mettre de belle humeur.

 

                                                          Année 1692                                        [343]     

 

1692.                                         [345]

                                                                                                                

Sur Mathurin Savary nommé Evesque de Seez en 1682. et sacré en 1693. Il êtoit jadis Marchand; Il parût la 1re. fois à Seez avec un Justeaucorps violet garni de boutons d’or et une veste en or et violet.

 

Avez vous veu la veste

Que Monseigneur avoit?

On dit que c’est un reste

D’etoffe qu’il vendoit.

 

Chanson                                                    1692                                          [346]

Suisse ou Flamant de Monsieur de Bousset.

 

Mon foy sti Roy té France l’estre ein crand movement, l’y fenir tous les ans prendre ma lochement; l’autre l’an qui n’est plus l’y fenir en personne faire sortir té Mons tout nostre Carnisson, moy chafre tant Namur ein four chouli Maison, tant mon café pon fin, faut ché l’apantonne; moy s’en fa tant Mastrickchi sis en seureté, & si lé Roy té France y fenit pour la prendre, pien plitost que sortit en crante lâcheté, moy poiré tout mon fin, moy poiré tout mon fin, afant que te la renter; moy poiré tout mon fin, moy poiré tout mon fin afant que témoy la rentre. moy poiré tout mon fin; moy poreé tout mon fin afant que te la rentre.

 

                                                                        1692 (Fevrier)                      [347]

Ce fut a peu prés dans ces termes que le le Saint Pere s’exprima après avoir leu la Lettre que Monsieur de Rebenac Envoyé Extraordinaire de Louis XIV. lui donna en presence du Cardinal d’Estrées & du Duc de Chaunes Ambassadeur de France. Par cette Lettre, Louis XIV. prie bien humblement sa Sainteté, premierement de regarder Monsieur de Rebenac son Envoyé sur le même pied qu’il regarda autrefois le Doge de Gennes, qu’il fit venir à Paris, l’asseurant qu’il ne l’envoye que pour lui demander pardon des Offenses qu’il a commises contre le Saint Siége. Secondement qu’il déteste et désaprouve tout ce qui fut arresté dans l’Assembleé des Evesques de l’an 1682. en 3e.  lieu, qu’il biffera de sa propre main en presence de son Nonce Apostholique, toutes les Déclaraons, Ordonnances & autres procédures qui ont été enregistreés en Parlement, contre l’autorité du Saint Siége Apostholique. Et enfin il asseure le Pape, qu’il confesse et reconnoît son infallibilité, tant dans le spirituel, que dans le temporel. Ce dernier Article plût si fort au Saint Pere, qu’il fit aussitost assembler les Cardinaux Cazanata, Panciatici, & Albani, qui resolurent unaniment que sa Sainteté devoit envoyer les Bulles aux évesques de France, à condition qu’ils prestcroient tous serment entre

                 

                                                                        1692                                          [348]

les mains de son Nonce qui est à Paris, Qu’ils reconnoissent les 4. Propositions du Clergé de France pour érronées, et qu’ils ne souffriroient plus à l’avenir qu’on enseignat rien sur cette matiére. Cette résolution ayant êté prise, le Saint Pere fit en même tems expediter des Bulles pour plusieurs évesques, et le lendemain le Cardinal d’Estrées, le Duc de Chaune Ambassadeur de Louis XIV. et le Marquis de Rebenae son Envoyé extraordinaire, vinrent avec un grand cortege remercier le Pape de sa bonté paternelle et lui presenterent avec un profond respect un blanc signé du Roy avec un Sceptre et une Couronne de Diamans de la valeur de cent mil francs, que le Marquis de Révenac mit aux pieds du Saint Pere, à qui il dit tout haut.

                  Saint Pere nous venons au nom de nôtre Roy,

                  Confesser qu’il depend absolument de toy,

                  Nous mettons à tes pieds son Sceptre et sa Couronne,

                  Dis nous ta volonté, commande, parle, ordonne,

                  Remplis ce Blanc signé selon ton bon Plaisir,

                  Car Louis veut enfin contenter ton désir.

 

Pasquin qui s’etoit trouvé dans l’Assembleé, voyant que le Marquis de Rebenac en demeuroit là, et que ces Messieurs faisoient leurs reverences pour se retirer, poursuivit ainsi.

                  Son oeil tout penitent ne pleure qu’eau benite,

                  Il ne peut plus trouver de repos dans son gîte,

                  Et son Esprit trouble de cent crimes commis

                  De ses meilleurs sujets à fait ses ennemis.

                  Parce qu’il ne sait plus où donner de la teste.

                  Tres sainte Pere il vous vient aujourd’huy faire feste.

 

Les François furent fort surpris d’entendre ce langage, le Duc de Chaune ayant ouy que c’estoit Pasquin, fit courir après, mais il se sauva dans la foule, et comme il prend toutes sortes de figures selon qu’il veut, il fut impossible de le reconnoitre, malgré les François il chanta encore cet Air en se retirant.

 

                  Quand le Coq chantoit hautement,         bis

                  Pierre pleuroit amerement;                         bis

                  A present que le Coq soupier,

                  Le Saint Pere n’en fait que rire,

                  Lire boula, lire lan lire

                                    Lan la la,

                                    Lire boula.

 

                  Ce Coq dit-on asseurement

                  Couve sous un oeuf un serpent;                                                     [350]

                  Mais pour éviter sa piquure,

                  Il ne faut pas que l’on l’endure

                  Lire boula, lire lan lure,

                                    Lan la, la

                                    Lire boula.

 

A la reserve du Coq qui chante, comme le Roy fait aujourd’huy, de la joye qu’il a d’avoir deux enfans, que l’on a trouvés sous une feuille de chou; Car il fait remarquer que quand le Roy voulut légitimer en Parlement Madame de Blois, et le Duc de Maine, le 1er. President demanda qu’elle êtoit leur mere, le Procureur du Roy répondit que sa Majesté les connoissoit pour ses enfans et que cela devoit suffire, le President n’estant point satisfait de cette réponse demanda si le Roy les avoit enfantés par la teste ou par la cuisse, comme fit autrefois Jupiter. Non reprit aussitost le Procureur il les a trouvés sous une feuille de Chou; Ah! dit le Président

                  Cette regle de droit est donc fausse aujourdhui.

                  Un enfant peut toujours bien connoitre sa mere,

                                    Mais pour scavoir quell est le pere,

                  Il peut souvente fois prendre un autre pour lui.

 

Monsieur Talon Avocat du Roy, voyant que le Parlement faisoit difficulté reconnoitre ces enfans pour legitimes, s’ecria en plein Bareau.

 

                  Pour couvrir un double Adultere,

                  Louis à bien raison de cacher ce mistere.

 

Dés qu’il eut prononcé cette parolle, le President recueillit les voix et dit au Greffier.

 

                  Escrivez que deux Anonimes,

                  Qu’on a trouvés dessous un chou,

                  Estant sortis d’un même trou,

                  Sont déclarez pour légitimes.

 

Cette Affaire fit pour lors tant de bruit qu’on en fit ce vaudeville qu’on chantoit hautement dans Paris. Sur l’air de Joconde.

 

                  Oui! Mademoiselle de Blois,

                  Avec le Duc de Maine,

                  Causeront un jour aux Francois,

                  Du mal & de la peine

                  Puisque Louis les a trouvez,

                  N’est-ce pas assez dire;

                  Il veut qu’ils soient légitimez

                  Pour troubler son empire.

 

La Quintessence                                 1692 (17 Mars)                   [353]

des Nouvelles.

 

Le Dessert vient toujours sur la fin d’un repas,

                  Quand on joüe des Comédies,

                  Des Opéra, des Tragédies,

La farce pour dessert jamais ne manqué pas

                  Ainsi suivant cette méthode,

Aprés avoir joué mon petit Opéra,

                  Je veux dans une Période

En dire une au lecteur qui le détrompera.

 

Tout le monde croit que Madame de Montespan est bien considéreé à la Cour; mais on se trompe fort, toutes les Princesses du sang la regardent comme les Paons de la Fable regardoient le jay qui s’étoit paré de leurs plumes; dans les occasions elle ne manquent pas de lui donner un coup de bec. Madame la Duchesse d’Orleans lui en donna un bien sensible, dans une visite qu’elle fut lui rendre au Palais Royal le 6. du courant. Cette Princesse qui avoit êté avertie de sa venuë, avoit donné ordre à une de ses Demoiselles d’aler prendre Madame de Monstespan au haut de l’éscalier, et de lui dire tout haut en l’introduisant dans sa Chambre;

 

                  C’est Madame de Montespan,                                      [354]

                  Qui vous vient faire un compliment.

 

Madame qui êtoit assise dans un fauteuil, tenant un Livre en sa main, fit d’abord semblant de ne pas entendre. Cependant Madame de Montespan s’aprocha, et aprés lui avoir fait une profonde reverence, lui dit, Je viens, Madame, vous témoigner la joye que je ressens de l’honneur que vous m’avez fait. Quel honneur vous ai-je fait? reprit la Duchesse. Quoi! Madame poursuivit la Montespan, n’est-ce pas un grand honneur pour moy d’etre entreé dans vôtre illustre Alliance? Il est vrai, Madame, repondit la Duchesse en s’emportant, que c’est un grand honneur pour vous; mais un tres grand deshonneur pour moy. Quoi! reprit la Montespan un peu en colére, quel meilleur parti pouviez vous esperer pour le Duc de Chartres, que celui qu’il a pris, d’epouser la Fille d’un des plus grands Rois du monde & qui est votre niece et sa Cousine germaine. Je veux croire charitablement, puisqu’il le faut, répondit la Duchesse, que le Roy en peut être le pere. Je dis charitablement, ajouta t-elle, car des personnes de vôtre sorte sont bien sujettes à caution. Comment des personnes de ma sorte! repliqua la Montespan en furie; Je suis une femme comme une autre. Il est vrai, repartit la Duchesse, qu’il y a des femmes qui vous ressemblent. Il n’y en a même par malheur que trop dans cette Cour, qu’on a raison d’apeller, Communis generis. Je n’entends point le Latin, reprit la Montespan, qui voulut changer l’entretien, mais je vous avoüe, que j’ay toujours fort aimé les honnêtes Compagnies. Je n’en doute nullement, dit la Duchesse; mais poursuivit-elle, en lui demandant; Les honnestes Compagnies vous aiment-elles? cette demande surprit fort la Montespan qui ne scavoit que répondre et qui fut bien aise de voir entrer Madame de Montpensier qui vint fort a propos pour romper cet entretien. Aprés quelques momens de conversation, la Montespan se retira avec Madame de Montpensier à qui elle temoigna n’estre pas contente de l’accueil que Madame la Duchesse d’Orleans lui avoit fait; mais elle fut encore bien mortifiée, d’entendre chanter en passant sur le pont neuf ces deux Couplets.

                                    Sur l’air Lire lan la.

                  Un chacun parle librement,        bis

                  De la faveur de Montespan,        bis                                               [356]

                  Les Dames n’en font rien que rire,

                  Lire lan la, lire lan lire,

                  Lan la lire lan la.

 

                  Mais pour Madame, ce dit on,   bis

                  Elle est facheé avec raison,         bis

                  Et n’oseroit pourtant rien dire;

                  Lire lan la lire lan lire,

                  Lan la, lire lan la.

 

Chanson                                                    1692                                          [359]

Sur l’air des Triolets.

faite à la Harelle en Juillet 1692.

l’Abbé Savary à Mademoiselle du Petitfort.

 

Mon Petitfort vous m’avez pris,                                    le 22 Juillet.

De vous je n’ay pû me deffendre;

De vos beautez je suis épris,

Mon Petitfort vous m’avez pris.

Et vos beaux yeux tous plein d’esprit,

Ont force mon coeur à se rendre.

Mon Petitfort vous m’avez pris,

De vous je n’ay pû me deffendre.

 

Belle et charmante Petitfort,                       C’est le pere de l’Abé qui parle.

Je vois que de prés l’on vous presse;

Certain Abbé vous parle fort,

Belle et charmante Petitfort.

Je lui pardonne, il n’a pas tort,

De vous marquer tant de tendresse,

Belle et charmante Petitfort,

Je vois que de prés l’on vous presse.

 

Petit Abbé de Savary

Retirez vous au séminaire,                                                                [360]

C’est tout de bon qu’on vous le dit;

Petit Abbé de Savary.

Laissez moi toute seule icy;

C’est bien assez d’un petit pere.

Petit Abbé de Savary

Retirez vous au séminaire.

 

Mon cher Abbé de Savary

Revenez tost du séminaire;

C’est tout de bon qu’on vous le dit

Mon cher Abbé de Savary;

Fanchon voudroit vous voir icy

A la place du Petit Pere.

Mon cher Abbé de Savary,

Revenez tost du séminaire.

 

Autre                                                           1692                                          [361]

Sur l’air d’un Rigaudon.

Sur le même sujet.

 

Mon pauvre Abbé,                              c’est Mademoiselle Petitfort qui parle

Quitte là la Poësie;

Qui mene à la folie,

Deviens plus sensé:

Tu fais l’amant

D’une jeune voisine

Depuis peu de tems;

Mais elle dit que tu as bien la mine

De perdre l’esprit

Va t’en au séminaire

Aprendre ton métier,

Et a dire un Breviaire

Qui sera ta moitié;

Iris ne te rendra jamais heureux,

Et méprise tes feux.

 

Autre                                                           1692                                          [362]

Sur l’air: Laire la laire lan laire.

Sur le même sujet.

 

Aimable et charmante beauté;

Je vais boire à vôtre santé;

Ne pourrai-je jamais vous plaire?

                  Laire la , laire lan laire,

                  Laire la laire lan la.

 

Je suis arrivé sur les lieux,

Pour vous y presenter mes voeux;

Escoutez moi donc sans colere,

                  Laire etc.

 

J’ay du coeur, j’ay de l’enjouëment,

Je n’aime tout au plus qu’un an;

Voyez si c’est là vôtre affaire.

                  Laire etc.

 

Autre                                                           1692                                          [363]

Sur l’air Ah! qu’elle y va gayement.

En allant à Saint Just chez Monsieur de Savary. le 23. Juillet.

 

Beautez et Nonnes chéminants

Ah! qu’elles y vont gayemens;

Ayant déjêuné gentiment

Tout le long de la Prairie.

Ah! qu’elles y vont les jolies;

Ah! qu’elles y vont gayemens.

 

Ayant déjeuné gentiment.

Ah! etc.

Vont à Saint Just gaillardement.

Tout le long etc.

 

Vont à Saint Just gaillardement,

Ah! etc.

Sans le Congé de leur maman.

Tout le long etc.

 

Sans le Congé de leur maman,

Ah! etc.

Le grand Maître en sera content; (1)                        

Tout le long etc.

 

(1)    Monsieur de Savary grand Maître des eaux et Forests de Normandie

 

Le grand Maître en sera content,                                                  [364]

Ah! etc.

Il s’en ira tout triomphant,

Tout le long etc.

 

Il s’en ira tout triomphant,

Ah! etc.

D’avoir attrapé le moment,

Tout le long etc.

 

D’avoir attrapé le moment,

Ah! etc.

De pouvoir conter son tourment.

Tout etc.

 

De pouvoir conter son tourment,

Ah! etc.

A la beauté qu’il aime tant.                           Mademoiselle de Petitfort.

Tout etc.

 

A la beauté qu’il aime tant,

Ah! etc.

Qui lui répond en gambadant.

Tout etc.

 

Qui lui répond en gambadant.

Ah! etc.

Vous ne seres point mon amant.                                                   [365]

Tout etc.

 

Vous ne serez point mon amant; Ah! etc.

Car j’ay un autre engagement.

Tout etc.

 

Car j’ay un autre engagement,

Ah! etc.

Que je veux aimer constamment.

Tout etc.

 

Que je veux aimer constamment.

Ah! etc.

Adieu, faites en tout autant.

Tout etc.

 

Adieu faites en tout autant,

Ah! etc.

Allons retrouver la maman.

Tout etc.

 

Allons retrouver la maman,

Ah! etc.

Embrassons-la bien tendrement;

Tout etc.

 

Autre                                                           1692                                          [366]

Sur l’air Beuvons à nous quatre

Arrivant à Saint Just pour diner le 24. Juillet.

 

Voicy les voisines,

Et bonjour le voisin,

Nous sommes de faim.

 

                  En partant.

 

Salut à nôtre hoste,

Mille remercimens;

Faisons lui nos complimens

Regagne la coste

Tous bien tristement.

 

Autre                                                           1692 (le 25. Juillet)          [367]

Sur l’air des Triolets

Sur Madame Savary qui se piquoit de scavoir les regles de faire des Vers et qui les citoit pendant qu’on badinoit en faisant des laire lan laire, raportant pour l’exemple un couplet qu’elle disoit avoir fait il y avoit longtemps.

par Madame Raft et Madame du P…..

 

Va t’en au Diable Savary,

Tu nous met toujours en colere;

Et quoi! jusque dans nôtre lit,

Va t’en au Diable Savary.

Venir trancher du bel esprit,

Et troubler nos laire lan laire.

Va t’en au Diable Savary,

Tu nous mets toujours en colere.

 

Autre                                                           1692                                          [368]

Sur l’air de Jean de Vert.

Sur le même sujet.

 

Vit on jamais rien de plus sot

Que cette mine fiere?

Qui vient icy mal apropos

Nous conter des chimeres.

Voyez un peu ce bel esprit

Pour se vanter d’avoir escrit

                  A Jean de Vert.

 

Autre                                                           1692                                          [369]

Sur le même Air.

Sur Monsieur Mordant qui avoit quitté le 24. de juillet Madame l’Abbesse sans lui tenir compagnie comme il le devoit.

 

Mordant ne manque point d’esprit;

Mais bien de politique.

Il fait paroître son dépit,

Et d’un rien il se pique.

Cela se fait il a present?

On l’auroit pû souffrir du tems

                  De Jean de vert.

 

Autre                                                           1692 (28 Juillet)                                   [370]

Sur l’air Alleluya.

A mon retour de Villarceaux.

 

Lorsque je partis de ce lieu,                          Monsieur Mordant

Je vous fis un fort triste adieu;

Mais Dieu mercy m’i revoila.

                  Alleluya.

 

Je vous revois bonne maman,

Il y a pour le moins un an,

Que mon malheur m’en arracha.

                  Alleluya.

 

Chere maman pardonnez moy,

Je vous le jure sur ma foy,

Jamais cela n’arrivera.

                  Alleluya.

 

Que Villarceaux est ennuyant,

Que j’y ay vescu tristement,

Nulle de vous le croira.

                  Alleluya.

 

Cependant rien n’est plus certain

Que même dez le grand matin;                                                       [371]

Je baillois à ces grilles là,

                  Alleluya.

 

A la fin je suis prez de vous,

Cheres soeurs réjouissons nous;

Chantons dansons et cetera.

                  Alleluya.

 

Divertissons nôtre maman,

C’est le devoir d’un bon enfant,

Et puis le Ciel nous benira.

                  Alleluya.

 

Autre                                                           1692                                          [372]

Sur l’air des Ennuyeux.

Mon voyage à Villarceaux

 

De mon voyage je reviens,

Et voicy quelle est l’histoire:

Je partis si je m’en souviens,

A cinq heures, ce fut sans boire;

Quand j’arrivay chez le Curé,

J’estois, ma foy bien altéré.                          le 24. juillet a Heubecourt

 

Je l’avois cherché dans Vernon,

Sans en aprendre de nouvelles;

Car ce villain petit garcon

Etoit allé avec des belles

Se promener jusqu’à Bissy,

Sans de moy prendre aucun soucy.

 

En entrant dedans la Maison

J’envoyay Jacquet à la Cave,

Qui m’apporta, en franc oison

Un vin couleur de betterave,

Dont je ne bus qu’un petit coup,

Ne le trouvant pas à mon gout.

 

Le Prieur ayant aperçeu                                                                                        [373]

Du pauvre jacquet lourdise,

Et voyant qu’il s’etoit deçeu

Lui fit reparer sa sottise,

L’envoyant tirer du bon vin,

Dont je bus jusqu’au lendemain.

 

Estant ainsi en liberté,

Et nous regardant comme freres;

Aprés avoir bien caqueté,

Nous reprenions en mains les verres.

A ce qui te plaist mon amy,

Et tope et tinque grand mercy.

 

Lorsque minuit vint à sonner,

Nous sonnâmes aussi retraite;

Nous nous mimes à raisonner,

L’un l’autre denos amourettes:

Toute aimable du Petitfort

Nous parlâmes de vous bien fort.

 

Enfin le lendemain matin,

M’estant greffé sur Rossinante;

Je pris tristement le chemin

D’une maison bien ennuyante;

Que Villarceaux est un couvent,

Où passe bien mal son tems.

 

Du Petitfort qu’eussiez vous fait,                                                  [374]

Dans cette affreuse solitude?

On ny voit point de Berthemet

Pour en charmer l’inquiétude:

Vive la Harelle ou vernon,

Dites, jamais s’i ennuye t’on?

 

J’aurois peine à vous exprimer,

Comment j’y passois les journées;

Vous pouvez vous imaginer,

Qu’elles me sembloient des anneés;

Mais ces discours sont superflus,

J’en suis sorti n’en parlons plus.

 

Lorsque je voulus en partir,                                            le 27.

Il survint un vilain orage,

Qui pouvoit me faire périr,

Si je me fus mis en voyage;

Par prudence il fallut rester

Pour ne me pas aller noyer.

 

Mais le Tonnere êtant passé,

Je songeay à me mettre en route;

L’orage leur dis-je est cessé,

C’est en vain que vous parlés toutes;

Je veux aller trouver Mordant,

Car il m’attend asseurement.

 

Je pris congé de ces Nonains,                                                          [375]

Malgré toute leur résistance

De rester jusqu’au lendemain,

Elles me firent grande instance;

Mais je leur dis le bon Mordant

M’attend ce soir bien seurement.

 

Adieu vous dis, mes cheres soeurs;

Adieu ma chere Divigeé;

Croyés moi, essuyés vos pleurs;

Vous vous montrez trop affligeé,

Il faut enfin nous séparer,

Car Mordant m’attend à souper.

 

Rocinante à beaucoup d’esprit

Depuis Bray jusqu’à son étable;

Sans lui parler elle m’a mis

Dans un chemin fort agréable;

Rocinante en a bien apris

A l’école du bon Fyfy.

 

Dés que je fus chez le Prieur,

Je chantay mon historiette;

Combien crois tu, ma chere soeur,

Qu’on bût de son vin de Farguette?

Nous en soufflâmes seurement

Trois pintes bien tranquillement.

 

Nous raisonnons ainsi tous deux,                                                 [376]

De tout ce qui nous pouvoit plaire,

Aux tendres objets de nos voeux,

Nous buvions comme des comperes.

Et dans cet agréable employ,

Minuit nous attrapa ma foy.

 

Il êtoit question ce matin

De revenir à la Harelle;

La crainte du méchant chemin

M’a fait Monter une haridelle,

Sans selle, bride, et étrier,

Comme un pauvre Menestrier.

 

Ainsi huché sur le Grison,

J’ay suivi Dame Rocinante,

Sans aucun accident, sinon,

Qu’ayant une épaule méchante,

Si je ne me fus bien tenu

Par terre il m’auroit etendu.

 

Ne songeons qu’à nous rejouir,

Je suis encore à la harelle;

Mais je n’ay plus guere à jouir

D’une Compagnie aussi belle;

Il faut retourner à Paris,

Adieu donc les jeux & les ris.

 

Dieu! que l’on m’y verra chagrín,                                                  [377]

Et que j’y feray triste mine;

J’y pleuray soir & matin,

Ne voyant plus cette blondine,

Qui par la douceur de ses yeux

Me rejouissoit dedans ces lieux.

 

Charmante Abesse excuses moy,

Prenes pitié de ma foiblesse,

Prés de vous je trouvois de quoy

Charmer l’ennuy et la tristesse;

Mais helas! il me faut partir,

Je peux bien dire adieu plaisir.

 

Autre                                                           1692                                          [378]

Sur l’air Et son son

Par Mademoiselle du Petitfort.

 

Une dévote a leü dans la Sainte Evangile,

Qu’il faut jeuner au feu toute plante infertile.

                  Et son son.

 

Qu’on ne la traite point de badine et de folle,

Elle a de point en point suivi la parabolle,

                  Et son son.

 

C’est par le bon avis d’un pere Trinitaire,

Que la devote a pris ce parti salutaire.

                  Et son son.

 

Elle explique tres bien la tres Sainte Ecriture,

Elle a pour son sauveur fait une créature.

                  Et son son.

 

Autre                                                           1692                                          [379]

Sur l’air de l’Echelle du temple.

En partant de Vernon pour Mantes le 31. Juillet en compagnie de Messieurs Tallement, et de Madame sa soeur, de Madame de Milly mere et fille, de Mesdesmoiselles Fontenay mere et filles, de Mademoiselle Passerat, et de Monsieur de Malherbe.

 

La Compagnie de Tallement,

Part de Vernon fort tristement;

De quitter cette aimable ville

Où l’on passoit si bien le tems

A danser dessous la charmille

Au son de plusieurs Instrumens.

 

Lorsqu’on se mit dans le bateau

La Conté pleura comme un veau;

Laugeois* en eut l’Ame affligeé,                                  *Conseiller au Parlement.

Et de Milly pareillement,

Qui voyant sa femme embarqueé

Se retira tout dolemment.

 

Un Abbé* qu’on ne nomme pas,                                   *d’Anviray

Soupira quittant les appas,

D’une tres charmante Baronne;                                  de Clermont       [380]

Les larmes lui vinrent aux yeux,

Et il ne put trouver personne

Pour le consoler dans ces lieux.

 

Au moment de l’embarquement,

Tout le monde chercha Mordans*;           fils, Lieutenant general de vernon.

Mais comme il a le coeur fort tendre,

Il ne voulut point dire adieu;

Et l’on craint qu’il ne s’aille pendre

A Forge ou dans quelqu’autre lieu            Il partoit en jour là pour Forge.

 

Le bon Monsieur de Fontenay,

N’avoit pas, ma foy, la coeur gay;

On vit aussi pleurer des Nonnes,

Et l’aimable du Petitfort,

Conduisant ses belles personnes,

Parut triste dessus le Port.

 

Autre                                                           1692                                          [381]

Sur l’air de Mais.

Par Mademoiselle du Petitfort, à la Harelle.

 

Soeur Savary l’Abesse te destine

Pour au Couvent aller chanter matiné;

                  Mais

Si tu fais trop la Mutine,

Tu n’en reviendra jamais.

 

Autre                                                           1692                                          [382]

Sur le même Air.

Couplets faits en revenant de vernon et envoyez à Mademoiselle du Petitfort le 3. Aoust 1692.

 

Du Petitfort que je ressens d’allarmes!

Et qu’à Paris je repandray de larmes.

                                    Pour,

Avoir connu tous vos charmes;

Je vais resver nuit et jour.

 

Malgré l’oubli qui suit toujours l’absence,

Vous me verrés signaller ma constance;

                                    Mais,

                  Quelle rude penitence

                  Si vous ne m’aimiez jamais.

 

J’en fais l’aveu, j’étios un peu volage;

Mais desormais l’on me verra tres sage,

                                    Loin,

                  De friponner d’avantage

                  Vous seule aurez tous mes soins.

 

Je n’auray plus cette ancienne foiblesse,

D’aller partout prodiguer ma tendresse;                                                  [383]

                                    Non,

                  J’ay fait un voeu de sagesse,

                  Auprés de vous dans Vernon.

 

J’en ay conté jadis a chaque belle,

Et l’on ma veu à toutes infidelle;

                                    Mais

                  J’ay juré dans la Harelle

                  De ne vous quitter jamais.

 

Voila tout ce qu’à pû faire ma muse,

Car tres souvent la badine s’amuse;

                                    Mais

De vôtre bonté j’abuse;

                  Vôtre valet à jamais.

 

A repartir il faut que je m’apreste,

Que n’est-ce helas! pour aller ou vous êtes.

                                    Oh!

                  Que j’en ferois grande feste;

                  Mais je vous tourne le dos.

 

Autre                                                           1692                                          [384]

Sur le même air

Couplets faits en allant à Clairefontaine. le 4. Aoust 1692.

 

Pere Merry, t’est le plus habile homme,

Qui fut jamais de Paris jusqu’a Rome;

                                    Car

                  Tu donne tes ordres comme

                  Si tu estois Maitre ez Arts.

 

                  Sur celuy des Ennuyeux.

Hier au soir en arrivant

Dedans la ville de Chevreuse;

On nous receut fort gallemment,

Et l’histoire en est curieuse,

L’on sonna, l’on carillonna,

Comme on eut fait pour le Legat.

 

                  Sur celuy de Landerirette.

A mon maître aussitost je dis,

Soyez certain de tout cecy,

                                    Landerirette.

Se fait par ordre de Merry,

                                    Landeriri.

 

On fit cesser le Carillon,                                                                                         [385]

Pour faire entendre le violon,

                  Landerirette.

Le tout par ordre de Merry,

                  Landeriri.

 

Aprés cela j’aurois juré

Trouver le soupé préparé,

                  Landerirette.

Par les bons ordres de Merry,

                  Landeriri.

 

Mais en entrant au Cabaret,

Nous ne trouvâmes rien de prest,

                  Landerirette.

Où Diable est ton ordre Merry,

                  Landeriri.

 

Eh! pourquoi leur dis-je tout haut?

N’avez vous rien tenu de chaud?

                  Landerirette.

Vous n’avez donc point veu Merry?

                  Landeriri.

 

Pardon mon Pere, excusez moy,

Dit la maîtresse en grand émoy;

                  Landerirette,                                                                             [386]

Je n’ons point l’ordre de Merry,

                  Landeriri.

 

Ne fallout point de violon,

De Cloches, ny de Carillon,

                  Landerirette.

Il falloit à soupé Merry,

                  Landerri.

 

Prends y bien garde un autrefois,

Au lieu de rester dans tes bois,

                  Landerirette.

Va donner tes Ordres Merry

                  Landeriri.

 

Ce coup nous te pardonnerons,

Doucement nous te traiterons,

                  Landerirette;

Mais regale nous bien Merry.

                  Landeriri.

 

 

                                                                        1692                                          [387]

Parodie de Monsieur l’Abbé de Lubert, après la Prise de Namur 1692. Sur les 3. 1ers. Scenes du 1er. Acte d’Atis.

 

                                    Scêne 1re.

                                    les Flamans.

 

Allons, allons accourez tous

                  Guillaume vient en Flandres.

Trop heureux Allemands venés icy l’attendre;

                  Mille peuples seront jalloux

                  De tant d’or que pour vous

                  Sa rigueur à sceu prendre.

 

                                    Scêne 2e.

                                    Nassau.

 

                  Allons, accourez tous,

Je viens pour vous deffendre.

                                    les Flamans.

Quand nos champs sont parez de ces vives couleurs,

                  Qui regnent sur les fleurs,

Quand le Ciel l’adoucit, que l’herbe vient a croître;

Le carnage chez nous commence de paroître,

Et nous fondons en pleurs.

                  La valeur du François s’eveille;

                  Et court au 1er. bruit de Mars,

                  Il bat, il force nos ramparts,                                            [388]

                  Le Statouder encore sommeil.

                                    Nassau.

Vous devez mieux juger du parti que je prens.

J’en veux à des guerriers dont les fougues legeres,

Passent avec fureur ainsi que des torrents;

                  Je scai que des efforts si grands,

                  Ont un sort qui ne dure gueres.

                                    les Flamans.

                  Il faudroit secouir Namur,

                                    Nassau.

                  Mes bras ne scauroient te deffendre;

                  Mais croyés moy, c’est un coup seur,

                  J’ay deux bons yeux pour le voir prendre.

                                    les Flamans.

                  Vôtre flegme en la guerre, et vos rares secrets,

                                    Poussent à bout les plus discrets.

                                    Nassau.

                  Les Francois prennent une ville,

Et vos yeux aussitost me voyent de travers;

Pour un Château perdu vous en aurez dix mille,

                  Quand j’auray conquis l’univers.

                                    les Flamans.

Que de fols ont signé la Ligue avec l’Empire,

                  L’Espagne doit s’en repentir.

                  L’Hollandois voudroit en sortir,

                  Le petit Savoyard soupire,

Les Anglois ont cherché ce qu’on leur fait sentir;                                [389]

Si leurs maux sont outrez, leur crime est encore pire.

François que triomphez, que vous êtes heureux!

Vos Biens sont a l’abri sous un Roy glorieux,

Et nous prés d’expirer nous n’oserions nous plaindre:

                  Et malgré nos tourmens rigoureux,

                  Et malgré ceux qui sont à craindre.

Francois qui etc.

                                    Nassau.

J’ay crû chers Alliés pouvoir tout entreprendre,

Et trouver les François aussi laches que vous.

Mais je n’ay point trouvé de foible pour les prendre.

 

                                    Scêne 3e.

                                    les Flamans.

                  Allons, accourez tous,

                  Nassau va nous deffendre.

                                    Nassau.

                  Si les François sont assés fols,

                  Pour assiéger, laissons les prendre;

Je vous promets qu’un jour je leur feray bien rendre.

Mais je n’ay pas encore animé mon courroux.

                                    les Flamans.

                  Allons accourez tous,

                  Nassau va nous deffendre.

                                    Nassau.

Ecoutez leurs canons, ecoutez leurs Tambours,

Ils remplissent mon coeur d’une frayeur étange.                                [390]

                                    les Flamans.

                  C’est à vous que l’on a recours;

                  Venez vaillant Prince d’Orange.

Les Bourgeois de Namur demandent du secours;

                                    Louis redoutable,

                                    Courageux aimable,

                  Voudroit devenir leur Roy;

                  Doivent ils subir sa Loy?

                                    Nassau.

Il faudroit contre lui gagner une victoire.

Je le scais comme vous, et je le voudrois bien.

                                    les Flamans.

Oui s’il ne vous en coutoit rien;

                  Car telle est votre gloire.

                                    Nassau.

                  Souvent quand on s’est avancé,

                  Pour la deffense des murailles.

                  On y trouve ses funerailles,

                  Ou du moins on est relancé.

                  Que les Armes de la France,

                  Soient beaucoup a redouter,

                  Aprés tant d’expérience.

                  Je ne puis en douter.

                                    les Flamans.

                  Allez Guillaume avec Baviere;

                  Faites mieux à Namur qu’à Mons

                                    Nassau.                                                                       [391]

Mais les François sont des démons,

                  Qui ne me craignent guere.

                                    les Flamans.

Serez vous insensible à l’espoir des Lauriers?

                                    Nassau.

                  Avec cent mille guerriers,

J’evite les combats autant qu’il m’est possible

                  Si j’etois battu par malheur,

                  Je connois bien mon coeur,

                  Il seroit trop sensible.

S’ils prennent des Châteaux et des villes sur nous,

                  Cela ne doit pas vous surprendre.

                  Tous ensemble avec Nassau.

                  Fuyons, et courons tous,

                  Namur vient de se rendre.

 

Chanson                                                    1692                                          [392]

Sur l’air des folies d’Espagne.

Par Mademoiselle F….. à Monsieur d’U………. à Pignerole.

 

Nos ennemis ont quitté votre Ville,

Et semblent s’en éloigner pour toujours;

Je devrois donc avoir l’esprit tranquille,

Puisque je ne crains plus rien pour vos jours.

 

Si j’allois vous soupçonner d’inconstance,

Seroit-ce à tort? parlez moy franchement;

Quant tous les jours on me fait confidence,

Que vous avez un autre engagement.

 

Complainte des Flamans              1692                                          [393]

Sur l’air des Folies d’Espagne.

 

Hélas! Nassau, quel sera nôtre azile

Contre Louis? qui peut nous proteger?

Si tous les ans il nous prend une ville?

Où pourrons nous à la fin nous loger?

 

Tu nous flattois de faire des merveilles,

Pour arrester le cours de ses Exploits;

Mais devant lui tu baisse les Oreilles,

Quand ta valeur nous réduit aux abois.

 

Pauvres Flamans que nous sommes a plaindre,

D’etre Artisans nous mêmes de nos maux;

De tous côtés nous avons tout a craindre,

Quand verrons nous la fin de nos maux?

Quoi! falloit-il épuiser nôtre bourse,

Sans nous donner aucun soulagement?

Quelle sera Nassau nôtre resource?

Quand nous t’aurons donné tout notre Argent.

 

Tu nous flattois d’une belle entreprise

Qui nous devoit render heureux a jamais;

Par ces discours tu nous mets en chemise

Sans rien tenir de ce que tu promets.                                        [394]

 

Tu préparois pour faire une descente,

Un Armement formidable aux François;

Ces grands aprets ont trompé nôtre attente,

Et Furne enfin couronne tes Exploits.                       s’empara de Furne mois de Septembre.

 

Devant Namur nous croyons voir le Siége;

Mais tu nous dis qu’il n’est pas encore tems,

Et nous voyons que c’est un autre piége

Que cet hiver à nos bourses tu tends.

 

Tout come nous l’Anglois est miserable,

Et l’Hollandois n’en est pas plus heureux.

Touchant l’argent nostre sort est semblable;

S’il prend sur nous, il prend bien plus sur eux.

 

Aprés avoir fait gémir tant de monde,

Aprends Nassau quels sont pour toy nos voeux;

Nous prions Dieu que le Ciel te confonde,

Et nous sauve d’un fleau si dangereux.

 

Chanson                                                    1692 (Septembre)            [395]

Sur l’air Scavez vous bien beauté cruelle.

Par Mademoiselle F….. à Monsieur d’I………

 

Mon coeur est plein d’Allegresse,

Voyant finir les beaux jours;

Bien loin d’en être en tristesse,

Je ne fais que chanter toujours;

Quel plaisir que l’hiver se presse;

Car je verray mes amours.

 

L’Esté, pour moy, est sans charmes,

L’Automne à plus d’agrement;

L’Hyver fait cesser mes larmes,

En me ramenant mon Amant;

Mais que je sentiray d’allarmes,

Aux aproches du printemps.

 

Il est doux lorsqu’on est tendre

De retrouver son Berger;

Il est bien facheux d’aprendre,

Qu’on ne doit le voir que leger;

Tous les jours l’on me fait entendre,

Que vous n’aimez qu’a changer.

 

J’aprends pour toutes nouvelles                                                                     [396]

Que vous avec des Cloris;

Et que vous courrez les belles

A Pignol comme à Paris.

Dites moy, vous écoutent ells?

Je trembre pour leurs maris.

 

Si vous aimez Célimene,

Songer à vous excuser;

Ou craignez qu’elle reprenne

Son coeur qu’on vous voit abuser.

Qu’amour prés d’elle vous ramene,

Sans ailleurs vous amuser.

 

Chanson                                                    1692                                          [397]

Sur l’air de l’Eschee du temple.

Sur le Combat de Steinkerque.

 

Aprés Mons et Namur vaincus,

La Ligue qui n’en pouvoir plus;

Pour surcroit perdre une Bataille.

Avec plus de cent mille bras;

Guillaume ne fait rien qui vaille

Dans les Siéges ny les Combats.

 

De nôtre Monarque vainqueur,

N’osant éprouver la valeur;

A ses yeux Namur il vit prendre,

Croyant que ce seroit en vain

Qu’on songeroit à se deffendre,

Quand Louis tient son foudre en main.

 

Mais quand ce soleil des François,

Aprés ses rapides Exploits, paroist

En repos dans la France;

Guillaume qui prenoit l’essor,

Voit que par sa seule influence,

Ce grand Astre l’accable encor.

 

Oui sur les Drapeaux de Louis,                                                        [398]

On fait des Exploits inoüis;

Pour lui la victoire agissante,

De ses Soldats fait des Héros,

Et son Étoille triomphante,

Fait triompher ses Généraux.

 

Guillaume aprens donc en ce jour

Ce qu’est le brave Luxembourg;

Ta deffaite en dit des nouvelles;

Le Ciel renverse tes Projets,

Veut à des peuples fidelles

Ouvrir les yeux sur tes forfaits.

 

Autre                                                           1692                                          [399]

Sur le même Air

Sur Louis Quatorze.

 

Louis est sage et généreux,

Dans ses desseins il est heureux;

A ses amis il est fidelle.

Les autres Monarques jaloux

Disent qu’il seroit leur modelle,

S’il alloit moins souvent aux coups.

 

Autre                                                           1692                                          [400]

Sur le même Air

Pendant le Siége de Namur.

 

Je ne m’estonne nullement,

Qu’Atlas porte le Firmament,

Comme dit la Métamorphose,

Puisque nous voyons en ce jour,

Que toute la France repose,

Sur la bosse de Luxembourg.

 

Chanson                                                    1692                                          [401]

Sur l’air……

 

Sur la terre et sur l’onde,

Tout ce qui voir le jour;

Il n’est rien dans le monde

Qui soit exemt d’amour;

Il faut être homme de mer, / Pour bien aimer Les Matelots,

Aiment au milieu ds flots.

 

Les Officiers de terre,

N’aiment pas constamment;

Ils sont comme le verre,

Sujets au changement.

                  Pour bien aimer

Il faut être homme de mer,

                  Les Matelots,

Aiment au milieu des Flots.

 

Un homme de Marine,

En agit autrement;

Car plus on le chagrine,

Et plus il est constant.

                  Pour etc.

 

Nous connoissons les costes

Et l’Étoille du Nord,                                                                [402]

Et comme bons Pilotes,,

Nous venons à bon port.

                  Pour etc.

 

Embarquez vous, Medames,

Ne craignez point les eaux;

Pour eteindre nos flames,

Venez sur nos vaisseaux.

                  Pour etc.

 

Les vents et les tempestes,

Les Brulots, les Rochers,

Ne sont que des fleurettes,

Aux amoureux rochers.

                  Pour etc.

 

On dit que la Sirene,

Par ses amoureux tons,

Ravit, charme, et entraîne

Ilauque et les Tritons.

                  Pour etc.

 

Chanson                                                    1692                                          [403]

Sur l’air Vivons comme le voisin vit

Ce Couplet est de Monsieur le Grand Prieur, pour Fanchon Moreau de l’Opéra.

 

Aprés avoir quitté Paris

Où tout plaisir abonde.

Avec du vin & mon Iris

J’irois au bout du monde.

 

Autre                                                           1692                                          [404]

Sur l’air de Joconde.

Adresseé à Boileau des Préaux.

 

Apollon si chéry des belles

A pris plaisir a l’egarer,

Et les Muses qui sont fémelles

Ont refusé de l’inspirer.

 

(1)   On s’est trompé sur l’air de cette Chanson, ou bien il y auroit 4. vers d’obmis parce qu’il en faut 8. Pour l’air de Joconde.

 

Chanson                                                    1692                                          [405]

Sur l’air: du Traquenard.

Le Comte de Grimbergue présentement le Prince de Barbançon qui etoit Gouverneur de Namur. Il avoit épousé Mademoiselle de Lalain sa Cousine, qui etoit fort belle et de peu d’esprit.

 

Mon Cousin que faites vous?

                  Ma Cousine je vous f.

Ah! vraiment mon Cousin

Vous prenez bien de la peine

Ah! vraiment mon Cousin

Prenez en jusqu’a demain.

 

Autre                                                           1692                                          [406]

Sur l’air: Tranquilles coeurs

par Coulanges.

Pour Monsieur le President le Coigneux, en partant de Morfontaine, pour Paris aprés les Vaccations.

 

                  Chevreuils & Cerfs courez les Champs,

                  Le Coigneux retourne à la ville;

                  Dieux! que vois d’icy, de gens

                  Qui lui vont eschauffer la bille;

Les Plaideurs, les Procez, les chagrins, les ennuys,

                                    L’attendent à Paris.

 

                  Adieu plaisirs, adieu repos,

                  Il s’en va bien changer de vie,

                  Endosser la Robbe à tuyaux;

                  Entendre un Avocat qui crie,

Et préférer enfin contrainte et gravité,

                                    A toute liberté.

 

Chanson                                                    1692                                          [407]

Sur l’air: des Rochelois.

Sur N….. Bolo ou Boleau.

 

Que Bolo a les yeux charmans!

Qu’on voit en elle d’agrémens!

Ȏ! Vénus que l’on croit si belle.

Viens te faire voir en ces lieux,

Pour déciderla querelle

Qui pouroit n’aître entre vous deux.

 

Je ne veux point de Jugement,

Je veux par accommodement

Finir entre vous cette guerre.

Que Bolo, de l’avis des Dieux,

Soit la plus belle de la terre,

Et moy la plus belle des Cieux.

 

Que Vénus a fait prudemment

D’eviter un tel Jugement!

De l’aveu de la Cour Celeste,

Avec tant de divins appas;

Boleau l’eut emporté de reste,

Faisant voir ce qu’on ne voit pas.

 

Epitaphe                                                   1692                                          [408]

De Monsieur de Louvois

 

                  Icy gît sous qui tout plioit,

Et qui de tout avoit une connoissance parfait,

                  Louvois que personne n’aimoit,

                  Et que tout le monde regrette.

 

Chanson                                                    1692                                          [409]

Sur l’air….

On dit que cette Chanson est de Monsieur Dangeau pour Madame la Princesse de Conty.

 

On a que trop de plaisir à vous rendre,

Ce que l’amour demande par vos yeux.

Ah! Princesse, seriez vous tendre?

Seriez vous pour le plus amoureux?

 

Autre                                                           1692                                          [410]

Sur l’air………

A Madame la Comtesse de Portland.

 

Belle Comtesse, l’honneur de l’Angleterre;

Vous me traittez avec trop de rigeur,

D’avoir quitté un Climat plein de guerre,

Pour la venir déclarer à mon coeur.

                                                                        Brunel.

 

Chanson                                                    1692                                          [411]

Sur l’air de Joconde.

 

Guillaume est un Roy vigilant,                     Prince d’Orange ou le Roy d’Angleterre.

Sa prudence est extrême;

Jamais sans verd on ne le prend;

Il voit tout par lui même.

Anglois de ce grand conquerant

Vous devez tout attendre;

Louis ne prend rien à present

Qu’il ne le voye prendre.

 

Il n’est Nassau, namur, ni mur,/ Ma foi Nassau Namur n’a mur,

N’y doublé Fort qui tienne;

Louis de son coup toujours seur,

Ordonne qu’on le prenne.

Luxembourg avec les François

Feront une barriere,

Que tu ne veux, et ne scaurois,

Franchir avec Baviere.

 

Il est fâcheux, on le scait bien,

Pour des guerriers habiles,

De voir, sans entreprendre rien,

Forcer de telles villes;

Mais au moins, Nassau, tu scauras.

Comment il faut les prendre;                                                           [412]

Si Mons ne te suffisoit pas,

Namur doit te l’aprendre.

 

                  Au Roy d’Espagne.

Vivez toujours, Prince, en repos

Dans le coeur de l’Espagne.

Le grand Nassau vôtre héros

Le/ Se fait voir en champagne.

Fiers Espagnols de vos Estats

Ne soyez pas en peine,

Nassau ne l’ignorera pas

En cas qu’on vous les prenne.

 

                  Le Prince d’Orange aux Alliez.

Enfin amis sans contredit,

Je scais prendre une ville;

Mons et Namur m’en ont instruit.

Je vais en prendre ille,

Je vous promets que dans un an

Ma troupe formidable

Se montrera prés de Dinant,

Si Dieu m’est favorable.

 

Chanson                                                    1692                                          [413]

Sur l’air de la Tambonne.

Sur Monsieur le Prince de Condé.

 

Sortez donc Prince;

Nos Provinces

Ont besoin de vos bras;

Montrez que vous êtes Prince,

Ou Enfant de treize mois.

 

Autre                                                           1692                                          [414]

Sur l’air: Quand Iris prend plaisir à boire.

Sur le Prince d’Orange.

 

Quand Nassau partit d’Angleterre,

Il dit qu’au bruit de son Tonnerre,

Trembleroient la Terre & les Cieux;

Mais Louis le Grand à bien sceu le confondre,

Sur Mons* faisant briller ses yeux;                             *ville.

Il a constraint cet audacieux

De regagner le Port de Londres.

 

Sonnet                                                        1692                                          [415]

Sur la Reduction de Namur.

 

Namur ville autant d’importance

Qu’il en soit dans les Pays bas;

Aprés Mons passe aussi le pas,

Et subit le jour de la France.

 

Un Prince nous donne espérance

D’un secours qu’il ne tente pas,

Et souffre avec cent mille bras

Qu’on capitule en sa presence.

 

C’est donc pour en être témoin

Qu’il vient vite et de si loin

Avec une escorte si grande.

 

Heureux aprés ce noble effort,

S’il peut avoir un Passeport

Pour s’en retourner en Hollande.

 

Complainte                                             1692                                          [416]

de la garnison de Namur.

Sur l’air des Ennuyeux.

 

Louis, disoit on, êtoit vieux,

Ce héros n’aimoit plus la guerre;

Nous ne devions plus en ces lieux

Entendre gronder son tonnerre;

Mons en fut le premier témoin;

Ma foy Louis ne vieillit point.

 

Nous l’avons veu de nos remparts

A la teste de ses Armeés

De la présence de ce Mars,

Toutes nos troupes allarmeés,

Diront partout, s’il est besoin;

Ma foy Louis ne vieillit point.

 

Mes bons amis c’est fait de nous,

Et du reste de votre Flandre;

Nassau se moque de nous tous.

Barbançons songeone à nous rendre

Sauvons le moule du pourpoint,

Ma foy Louis ne vieillit point.

 

Grand Baviere si tu m’en crois,                                                                         [417]

Aprés ta honteuse champagne

Retourne pour jamais chez toy;

Va dire à toute l’Allemagne,

Pleurant ta goute dans un coing,

Ma foy Louis ne vieillit point.

 

Si tu ne prétens en ces lieux,

Que voir Louis, prendre des villes;

Guillaume tout seul en vaut deux.

Peu de gens y sont plus hábiles;

Sans craindre laisse lui ce soin,

Ma foy Louis ne vieillit point.

 

Chanson                                                    1692                                          [418]

Sur l’air…..

Sur Monsieur de Barbançon.

 

Tout mary qu’on met en Chanson,

S’en prend à tort à Barbançon,

Qui ne songe plus a médire:

Car sa femme l’a convaincu,

Qu’il est malhonneste d’escrire,

D’un pauvre Diable de cocu.

 

Chanson                                                    1692                                          [419]

Sur l’air du Menuet de Furstemberg.

A Madame la Comtesse de Saint Geran.

 

Voicy le tems adorable Silvie;                      le printemps

Voicy le tems d’escouter les Amans;

Le Rossignol jour et nuit y convie;

Tout est amour dans nos bois, dans nos champs.

Voicy les tems adorable Silvie,

Voicy le tems d’escouter les amans.

 

Ah! quel plaisir sur la verte prairie,

De soulager ses amoureux tourmens

Voicy le tems etc.

 

Autre                                                           1692                                          [420]

Sur l’air des Ennuyeux

Remerciement pour une Chaise de commodité, construite aux Dépens de 3. personnes. par Coulanges.

 

Grace à Madame le Coigneux (1)

Ma Chaise est bonne et bien garnie;

Grace à son Courin généreux (2).

De gallons elle est enrichie,

Lamoignon (3) s’est mise en grands frais

En velours, à trois quartiers prés.

 

De velours passablement neuf,

Trois quartiers achevoient l’affaire,

Gaster sa Tarte pour un oeuf;

Voila ce qu’elle vient de faire,

L’on en eût doublé le dossier.

Et j’ay besoin du Tapissier.

 

(1)   La Presidente le Coigneux de la maison de Navailles.

(2)   Le Duc de Lauzun.

(3)   Madame de Lamoignon.

 

Autre                                                           1692                                          [421]

Sur l’air de Grizelidis.

Pour le Pere Bourdalouë qui preschoit à Saint Cheron parroisse de Basville, le jour de la feste du Saint.

 

C’est aujourd’huy la feste

La feste du Patron;

Tout le monde s’apreste

Pour entendre un sermón

Des plus exquis;

Qui dira que sans teste,

Dieu receût Saint Cheron,

                  En Paradis.

 

                  par Coulanges.

 

Sur Monsieur de Coulanges         1692                                          [422]

par Monsieur de Nevers; à Saint Martin à la fin de 9.bre 1692.

 

                  Jamais on ne s’en passera,

On veut Coulanges aux champs, on le veut à la ville,

A Saint Martin, à Meudon, à Basville;

                  On se l’arrache enfin,

                  Et c’est à qui l’aura.

 

Chanson                                                    1692                                          [423]

Sur l’air Dormez Roulette.

Entretien du Prince et de la Princesse d’Orange, aprés le Siége de Namur; par le Chevalier de Rochefort.

 

Vous paroissez chagrin.

Oh! qu'avez vous Guillaume?

Ma femme je n’ay rien.

Comment va mon Royaume?

Fort bien Guillaume.

Et vous, comment vous va?

Passablement bien ma femme; mais j’ay mal a l’Estomach.

 

Vous vous fatiguez trop,

Conservez vous de grace;

Mais dites moy un mot

De l’importante place.

Le Roy de France enfin apris Namur,

Mais qu’il fera de depense pour en réparer les murs.

 

Comment avez vous pû

Voir prendre cette ville

Sans avoir combattu?

Ce trait n’est pas habile;

Le grand Bavieres differoit de jour en jour                              [424]

D’outrepasse la Riviere pour aller à Luxembourg.

 

N’estoit-ce pas à vous,

Comme Roy d’Angleterre,/ Comme Roy d’importance,

De commander à tous

De faire diligence?

Pour aller battre ce Luxembourg si méchant,

Ou de le faire combattremême sans y être present.

 

C’estoit bien mon dessein;

Mais je n’ay pû le faire;

Car rien n’est plus mal sain

Pour moy, qu’une Riviere;

J’avois mon âne qui m’incommodoit bien fort,

Et avec cela, ma femme, je n’estois pas le plus fort.

 

Que faire maintenant

Pour vôtre renommeé?

Allez prendre Dinant

Avec vôtre Armeé.

Le Roy de France à Versailles est de retour.

Profités de son absence pour surprendre Luxembourg.

 

Ma femme, croyés vous

Que cela soit facile?

Nous avons contre nous                                                                                        [425]

Un Général habile.

Luxembourg veille, .. rien n’eschape à son esprit,

Et pendant que tout sommeil, partout des Ordres il escrit/ il observe l’ennemi.

 

Vous qui passés partout

Pour un grand politique;

Faites quelque grand coup,

Qui lui fasse la nique.

Que faut il faire ma femme? dites le moy,

Je suis tout prest pour vous plaire, c’est vous qui m’aves fait Roy.

 

Il faut absolument

Que vous chassis de Flandres

Luxembourg, et ses gens,

Et les villes reprendre,

Que son grand maître a pris sur les Flamans.

Pour vous faire connoitre pour Guillaume le Grand.

 

Vous ne repondez rien,

Mon bon ami Guillaume/ Cher ami de mon ame;

Ne parlay-je pas bien

Comme un habile Dame?

Oui da ma femme, vous faites un beau projet,

Mais, qui sera l’habile homme qui le mettra en effet?

 

J’ay veu prendre Namur

J’en ay l’ame saisie;                                                             [426]

Mais dans peu à coup seur

Elle sera reprise,

Dans mon Royaume je retourne tout expres

Pour chercher les moyens comme j’en chasserai les François.

 

Avant de s’engager

En si grande entreprise,

Il faudroit vous purger.

Couchez vous sans remise,

Dormez Guillaume, ayez soin de/ prenez bien vôtre repos.

J’auray soin de vos Royaumes, ayez soin de vôtre peau.

 

Réveillez vous Nassau,

Prenez vîte un Clistere,

En voicy un tout chaud

Que tient l’Apoticaire;

Ça le derriere, tournez vous bien comme il faut,

C’est icy, non pas non pas en guerre, qu’il vous faut tourner le dos.

 

Que me faites vous donc,

Monsieur l’Apoticaire?

Je vous mets le Canon;

Sire, laissez moy faire;

Quelle misere, je crois que je suis perdu.

Quoi! jusqu’en Angleterre j’auray le canon au cu?

 

                                                                        1692                                          [427]

Complainte du Prince d’Orange à la Flandres et aux Alliez, après la Prise de Namur 1692.

Sur l’air de la Plainte de Priam, dans l’Opera d’Achille.

 

                  Le Prince d’Orange.

Restes infortunés des villes de la Flandres;

Allemans, Espagnols, et vous pauvres Flamans.

Suspendez vos regrets, écoutés mes sermens.

Je jure d’obliger la France de tout rendre.

                  La Flandres.

Ne songeons qu’a fléchir le coeur

De ce terrible vainqueur.

                  Le Prince d’Orange.

Vous voyez Ligue deplorable,

Un Roy qui fut longtems le plus puissant des Rois,

C’est ce même Nassau qui mettra sous vos Loix,

Du plus grand des héros, l’Empire redoutable:

C’est moy que le dernier de mes fameux exploits

Vient de rendre si formidable

A tous les vaisseaux des François…………………. Pose

 

La perte de Namur est un coup tres funeste;

Mais ma valeur vous la rendra.

Ma douleur chés les morts plûtôt m’emportera,                                 [428]

Que de ne pas deffendre au moins ce qui vous reste.

Vous le scavez, vous que j’ateste?

Combien j’ay fait d’efforts pour secourir Namur,

On vous a pris cette ville importante,

Et pour comble d’horreur, ma Majesté présente:

Mais dans peu vous verrez à quel point je suis seur

De vous faire rentrer triumphant dans Namur.

Sitôt que vous serez rentré dans cette Place,

Je souhaite, je veux, et j’entens que l’on fasse

Eriger en mon nom un pompeux monument.

Ce sera pour servir de Temple à vôtre gloire,

Puisque tout l’avenir avec étonnement

Y verra quelque jour cette grande victoire.

                  La Flandres.

Que pourrois-je espérer d’un si faible secours?

Quand je vois tous les jours

Quelle est vôtre impuissance?

Je méprise tous vos discours;

Que pouvez vous, helas! contre le Roy de France?

Laissez moy de Louis implorer la bonté;

A mes soupirs il sera favorable.

N’augmentés pas l’excés de mon adversité

En le rendant inexorable.

 

Chanson                                                    1692                                          [429]

Sur l’air: Je ne scaurois.

 

L’Electeur venant de boire,                           de Bavieres.

Dit à Nassau l’autre jour.

Courons vîte à la victoire

Vengeons nous de Luxembourg.

                  Je ne scaurois.

Je risquerois trop ma gloire,

                  J’en mourrois.

 

Mais reprit il, sans rien faire,

Verrons nous prendre à nos yeux

Le rempart de la Frontiere?

Croyez moi vengeons nous mieux.

                  Je ne scaurois

Du moins passons la Riviere,

                  J’en mourrois,

 

Craignez vous cet adversaire,

Luy repartit l’Electeur?

Je prens mon humeur guerriere.

Quittez, quittez vôtre peur,

                  Je ne scaurois,

Je crains bien moins le Tonnerre,

                  J’en mourrois.

 

Sitost répliqua Bavieres,                                                                     [430]

A quoi bon venir ici?

Retournons viste en arriere;

Et quittons ce país cy;

Je le voudrois; mais je ne scaurois,

S’il me prenoit par derriere

                  J’en mourrois.

 

Je vais donc boire et reboire,

Nassau, resvez nuit et jour.

J’abandonne la victoire

Au démon de Luxembourg;

Je le voudrois; mais je ne scaurois,

Quitter le vin pour la gloire,

                  J’en mourrois.

 

Autre                                                           1692                                          [431]

Sur l’air: Reveilles vous.

 

Nassau jure en sa conscience

Que si lui même n’avoit veu,

Prendre Namur en sa presence;

Non, il ne l’auroit jamais crû.

 

Autre                                                           1692                                          [432]

Sur l’air: Quand Iris prend plaisir.

 

Puisqu’enfin, Louis, que rien ne t’étonne

Assiege Namur en personne,

Il sera bientost sous nos Loix.

Ce Conquerant si chéri de Belonne,

Ce parfait model des Rois

A toujours réduit aux abois

                  Les Ennemis                         bis

                  De sa Couronne.

 

Autre                                                           1692                                          [433]

Sur l’air. Je veux qu’on sonne pour cloches tous les pots du Cabaret, ou Les sauts de Bordeaux.

 

Pourquoi grand Prince d’Orange.

As-tu sitost disparû?

Et que fais donc ta phalange

Dans les plaines de Fleurus?

En ce lieu, troupes superbes,

Nous ouvrimes vôtre flanc,

Et vous n’y voyez point d’herbes

Qui n’ait bû de vôtre sang.

 

Vos pareils en ce carnaje

Fuyoient comme des troupeaux.

Verra-ton vôtre courage

S’animer sur les Tombeaux,

Pour courir à leur vengeance?

Déployez tous vos Drapeaux

Où prendrez vous patience

Quand Louis prend vos Châteaux?

 

A cette digne Conqueste,

Borne, Louis, tes exploits

Qui contre ta seule teste

 

Réunissent tant de Rois;                                                                                       [434]

Donne la paix à la terre,

Et nul peuple désormais

Ne craindra plus que la guerre

Ensanglante ses guerets.

 

Autre                                                           1692                                          [435]

Sur l’air de la marche du Prince d’Orange.

 

Le Prince d’Orange Nassau,

A pris son vol un peu trop haut.

                  De cet Icare,

                  De ce barbare,

De cet Icare la cire fond

Qu’on va voir Bellorophond

Luy creuser un gouffre profond.

 

On dit qu’on a veu dans Paris,

Le Prince d’Orange endormi

                  Courir la poste,

                  Dans une hoste,

Courir la poste sur un Cochon.

                  Madelon, ce dit on,

A veu ce grand Champion

Qui venoit assiéger Dijon.

 

Autre                                                           1692                                          [436]

Sur l’air: Moy.

 

Sur Barbezieux ait eu l’art de me (1) plaire,

M’en dois-je faire une grande affaire?

                                    Si

Maman (2) baisoit bien le pere,

J’ay droit de baiser le fils.

 

(1)   Madame de Blansac fille de la Mareschalle de Rochefort.

(2)   La Mareschalle de Rochefort.

 

Autre                                                           1692                                          [437]

Sur l’air: Les Oiseaux vivent sans contrainte.

Sur la Comtesse de Vienne (la Vieuville)

 

Chez la Vienne on vit sans contrainte,

On y f…… sans crainte;

                  L’époux est doux,

Tout y rit, tout y cherche à plaire,

Nous pouvons en être jaloux.

Si l’esprit ne s’y trouve guere,

                  En amour ils sont tous,

                  Moins bestes que nous.                 bis

 

Autre                                                           1692                                          [438]

Sur l’air de Mais

Sur la même personne que la précédente.

 

Qu’est devenu le sceau de porcelaine,

Où tu faisois refraichir ta bedaine?

                                    Mais

                  S’il est dans ton C…..la Vienne

                                    Il n’en reviendra jamais.

 

Un Colonel a pris martel en teste,

D’une Comtesse il se fait grande feste;

                                    Mais,

                  C’est sa premier conqueste,

                  Ne le trouvons pas mauvais.

 

Chanson                                                    1692                                          [439]

Sur l’air de la Sarabande de Lully.

Réponse de la des Chars à la Chanson précédente.

 

Vous me voyez telle qu’on ma dépeinte,

Je vous paroist toujours dans la contrainte;

Mais en particulier je fais la rage;

Est il quelque Nigaud que je n’engage?

                  Tout est receu chez moy,

                  Vous scavez pourquoi.

 

Autre                                                           1692                                          [440]

Sur l’air….

Monsieur le Prince (de Condé) fit cette Chanson à Chantilly lorsque nôtre Flotte fut battue par les Anglois & Hollandois, au Combat de la Hogueen 1692.

 

Tout est en feu sur la terre et l’Onde,

Tandis qu’en paix nous venons icy;

Libres de soucis de l’autre monde,

Gueris des erreurs de celui cy.

Tout est en feu sur la terre & l’Onde

Tandis qu’en paix nous venons icy.

 

Chanson                                                    1692                                          [441]

Sur l’air de l’Ouverture du grand Ballet, ou Marais beau séjour de la réjoüissance.

 

L’on voit dans ces lieux la Reine (1) des Danseuses;/ Icy vous voyez la Reine des Danseuses

                  L’on dit qu’elle est cagneuse,

                  Plus méchante qu’un lutin,

                  Plus séche qu’un sapin;

                  Avec son long menton,

Sa bouche est pleine de tampons,

                  Ses Levres de vermillons;

                  Ses soucies qui se touchent

                  De noir ont plus d’une couche,

                                    Et son cu

Vient du Palais, et ne vaut qu’un écu.

                  Son Esprit estun Roman,

                  Qu’un sot (2) trouve charmant;

La belle vous paroist farouche,

                  Elle ne l’est nullement.

 

(1)   La Desehart Chanteuse et Danseuse à l’Opéra.

(2)   Beaubour Receveur general des Finances.

 

Autre                                                           1692                                          [442]

Sur l’air: Ma mere mariez moy.

 

Que la guerre est un metier

Qui commence à m’ennuyer;

Condé, Turenne aux enfers,

Et pour Général n’avoir que Bouflers.

Condé, Turenne aux Enfers,

Tout ira bien de travers.

 

Chanson                                                    1692                                          [443]

Sur l’air: Laire la, laire la laire.

 

Namur tout entier est pris,

Dont Guillaume est bien surprise

Comme l’est la Ligue entire

Laire la, laire lanlaire,

Laire la, laire lanla.

 

Guillaume aux gens de sa cour,

Dit parlant de Luxembourg;

Je suis seur de le défaire.

Laire la etc.

 

Alors un de ses Dragons,

Lui dit ce sera comme à Mons.

Où l’on fir le cry derriere.

Laire la etc.

 

Aprés tant de Campemens,

Et de si grands mouvemens,

Faire de l’eau toute claire.

Laire la etc.

 

Guillaume tout interdit

A ce Dragon répondit,

C’est la faute de Bavieres,                                                                 [444]

Laire la etc.

 

De crainte d’avoir des coups.

Mon Prince retirons nous;

Allons boire à Londre de la biere;

Laire la etc.

 

Chanson                                                    1692                                          [445]

Sur l’air de Joconde.

A Madame la Princesse d’Enrichemont lors de sa 1re. Entreé dans sa Principauté, Ses vassaux lui ayant fait fraper une Médaille en 1692.

 

Les habitans d’Enrichemont

Pour vous marquer leur zele,

Inventent chaque jour, dit on,

Quelque feste nouvelle.

Princesse parmi les plaisirs,

Que fait vôtre présence;

Songez quelque fois aux soupirs,

Qu’on pousse en vôtre absence.

 

Lorsque vos sujets vos vassaux

Viennent vous rendre hommage,

Et que sur de brillans métaux,

Ils gravent vôtre Image.

Souvenez vous que ces honneurs,

Ne sont rien qu’en modele,

Et que dans le fonds de nos coeurs,

Elle est cent fois plus belle.

 

Autre                                                           1692                                          [446]

Sur l’air…..

 

A Courson je trouvai la Dame en couche,

Laquelle êtoit de repos sur son lit,

Son travail fut pourtant petit;

Du Ciel ayant obtenu une bouche

Propre a les mettre au monde a petit bruit.

 

C’est le talent de toute sa famille

Les Nigots, n’en use pas autrement;

Leurs enfans sortent aisément,

Et l’on n’en peut douter dans cette ville,               Auxerre

Qui les air fait jamais si brusquement.

 

La Marquise de Courson est fille de Nigot qui avoit les Coches d’Auxerre et Secretaire du Roy. Elle êtoit accoucheé sans sage femme, en moins d’une demie heure. Elle venta toujours ce talent, disant que ses soeurs et elle accouchoient toujours sans peine.

 

Chanson                                                    1692                                          [447]

Sur l’air des folies d’Espagne.

Sur la prise de Namur.

 

Grand Nassau, redoutable Baviere,

Grand Valdeck, vigoureux Brandebourg.

Gardez vous de passer la Riviere,

Pour ne pas rencontrer Luxembourg.

 

La voila cette imprenable ville,

Qui se rend au plus puissant des Rois,

Et Nassau recule en homme habile,

Pour pouvoir s’en fuir une autre fois.

 

Quant à vous Prince prudent et sage,

Gouverneur depuis quelques momens.

Rendez grace au Roy qui vous degage

Du grand pois de ce gouvernement.

 

Autre                                                           1692                                          [448]

Sur l’air: En Janvier jusqu’en avril. ou du brave Comte de Tallard, ou des Rochellois.

 

En Janvier jusqu’en Avril,

Sans craindre danger ni péril.

Luxembourg affamé de gloire

Forme de genereux desseins,

Dont il a perdu la mémoire,

Depuis May jusqu’ à la Toussaint.

 

Autre                                                           1692                                          [449]

Sur l’air Tranquilles coeurs.

Sur le Mariage du Marquis de Bellefonds. (Gigault)

 

Monsieur Gigault préparez vous

Au Saint devoir du mariage;

Vous allez devenir époux,

Faites bien vôtre personnage.

Contentés de Fanchon les secrets apetits,

Elle vous met au pis.

 

Baisés baisés si vous pouvez

Jusques au lever de l’aurore;

Quand Fanchon dira c’est assez,

Croyez qu’elle en demande encore.

Toujours au cabaret la vérité se dit

Et jamais dans le lit.

 

N’allez pas vous entretenir

Des maux qui suivent l’himeneé,

Vous pourriez perdre le plaisir,

De vôtre plus belle journeé.

Jouissez de vôtre heureux destin,

Repentez vous demain.

 

Autre                                                           1692                                          [450]

Sur l’air de Jean de vert.

Sur Monsieur de Damas Seigneur de Cormaillon qui avoir épousé Madame la Présidente Barentin.

 

Vôtre etoile cher Cormaillon,

N’est pas des plus commune;

Sans crainte d’être Cornaillon,

Vous avez fait fortune

Vous ne serez cocu ny gueux,

N’est-ce pas être plus heureux

que Jean de vert?

 

Triolets                                                                        1692                                          [451]

Sur la Signature du Formulaire.

 

Il est vrai, car il est moulé

Qu’il faut signer le Formulaire,

En vain on a tant reculé,

Il est vrai car il est moulé

Janseniste soit apellé.

Celui qui ne le voudra faire;

Il est vrai, car il est moulé,

Il faut signer le Formulaire.

 

C’est être hérétique de Cour,

Que de refuser de souscrire.

Ce fait est clair comme le jour,

C’est être hérétique de Cour,

Que de refuser de souscrire.

 

En conservant l’humilité

Je me conserve ma prébende,

Et je trouve ma seureté

En conservant l’humilité.

Ȏ heureuse facilité!

De signer tout ce qu’on demande;                                               [452]

En conservant l’humilité

Je me conserve ma Prebende.

 

Martin Steyaert travaille en vain

A faire triompher Moline,

Pour oppose saint Augustin

Martin Steyaert travaille en vain.

Car de cet Auteur tout divin

On defend trop bien la doctrine

Martin Stryaert travaille en vain

A faire triompher Moline.

 

Chanson                                                    1692                                          [453]

Sur l’air des Rochelois.

Sur le Mareschal de Luxembourg. A l’occasion de la Lettre escrite au Roy par ce Mareschal apres le combat de Steenkerke.

 

Voulez vous brave Luxembourg,

Scavoir ce qu’on dit à la Cour,

De vôtre derniere Bataille?                           de Steinkerke.

Chacun y publie hautement

Que vous n’avez fait rien qui vaille,

Non de coeur, mais de Jugement.

 

Quoique disent les Courtisans,

Vôtre Lettre à ses partisans.

Elle est escrite par merveille;

Mais il en falloit sans façon,

N’en déplaise à Monsieur Abeille             son secretaire.

Retrancherle joly garcon (1).

 

(1)   en parlant du Marquis de Rochefort Colonel de Bourbonnois.

 

Autre                                                           1692                                          [454]

Sur l’air de l’Echelle du Temple.

Expédition projetteé pour l’Angelterre.

 

Le dessein êtoit beau

D’aller établir de nouveau

Dans le Royaume Britanique,

Jacques l’Eglise, et les Couvens

Avec un pouvoir despotique;

Mais on a compté sans les vents.

 

Autre                                                           1692                                          [455]

Sur l’air de l’échelle du Temple.

Balet proposé pout la leveé du Siege de Namur.

 

Le Prince d’Orange enragé

D’aprendre Namur assiegé;

Harangue sa nombreuse Armeé

Pour la disposer au Combat;

Mais ses feux tournant en fumeé,

Ainsi qu’ à Mons n’a pris qu’un rat.

 

Il avoit promis aux Francois

Un ballet au son des hautbois,

Qui pour repondre à son afiche,

Lui laisserent un beau terrain,

Et comme il danse en écrévisse,

On ne peut lui donner la main.

 

Quoi que le parti fut égal,

Louis eut tout lhonneur du bal;

Valdeck et le Duc de Bavieres

Craignant la danse de Fleurus,

Leur courante en fut plus légere

En sorte qu’on ne les vit plus.

 

A la barbe de Barbençon,                                                                    [456]

Le Château dansa tout de bon,

On ne sortit point de Cadence.

Ath, Mastrick et Charleroy,

A leur rang entreront en danse.

Ostende & Gand tremblent d’effroy.

 

Bavieres est trop homme d’honneur,

Orenge en creve dans le coeur

Il vouloir envahir la Flandres;

Et comme il ny pût réussir

Il nous la regardera prendre

Pour se vanger avec plaisir.

 

Chanson                                                    1692                                          [457]

Sur l’air….

Sur la Prise de Namur.

 

Le Stathouder des Estats,

Est, dit on, des plus habiles;

C’est un grand preneur de villes,

Un grand donneur de Combats;

Mais Louis sous sa puissance

Met Namur & son Château;

Et le fait en la presence

De ce valeureux Nassau.

 

Autre                                                           1692                                          [458]

Sur l’air: Ouy je le dis et le repete.

l'Espagnol aux Alliez.

 

Bien qu’à notre domage,

Vous ayex eu de l’avantage,

Sur quelques vaisseaux des François;

Avouez que depuis la Guerre

Ils n’ont perdu qu’un peu de bois,

Et que je perds beaucoup de Terre.

 

Chanson                                                    1692                                          [459]

Sur l’air. Un Chapeau de paille.

 

Sur la signature du Formulaire que l’on commençoit a introdure dans les Pays bas. Imitation de celle faite lors de la signature du Formulaire en France. On la trouvera parmi les Ouvrages de Monsieur de Coulanges.

 

Ils sont perdus les pauvres Jansenistes,

                  L’on n’en parlera plus;

Nous triomphons nous autres Molinistes,

                  Nous les avons vaincus;

Sans alleguer ny Peres, ny Conciles,

                  Nous sommes habiles nous.       bis

 

En son Colege aux gens de robe noire,

                  La pluspart bons enfans;

Monsieur Steyaert enflé de vaine gloire;                                 Steyaert Professeur a Louvain

                  Crioit en ménaçant,

Vous signerez parbleu le Formulaire

                  J’en fais mon affaire moy.             bis

 

Le grand Steyaert, s’etant mis en voyage

                  Pour tromper les Prelats;

Voyant l’effet de sa pieuse rage,

                  Chantoit aux Prélats,                                                           [460]

Je suis venu, j’ay veu, J’ay mis en fuite,

                  Je fais le Jesuite moy,

                  Je fais le Jesuite.

 

Chanson                                                    1692                                          [461]

Sur l’air de Joconde.

 

Sur le triomphe de l’amour

                  Disent les Jansénistes,

N’oubliez le Pere Bouhours,

                  La gloire des Jesuites;

Autrefois on les accusoit

                  Du vice d’Italie;

Mais la dévote qu’il aimoit,

                  Les Peres justifie.

 

En lui faisant un bel enfant,

                  Ne croyez pas critiques

Qu’il ait fair un peché si grand;

                  Il craint Dieu et s’en pique;

Mais quand sans songer au Seigneur,

                  On cede à a nature,

L’eportement d’un tendre coeur

                  Ne rend point l’ame impure.

 

Autre                                                           1692                                          [462]

Sur ….. de Nangis, à présent la Comtesse de Blanzac (la Rochefoucault) fille de la Mareschale de Rochefort.

 

Nangis, vôtre amant est ben las

De baiser vos maigres appas;

Munissez vous d’un plus fidele,

Vôtre bon coeur/ cocu le veut fort bien;

Mais surtout soufflez la Chandelle

Que la grand maman n’envoye rien.

 

Chanson                                                    1692                                          [463]

Sur l’air des Rochelois.

Sur le Combat de Stenkerke.

 

Luxembourg fait en se jouant,

Comme Cezar en s’apliquant,

Ses impromptus vallent des veilles,

Eh si Nassau ne l’eut surpris,

L’on n’auroit point veu de merveilles

Qui n’ont d’exemple que chez luy.

 

Réponse

 

Taisez vous censeurs indiscrets

Gens comme lui sont toujours prêts;

S’il dort souvent, c’est pour mistere,

Et pour tromper son Ennemy,

Qui n’auroit point tenté d’affaire

S’il n’eût crû le prendre endormi.

 

Autre                                                           1692                                          [464]

Sur l’air ………….

 

Le Chevalier de Mone

Montre à la Bunelay

Un v….. long comme une aune,

Large et dur comme un ais;

Mais il ne la f….. pas en C…..

Pour plaire à la Cologon.

 

Elle a le C….. trop large

Pour placer ce gros v…..

Son v…. est à la marge

Qui pleure de dépit;

Mais il est si prés du C…..

Qu’il croit être f…..tu.